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À vos arts, prêts... Partez ! - Radio Campus Paris

À vos arts, prêts... Partez ! - Radio Campus Paris

Author: À vos arts, prêts... Partez !

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Description

À l’occasion des Jeux de Paris 2024, et dans le cadre de l’Olympiade culturelle, les élèves de l’École du Louvre vous proposent un podcast quotidien durant 100 jours pour découvrir des sites, des œuvres, des artistes qui mêlent art, sport et olympisme.
Un projet original, un exercice pédagogique inédit, une performance pour 100 jeunes historiens et historiennes de l’art en herbe, étudiants et étudiantes de l’École du Louvre, devenus apprentis-reporters pour partager chaque jour, en 3 minutes chrono, leurs découvertes et leur passion !
À écouter tous les jours à 18h55 à partir du 18 avril 2024 et en rediffusion le lendemain à 11h55, sur Radio Campus Paris et sur les plateformes de streaming.
Avec le soutien du Ministère de la Culture et du Comité national olympique et sportif français. Toutes les informations sur ecoledulouvre.fr.
33 Episodes
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Je m’appelle Rachel et je vais vous parler aujourd’hui de judo, de légèreté et d’équilibre. La sculpture qui se trouve devant vous, se nomme Le judo, et a été réalisée par l’artiste français Maurice Guillaume en 2001. En bronze, de couleur rouille, elle représente le combat de deux judokas. Sur un pied, l’un soulève l’autre dans un mouvement presque chorégraphique voulant le mettre au sol, c’est l’instant avant la chute qui est capturée.  Leurs membres rugueux facilement lisibles semblent être des branches, et leur corps comme déconstruits et noués, finissent par se confondre, créant ainsi presque un tronc d’arbre. Particulièrement géométrique, la forme globale de l’œuvre ressemble alors à celle d’une équerre. C’est l’instabilité dans un équilibre parfait qui est ici représentée.  Malgré la voltige précédant la chute d’un des deux sportifs, pouvant faire ressentir une sensation de brutalité dans l’acte effectué, la légèreté demeure, comme si la pensée psychique du judoka était retranscrite.   « Voie de la souplesse » est ce que signifie le mot judo en japonais. Créé en 1882 par Jigorō Kanō et s’inspirant du ju-jitsu à vocation guerrière, le judo est un art martial à pédagogie physique, mentale et morale, et au raisonnement particulièrement poétique.  La légende veut qu’en hiver, le maître remarqua que les branches des cerisiers se cassaient sous le poids de la neige alors que les roseaux se pliaient simplement pour s’en débarrasser. L’art du judo consiste donc à amener avec souplesse son adversaire au sol comme le fait le roseau avec la neige.  Particulièrement influencé par l’art abstrait et le sport, Maurice Guillaume, ancien étudiant à l’école des beaux-arts à Paris transforme ces deux judokas en végétaux, nous rappelant alors l’origine lyrique de cette discipline qui a fait sa première apparition aux Jeux Olympiques à Tokyo en 1964. Aujourd’hui, la France est le deuxième pays médaillé dans ce sport après le Japon.   Avec ses quatre dimensions, la sculpture occupe l’espace et donne, selon l’artiste, le sentiment d’éternité. Dans son immobilité, elle doit donner l’illusion du mouvement. Comme emprisonnée dans la lave, l’instant est ici suspendu et une sensation de flottement envahit l’espace. La chute du judoka survenant bientôt, nous, spectateurs, ressentons toutes les émotions comme si nous assistions au combat. Pensez-vous qu’il va réussir à s’en sortir ? Et qui donc va gagner ?   J’aime cette œuvre car elle invite le spectateur dans son univers mouvementé. Je l’aperçois comme une danse contemporaine où la grâce des figures se mêle à la puissance et à la force qui émanent de l’œuvre. Elle est une valse de personnages associant une approche plastique occidentale à un art martial asiatique.   Le judo, Maurice Guillaume, 2001, bronze, 44 cm de hauteur, Nice, Musée national du Sport.   Texte et voix : Rachel Morin Enregistrement : Colin Gruel Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Raphaëlle. Peut-être que comme moi, vous n’avez pas de gros bras, mais je suis certaine que vous apprécierez l’œuvre dont je vais vous parler aujourd’hui mêlant cirque, haltérophilie et peinture naïve. Il s’agit d’une huile sur toile du peintre français Camille Bombois, datée vers 1930. Elle représente une scène de spectacle forain en extérieur, où une foule est amassée. Celle-ci regarde un athlète à la musculature exacerbée, en train de soulever de sa main droite seulement un haltère composé de deux sphères noires colossales. Elles sont si énormes qu’elles semblent plus grosses que le buste de l’athlète lui-même.  Comment cet homme arrive-t-il à soulever une telle masse d’une seule main ? Ici, l’athlète est en pleine exhibition de force et cherche à distraire la foule. Ce qui surprend tout de suite, c’est l’absence totale d’effort et de souffrance chez notre athlète. On dirait même qu’il s’amuse de nous, en prenant un petit air désinvolte. Aucune contraction musculaire, une posture improbable, une taille de l’haltère démesurée : absolument rien de réaliste ici.   Pourtant, une scène de ce genre, Camille Bombois en a souvent vu. Avant d’être peintre, notre artiste a longtemps travaillé comme forain dans un cirque et s’inspire de sa propre vie pour peindre ses œuvres, avec un goût tout particulier pour la monumentalité des personnages et les couleurs vives. Avec les peintres naïfs, pas besoin de représenter une réalité parfaite ni de respecter la perspective, les couleurs d’origine et les proportions !   Mais ne vous y trompez pas ! L’haltérophilie est un sport bien difficile et très technique aussi pratiqué loin du monde du cirque. Présent dès l’Antiquité, il intègre les Jeux Olympiques modernes dès leur première organisation en 1896 à Athènes. C’est certainement une des épreuves les plus impressionnantes.   Amusez-vous à comparer ce tableau avec une photographie d’un ou d’une haltérophile en pleine compétition et vous serez saisi par la force et l'entraînement nécessaires pour arriver à un tel exploit, contrairement à ce que notre œuvre voudrait nous faire croire.   A titre personnel, je préfère tout de même la version naïve qui me semble beaucoup moins fatigante et plus amusante à regarder.   Athlète forain, Camille Bombois, huile sur toile, 1m30 x 89 cm, vers 1930, Senlis, Musée d’art et d’archéologie.   Texte et voix : Raphaëlle Billerot-Mauduit Enregistrement : Margot Page Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour à tous, je m'appelle Cyndy, et je vais vous parler de piscine, d’Art déco et d’architecture. La piscine Nakache doit sa création à l’architecte Jean Montariol et à l’ingénieur Charles Baruteaud. Cette piscine, véritable chef-d’œuvre architectural, inscrite au titre des Monuments historiques, a une histoire fascinante.   Elle se niche sur l’île du Ramier en bord de Garonne à Toulouse. Érigée dans les années 1930, elle incarne le style Art déco qui connaît son apogée dans les années vingt. L'Art déco, c'est, après l’exubérance ornementale de l’Art nouveau, le retour à une esthétique plus classique, élégante, sobre. L'association de la simplicité géométrique des lignes et des surfaces à la richesse des couleurs et des matériaux, en fait un style à la fois moderne et populaire.  Imaginez, deux piscines extérieures, l’une dédiée aux compétitions et l’autre aux loisirs s’étirant sur 150 m de long, agrémentées d’une île et de cascades pour un air de vacances. Il y a également une piscine intérieure avec des gradins pour 800 spectateurs. Cette piscine est un témoignage des politiques socialistes du début du XXe siècle, portées par des idées progressistes et la vision d’un avenir meilleur pour tous. Le Parc municipal des Sports toulousain, où se trouve la piscine, a, en effet, été conçu comme un lieu de loisirs et d’agrément de cinquante hectares, à proximité des quartiers populaires, c’est un véritable palais d’éducation physique, d’hygiène et de sport accessible à tous.   Jean Montariol, l'architecte, a introduit à Toulouse une modernité architecturale lumineuse et fonctionnelle, tout en préservant les traditions de la région. Par exemple, les colonnes de marbre rouge, autrefois visibles à l'intérieur, incarnent le style Art déco mais également l’architecture antique de l’ancienne cité romaine. Cette piscine par son nom, rend hommage à Alfred Nakache, champion toulousain de natation mondialement reconnu qui a survécu à la déportation à Auschwitz. Ayant eu la chance de la visiter, ce qui m’a le plus marqué, c’est l’atmosphère et la possibilité d’imaginer la restauration de ce décor exceptionnel, alors n’hésitez pas à la découvrir par vous-même.   Piscine Municipale Alfred Nakache, Jean Montariol (architecte) & Charles Baruteaud (ingénieur), Toulouse, 1931.   Texte et voix : Cyndy Marie-Joseph Enregistrement : Sibylle Buloup Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Suzanne, aujourd’hui je vais vous parler de boxeur, d’idéal et de plâtre.   L’œuvre que je vais vous présenter est une statue illustrant un athlète. C’est une œuvre monumentale, plus grande que nature, de deux mètres quarante de haut, qui représente un pugiliste, un boxeur. Il est debout, nu. Je vous laisse imaginer ses deux jambes bien ancrées dans le sol, son buste particulièrement travaillé, avec ses pectoraux et sa poitrine dont le volume se dessine grâce à l’éclairage. Ses bras, aux muscles saillants, sont le long du corps et accompagnent le mouvement de sa tête, qui est légèrement penchée vers la gauche.  Le modèle de cette œuvre est d’ailleurs bien connu ! Il s’agit du boxeur français Georges Carpentier, un ami de l’artiste.  Mais pourquoi cette œuvre associe-t-elle sport et art ? Car celle-ci fut présentée au concours de sculpture des Jeux Olympiques en 1924 et lui a valu la première place au concours d'art lors du tournoi olympique d'athlétisme d'Amsterdam en août 1928. Les Jeux Olympiques ont accueilli des épreuves artistiques jusqu’en 1948.  D’ailleurs, le Pugiliste devait faire partie d'un ensemble de quatre sculptures sur la boxe : un Boxeur tombé, un Boxeur mettant ses bandelettes et un Combat. Les deux dernières œuvres ne furent pas réalisées.  Une autre version du Pugiliste fut aussi faite, en bronze de dimension réduite, et il est intéressant de voir les similarités et différences entre les deux œuvres. L’œuvre en plâtre fut présentée au Salon de 1920, mais la statue choqua à cause de sa nudité que l’artiste promis de couvrir, pour le format réduit. Promesse qui ne sera finalement pas tenue.   Personnellement, j’ai été marquée par l’effet sculptural et froid du plâtre qui rend avec justesse une anatomie idéale du corps humain et qui rappelle les sculptures antiques. En parlant du modèle, Landowski dit d’ailleurs : « Carpentier a posé ce matin. C’est vraiment une magnifique machine humaine. J’ai encore des erreurs d’aplomb. La beauté des antiques réside dans les aplombs juste ».  Pugiliste, Paul Landowski, 1920, plâtre, deux mètres quarante, Musée Paul Landowski à Boulogne Billancourt  Texte et voix : Suzanne Gilles Enregistrement : Suzanne Saint-Cast Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Naïma, et je vais vous parler de photos, de mouvement et de lancer de disque. Je me trouve ici devant une planche d’Étienne-Jules Marey, comprenant deux séries en noir et blanc de seize petites photographies, disposées dans la hauteur, en frise. On y voit un lanceur de disque quasi nu, en pleine action dont le mouvement est décomposé sur ces trente-deux clichés. Il tourne sur lui-même en tenant fermement le disque dans sa main droite. En équilibre sur une jambe, le bras droit tendu, il lâche le disque qui disparaît du cadrage de la dernière photo de la série.   Bien avant l’invention des GIF, ces images numériques animées, qu’on retrouve sur les réseaux sociaux, Étienne-Jules Marey invente un procédé à partir d’un fusil photographique qui lui permet de décomposer le mouvement en plusieurs photographies.   Il s’agit d’un appareil muni d’une crosse, semblable à celle d’un fusil traditionnel, qui lui permet de prendre plusieurs photographies. C’est l’invention de la chronophotographie. Ce qui en fait aussi l’un des pionniers du cinéma. Les frères Lumière doivent partager le mérite !  Mais si Marey est aujourd’hui surtout connu pour ses photographies, c’est avant tout un médecin et chercheur, passionné par l’étude du mouvement animal et humain. Il incorpore la photographie à son travail scientifique afin d’enregistrer ce que l’œil ne voit pas. À la même époque aux États-Unis, Eadweard Muybridge décompose lui aussi le mouvement de chevaux au galop grâce à des procédés similaires.   Les compétitions sportives de l’Exposition Universelle de 1900 lui offrent un vaste champ d’expérimentation. Il y observe des athlètes en situation dynamique pour étudier les caractéristiques physiologiques de leur performance. En 1900, l’année où Marey réalise cette épreuve, le contexte des Jeux Olympiques est un peu différent. Les concours sportifs de l'Exposition Universelle qui a lieu cette année-là à Paris, font office de Jeux Olympiques.   Bien qu’elles participent avant tout d’une ambition scientifique, ces séquences photographiques sont pour moi porteuse d’une force poétique, qui me touche particulièrement. En arrêtant le temps et le mouvement, Marey nous donne à voir l’invisible. Malgré elles, ces images célèbrent la beauté éphémère du geste humain dans une esthétique qui transcende leur intention scientifique initiale.   Le Lancement du disque, Étienne-Jules Marey, 1900, quatre chronophotographies sur pellicules souples, 35 par 5,6 centimètres par bande, Paris, École Nationale Supérieure des Beaux-Arts.  Texte et voix : Naïma Lozano Enregistrement : Colin Gruel Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Aure et aujourd’hui, je vais vous parler d’éventail, de sport et de robe. L’objet que je vais vous présenter est un éventail publicitaire produit par le Bon Marché en 1910. Vous tenez donc un éventail à la main. Quand vous l’ouvrez, ses neuf palmettes se déploient et montrent un décor imprimé bicolore blanc et rouge. Ce sont des femmes qui font du cricket, du golf, de l’équitation ou encore du patin à glace.   L’éventail est un accessoire de mode qui arrive en Europe au XVe siècle par le commerce avec l’Orient. C’est au XVIIIe siècle qu’il est le plus utilisé et le plus élégant, il peut être en ivoire, en écaille couvert de plumes, de dentelles ou de papier peint à la main. Au XIXe siècle, les décors peints à la main sont remplacés par des décors imprimés plus rapides à fabriquer et moins coûteux. On produit alors beaucoup d’éventails commémoratifs et publicitaires comme ici.   En bas de chaque palmette, on retrouve la même inscription qui dit : “Au Bon Marché, A. Boucicaut Paris”. Le Bon Marché, c’est un grand magasin fondé en 1838. Il est rapidement racheté par Aristide et Marguerite Boucicaut, qui en font un grand magasin moderne. Émile Zola s’en inspire pour inventer le grand magasin, le Bonheur des Dames, dans son roman de 1883.   Les femmes sur l’éventail montrent la clientèle aisée du Bon Marché. En effet, les sports qu’elles pratiquent sont en 1910 réservés à une élite. On peut prendre l’exemple de la voiture, au centre de votre éventail, une palmette montre une femme conduisant une automobile. Au début du XXe siècle, la voiture est un produit de luxe et avant 1914, les femmes qui conduisent représentent moins d’1% des titulaires du permis de conduire en France. Elles sont donc vraiment marginales et celles qui conduisent sont des grandes bourgeoises et des aristocrates comme Camille du Gast ou la duchesse d’Uzès.   Comme le sport se développe, il faut de nouveaux vêtements plus adaptés, regardez les femmes sur l’éventail, elles portent toutes des jupes qui arrivent à mi-mollet, c’est très court pour l’époque. On mettait d’habitude des robes qui arrivaient jusqu’au sol. Ces jupes plus courtes sont donc beaucoup plus confortables pour courir après une balle de tennis ou faire de grandes enjambées en patin à glace.   J’adore cet éventail, le dessin est très délicat et vraiment très joli. Comme chaque dessin est dans un cadre, on dirait un peu des cases dans une BD. On peut imaginer une histoire derrière chaque image, par exemple : où va la femme qui conduit ou comment s’appelle le chien de celle qui est à la chasse ?  Éventail plié, Au Bon Marché, vers 1910, Impression en couleurs, papier cartonné, carton, fer. Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris.   Texte et voix : Aure Lapierre-Renard Enregistrement : Sibylle Buloup Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Marie, et aujourd’hui je vais vous parler d’une sculpture de Germaine Richier, L’Escrimeuse de 1943. Ensemble on va évoquer le mouvement, l’affrontement dans l’escrime et le contexte de la Seconde Guerre mondiale. Sur un socle rectangulaire, une jeune femme de profil est en position de garde. On voit là une véritable combattante moderne habillée d’une tunique et de chaussons d’escrime ainsi que d’un casque à résille métallique. Elle est ancrée dans le sol, ses jambes sont fléchies. Son corps s’équilibre à l’aide de son bras gauche levé à l’arrière et son bras droit pointe le fleuret. Le fleuret, c’est une arme blanche utilisée dans la pratique de l’escrime qui est ici comme cassée, seul le manche est représenté.   La sculptrice a grandi près de Montpellier, une ville renommée pour sa pratique de l’escrime, notamment au XIXe siècle avec le célèbre maître d’arme Jean-Louis Michel. C’est un art très ancien qui est associé à l’Ancien Régime et qui est devenu une pratique sportive jusqu’à sa consécration lors des premiers Jeux Olympiques modernes de 1896 à Athènes. Germaine Richier a d’ailleurs fait venir un maître d’arme de l’Université de Zurich dans son atelier suisse pour lui servir de modèle. Mais en pratique, elle aurait pu prendre pour modèle une escrimeuse car les femmes pratiquent l’escrime aux Jeux Olympiques depuis 1924.   Germaine Richier suspend le corps et l’action dans le temps et l’espace. Comme si cette amazone anonyme allait se mettre à bouger d’un instant à l’autre. Comme si elle allait bondir sur son adversaire. Mais cet adversaire qui est-il ou qui est-elle ? Ce n’est pas anodin de représenter une femme comme cela. En 1943, Germaine Richier est en pays neutre dans une Europe en guerre, elle est en Suisse.   L’escrimeuse représentée en position de garde, entre attaque et défense, affronte sans peur les temps violents de son époque. Peut-être s’agit-il d’un combat que souhaiterait mener l’artiste réfugiée en Suisse. On pourrait donc y voir un autoportrait de l’artiste combattant la matière et la guerre, une évocation de sa situation d’exile, mais aussi une allégorie politique, une posture qui signale son désaccord.  Cette sculpture me fascine pour son aspect immobile et nerveux à la fois. Je trouve l’étude du mouvement fascinante. Elle me donne envie d’affronter le monde.   Escrimeuse avec masque, Germaine Richier, 1943, bronze patiné foncé, H. 105 cm, l. 70 cm, Montpellier, Musée Fabre.  Texte et voix : Marie Brochec Enregistrement : Margot Page Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Justine, et aujourd’hui nous allons remonter le temps jusqu’au tournant du XXe siècle, pour assister à un combat de lutte alliant couleurs et mouvement et violence. L’œuvre que je vous présente est une peinture à l’huile réalisée par Natalia Gontcharova aux alentours de 1910. Elle représente deux corps, l’un de face l’autre de dos, engagés dans une prise de lutte, se débattant sur une arène de foire au sol rouge foncé. Le cadrage serré nous révèle le choc de deux corps massifs, à la peau de couleurs jaune pour l’un et vert pour l’autre, défini par de larges contours noirs. Les deux lutteurs portent un bas et une paire de bottes noires et celui à la peau jaune, à gauche du tableau, porte un maillot rouge. Ce dernier nous regarde quand seulement le corps de son adversaire est discernable.   Ce qui m’intéresse dans cette peinture, c’est la manière dont les corps sont traités. Ici, les lutteurs ne sont pas représentés de manière naturaliste, c’est-à-dire fidèles à la réalité, mais de manière synthétique, l’accent est mis sur l’importance de la couleur comme vecteur des émotions des lutteurs plutôt que la réalité du combat. C’est une façon pour l’artiste de faire ressentir aux spectateurs la réelle violence qui en émane. Dans cette toile, le sport est traité par la peintre comme la métaphore du combat de l’artiste contre l’académisme, l’art n’est plus un art de salon mais un art d’exercice et au-delà un véritable combat. Un combat contre le passé auquel nous sommes ici conviés. Natalia Gontcharova, artiste néo-primitiviste : mouvement qui se développe en Russie autour de 1910, s’inspire des estampes populaires russes et prône un traitement plus synthétique des formes, qui trouve échos dans la brutalité d’une lutte.   Nous avons donc ici affaire à une métaphore de la lutte de l’artiste à la fois en tant que femme et artiste d’avant-garde vers une nouvelle vision des corps qui s’inspire dans son cas de la lutte. Une lutte sur tous les terrains.   Par ailleurs, la posture des lutteurs de Gontcharova est fidèle de celle des premiers lutteurs en Grèce Antique, front contre front ils s’agrippaient au niveau du torse et effectuaient une prise au-dessus de la taille, leur corps prenant ainsi la forme d’un “V” inversé. Les combats étaient supervisés par un arbitre pointant les fautes et la lutte était la dernière discipline du combat des jeux panhelléniques. Elle est intégrée pour la première fois aux Jeux olympiques en 1896 et devient très rapidement appréciée. Des centaines de styles de lutte se démarquent désormais dans le monde entier, faisant d’elle une des plus grandes disciplines des Jeux olympiques.  Ce que j’aime dans cette œuvre, c’est la force avec laquelle les corps s’entrechoquent. L’artiste met l’accent sur les couleurs qui viennent souligner les courbes et il devient facile d’imaginer la puissance des athlètes au combat.   Les Lutteurs, Natalia Gontcharova, peinture à l’huile sur 118,5 par 103,5 cm, vers 1909-1910, MNAM-CCI.  Texte et voix : Justine Camand Enregistrement : Hugo Passard Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Pascaline, et aujourd’hui je vais vous parler de golf, de vitrail et d’Art déco.   Le Golf de Jacques Gruber est un dessin de format circulaire en noir et blanc réalisé en 1925 au fusain sur papier calque. Il représente une joueuse de golf qui, son club en l’air derrière les épaules, s’apprête à taper dans la balle. Les formes sont géométriques et le dessin réduit à l’essentiel.   Il s’agit du dessin préparatoire à l’un des six vitraux commandés au maître verrier Jacques Gruber sur le thème du sport. Cet artiste appartient à l’école de Nancy et s’il se fait d’abord connaître comme représentant de l‘Art nouveau avec un style tout en courbes et contre-courbes, il se rapproche de l’Art déco avec une composition beaucoup plus géométrique. À votre avis, à quels bâtiments sont destinées ces pièces de vitrail ? Elles ont été réalisées pour le casino d’Ilbarritz situé sur la côte basque et illustraient les loisirs de plein air que les riches vacanciers pouvaient y pratiquer.  La tenue de cette joueuse de golf est emblématique des années 1920 où la mode sportive féminine se modernise. Les corsets sont abandonnés, les longueurs raccourcissent car hygiène et confort prévalent désormais sur l’élégance. Regardez sa robe, le bas plissé rappelle les jupes de golfeuses inventées par le couturier Jean Patou. Et sous son chapeau cloche, les traits finement dessinés de son visage de profil – réhaussés à la gouache blanche – illustrent sa concentration, peu avant le geste décisif.  Essayez d’imaginer l’œuvre finale, elle comporte peu de couleurs comme souvent dans les vitraux de style Art déco : le jaune pour les détails de l’habillement, le gris pour le matériel de golf et le noir pour les contours. Lorsque les rayons du soleil passent au travers, ils mettent tout particulièrement en valeur ces éléments, délimités par le plomb qui permet de souder les morceaux de verre à vitre entre eux.   Pour moi, la force de cette œuvre réside dans le mouvement qui s’en dégage alors même qu’elle est figée. Aussi bien matériellement dans le verre, que physiquement à peine le geste débuté. Et si les vitraux ont disparu avec le casino à sa fermeture après la crise économique de 1929, il semblerait qu’il ne manque qu’un rayon de soleil pour l’animer à nouveau et, qu’à la faveur d’une éclaircie, notre golfeuse vise, tape et marque !  Le Golf, Jacques Gruber, 1925, Dessin fusain ; gouache blanche ; rehaut sur papier calque, Musée départemental de l’Oise, Beauvais Texte et voix : Pascaline Chevalier Enregistrement : Margot Page Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Jianhui et je vais vous parler de gobelet, de polo et d’échanges.  Représentez-vous un gobelet fabriqué en Syrie vers 1250, il est encore complet, de la taille d'une main, avec une ouverture deux fois plus large que sa base. Ce gobelet est l’un des témoignages de l’une des techniques la plus spectaculaire, développée dans le monde islamique ; le verre soufflé à décor émaillé et doré. Le verre translucide du gobelet est obtenu à partir de silice et d'un fondant. Une fois que la forme du gobelet est créée, le décor en or et les émaux sont délicatement appliqués.  Regardez au centre, trois cavaliers à cheval sont représentés. Les montures portent harnais, selles et étriers, elles sont blanches, rouges et noires. Les personnages sont coiffés de lourds turbans de couleurs différentes, vêtus d’une robe serrée à la taille et ornée sur la manche d’un tiraz.   Les plis du vêtement semblent capturer le mouvement de la scène. À première vue, vous pourriez penser que c'est une scène de chasse.  Mais regardez de plus près, il n’y a ni carquois ni flèches. Les cavaliers galopent sur un fond de rinceaux, dont les courbes et les contre-courbes enchaînées créent une impression de mouvement, qui souligne leur course, presque comme dans une bande dessinée.  Ces cavaliers sont en réalité en train de jouer au polo ! Le décor de ce gobelet précieux est traité comme une page de miniature colorée, une forme d'illustration ou de peinture détaillée avec beaucoup de précision et de finesse.   À partir de la fin du XIIe siècle, on constate un fort développement des compositions figurées dans la production d’objet de luxe en céramique, en métal et en verre émaillé. Ces objets évoquent les plaisirs liés aux cercles du pouvoir, en particulier des activités équestres comme les joutes, la chasse et le jeu de polo que l’on retrouve ici. Grâce aux deux bandeaux d’écritures en arabe qui encadrent le registre central, nous savons que ce gobelet était une dédicace à un sultan, une manière de montrer respect et loyauté envers le chef de l'État.  Ce qui me touche particulièrement dans cet objet, c’est que son histoire ne s’arrête pas au XIIIe siècle en Syrie. Il a été découvert à Orvieto, en Italie.  Ce gobelet en verre, petit et fragile, a survécu pendant 800 ans, préservé par différentes personnes, pour diverses raisons ou utilisations. C’est un véritable trésor qui nous raconte une histoire allant bien au-delà de sa naissance, depuis l'invention du jeu de polo en Asie et sa diffusion grâce à la Route de la Soie, jusqu'au voyage de ce gobelet vers l'Europe.  Gobelet aux joueurs de polo, vers 1250, Syrie, en verre soufflé, décor émaillé et doré, découvert à Orvieto en Italie, sous l'autel de l'église, aujourd'hui disparue, de Santa Margherita, Hauteur : 15,5 cm, Paris, Musée du Louvre.   Texte et voix : Jianhui Yang Enregistrement : Hugo Passard Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Hey ! Je m’appelle Chloé-Alizée. Aujourd’hui, je vous parle de skate ! Trois mots à retenir : Board, Freestyle et Fun. Accrochez-vous, ça va glisser ! Facile d’imaginer un skateboard, vous me direz, mais connaissez-vous les mots qu’utilisent les skateurs pour le décrire ? C’est un board ou deck, une planche en bois courbée à laquelle sont attachées des roues, maintenues par des trucks en acier. Tout un set-up bricolé maison, modifiable quand on veut. Son décor est aussi important. Le skate qui m’intéresse porte fièrement un dragon rouge et une tête d’oiseau, l’emblème de son créateur Tony Hawk alias Birdman, l’homme oiseau.  Tony Hawk est une légende du skate depuis son enfance. Il a réalisé le premier 900, figure ou trick consistant à réaliser deux tours et demi lors d’un saut depuis une grande rampe. Rien que d’y penser, ça me donne des frissons ! Ça tombe bien, c’est l’objectif de tout rider ou rideuse qui pratique un sport extrême.   Le skate a été inventé par des surfers californiens vers 1950 pour tester d’autres sensations de glisse dans la rue et ses spots. Petit à petit, il s’est diffusé partout dans le monde avec son vocabulaire, son esthétique pop et colorée et son mode de vie. À nous les sensations, la liberté et le fun !  Attention, réaliser des figures implique un entraînement physique quotidien. Tout skateur doit persévérer même s’il tombe, et repousser ses limites ! Avec ces valeurs, le skate a sa place aux Jeux Olympiques. En 2024 à Paris, une arène sera aménagée place de la Concorde pour accueillir deux épreuves : le Park, pour les Tony Hawk amateurs de courbes, et le freestyle, dans un espace reproduisant une rue. Les skaters improviseront leurs figures réalisées pendant leur run, prestation de 45 secondes, et seront évalués sur leur vitesse et leur technique.   Je trouve l’univers qui gravite autour du skate super fun. Chacun bricole ses planches, parfois de vraies œuvres d’art, ou son parcours comme il ou elle le veut. Impossible de ne pas m’arrêter lorsque je vois un rider tester un spot sympa dans la rue ou même un joueur en ligne incarner Tony Hawk dans l’un de ses jeux vidéo ! D’ailleurs, à quand, le skate aux JO du e-sport ?  Skateboard, pro-model « Tony Hawk », 1983, bois, film déco, papier de verre, Marseille, MUCEM.   Texte et voix : Chloé-Alizée Clément Enregistrement : Suzanne Saint-Cast Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour à tous ! Je m’appelle Claire, aujourd’hui je vais vous parler de sculpture, de chef-d'œuvre et de victoire. Notre création artistique est une sculpture grecque renommée qui fût découverte sur l’île de Samothrace et qui date du début du IIe siècle avant notre ère. Elle est encore mystérieuse à bien des égards.   Tout d’abord, imaginez une figure féminine sans tête : atypique me direz-vous, mais cela lui donne un caractère universel plutôt plaisant. Elle est très sensuelle, puissante et aérienne. Les ailes déployées, elle s’apprête à atterrir sur la proue d’un navire. Le drapé de son vêtement bouillonne et suit les courbes de son corps. Et si je vous dis Victoire, vous avez une idée ?  La réalisation du monument décrit est une prouesse technique, l’œuvre semble légère mais pèse en réalité plusieurs tonnes de marbre de Paros pour la figure féminine, et de marbre gris de Lartos pour la proue et le socle. Elle n’était pas toute blanche à l’origine, on a repéré des traces de peinture bleue sur son vêtement et sur une aile. En poésie, on l’appelle « la Bienheureuse » ou « la Glorieuse ». Fille d’un Titan et d’une Océanide, on la nomme aussi Nikè.  À quoi reconnaît-on notre messagère ?  À ses attributs que sont la couronne de laurier, une torche, un trophée ou la palme de la victoire. C’est par eux qu’elle vient annoncer le succès aux vainqueurs de guerre, des arts ou des sports de compétition. C’est dire aussi si elle a sa place dans les Jeux Olympiques !   Dans l’Antiquité, cette victoire allégorique apparaît sur des scènes de bas-reliefs, des sarcophages, des pièces de monnaie ou des vases en céramique. Elle assiste aux préparatifs, préside, arbitre ou s’envole pour venir se placer derrière l’élu des dieux. À la fin de l’épreuve, c’est elle qui remet au vainqueur les insignes et les prix.  Aujourd’hui encore, Nikè influence le sport car elle est vive et dynamique. Un détail de l’aile gauche de notre œuvre d’art a notamment inspiré la marque Nike qui a repris les lettres de son nom. Son logo exprime l’énergie et le dépassement de soi. Elle apparaît aussi sur le premier trophée de la coupe du monde de football en 1930 : il s’agit de la Coupe Jules Rimet.  Je ne sais pas pour vous, mais moi, je suis conquise par son aspect surnaturel, sa beauté exceptionnelle et sa grande force symbolique. Elle trône en réduction sur mon bureau : c’est un porte-bonheur. Qu’elle vous aide aussi à réussir tous vos projets !  Victoire de Samothrace, vers 190 avant J.-C., marbre, sculpture monumentale, Paris, Musée du Louvre.   Texte et voix : Claire Farah Enregistrement : Suzanne Saint-Cast Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Camille et aujourd’hui je vais vous parler de lumière, de régate et d’impression. Imaginez-vous au mois de juillet, assister à une course d’aviron, la fameuse Molesey Regatta sur les bords de la Tamise au côté de l’aristocratie anglaise. Sentez ce vent qui fait onduler les drapeaux britanniques au premier plan puis admirez au second plan tous les avirons parallèles où les rameurs essayent de s’arracher la première place. C’est ce moment de tension et d’excitation qu’a voulu retranscrire Alfred Sisley dans Les Régates à Molesey, peinte en juillet 1874 en Angleterre.   Alfred Sisley, né à Paris de parents britanniques, est un peintre rattaché à l’impressionnisme, un mouvement pictural né à la fin du XIXe siècle qui célèbre la modernité, le plein-air, et s’attache par une touche rapide et claire à retranscrire les effets de la lumière. Tout le tableau est une impression de mouvement, que ce soit l’eau qui capte les moindres rayons de lumière, les drapeaux qui se laissent aller à la danse du vent et les rameurs qui brassent l’eau. Sisley essaye de recréer cette effervescence qui se cristallise alors autour du sport.   Alors pourquoi la régate est un sujet contemporain de Sisley ? Une régate est une course de vitesse entre plusieurs bateaux sur un parcours fermé. Ici, c’est précisément une course d'aviron qui se déroule sous nos yeux. L’aviron est connu depuis l’Antiquité. Dans l’Énéide, Virgile mentionne la première course à l’aviron organisée par Énée pour les funérailles de son père. Pour ce qui est de l’Angleterre, c’est au début du XVIIIe siècle que la pratique de l’aviron devient sportive. La première grande compétition d'aviron est la célèbre course entre les universités d’Oxford et de Cambridge en 1829. L’aviron est au programme des Jeux Olympiques depuis la première édition à Athènes en 1896, il faudra attendre les Jeux de Montréal en 1976 pour que les femmes aient l’autorisation d’y participer. C’est lors de la première exposition collective des impressionnistes en avril 1874 que le motif des régates se retrouve dans de nombreux tableaux impressionnistes comme ceux d’Auguste Renoir, ou de Auguste Caillebotte.   Plongez à mes côtés dans l’univers de Sisley, univers où tout n’est que, pour moi, une métaphore de l’eau : la partie supérieure est embrumée comme si le brouillard anglais se joignait à la partie. Tout est un camaïeu de bleu sur lequel Sisley ajoute du rouge et du jaune. Reflet de la vie qui se déroule alors hors de l’eau.   Les Régates à Molesey, Alfred Sisley, 1874, huile sur toile, H. 66 ; L. 91,5 cm, Paris, Musée d’Orsay.  Texte et voix : Camille Delmont Enregistrement : Hugo Passard Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Astrid et aujourd’hui, j’ai choisi de vous parler d’un bâtiment qui va sans doute vous évoquer les mots « béton », « football » et « urbanisme lyonnais ». Il s’agit d’un stade entièrement réalisé en béton, de très grande dimension dont la forme est presque elliptique. L’architecture est extrêmement simple, sans fioritures, excepté quelques éléments ajourés. Le stade est pourvu de quatre porches d’entrée sur deux côtés, au niveau desquels on distingue des arcades ainsi qu’une grande arche très simple. Il est ceint d’une galerie comportant de petites arches en plein-cintre devant laquelle se trouvent les gradins à ciel ouvert. Devant ceux-ci se situent une piste cyclable, une piste pédestre et un terrain de football au centre. La monumentalité de l’ensemble mais surtout sa sobriété devait frapper l’œil du spectateur à l’époque de sa construction.  Comme vous vous en serez probablement douté, il s’agit du stade de Gerland, à Lyon, stade officiel de la ville avant la construction du Parc Olympique lyonnais.  Sa construction débute en 1913 mais son inauguration n’a lieu qu’en 1926. À l’origine, le stade s’inscrit dans un ensemble sportif d’envergure, une « cité des sports » : on peut notamment venir y pratiquer l’athlétisme ou bien encore nager. C’est Tony Garnier, architecte lyonnais de renom, auteur de la Halle qui porte encore son nom, qui est mandaté pour sa construction.   Vous reconnaitrez sans doute les influences antiques du stade, interprétées par Garnier, qui rejette l’ornement au profit d’une utilisation épurée du béton. Par ses murs assez bas, l’ensemble sportif fait penser au célèbre stade d’Olympie où les athlètes s’affrontaient dans différentes épreuves de course à pied. La monumentalité et l’aspect classicisant du complexe semblent presque annoncer l’Olympiastadion de Berlin édifié dans les années 1930 dans lequel la référence à l’architecture antique est encore plus explicite, la filiation avec l’Empire romain étant revendiquée par le régime nazi.  D’origine lyonnaise, j’ai déjà eu l’occasion de fréquenter ce stade bien connu des supporters Lyonnais.   Stade de Gerland, Tony Garnier, béton, 1913-1926, Lyon, quartier de Gerland.   Texte et voix : Astrid Kowalski Enregistrement : Sibylle Buloup Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Clara et je vais vous parler de puissance, de douleur et de virtuosité.   Le Milon de Crotone est une sculpture de deux mètres de haut en marbre blanc de Carrare. Pierre Puget la sculpte de 1672 à 1682. On y voit un homme adulte debout, nu, la main gauche coincée dans un tronc d’arbre. Son visage est déformé par la douleur car un lion lui mord la fesse et plante ses griffes acérées dans la chair de sa jambe droite.   Le Milon est un tour de force technique puisqu’il est sculpté dans un seul bloc de marbre. Le détail des muscles et de la chair de l’homme est si précis que lors de sa réception, la reine Marie-Thérèse s’exclame : « Le pauvre homme ! ». Il a les muscles tendus par la douleur de la morsure du lion et les griffes dans sa cuisse marquent la violence de l’agression. Le Milon de Crotone est l’image savante du corps torturé du grand athlète, vaincu par la vieillesse.  Son histoire se déroule dans la ville de Crotone en Grande Grèce, c’est un héros lutteur reconnu pour sa force. Vieillissant, il veut prouver ses capacités sportives malgré sa force diminuante. Il décide de séparer un tronc à la force de ses mains mais finit par y laisser sa vie. En effet, à la nuit tombée, des bêtes sauvages viennent dévorer l’homme rempli d’orgueil qui s’est coincé dans un tronc. Puget représente à ses pieds, la coupe et les rubans du vainqueur aux Jeux Olympiques. La coupe gît au sol rappelant que la gloire est éphémère.   Néanmoins, Le Milon de Crotone compte parmi les athlètes célèbres de l’Antiquité, reconnu pour sa force herculéenne. Modèle olympique par excellence, il figure même sur l’un des quatre timbres de la planche philatélique éditée à l’occasion des Jeux Olympiques de Paris de 1924. C’est un symbole de la culture athlétique. De ses nombreuses victoires vient un proverbe : “plus sain que Crotone”.   J’affectionne cette sculpture car Puget réussit à faire transparaître la tendreté de la chair humaine dans une matière minérale dure. La sculpture prend vie par son mouvement, par sa virtuosité technique dans le rendu du pelage de l’animal, de la chair du sportif marquée par l’effort et le passage du temps.  Le Milon de Crotone, Pierre Puget, 1672-1682, marbre de Carrare, 2m de haut, Musée du Louvre.  Texte et voix : Clara Sadik Enregistrement : Kélian Jeannez Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Je m’appelle Ambre et aujourd’hui je vais vous parler de comptabilité, de lutte et d’épopée. Notre objet est ce que l’on appelle un sceau-cylindre, il date d’entre -1800 et -1600 avant notre ère et a été retrouvé en actuelle Syrie.   C’est un petit morceau de pierre en forme de cylindre de quelques centimètres, à la surface duquel deux scènes ont été gravées : d’une part deux personnages debout en position d'orants face à la représentation d’une divinité syrienne ; par ailleurs un groupe de cinq personnages disposés en registre au-dessus d’une scène de combat entre deux lutteurs. Notre œuvre est de très petite taille : elle ne mesure que 2,5 cm de haut, puisqu’un sceau-cylindre peut et même doit pouvoir être emmené partout. Les propriétaires les portaient même autour du cou comme une amulette.  Pourquoi donc l’emmener partout ? Tout simplement parce qu’un sceau-cylindre c’est, pour son propriétaire, un moyen pratique et rapide pour authentifier ses biens et en tenir la comptabilité. Pour cela, rien de plus simple ! Il suffit d’appliquer une pression dans de la matière molle, comme de l’argile, en faisant rouler le rouleau pour y imprimer un décor gravé. L’empreinte laissée crée une signature que l’on peut apposer sur une tablette de comptabilité. Posséder un sceau-cylindre est souvent perçu comme une marque d’autorité.   Pourquoi choisir de représenter un combat de lutteurs pour marquer sa signature ? L’interprétation des scènes de combat sur ce type d’objet reste souvent floue. On peut supposer que c’est par goût ou par désir de personnalisation que cette scène a été choisie. Après tout, en Mésopotamie, la lutte est une pratique assez populaire.   On en trouve des descriptions dans l’épopée de Gilgamesh, c’est un des premiers récits héroïques de l’histoire où un combat entre Gilgamesh le roi d’Uruk et son double Enkidu est raconté. Il semble aussi que la lutte soit associée à des rituels religieux et politiques comme pour sélectionner un futur prêtre ou un chef. Des événements athlétiques furent même organisés autour de la figure de Gilgamesh pendant neuf jours dans la ville d’Assur où des hommes s’affrontèrent à la lutte et à l’athlétisme.  Pour ma part, je suis très sensible au charme qui se dégage de l’objet, notamment par sa petite taille et son décor personnalisé. J’aime aussi naïvement me dire qu’une personne, il y a 2000 ans, a peut-être choisi ce sceau-cylindre pour ces détails.   Sceau-cylindre, bronze moyen, entre 1800 et 1600 avant notre ère, découvert en Syrie du Nord, hématite, 2,5 cm de hauteur, Paris, Musée du Louvre.   Texte et voix : Ambre Delmas Enregistrement : Sibylle Buloup Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Esteban et aujourd’hui je vais vous parler de vase, d’aviron et d’art-déco.  Nous sommes face à un vase blanc en faïence peint par Robert Lallemant en 1924, il est de forme ronde avec un pied et un col rectangulaire. Au centre, on peut voir un carré où se déploie une scène de sport peinte qui représente deux hommes devant un pont en train de faire du double scull, c’est un type de bateau utilisé pour la pratique de l’aviron qui comprend deux rameurs tenant chacun une rame tribord et une rame bâbord.   Dans les années 20, nous sommes en plein dans les “années folles” caractérisées par une intense activité sociale et artistique. Durant cette période, le sport est mis à l’honneur, et la fréquentation des événements sportifs par le public se développe sensiblement. La date de création de ce vase, en 1924, correspond à une année très particulière, puisque c’est à cette période que se sont déroulés les Jeux Olympiques au Stade de Colombes en région parisienne. Quarante-cinq pays et plus de 6000 athlètes y ont participé, ce qui constitue un record pour l’époque. Cette année-là se déroule, en parallèle des épreuves sportives, les Jeux Olympiques artistiques qui ont pour but de récompenser les œuvres d’art. Cet événement a donné naissance à de nombreuses œuvres sur le thème du sport.   Robert Lallemant a ainsi produit une vingtaine de céramiques sur des pratiques sportives aussi diverses que le polo, le golf ou le javelot.   Quant à l’aviron, il fait partie des Jeux Olympiques modernes depuis 1896, les compétitions amateurs ont débuté à la fin du XVIIIe siècle en Angleterre. Sur le vase, on peut voir un pont au second plan juste derrière le double scull. Ce dernier pourrait représenter le pont d’Argenteuil puisque l’épreuve d’aviron qui fut effectuée au Jeux Olympiques de 1924 s’est déroulée sur la Seine entre ce pont et l’Ile Saint-Denis. Les céramiques de Robert Lallemant aux formes stylisées et aux couleurs chatoyantes, ici du bleu et du rouge, démontrent la joie de vivre et l’insouciance de l’entre-deux guerres. Elles reflètent également l’influence du style Art déco, un mouvement artistique qui s’est développé à partir des années 1910. Vous savez, c’est ce genre d’objets que l’on pourrait presque trouver dans les romans d’Agatha Christie.   En 1929, Robert Lallemant participe à la création d’une association : l’Union des artistes modernes qui vise à produire des objets fonctionnels adaptés à la vie active. Il cherche à développer des formes particulières qu’il est possible de répéter en petites séries.   Ce qui m’intéresse tout particulièrement dans cette œuvre, c’est son côté Art déco : la modernité et la simplicité de ses formes.  Vase « Double scull », Robert Lallemant, faïence, 1924, 33,4 cm de haut, 28 cm de large, Musée municipal d’Art et d’Histoire de Colombes.   Texte et voix : Esteban de Sousa Enregistrement : Suzanne Saint-Cast Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Jeanne, et je vais vous parler de contraste, de rugby et de danse.  L’œuvre que je vais vous décrire s’appelle Football. C’est une aquarelle réalisée en 1917 par Robert Delaunay. Sur un fond marqué de couleurs vives tournoyantes, un homme tend les bras au-dessus de sa tête, comme pour attraper une balle en vol. À sa gauche, une seconde personne semble courir du fond d’un terrain. Autour de ces deux hommes, des formes circulaires multicolores flottent dans l’espace et animent le fond.  Ce qui me marque dans cette œuvre, c’est la profusion de couleurs. Les jaunes à côté des noirs contrastent avec les oranges et les verts. Le dossard rouge vibre à côté du bleu, du vert et du violet. Robert Delaunay aime jouer avec ces contrastes dans ses œuvres. Il s’appuie sur la théorie du contraste simultané des couleurs de Chevreul. Un nom un peu complexe pour dire que lorsqu’on juxtapose des couleurs les unes à côté des autres, elles paraissent plus puissantes. Delaunay cherche à leur donner du dynamisme. Avec ces grands cercles concentriques, les couleurs se mettent en mouvement et tourbillonnent.  Cette aquarelle s’appelle Football. Pourtant, les deux personnes ne sont pas des footballeurs. Cela peut paraître un peu ironique mais en 1917, c’est le rugby que l’on nomme football, ou « football-rugby ». Le rugby arrive en France à la fin du XIXe siècle. Il devient une discipline olympique à cette époque, en 1900 dans sa variante à XV, et bien plus tard, en 2016, dans sa variante à sept. Au début du XXe siècle, il est un des sports les plus populaires de l’hexagone. Les loisirs sportifs font partie intégrante de la société moderne. Ils sont une source de sujets nouveaux pour les artistes qui veulent dépeindre les transformations de leur époque.  Cette aquarelle n’est pas une œuvre définitive. Elle fait partie d’une série de croquis et d’esquisses pour un projet de ballet. Robert Delaunay travaille sur les décors. Il choisit de représenter des rugbymans car les mouvements des sportifs font penser à ceux des danseurs et leurs dossards chamarrés, aux costumes des ballets. Figés dans les airs, nos deux athlètes en tenues bleu et rouge exécutent une drôle de chorégraphie pleine de vie sur un fond abstrait coloré.  Cette œuvre me parle par son dynamisme et la joie qui se dégage des couleurs chatoyantes. Elle me donne envie de sortir jouer au rugby sous un soleil d’été.  Football, Robert Delaunay, 1917, aquarelle, Troyes, Musée d’Art moderne.   Texte et voix : Jeanne Mallinjoud Enregistrement : Suzanne Saint-Cast Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
Bonjour, je m’appelle Zola et je vais vous parler de proportions, de fictions nationales et d’intemporalité.   L’Athlète est une sculpture en plâtre patiné de plus de deux mètres de haut réalisée en 1938 par Félix Joffre. Vous contemplez cet homme d’une vingtaine d’années, presque entièrement nu, qui vous surplombe par sa grande taille. Pudiquement vêtu d’une culotte moulante, sa musculature impressionnante capte votre attention. Mains sur les hanches, fermement campé sur ses deux pieds, torse bombé et le menton légèrement relevé, il pose, immobile. Son regard plein d’assurance fixe l’horizon. Cela vous intrigue. Peut-être est-il en train d’attendre que son score soit affiché sur panneau ? Quel sport pratique-t-il ? Vos yeux suivent la ligne vallonnée formée par ses cuisses puissantes : l’athlétisme peut-être ?   Pour créer ce corps fort et vigoureux, l’artiste a pris pour modèle un pompier parisien et pour le visage, celui d’une sculpture antique romaine. Grand Prix de Rome en 1929, Félix Joffre est allé étudier les statues antiques en Italie dont il cherche à imiter le “beau” idéal : un corps parfait symbole d’un esprit vertueux. En vous rapprochant, vous remarquez que de savants calculs de proportions ont été opérés : largeur des épaules égal écart entre les pieds, angle formé par les bras égal cent degrés, un buste plus deux jambes égal un i-grec inversé.   Exécutée en 1938, cette sculpture exhibe un corps qui, grâce à une pratique physique intense, parvient à un équilibre idéal très à la mode à cette époque. Les fictions nationales de l’entre-deux-guerres se l’approprient. En effet, le sport est instrumentalisé par les régimes fascistes qui en font un moyen d’embrigadement. Les jeunesses hitlériennes et mussoliniennes sont élevées selon l’idée que l’« homme nouveau » serait selon le journaliste Carlo Scorza un « être physiquement transformé » c’est-à-dire résistant, rapide et fort comme un homme-machine.   Cette statue déconcerte par son caractère intemporel. Épurée à l’extrême car dépouillée de vêtements et de parures, il vous est impossible de la rattacher à une époque précise. Le tout vous semble pourtant étrangement familier. Les traits physiques sont suffisamment imprécis pour vous évoquer le corps d’un homme de votre temps.   Ce qui me touche avec cette œuvre, c’est son caractère résolument moderne. Je vois chez les bodybuilders d’aujourd’hui un retour de l’homme mécanique des années 1930 comme une réminiscence de l’exaltation de la force physique. Cette sculpture a presque cent ans et elle nous parle de notre présent : fascinant non ?   L’Athlète, Félix Joffre, 1938, plâtre patiné, 2m de haut, 98cm de large et 58cm de profondeur, La Piscine, Roubaix.   Texte et voix : Zola Duguet Enregistrement : Philipp Fischer Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
L’œuvre dont je vais vous parler est une joueuse de polo, datant de 750 et réalisée en terre cuite rouge, produite en Chine. Elle représente une femme à califourchon sur son cheval, en train de jouer au polo. La crosse n’est plus présente dans sa main droite, mais sa posture montre qu’elle est en pleine action. Son cheval est au galop, les pattes élancées vers l’avant, et comme vous pouvez l’imaginer il semble presque voler puisque ses sabots ne touchent pas le sol. Sa polychromie est exceptionnelle, puisqu’elle porte une veste jaune, un pantalon rouge, des bottes noires et coiffée d’un petit chignon.  Cette statuette mesurant environ vingt-huit centimètres, est en réalité un mingqi, un « objet miroir ». Ils représentent généralement des personnages ou animaux, et ils sont placés dans des tombes pour accompagner le défunt. Ces objets sont typiques de la dynastie Tang, une dynastie de la Chine ancienne, au pouvoir entre 618 et 907.  Le polo, bien avant d’être une discipline sportive des Jeux Olympiques entre 1900 et 1936, est un sport originaire de Perse, et il serait arrivé en Chine à travers les routes de la Soie. C’est une pratique très populaire sous la dynastie des Tang. D’ailleurs, de nombreuses œuvres d’art chinoises représentent des femmes, d’un statut social élevé jouant au polo à dos d’âne.   Si vous regardez la vitrine où est exposée cette joueuse de polo, vous pourrez voir qu’elle s’inscrit dans un ensemble, composée de 6 statuettes représentant des joueuses de polo. Elles sont individualisées car elles portent toutes des coiffures différentes et des couleurs de vêtements différents. Cette petite statuette représenterait donc une dame de cour. Elle semble concentrée à suivre la balle, et le cheval, en pleine fougue, montre l’endurance et la rapidité mais aussi la tension de la partie.   Ce que j’aime dans cette œuvre, c’est comment elle nous montre la tension de la partie de polo, à travers le bras élancé de cette joueuse. Lorsqu’on la regarde, on a l’impression de vivre le match qui se crée en face de nous. Les attitudes montrent à la fois, un moment d’agitation et d’attention et on le voit très bien à travers la finesse des traits de son visage, particulièrement concentré.   Joueuse de polo, Chine du Nord, dynastie Tang, vers 750, terre cuite rouge engobée et peinte, 28 cm de haut pour 37 cm de longueur, Paris, Musée Guimet.  Texte et voix : Emma Rimbeuf Enregistrement : Sibylle Buloup Montage : Jean Foucaud-Jarno Musique & web : Philipp Fischer Coordination : Julia Martin & Grégoire Verprat
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