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Les rendez-vous de Philopop

Les rendez-vous de Philopop

Author: Ouest Track Radio

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Description

Les Rendez-vous de Philopop avec Didier Carsin
49 Episodes
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Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 21 avril 2024                             Qu'est-ce que le pessimisme ?Une lecture du Monde comme Volonté et comme Représentation de Schopenhauer (1819)Le pessimisme est ordinairement considéré comme la disposition d'esprit d'un homme qui voit tout en noir. S'agit-il seulement d'une vision de l'existence purement subjective qui est affaire d'humeur ou de tempérament ? Ou peut-on en donner des raisons objectives, comme le prétend Schopenhauer ? Cette émission vise à présenter sa démarche et à expliquer en quoi sa philosophie est un pessimisme.1- Le pessimisme réfute toute vision théologique du monde qui conduit à réduire le mal à une apparence ou à un moyen de promouvoir le bien a- C'est la rencontre du mal qui suscite l'interrogation philosophique, mais souvent les philosophes ont préféré relativiser son existence, en visant sa justification (optimisme métaphysique de Leibniz; philosophie de l'histoire de Hegel)b- La réfutation de l'optimisme de Leibniz (le monde "est le meilleur des mondes possibles"), doctrine illusoire reposant sur un théisme (affirmation d'un Dieu bon auteur du monde) et faisant un usage illégitime du principe de causalité (Dieu est considéré comme la cause première)c- L'argumentation du pessimisme opposée à l'optimisme: en quel sens Schopenhauer établit que le monde "est le pire des mondes possibles"2- L'élucidation de l'origine du mal (de la souffrance): le "Vouloir" comme puissance universelle et aveugle constitutive de toute chose, la souffrance étant ainsi " le fond de toute vie"a- Le désir humain, manifestation de sa force aveugle qui s'éprouve comme "une soif inextinguible" qu'aucun objet désiré ne saurait comblerb- Si désirer, c'est souffrir d'un manque, le plaisir n'en est que la délivrance passagère. Le bonheur "n'est rien que de négatif"c- L'ennui (nous n'avons rien à désirer) est une souffrance plus insupportable que celle que nous éprouvons quand des obstacles nous empêchent de satisfaire un désir. Il révèle le non-sens de l'existence humaine (un parallèle avec Pascal).3- Se délivrer du Vouloir-vivre qui est la source du malheur de la viea- La recherche du bonheur conduit au malheur tant qu'il est une course sans fin d’objets en objets. b- Quel intérêt pratique peut avoir une philosophie pessimiste: la prise de conscience de la source du malheur de la viec- La "négation du Vouloir-vivre" comme affranchissement du Vouloir-vivre et de la tyrannie des désirsConclusion: Le pessimisme comme remède contre l'illusion optimiste qui expose au désespoirBibliographie:1- Le Monde comme Volonté et comme Représentation, d'Arthur Schopenhauer (1819)- 4ème partie: "La Volonté s'affirme, puis se nie", et Suppléments 17 ("Sur le besoin métaphysique de l'humanité")  et 56 ("De la vanité et des souffrances de la vie")2- Pensée 126 de Pascal (édition Le Guern en Folio)3- Essais de théodicée de Leibniz, en G/F3- Candide, conte philosophique de Voltaire, particulièrement les chapitres 5 et 19
Les situations historiques ne sont jamais identiques. Mais dans la mesure où l’enchaînement monstrueux des massacres qui ont lieu depuis cinq mois en Israël et à Gaza, nous y incite, il peut être utile de réfléchir à ce qu’ont écrit Sartre et Camus sur le colonialisme et le terrorisme et sur les raisons de leurs divergences à propos du drame algérien, à la fin des années 50.1. Le désaccord entre Sartre et Camus sur l’avenir de l’Algérie a. Le rejet de la colonisation française. Quelques dates à rappeler : les massacres de Sétif en mai 1945, le déclenchement de l’insurrection armée par le FLN en novembre 1954, la proclamation de l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet 1962.b. Pour Sartre, il n’y a pas d’autre solution que l’indépendance. Il accorde son soutien public aux militants du réseau Jeanson qui collectent et transportent des fonds et des faux papiers pour aider les nationalistes algériens.c. Camus veut croire encore à une réforme profonde du système colonial qui permette le maintien de l’Algérie française.2. Une divergence d’analyse concernant le système colonial a. Camus dénonce ses injustices dans ses articles sur la « Misère de la Kabylie » parus dans le journal Alger républicain en 1939, et en appelle à une réforme sociale et économique pour réaliser une « Algérie pacifique et juste ».b. Dans l’article qu’il publie en mars 1956 dans les Temps modernes, Sartre montre que « le colonialisme est un système », qui, en raison même de sa nature systémique, ne peut pas être réformé. De l’analyse de sa « nécessité interne » il passe ensuite à l’examen des conséquences de son développement. « L’Etat français livre la terre arabe aux colons pour leur créer un pouvoir d’achat qui permette aux industriels métropolitains de leur vendre leurs produits ; les colons vendent aux marchés de la métropole les fruits de cette terre volée »3. Une divergence d’analyse et de jugement sur la nature et le rôle de la violence a. Sartre : la violence émancipatrice du coloniséLe système colonial a besoin d’engendrer de la haine pour se maintenir : haine raciste des colons pour les colonisés (qu’ils ont besoin de déshumaniser et d’invisibiliser) et haine des colonisés pour les colonsLa violence coloniale conduit à la révolte des colonisés. La violence revient ainsi en boomerang contre le colonisateur, le jour où la furie des colonisés ne peut plus être retenue et éclate (c’est le « temps des massacres », voir la préface de Sartre aux Damnés de la terre de Frantz Fanon, 1961)La violence insurrectionnelle des colonisés est le seul moyen pour eux de sortir « des ténèbres coloniales » et de s’émanciperb. Camus : le refus de la « casuistique du sang » (Chroniques algériennes)Que la violence soit parfois nécessaire, n’implique pas qu’on puisse en justifier le principe au nom d’une justice absolue, et en faire un usage indiscriminé pour frapper des civils innocents.Les analyses de Camus dans son Essai de 1951, L’Homme révolté : le « crime logique », le « principe de révolte » contre « l’esprit de révolution »On ne peut condamner la torture pratiquée par l’armée française et sa répression féroce menée contre les populations civiles sans condamner en même temps les attentats terroristes du FLN. Pour Camus, c’est l’engrenage des violences qu’il faut combattre, car il ne peut mener qu’à la destruction.Conclusion : Réfléchir sur ces deux références en cherchant à comprendre la critique que chacune d’elles peut adresser à l’autre. Mesurer combien leur usage médiatique se révèle souvent abusif (j’en donne un exemple pour Camus)Bibliographie :Situations, V chez Gallimard, recueil d’articles de Sartre dans lequel on peut trouver notamment « Le colonialisme est un système » et sa préface aux Damnés de la terre de Frantz FanonL’homme révolté de Camus, collection FolioChroniques algériennes de Camus, collection Folio
Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 17 décembre 2023 L’antisémitisme, le sionisme, la Palestine, l’Etat d’Israël, La réflexion de Hannah Arendt Face à l’horreur des massacres qui ravagent le Moyen Orient, il paraît utile de lire ou de relire l’œuvre de Hannah Arendt (1906- 1975). En tant que juive allemande, elle dut fuir l’Europe en 1941 et se réfugier aux Etats Unis, où elle prit la nationalité américaine en 1951. L’émission se propose d’examiner les raisons pour lesquelles H. Arendt fut sioniste et celles pour lesquelles elle cessa de l’être L’antisémitisme moderne et les impasses d’une émancipation purement individuelle (Sur l’antisémitisme) Pour comprendre pourquoi les Juifs se sont trouvés « au centre de la tourmente », il faut saisir la spécificité de l’antisémitisme moderne qui ne peut pas être confondu avec la haine des Juifs d’origine religieuse, et replacer son développement dans le cadre de l’Etat-nation en Europe aux XIX et XX èmes siècles. L’antisémitisme politique. Le sort des Juifs étant lié à l’existence de l’Etat-nation, son déclin les expose à l’antisémitisme qui les associe imaginairement à des liens financiers avec un Etat corrompu. L’antisémitisme social. Loin de se traduire dans les mœurs, l’égalité des conditions (qui résulte de l’émancipation juridique des Juifs) engendre un antisémitisme social. Plus les Juifs s’assimilent, plus leur différence fait problème, à mesure que leur identité juive devient moins visible. D’une identité religieuse, on passe à une identité raciale (un « type juif ») fantasmée par les antisémites. Le Juif est alors soumis à une injonction contradictoire : ne pas ressembler à un Juif tout en étant juif. Quels que soient ses efforts pour s’assimiler, le Juif est ramené à sa condition de « paria » et se trouve la proie de l’antisémitisme (« Que Dreyfus est coupable, je le conclus de sa race », écrivait l’écrivain antisémite Maurice Barrès) Du « paria » au réfugié apatride. La justification d’un Etat pour le peuple juif (L’impérialisme) Déchus de leur nationalité et de leur citoyenneté par l’Allemagne nazie (fin des années 30), les Juifs sont réduits à la condition de réfugiés apatrides : « Il semble qu’un homme qui n’est qu’un homme a précisément perdu les qualités qui permettent de le traiter comme leur semblable ». Le premier des droits d’un être humain doit être celui « d’avoir des droits » : cela ne signifie pas seulement des droits civils aux individus, mais cela implique aussi le droit pour un peuple à la liberté politique et à se constituer en nation dotée d’un Etat pour protéger ses droits (L’Etat d’Israël assure « l’établissement de droits humains ») Quelle doit être la structure du nouvel Etat en Palestine dont les Juifs ont besoin ? La rupture de H. Arendt avec le sionisme En quel sens il faut entendre, selon H. Arendt, l’idée d’un peuple juif Les critiques de H. Arendt à l’égard du mouvement sioniste auquel elle reproche de ne pas prendre en compte l’existence des Arabes Palestiniens et de vouloir imposer par la force la création d’un Etat national juif La fondation d’Etats-nations en Palestine risque de conduire au même échec auquel ont été conduits les Etats-nations d’Europe centrale après le démembrement de l’empire austro-hongrois en 1919. Elle risque de mener à une guerre sans fin (des minorités opprimées, et l’expulsion de populations : 750 000 Arabes palestiniens sont ainsi transformés en réfugiés, privés « du droit d’avoir des droits », comme l’étaient en Europe des centaines de milliers de Juifs à la fin des années 30). Contre la solution d’Etats-nations, H. Arendt préconise celle d’un Etat bi-national assurant des droits égaux aux Juifs et aux Arabes et organisé sur la base de conseils où ils régleraient ensemble les problèmes qu’ils ont en commun. Bibliographie : - Sur l’antisémitisme, 1er tome des Origines du totalitarisme (1951), de Hannah Arendt, collection Essais/Points, et L’Impérialisme, chapitre V : « Le déclin de l’Etat-nation et la fin des droits de l’homme « , 2ème tome des Origines du totalitarisme, même collection -Dans Ecrits Juifs (chez Fayard), deux articles : «Réexamen du sionisme » (1944) et « Pour sauver le foyer national juif » (1948)En complément de cette émission, on peut écouter aussi sur Ouest track : L'affaire Dreyfus comme symptôme de l'antisémitisme; - L'affaire du paquebot le Saint Louis en 1939 : réflexion sur les droits de l'Homme et la question des migrants et des réfugiés; - L'antisémitisme (lecture des Réflexions sur la question juive de JP Sartre). Voir la liste des podcasts des Rendez vous de PHILOPOP. 
1- Pourquoi les Lumières sont-elles mises en question ?a- La reconnaissance assez récente des injustices du passé colonial: la Loi du 21 mai 2001, dite "Taubira", et, depuis le 10 mai 2006, célébration d'une "journée de commémoration nationale des mémoires de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions" (1794 et 1848)b- Quelle position et quel rôle ont eu les philosophes des Lumières (on limitera le propos aux philosophes français parmi lesquels Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Diderot...)? Ont-ils fermement combattu la traite et l'esclavage ou en ont-ils seulement condamné le principe au nom de l'universalité des droits, tout en en justifiant la pratique pour des motifs politiques et économiques ?c- Montesquieu (Livre XV de l' Esprit des Lois, 1748) est considéré comme le premier philosophe à avoir posé les principes théoriques de la dénonciation de l'esclavage. Son statut fondateur est-il mérité, et au-delà de son cas, peut-on continuer à affirmer la vertu émancipatrice des Lumières ?2- Le cas Montesquieu comme illustration des « ambiguïtés » des philosophes des Lumières (critique de Louis Sala Molins, dans Le Code Noir ou le calvaire de Canaan)a- Il serait silencieux sur la pratique de l'esclavage afro-antillais et sur l'existence du Code Noir (texte promulgué en 1685 qui réglemente en 60 articles l'usage et la vie des esclaves dans les colonies françaises)b- Il serait indifférent au sort des esclaves noirs, comme en témoignerait le ton léger de l'ironie et de la plaisanterie sur un sujet aussi grave, dans le célèbre chapitre 5 du Livre XV, De l'esclavage des nègres. Critique adressée par Bernardin de St Pierre dans le post-scriptum de la 12ème lettre du Voyage à l'Ile de France (1773).c- Sa condamnation de l'esclavage serait très ambigüe puisqu'elle admettrait son existence dans les pays chauds (conformément à la théorie du climat exposée au Livre XIV)d- Cette condamnation se trouverait contredite par la 2ème partie du Livre XV où Montesquieu ne se préoccupe plus que d'indiquer comment prévenir les "abus" et les "dangers" de l'esclavage. Montesquieu est-il vraiment anti-esclavagiste ? Son souci n'est-il pas plutôt de réfléchir aux moyens de perpétuer l'esclavage colonial en évitant des révoltes ?3- Réponses aux critiques. Lire le Livre XV en confrontant son propos aux préjugés dominants du XVIIIème sièclea- Montesquieu produit une définition générale de l'esclavage (chapitre 1) qui comprend aussi bien l'esclavage antique que l'esclavage moderne, le servage que l'esclavage "pris à la rigueur tel qu'il était chez les Romains et qu'il est établi dans nos colonies" (note du chapitre 2). L'absence de référence explicite au Code Noir n'est-elle pas une affaire de prudence ?b- Lecture du chapitre 5 "De l'esclavage des nègres": l'ironie comme arme suprême des Lumières contre l'injustice et l'absurde, et comme réaction réfléchie de Montesquieu aux opinions dominantes du moment (à propos de la nécessité économique de la traite et de l'esclavage, à propos de la question de l'origine de la couleur des Noirs...)c- Expliquer la présence de l’esclavage dans un certain nombre de contextes (politiques et géographiques) n'est pas le justifier. S'il favorise la servitude, un climat chaud n'est jamais une fatalité. L'argument de la chaleur du climat est fallacieusement invoqué par des élites économiques pour justifier l'institution de l'esclavage dans les colonies et son maintien (chapitres 7 à 9).d- L'esclavage étant institué dans les faits, le problème est d'éviter ses abus et ses dangers (chapitre 11). Montesquieu préconise ainsi son encadrement juridique. Il n'est pas abolitionniste, il plaide pour des mesures progressives d'affranchissements (ce sera le programme de la Société des amis des Noirs, fondée en 1788)4- Le mouvement des Lumières comme prise de conscience progressive du caractère insoutenable de l'esclavage coloniala- Les Lumières ne sont pas un état doté d'emblée de principes déjà constitués.(les droits de l'Homme) Elles ne se caractérisent pas non plus par une doctrine homogèneb- L'un des premiers plaidoyers en faveur de l'abolition est rédigé par le chevalier de Jaucourt, un encyclopédiste ami de Diderot: il s'inspire explicitement de l'argumentation de Montesquieu dans deux articles importants ("Esclavage" et "Traite des Nègres". L'Encyclopédie ne parle pas pour autant d'une seule voix, c'est un lieu de débat : on y trouve aussi des articles favorables à l'esclavage.c- Les contradictions des Lumières: entre un progrès économique fondé sur la recherche du "luxe" (au nom duquel la traite et l'esclavage paraissent indispensables) et un idéal humanitaire qui au contraire les condamne.Bibliographie :Esprit des Lois, Livre XV, de Montesquieu (1748)Le Code Noir ou le calvaire de Canaan, Louis Sala Molins, 1987Esclavages, Les ports normands dans la traite atlantique, XV-XXIè siècles, sous la direction d’Eric Saunier
Présentation des activités de PHILOPOP (association populaire de philosophie du Havre) et du programme de la saison 2023-2024 1- PHILOPOP, une association ouverte à tousQuelques précisions d'ordre pratique :voir sur le site de PHILOPOP ( https://sites.google.com/site/philopoplh/ ) le barème des cotisations, le calendrier adopté, le rythme des séances (en moyenne 2 fois par mois un mardi ou un jeudi de septembre à juin hors vacances scolaire), le lieu et l'horaire  (au Lycée Claude Monet du Havre, salle audio, de 20H30 à 22H30)Les questions philosophiques: des questions que tout homme peut être amené à se poser au cours de son existence (exemple de la vérité)L'ambition de PHILOPOP : permettre à tous ceux qui le souhaitent d'accéder à un questionnement philosophique en offrant les conditions d'un travail suivi2- Les séances au lycée Claude Monet: la formule d'un cours progressif (suivi d'une discussion)Il ne consiste pas dans un exposé de connaissances et ne présente pas la pensée des philosophes comme une opinion savanteIl montre comment l'examen d'une notion (la justice, la vérité, le peuple, le temps...) conduit à formuler un ou des problèmes qui s'imposent nécessairement. La lecture des philosophes n'a pas d'autre intérêt que d'éclairer la réflexion, et de l'aider à aborder ces problèmes.3- Le programme de la saison 2023-2024Les séances sont accompagnées d'un plan et enregistrées. L'enregistrement est accessible aux adhérentsLe thème : Le TempsL'oeuvre : Les chapitres 41 et 44 du Monde comme volonté et comme représentation de Schopenhauer regroupés sous le titre : Métaphysique de la mort, métaphysique de l'amour, en 10/18Les 5 premières séances  Mardi 19 septembre, Mardi 3 octobre, Jeudi 12 octobre, Jeudi 9 novembre, Mardi 21 novembre (voir le calendrier sur le site de PHILOPOP4- L'émission mensuelle des Rendez vous de PHILOPOP sur Ouest track radio (podcastée et accompagnée d'un plan)Montrer comment la lecture d'une oeuvre philosophique permet d'éclairer une question d'actualité et d'y réfléchir5- Venez nombreux à la conférence donnée par PHILOPOP  le 21 octobre à 10h30 à la Bibliothèque Niemeyer du Havre:"Les philosophes français des Lumières face à la traité négrière et à l'esclavage colonial"
Vers une terre inhabitable ?L'anthropocène 40 experts ont alerté récemment dans la revue Nature du franchissement de 7 des 8 lignes rouges planétaires au delà desquelles la terre risque de devenir inhabitable. Comment expliquer qu'on en soit arrivé là ? A-t-on affaire à un processus fatal ? Peut-on l'enrayer et en atténuer les effets, et si c'est le cas, de quelle manière ?Pour décrire la situation nouvelle à laquelle l'humanité est désormais confrontée, deux scientifiques, Eugène Stoermer et Paul Crutzen, tous deux spécialistes du climat, ont proposé d'ajouter une 3ème ère au quaternaire (après le pléistocène et l'holocène) qu'ils décident de nommer anthropocène (c'est à dire l'ère de l'humain) parce qu'elle est marquée par l'impact des actions humaines 1- En quoi l'hypothèse de l'anthropocène paraît-elle pertinente pour désigner la nouveauté et la gravité des transformations en cours (réchauffement climatique, érosion massive de la biodiversité planétaire, acidification des océans, pollution des eaux, des airs et des sols...) ?On ne peut plus s'en tenir aux idées de crise écologique et de développement durableL'hypothèse proposée constitue l'humanité en force géologique : pour la 1ère fois dans l'histoire de la planète, une époque géologique serait définie par la capacité d'action d'une espèce, l'espèce humaineCette hypothèse conduit à mettre en cause la séparation établie par la modernité entre la nature et l'histoire humaine (voir l'introduction à l'histoire universelle de Michelet, et la préface de Condorcet à l'Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain)L'homme ne peut plus considérer la nature comme un milieu extérieur prévisible dont il peut connaître les lois et qu'il peut soumettre à ses techniques, il devient partie prenante de l'histoire de la terre en risquant par son activité de la détruire comme espace habitable.2- L'hypothèse de l'anthropocène est-elle légitime ? L'humanité est-elle vraiment en train d'écrire une page entièrement neuve de l'histoire de la planète ? N'est-ce pas là surévaluer l'importance de son activité ?Distinguer avec Philippe Descola (article de la revue Esprit de 2015, Humain, trop humain?) le phénomène général d'anthropisation (exemple d'une altération écosystémique régionale par l'intervention continue des Amérindiens sur la flore de la forêt amazonienne) de l'anthropocène en tant que transformation globale et accélérée du système de la terre depuis un peu plus de 2 siècles. 3- A quel type d'action doit conduire le diagnostic d'anthropocène ?a- Le projet d'une « géo-ingénierie » planétaire et l'idée d'une « gouvernance environnementale globale » (selon la formule de John Kerry, envoyé spécial du président des USA pour le climat, en 2014) :l'anthropocène apparaît dans cette perspective comme l'âge de la domination de l'homme sur la planèteau lieu d'admettre les limites de la technique humaine et ses conséquences involontaires, ce projet revient à s' illusionner sur sa puissance en s'imaginant trouver en elle le remède aux maux engendrés par le développement industrielb- Une nouvelle conception du rapport de la technique à la nature, pour laquelle la nature n'est plus entièrement prévisible en ce qu'elle est constituée par un système d'interactions de plusieurs processus naturels dans lequel s'insère l'activité humaine. L'anthropocène est l'entrée dans un monde incertain. 4- La question des responsabilités : le caractère politiquement discutable de la notion d'anthropocèneParler d'anthropocène, c'est rendre l'humanité dans son ensemble responsable de la dégradation de la situation environnementale. S'il est vrai que la notion est pertinente dans la mesure où désormais tous les peuples sont affectés, elle dissimule toutefois deux injustices :le fait que les différentes populations du monde n'ont pas participé à part égale au processus de l'anthropocène (c'est pourquoi des historiens lui préfèrent la notion de « capitalocène »)le fait que ce sont celles qui y ont le moins contribué qui sont aujourd'hui les plus exposées à ses conséquences (inondations, montée des océans, sécheresses etc)Les inégalités et les injustices ne sont-elles pas un obstacle considérable pour lutter résolument contre les effets de l'anthropocène ?Bibliographie : L'événement anthropocène, par Christophe Bonneuil et Jean Baptiste Fressoz, collection Points/ SeuilPenser et agir avec la nature, par Catherine et Raphaël Larrère, édition La Découverte
Sur la fragilité de la vérité dans l'espace politiqueSommes-nous entrés dans une ère où la vérité n 'a plus de valeur, où prolifèrent les « fake news » et les « faits alternatifs », une ère de la « post-vérité » ?Pourquoi la vérité s'avère-t-elle si fragile, pas seulement dans les tyrannies mais aussi dans les démocraties ? En quoi sa destruction met-elle en péril la vie publique elle-même ? Réflexion à partir de la lecture de deux essais d'Hannah Arendt, « Vérité et politique » (1965), et « Du mensonge en politique » (1972) 1- Le conflit de la vérité de fait et de la politique « se produit aujourd'hui sous nos yeux à une vaste échelle ». Comment expliquer l'hostilité qui menace la première ?a- Sa vulnérabilité tient d'abord à sa contingence (il est facile de faire disparaître le nom de Trotsky des livres d'histoire de la Russie soviétique ; « les faits et les événements sont choses infiniment plus fragiles que les axiomes (…) produits par l'esprit humain »).b- Les faits et les événements menacés « constituent la texture même du domaine politique » qu'un pouvoir politique veut réarranger à son profit en les falsifiant et en les effaçant.c- Les trois modes d'effacement de la vérité de fait :Sa destruction matérielle (effacement des traces d'un fait ou d'un événement)L'interdiction de son accès à un statut public qui peut être le fait d'une large partie de l'opinion publique dans une démocratie (voir les polémiques contre son livre Eichmann à Jérusalem, 1963)Sa transformation en opinion (cas uniquement des démocraties)2- La vulnérabilité des vérités de fait exposées à être transformées en opinions (démocraties)a- Les vérités de fait se trouvent dans une situation paradoxale :- Comme les opinions, elles sont « politiques par nature » en ce qu'elles s'inscrivent dans la pluralité. « La vérité de fait est toujours relative à plusieurs » : elle concerne des événements dans lesquels plusieurs se sont engagés ; elle est établie par des témoignages et repose sur des témoignages ; elle est partagée dans des récits communs.- Contrairement aux opinions, elles s'imposent sans discussion une fois qu'elles sont établies et déclarées comme vraiesb- Les vérités de fait se distinguent des opinions et des interprétations par leur « matière factuelle » qui ne peut pas être modifiée, contrairement aux interprétations et aux récits qu'on peut en faire (voir la réponse de Clémenceau : « Ce dont je suis sûr, c'est que les historiens futurs ne diront pas que la Belgique a envahi l'Allemagne »)c- Loin de conduire au rejet ou à la mise à l'écart des vérités de fait, la nature représentative de la pensée politique exige au contraire leur respect et leur préservation : « La liberté d'opinion est une farce si l'information des faits n'est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l'objet du débat ».3- Les effets destructeurs du mensonge politique moderneLà où le mensonge traditionnel cachait, le mensonge moderne détruit.a- Le mensonge dans les régimes totalitairesLe mensonge y est comme « un premier pas vers le meurtre » (exemple de Trotsky)En détruisant la vérité, il détruit tout espace public qui permette le partage des expériencesb- La manipulation des masses dans les démocraties modernes : l'exemple du mensonge par fabrication d'une image en direction de la population (d'un storytelling d'Etat) qui permet d'écarter les faits dérangeants en les traitant comme des opinions négligeables et de leur substituer une autre réalité justifiant notamment la poursuite de la guerre au Vietnam (« Du mensonge en politique », 1972) Conclusion : La nécessité de contre-pouvoirs (une presse indépendante, des lanceurs d'alerte : Daniel Ellsberg, Julian Assange, Chelsea Manning, Edward Snowden … ) pour révéler les manipulations des gouvernements, signaler les atteintes à l'intérêt général, et permettre un vrai débat politique
Les Rendez-vous de PHILOPOP, rediffusion de l'émission du 25 octobre 2020 ----------------------------------Qu'est- ce que le peuple ? 1- Une notion ambigüe Un sens politique (communauté de citoyens, « populus ») et un sens social (le bas-peuple, la plèbe, « plebs » ou « vulgus »)Y a-t-il une volonté du peuple ? Le peuple existe-t-il comme sujet collectif ?Deux visions opposées du peuple : Michelet (Histoire de la Révolution française, 1847) et Flaubert (Education sentimentale, 1869) ; le peuple a-t-il une existence politique ou n'est-il qu'un mythe ? 2- La plèbe est-elle un danger pour le peuple ? L'ambiguïté du mot nous contraint à réfléchir à l'articulation des deux sensLa notion de peuple a en réalité trois sens : juridique, ethnique, social (Anthropologie d'un point de vue pragmatique, 2ème partie, de Kant, 1797) . La plèbe (3ème sens) apparaît comme un danger pour le peuple (1er sens) car elle risque de devenir séditieuseAinsi, pour Platon (La République), le peuple (populus) ne peut pas exister ; il n'est que le plus grand nombre incapable de se gouverner (ignorance et irrationalité) qui devient dangereux en se rassemblant sous l'influence de démagogues; seuls les « meilleurs » (l'élite des philosophes-rois) doivent gouverner 3- Le peuple (le « populus ») ne peut se concevoir qu'à partir de la plèbe « Peuple » est un nom péjoratif au XVIIIème siècle qui, jusqu'à la Révolution française, a un sens exclusivement social ; il désigne le bas-peuple (plèbe)La critique de cette représentation péjorative par l'abbé Coyer (Dissertation sur la nature du peuple, 1755) : « Le peuple (sens social) est composé d'hommes »Rousseau (Emile, 1762) va plus loin : « C'est le peuple qui compose le genre humain ; ce qui n'est pas le peuple est si peu de chose que ce n'est pas la peine de le compter ». Seuls les gens du peuple sont capables de sentir et d'identifier ce qui est humain. Chez eux l'amour-propre n'étouffe pas la pitié, contrairement aux « gens du monde » qui sont aveuglés par « la fureur de se distinguer »Conclusion : Le peuple (politique, qui suppose l'égalité des hommes) ne peut se concevoir qu'à partir de la plèbe (le peuple social) Bibliographie :Histoire de la Révolution française 1ère partie, de Michelet, à propos de la prise de la Bastille le 14 juillet 1789Education sentimentale de Flaubert, à propos des journées de février 1848Dissertation sur la nature humaine de l'abbé CoyerEmile de RousseauLa nature du peuple, par Deborah Cohen (éditeur, Champ Vallon)Les voies du peuple, par Gérard Bras (éditions Amsterdam) Film conseillé : Un peuple et son roi,réalisé et écrit par Pierre Schoeller, sorti en 2018 (extrait donné lors de la 2ème pause) Site de l'association PHILOPOP : https://sites.google.com/site/philopoplh/
Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 12 mars 2023La retraite, pour quelle vieillesse ?Réflexion à partir de la lecture du livre de Simone de Beauvoir publié en 1970 « La vieillesse » (collection Folio)La retraite n'est pas seulement un problème économique et social. Elle met en jeu l'idée que nous avons de la vieillesse et de notre existence. Si la condition des vieillards a changé depuis 1970 (l'âge de départ à la retraite était alors de 65 ans, et le niveau des pensions était très faible), la vieillesse est toujours considérée principalement en termes de soins, de dépenses et de coût. Elle souffre d'une image négative.1- Pourquoi la vieillesse apparaît-elle surtout comme une déchéance ? Le déclin biologique auquel elle correspond suffit-il à expliquer le regard dépréciatif porté sur elle ?Si le spectre de la vieillesse a reculé depuis 1970 (il concerne avant tout ce qu'on appelle aujourd'hui le « 4ème âge »), il n'a pas pour autant disparu.La vieillesse est toujours l'objet d'une « conspiration du silence » (selon la formule de S. de Beauvoir). C'est un sujet « triste » qu'on préfère éviter.Les raisons pour lesquelles S. de Beauvoir a écrit son livre sont toujours actuelles. Ainsi dénonce-t-elle l'ostracisme qui frappe les vieillards (ils sont traités en « parias »). Et « nous poussons si loin l'ostracisme que nous allons jusqu'à le tourner contre nous-même : nous refusons de nous reconnaître dans le vieillard que nous serons » (Introduction).2- La vieillesse comme « situation humaine ». Que signifie « être vieux » ?a- La vieillesse n'est pas seulement un fait biologique, c'est aussi un fait culturel : il est impossible de penser le vieillissement sans prendre en considération la société dans laquelle il se produit.Les données objectives de la biologie et de la médecine (chapitre 1), de l'ethnologie (chapitre 2), de l'histoire (chapitre 3), de la sociologie (chapitre 4).Comme « situation humaine », la vieillesse a un double dimension : objective (à ce titre, elle est objet de savoir) et subjective (c'est une expérience vécue qui peut faire l'objet d'une description phénoménologique)b- Comprendre de quelle manière le vieillard intériorise l'image de la vieillesse que la société lui renvoie (chapitres 5 et 6) : voir ainsi la découverte de la vieillesse à partir du regard d'autrui.« La complexe vérité de la vieillesse : elle est un rapport dialectique entre mon être pour autrui, tel qu'il se définit objectivement, et la conscience que je prends de moi-même à travers lui. En moi, c'est l'autre qui est âgé, c'est à dire celui que je suis pour les autres : et cet autre, c'est moi » (p-400) (…) « Ce que nous sommes pour autrui, il nous est impossible de le vivre sur le mode du pour soi » (p-410).Ainsi, en intériorisant le regard dévalorisant des autres, le vieillard se fige et se réifie dans une perception dégradante de lui-même. 3- Pourquoi la vieillesse est-elle l'objet d'un processus de déshumanisation ? a- Une déchéance économique et sociale : « Le vieillard est celui qui ne peut plus travailler et qui est devenu une bouche inutile » (p-59). Dans le cadre d'une société qui valorise l'homme actif et réduit l'humanité au travail productif fondé sur la force de travail (c'est celle que décrit S. de Beauvoir), la retraite est vécue par les travailleurs comme un exil brutal et une rupture d'identité qui précipitent leur vieillissement, et entraînent leur déchéance (chapitre 4, voir particulièrement les pages 371 à 377)b- Les conséquences existentielles de ce processus de déshumanisation sur les vieillards : une altération de leur rapport au temps, à leur histoire, à l'existence (l'absence de tout projet, la perte des raisons d'agir, voir chapitre 6) 4- Comment résoudre le problème de la vieillesse ? Que faire pour que les hommes soient tous considérés jusqu'à la fin de leur vie comme des hommes ? (conclusion du livre)Ce problème n'est pas seulement un problème individuel, il n'est pas non plus simplement un problème sociétal (que prendrait en charge une « politique de la vieillesse »), c'est un problème social et politique qui exige une transformation profonde de la société. Lecture de quelques extraits de la conclusion de Simone de Beauvoir.
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 29 janvier 2023 La peine de mort comme « assassinat public » (Beccaria) Réfléchir sur la peine de mort à la lumière du Traité des délits et des peines (1764) de C. Beccaria :« Si je prouve que cette peine n'est ni utile ni nécessaire, j'aurai fait triompher la cause de l'humanité » (§ 28). Qui est Beccaria ?De 1791 à 1981 : une brève histoire de l'abolition de la peine de mort en FranceLa peine de mort dans le monde aujourd'huiPourquoi, malgré les progrès de l'abolition, l'abolitionnisme est-il une position fragile ? Le problème est de nature politique : l'Etat dispose-t-il d'un droit de vie et de mort qui l'autorise à un tuer un homme pour son crime ? Ou la peine de mort est-elle au contraire « un assassinat public » ? 1- Le droit pénal implique-t-il le droit de donner la mort ?a- Le criminel comme ennemi. Pourquoi le droit de vie et de mort est-il considéré comme un attribut essentiel de la souveraineté ?b- « La mort-supplice » (2ème chapitre de Surveiller et punir de Michel Foucault, 1975). L'exemple du supplice infligé à Damiens en 1787 pour crime de régicide (1er chapitre). 2- Le droit pénal n'a d'autre fonction que l'utilité commune (Beccaria)a- L'origine contractuelle du droit pénal (§ 1) : d'une « liberté rendue inutile » (état de nature) au sacrifice d'une part de sa liberté pour jouir du reste de la liberté garantie par les lois (état civil)b- Les châtiments sont nécessaires pour empêcher « l'esprit despotique » du criminel de « replonger dans l'ancien chaos les lois de la société »c- Un châtiment n'est juste que s'il est nécessaire (pour défendre l'utilité commune), sinon il est « tyrannique » (§ 2). Sa fonction est préventive (« Le but des peines n'est ni de tourmenter et d' affliger un être sensible, ni de faire qu'un crime déjà commis ne l'ait pas été ».... il est « d'empêcher le coupable de causer de nouveaux dommages et de dissuader les autres d'en commettre de semblables », § 12) 3- La peine de mort est injuste (elle ne peut être un droit) ; elle est inutile (aucune efficacité dissuasive) et elle est même nuisible (criminogène). Lecture du § 28.a- Elle n'est pas un droit :aucun homme ne peut avoir consenti à confier au souverain le droit de lui ôter la vie (le sacrifice d'une part de sa liberté ne peut comprendre celui « du plus grand de tous les biens » qu'est la vie)-« Sous le règne paisible de la légalité » (dans le cadre d'un Etat de droit), la peine de mort ne peut jamais être un droit. Un citoyen ne peut jamais être une « menace pour la sécurité de la nation ». Il ne peut être un danger que lorsque les lois s'effondrent : dans une guerre civile, on ne punit pas un criminel, on cherche à vaincre un ennemi.b- La peine de mort est inutile : elle n'a aucune efficacité dissuasiveL'histoire montre qu'elle n'a jamais empêché le crimeIl n'y a aucune proportionnalité entre la sévérité de la peine et l'efficacité dissuasive : la réclusion à perpétuité est moins sévère pour le coupable que la peine de mort, et plus dissuasive.c- « La peine de mort est nuisible par l'exemple de la cruauté qu'elle donne »En « ordonnant un assassinat public », l'Etat alimente la violence qu'il prétend empêcherLa « répulsion invincible » des hommes à la vue du bourreau, fondée sur la conviction que « leur vie n'est au pouvoir de personne ».Conclusion : La peine de mort est appliquée surtout aux hommes les plus démunis qui n'ont rien à perdre en commettant des crimes. Elle est le châtiment d'un Etat despotique dont les lois contribuent à « concentrer les avantages de la société sur un petit nombre et à accumuler d'un côté la puissance et le bonheur et de l'autre la faiblesse et la misère » (Introduction et § 28) Bibliographie :Traité des délits et des peines (1764) de Beccaria, surtout l'introduction, et les § 1, 2, 12, 28Contrat social Livre II, chapitre 5 de J. J. Rousseau (1762)Surveiller et Punir, chapitres 1 et 2, de Michel Foucault (1975)L'Abolition, Robert Badinter (2000)
Le récit de la Genèse est présenté traditionnellement comme le texte du « péché originel ». Sa lecture valide-t-elle cette interprétation ? Ce récit enseigne-t-il la vérité de la condition pécheresse de l'homme, comme l'affirment Saint-Augustin (354- 430) et Pascal (1623-1662) à sa suite, - ou n'est-il qu'un texte anthropomorphique exprimant la vision d'un homme ignorant, selon la lecture qu'en fait Spinoza (1632- 1677)?Peut-on dire qu'Adam, le premier homme, est puni par Dieu pour avoir désobéi à son commandement, et condamne le genre humain à la souffrance pour le prix de sa faute ?1- Examen du récit de la Genèse (particulièrement de ses chapitres 2 et 3)a- Les trois étapes du récit : 1- le don du jardin par Dieu et l'énoncé de son commandement ; 2- l'irruption du serpent : de la tentation à la faute ; 3- le châtiment de Dieu et l'expulsion d'Adam et Eve du jardinb- Dieu a-t-il prononcé l' interdiction de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, ou a-t-il exprimé seulement un avertissement concernant la nocivité de ce fruit ? La reformulation de l'énoncé divin par le serpent et la femme et son interprétation insistante en termes d'interdit (« Dieu a dit : (…) Vous n'y toucherez pas »)c- Une mise en cause de la crédibilité de la parole divine 2- Les difficultés auxquelles se heurte l'interprétation théologique du récit en termes de péché originela- Une faute bien étrange dont Adam ne peut prendre conscience qu'en mangeant du fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Malb- L'idée d'une corruption de la nature originelle de l'homme est incompréhensible : comment comprendre que cet être que Dieu a créé bon et tout-puissant (il le fait à son image) fasse l'expérience de sa faiblesse en cédant à la tentation ?c- Ces difficultés n'empêchent pas les théologiens et les moralistes d'affirmer le libre-arbitre de l'homme et de soutenir en même temps le dogme du péché originel 3- La critique par Spinoza des présupposés de cette conception théologique a- Le libre-arbitre est une illusion ; il n'exprime pas une véritable liberté mais traduit une impuissanceb- C'est une illusion qui fait obstacle à la connaissance de l'homme et de Dieuc- Dieu n'est pas à l'image que l'homme se fait de lui-même (en se croyant doté d'un libre-arbitre) : il n'est pas une volonté qui crée l'univers et qui s'adresse aux hommes par des commandements, et rétribue leurs actes par des récompenses ou des châtiments ; il est le Réel en sa totalité (la Nature) en tant qu'il se produit selon des lois nécessaires et produit toutes les choses qui sont en lui. Ses lois sont des « vérités éternelles » qui expriment des rapports nécessaires et non des commandements. 4- La lecture que fait Spinoza du récit de la Genèse (Traité théologico-politique, chapitre 4)a- Le récit de la Genèse exprime la vision anthropomorphique d'un ignorant qui imagine Dieu comme une volonté qui s'adresse à lui et exige de lui obéissanceb- Selon ce récit, Dieu n'interdit aucunement à Adam de manger du fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal, mais il l'avertit de sa nocivité. Il ne peut donc pas y avoir de faute d'Adam.c- Ce n'est qu'après en avoir mangé et souffert de son effet nocif, qu'Adam interprète sa souffrance comme le châtiment de Dieu Conclusion : En quoi le fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du Mal agit-il comme un poison ? Réflexion sur la différence entre la morale et la sagesse. Bibliographie : Genèse, chapitres 2 et 3Spinoza : Préfaces des 3ème et 4ème parties de l'Ethique, Traité politique, chapitre 2, § 6 ; et surtout, Traité théologico-politique, chapitre 4.
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 30 octobre 2022 « La raison du plus fort est toujours la meilleure » Chacun aura reconnu la célèbre morale du Loup et de l'agneau de Jean De la Fontaine.Pour comprendre ce qu'est la « raison du plus fort », il est utile d'examiner la manière de raisonner du loup dans la fable. Cette morale peut susciter deux lectures :Selon la première, c'est une morale ironique : la « raison du plus fort » consiste à déguiser la force en droit ; elle revient à donner une apparence de justification à ce qui n'est que le décret arbitraire du plus fort. C'est la lecture de Rousseau dans le Contrat social (1762)Selon la seconde, c'est une morale réaliste : il faut se résoudre à reconnaître que seule la force est en mesure d'instituer le droit et de faire régner la paix. La raison du plus fort est ainsi toujours la meilleure. C'est la lecture de Pascal, dans ses Pensées, parues après sa mort en 1670.L'examen de la morale du Loup et de l'agneau nous conduit ainsi à nous interroger sur la nature du droit : s'oppose-t-il à la force (Rousseau) ou se ramène-t-il au contraire à elle (Pascal) ? 1- Le droit contre la force (Rousseau, Contrat social, Livre I, chapitre 3) a- La faiblesse de la force explique que le plus fort ait besoin du droit du plus fort pour maintenir sa domination.b- C'est un « prétendu droit » reposant sur la confusion de la force et du droit, dont l'efficacité consiste à capter le consentement des opprimés à leur oppression (ils se croient « obligés » d'obéir alors qu'ils sont « contraints »)c- En dissipant cette confusion et en ramenant la force à ce qu'elle est (une « puissance physique »), les peuples ont raison de s'insurger et de chercher à renverser le rapport de forces en leur faveur (« Puisque le plus fort a toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort », Rousseau fait ici allusion à la morale du Loup et de l'agneau)d- Instituer un véritable droit et établir une autorité légitime : c'est l'objet du Contrat social. 2- Seule la force fait le droit (Pascal, Les Pensées) a- L'idéal serait que la justice (« qualité spirituelle ») soit toujours suivie et secondée par la force (« qualité physique »), mais « ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste » (Pensée 298, édition Brunschvicg)b- L'explication de cet état de fait est la suivante : « La justice est sujette à dispute » ; « La force est très reconnaissable et sans dispute »c- Ainsi, seule la force peut tenir les hommes en respect en instaurant un droit qui mette fin aux querelles.d- Comme la force ne peut d'elle-même engendrer un sentiment de justice, il faut qu'elle soit occultée comme force pour qu'elle paraisse la justice dans l'imagination du peuple à travers les lois établies (il faut qu'il oublie avec le temps la violence originelle, - « l 'usurpation »- du plus fort, Pensées 294, 304, 326). 3- Ces deux lectures s'appuient sur deux conceptions de l'homme radicalement différentes : Pour Pascal, l'émancipation des hommes et des peuples est illusoire (la « concupiscence » est au principe de leurs actions, la politique consiste à « régler un hôpital de fous ») ; pour Rousseau, elle est une exigence, certes difficile à réaliser Mais l'un et l'autre s'accordent à reconnaître le rôle de l'imagination dans la domination du plus fort Bibliographie:- Le Contrat social de J. J; Rousseau, Livre I, chapitre 3 ("Du droit du plus fort"), 1762, collection G/F- Les Pensées de Pascal, 294, 298, 299, 304, 326, édition Brunschvicg, collection G/F, parues après sa mort en 1670- Les Trois Discours sur la condition des Grands de Pascal
La première séance aura lieu le jeudi 22 septembre de 20H30 à 22H30 au lycée Claude Monet du Havre. Outre les séances qu'elle y organise régulièrement, PHILOPOP donne une émission mensuelle (les Rendez vous de Philopop) sur Ouest Track radio.1- PHILOPOP, une association ouverte à tousQuelques précisions d'ordre pratique  :Vous trouverez sur le site de PHILOPOP (https://sites.google.com/site/philopoplh/) le barème des cotisations, le calendrier adopté, le rythme des séances (en moyenne 2 fois par mois un mardi ou un jeudi de septembre à début juin hors vacances scolaire), le lieu et l'horaire  (au Lycée Claude Monet du Havre, salle audio, de 20H30 à 22H30)Les questions philosophiques  : des questions que tout homme peut être amené à se poser au cours de son existence (exemples de la vérité, de la justice, de la liberté...)L'ambition de PHILOPOP : permettre à tous ceux qui le souhaitent d'accéder à un questionnement philosophique en offrant les conditions d'un travail suivi2- La formule d'un cours progressif (suivi d'une discussion)Il ne consiste pas dans un exposé de connaissances et ne présente pas la pensée des philosophes comme une opinion savanteIl montre comment l'examen d'une notion (la vérité, la justice, la liberté, la mémoire...) conduit à formuler un ou des problèmes qui s'imposent nécessairement. La lecture des philosophes n'a pas d'autre intérêt que d'éclairer la réflexion, et de l'aider à aborder ces problèmes.3- Le programme de la saison 2022-2023Les séances sont accompagnées d'un plan et enregistrées. L'enregistrement est accessible aux adhérentsLe thème  : Le châtimentL'oeuvre  : L'Evolution créatrice de Henri Bergson, collection Quadrige aux P.U.FL'émission des Rendez vous de Philopop de ce dimanche 18 septembre (reprise le dimanche 25 septembre) n'a d'autre but que de vous expliquer la démarche de l'association (Philopop, association populaire de philosophie du Havre, créée en 2007) et de vous présenter brièvement le programme de la saison 2022-2023Les 3 premières séances au lycée Claude Monet: jeudi 22 septembre, jeudi 6 octobre, mardi 18 octobre Site internet de PHILOPOP: https://sites.google.com/site/philopoplh/
Réflexion à partir de deux textes de Freud consacrés à la question de la guerre: Propos d'actualité sur la guerre et sur la mort (1915), collection G/F, et Pourquoi la guerre  ?, correspondance Einstein/Freud (1932), collection Rivages poche. La guerre d'Ukraine nous a déjà conduit à réfléchir sur la guerre, à partir de l'oeuvre de Clausewitz, « De la guerre», mais dans une toute autre perspective.La 1ere guerre mondiale a engendré un profond désarroi : jamais les hommes des nations dites «civilisées», ne pouvaient imaginer au début du XXème siècle qu'ils connaîtraient un tel déchaînement de violence. La cause de ce désarroi, ce sont les «désillusions» concernant le processus de civilisation que Freud se propose de «traiter»Pourquoi a-t-on eu besoin de croire que la civilisation élève progressivement à la moralité ? En quoi est-ce là une «illusion» que la 1ère guerre mondiale vient «fracasser»?1- Pourquoi l'idée d'un progrès moral de la civilisation est-elle illusoire ? a- L'exposé des idéaux de l'homme «civilisé»: le processus de civilisation entraînerait un progrès de la moralité (à tous les niveaux, individus, peuples, Etats), qui rend inconcevable une guerre comme la 1ere guerre mondiale (c'est à dire une guerre qui «interrompt le développement des relations morales entre les peuples et les Etats »)b- Comment expliquer que cette guerre ait pu engendrer un tel déchaînement de violence?La guerre pervertit l'Etat. Alors qu'il est censé fonder son existence sur des règles de justice qu'il impose aux hommes placés sous son autorité, il s'en affranchit totalement en temps de guerre («si l'Etat interdit à l'individu l'usage de l'injustice, ce n'est pas parce qu'il veut l'éliminer, mais parce que, au même titre que le sel et le tabac, il veut la monopoliser»). Le cynisme de l'Etat entraîne alors « un relâchement de toutes les relations morales» qui révèle leur grande fragilité.c- Comment l'homme devient-il capable de moralité ?L'homme n'est ni bon ni mauvais en soi (sont «mauvaises» les pulsions incompatibles «avec les exigences de la communauté humaine»); l'éducation peut transformer de manière assez limitée ses pulsions mauvaises en pulsions sociales mais ne peut jamais complètement les éradiquer; ainsi, « il y a bien plus d'hypocrites civilisés que d'hommes vraiment civilisés».Notre désillusion concernant la valeur de la civilisation est-elle vraiment justifiée? «En réalité, les hommes ne sont pas tombés aussi bas que nous le craignions, pour la bonne raison qu'ils ne s'étaient pas élevés aussi haut que nous nous l'étions figuré»2- Si la guerre s'explique par des pulsions destructrices, est-elle pour autant une fatalité? (Pourquoi la guerre? Correspondance de Freud avec Einstein, 1932)a- La 1ere partie de la réponse de Freud : une reprise de la réflexion du philosophe Kant sur la guerre et la paix : 1- le droit comme «violence de la communauté»; 2- l'histoire achemine les Etats paradoxalement par le moyen de la guerre, vers la paix perpétuelle; 3- la solution d'une Société des Nations qui aurait le pouvoir d'imposer ses arbitrages aux Etats et de mettre ainsi un terme à la guerreb- La 2ème partie de la réponse est constituée par l'apport de la psychanalyse à la réflexion :1- la paix est irréalisable parce que la guerre est l'expression de la vie pulsionnelle des hommes (elle met en œuvre la pulsion de destruction à l'échelle collective, pulsion qui est dérivée de la pulsion de mort );2- le désir de paix qui s'oppose à cette pulsion, est soutenu par la pulsion de vie (Eros) qui s'exprime par la production de «liens de sentiment » (« Si la propension à la guerre est un produit de la pulsion destructrice, il y a donc lieu de faire appel à l'adversaire de ce penchant, à l'Eros. Tout ce qui engendre, parmi les hommes, des liens de sentiment doit réagir contre la guerre»).
Réflexion sur la mémoire collective, principalement à partir de la Conférence d'Ernest Renan, Qu'est-ce qu'une nation ? (1882), et du livre de l'historien Henry Rousso, Le syndrome de Vichy, paru en 1987.Pour mettre fin à une guerre civile, faut-il prescrire l'oubli des violences et des crimes pour réconcilier les citoyens ennemis et reconstruire l'unité de la Cité ? Ou faut-il au contraire en perpétuer le souvenir afin de prévenir leur répétition ? Devoir d'oubli ou devoir de mémoire ?La 1ère solution fut longtemps privilégiée : 3 exemples.Exemple du serment que devaient prononcer les citoyens d'Athènes de ne plus rappeler les violences de la guerre civile qui eut lieu en 404 av J.C. ; exemple de l'édit de tolérance de 1598 exigeant que la mémoire des choses passées (les guerres civiles entre catholiques et protestants) « demeure éteinte et assoupie comme chose non advenue « ; exemple plus récent des lois d'amnistie de 1951 et 1953 concernant les faits de collaboration sous Vichy Pourquoi l'oubli nous paraît-il aujourd'hui inacceptable ? Pourquoi la mémoire est-elle devenue une obligation ? 1- Pour préserver l'unité et l'identité d'une nation, n'est-il pas nécessaire d'exclure de sa mémoire commune les pages noires de son histoire ? « L'oubli, -je dirai même l'erreur historique- sont un facteur essentiel de la création d'une nation » (Ernest Renan dans Qu'est-ce qu'une nation ? 1882) 2- L'impossible effacement du souvenir d'une guerre civile comme celle qui eut lieu sous Vichy entre 1940 et 1944 (Henry Rousso, Le syndrome de Vichy, 1987)En quoi la période de Vichy fut-elle « une tragédie d'une exceptionnelle gravité » ?« Le syndrome de Vichy est l'ensemble hétérogène des symptômes, des manifestations (…) qui révèlent l'existence du traumatisme engendré par l'Occupation » (particulièrement celui qui est lié aux divisions opposant les Français).Le projet de l'historien du syndrome de Vichy : étudier les manifestations de la mémoire de Vichy et ses transformations au cours de son devenir depuis 1944, à la manière dont Freud aborde les symptômes d'une névrose (un bref rappel de la leçon de Freud). Le traumatisme ne peut être effacé, mais survit de manière souterraine à travers son refoulement.3- Les 4 phases de l'histoire de la mémoire de Vichy depuis 1944 :- de 1944 à 1954, de l'épuration jusqu'aux lois d' amnistie : le « deuil inachevé »de 1954 à 1971, le « refoulement » du traumatisme : le silence officiel sur le régime de Vichy, le « mythe résistancialiste » (l'assimilation de la « Résistance » à l'ensemble de la nation)de 1971 à 1974, le « miroir brisé ». Le « retour du refoulé » (la réémergence dans le débat public du passé de Vichy sur la collaboration et la responsabilité du régime dans la déportation des Juifs dans les camps de la mort)depuis 1974, le réveil de la mémoire juive, la réouverture de procédures judiciaires contre d'anciens nazis et d'anciens collaborateurs ayant échappé pendant des décennies à toute justice, la requalification de leurs crimes en « crimes contre l'humanité » (dont l'imprescriptibilité est reconnue depuis la loi de décembre 1964).4- La mémoire collective implique un nouveau rapport au passé- elle est d'abord une exigence de justice à l'égard des victimes des crimes du passé (reconnaissance des torts et réparation)- elle ne repose plus sur une adhésion irréfléchie à un passé mythifié et une forme d'allégeance mais aborde le passé (ses épisodes conflictuels) comme « un problème à résoudre ». Ce n'est possible que dans une démocratie où les citoyens débattent et construisent l'identité de leur nation. Bibliographie :Qu'est-ce qu'une nation ? Ernest Renan, 1882Le syndrome de Vichy, Henry Rousso, 1987Face au passé, Henry Rousso
Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 1er mai 2022 « L'enfer, c'est les Autres » « Alors, c'est ça l'enfer (…) Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril... Ah ! Quelle plaisanterie. Pas besoin de gril : l'enfer, c'est les Autres »Ce sont les paroles de Garcin, l'un des trois personnages de Huis-Clos, à la fin de la pièce que J.P. Sartre produit la 1ère fois en 1944.Que veut dire la formule devenue célèbre : « L'enfer, c'est les autres » ?Sartre conclut-il que nos rapports avec les autres sont toujours infernaux ? Qu'en est-il de notre relation avec autrui ? Pour en éclairer le sens, lisons ou relisons Huis Clos à la lumière des analyses de Sartre dans la 3ème partie de l'Etre et le Néant (1943) dont le titre est : « Le pour-autrui ». 1- Le dispositif qui permet de faire du salon de Huis-Clos un enfer : les personnages sont éternellement livrés au regard des autres 2- L' analyse des relations avec autrui dans la 3ème partie de l'Etre et le Néant a- Il n'y a d'expérience d'autrui que si je l'appréhende comme sujet (conscience). Si ma perception ne me révèle que des objets, comment puis-je savoir avec certitude qu'autrui est une autre conscience (un autre sujet, un autre moi qui n'est pas moi) ? b- L'expérience d'autrui comme épreuve d'une décentration de ma perception du monde et d'un regard qui m'objectiveL'exemple du jardin public (le Square St Roch au Havre?) : « Ainsi tout à coup un objet est apparu qui m'a volé le monde »L'exemple du trou de serrure (l'expérience de la honte) : c'est en m'éprouvant comme objet du regard d'autrui que je fais au coeur de ma conscience l'expérience de sa présence comme sujetc- Le regard d'autrui me révèle que je ne suis pas une pure conscience et que j'ai aussi un dehors qui peut être jugé et qualifié. Je découvre que je suis désormais quelqu'un, et que ce que je suis m'échappe, puisque ce que je suis dépend de la perception qu'autrui a de moi : « Ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre ». 3- L'épreuve du regard d'autrui comme enfer (retour à Huis Clos) a- L'absence de miroir dans Huis Clos fait de chacun des personnages la proie du regard des autres. Le regard d'autrui impose ainsi à la conscience un dehors qu'elle ne contrôle pas et qu'il peut métamorphoser à volonté (voir la scène où, faute de retrouver sa glace de poche, Estelle s'aliène au regard d'Inès) b- Si l'enfer ne peut avoir d'autre lieu que les autres  (ils nous enferment dans leurs jugements et nous assignent une identité), cela ne signifie pas que cet enfermement est définitif. Il ne l'est que lorsqu'on est mort ou que nous nous comportons dans l'existence comme des morts-vivants pour qui les jugements des autres sur eux sont définitifs. Etre mort (comme les personnages de Huis Clos), c'est être dans l'impossibilité d'agir sur notre existence et de donner un nouveau sens à notre passé ; c'est être condamné au jugement que les autres (les vivants) porteront sur nous: « Pour la vie morte, les jeux sont faits (…) Etre mort, c'est être en proie aux vivants » (L'Etre et le Néant, 4ème partie, chapitre 2, E : « Ma mort », page 712) 4- C'est le conflit qui donne vie aux relations avec autrui a- Il y a conflit en ce que chaque conscience vise à surmonter sa dépendance originelle à l'autre en maîtrisant sa relation avec luib- L'exemple de l'amour : il est la tentative de posséder la liberté de l'autre pour le contraindre à me reconnaître comme sa raison d'être ; cette tentative doit demeurer impossible pour que l'amour ait un avenirc- Si le conflit est ce qui fait la vie de la relation avec autrui, l'enfer commence avec le tiers. La relation amoureuse qui s'ébauche entre Garcin et Estelle meurt très vite d'être objectivée sous le regard d'Inès (voir Huis-Clos) Bibliographie :-Huis Clos de Jean Paul Sartre, collection Folio-L'Etre et le Néant, 3ème partie (« Le pour-autrui »), collection Tel/ Gallimard- Huis Clos mis en scène par Robert Hossein sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=ila9Vjpp3yE
Les Rendez vous de PHILOPOP, émission du 13 mars 2022 La guerre est-elle vraiment la continuation de la politique par d'autres moyens ?Réflexion à partir de la lecture du traité de Clausewitz (1780- 1831),« De la guerre » Le 24 février 2022, Vladimir Poutine décide d'envahir l'Ukraine et menace de faire usage de l'arme nucléaire si on l'empêche d'arriver à ses fins. Si, comme l'explique Clausewitz, la guerre est un moyen pour la politique d'atteindre ses fins quand tous les autres ont échoué, est-elle encore un moyen de continuer la politique si, livrée à sa propre dynamique qui la porte vers une violence illimitée, elle débouche sur l'utilisation de l'arme nucléaire ? La célèbre définition de Clausewitz (« la guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens ») est-elle toujours valable ? Pour répondre à ce problème, nous suivrons d'abord l'analyse de Clausewitz. Clausewitz ne s'interroge pas sur la signification anthropologique de la guerre (résulte-t-elle d'un penchant humain?), il n'en discute pas la légitimité (y a-t-il des guerres justes?), il ne porte pas sur elle un jugement moral. La guerre est à ses yeux un fait dont il faut comprendre la nature et découvrir les lois. Cette étude exige qu'on cesse de la considérer simplement comme un phénomène irrationnel, le déchaînement aveugle d'une violence collective. 1- La guerre apparaît ordinairement comme un phénomène irrationnel pour trois raisons : a- Elle témoigne de l'existence d'un penchant humain à l'agression et à la destruction (Freud : Propos d'actualité sur la guerre et la mort (1915), Pourquoi la guerre ? (correspondance avec Einstein, 1932)b- En tant qu'elle est l'expression arbitraire du droit du plus fort, elle est injustifiable juridiquement (violation du droit)c- En tant qu'elle est dans son principe la négation du genre humain, elle est injustifiable moralement (Kant, conclusion de la Doctrine du droit) 2- La volonté de faire la guerre n'est pas simplement l'expression d'un penchant naturel à l'agression a-Elle a une rationalité : c'est une force organisée, une violence contrôlée et dirigéeb- Faire la guerre, ce n'est pas simplement tuer et se faire tuer, c'est être prêt à mourir pour tuer un ennemi (Alain : « Il faut des maximes qui tuent », § 90 de Mars ou la guerre jugée)c- La logique interactive de la guerre (elle est comme un « duel ») empêche qu'on la réduise à l'expression d'une agressivité naturelle (De la guerre I, 1 et VI, 7, Clausewitz) 3- La guerre tend par elle-même à « monter aux extrêmes » (De la guerre, I, 2 et 3,Clausewitz)a- Le « concept pur » de la guerre : la dynamique constitutive de la guerre comme montée aux extrêmesb- Du concept pur de la guerre à la réalité des guerres : les raisons pour lesquelles elles ne montent pas aux extrêmes 4- « La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens » (VIII, 6) Conclusion : la guerre ne rompt pas avec la politique et par bien des aspects elle lui ressemble, mais en même temps, elle risque de lui échapper car elle est une violence potentiellement illimitée. Qu'en est-il alors du risque que constitue l'usage de l'arme nucléaire ? La guerre est-elle vraiment la continuation de la politique par d'autres moyens ? Bibliographie : De la guerre, surtout les Livres I et VIII, ClausewitzPenser la guerre, Raymond AronEn rapport avec le thème de la guerre et de la paix, voir le podcast de l'émission des Rendez-vous de Philopop : « La mondialisation est-elle un doux commerce ? »
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 20 février 2022Angoissante liberté Réflexion à partir de la lecture de l'Etre et le Néant de J.P. Sartre (1943). En quel sens les hommes sont-ils libres ? Comment leur liberté se révèle-t-elle à eux ? Pourquoi ignorent-ils le plus souvent ce qu'elle est et tentent-ils de la fuir? 1- La liberté est « l'être de la réalité humaine »a- La conscience fait de l'homme un être libre. Elle n'a pas l'être d'une chose, elle est un mouvement qui la porte au dehors d'elle même en ce qu'elle est toujours « conscience de quelque chose ». Elle est ainsi « l'être qui est ce qu'il n'est pas et n'est pas ce qu'il est » (conscience d'un arbre, elle est en même temps cet arbre qu'elle n'est pas et elle n'est pas cet arbre dont elle se distingue).b- En tant que j'ai conscience de moi, je suis en même temps ce moi dont j'ai conscience et je ne le suis pas. La liberté est cette impossibilité pour l'homme de coïncider avec son être, qui fait qu'il a toujours à être2- C'est dans l'angoisse que les hommes découvrent le fait irrémédiable de leur libertéa- L'exemple du vertige : la différence entre la peur et l'angoisseb- « Je m'angoisse parce que mes conduites ne sont que possibles ». La découverte d'une liberté sans attaches : il ne tient qu'à moi de m'éloigner du précipice ou de m'en approcher : rien ne détermine mon choix.c- Nous voudrions pouvoir échapper à notre liberté, l'angoisse nous révèle que c'est impossible : « Nous sommes condamnés à être libres ». Nous n'avons pas le choix d'être libres ou non, nous n'avons pas le choix de ne pas choisir.3- La « mauvaise foi » comme tentative d'échapper à sa liberté et d'être comme une chosea- Elles est ce mensonge à soi-même qui est rendu possible par le mode d'être de la réalité humaine (sa liberté)b- Parmi les exemples donnés par Sartre, celui de l'homosexuel qui, honteux d'être homosexuel dans une société homophobe, dénie son homosexualité (il prétend n'être aucunement ce qu'il est et se définit comme ne l'étant pas)c- Dans l'ordre de l'action, la mauvaise foi se traduit par « l'esprit de sérieux » (exemple de l'antisémite dans les Réflexions sur la question juive, 1946)4- La liberté en situationa- Ne pas confondre la liberté ontologique de l'homme qui constitue sa réalité et l'usage qu'il fait de sa liberté « en situation ». La situation qui s'impose à lui ne détermine pas le sens qu'il choisit de lui donner (exemple du rocher)b- Loin que le passé détermine le présent, c'est le futur (qu'on projette de réaliser) qui décide du sens du passé (l'exemple de la crise mystique de l'âge de 15 ans et celui de la continuation ou de la rupture du lien conjugal)5-Il y a des situations qui révèlent au plus haut point notre liberté (La République du silence, dans Situations III) a- « Jamais nous n'avons été plus libres que sous l'occupation allemande (…) A cause de tout cela, nous étions libres »b- « Il n'y a pas de situation inhumaine ». C'est la conscience qui décide seule de son sens : il est possible que je résiste à la torture pour ne pas trahir mes camarades (« Si on me torture, tiendrai-je le coup? »)Bibliographie :- L'Etre et le Néant de J.P. Sartre (1943) chez Tel/ Gallimard, plus particulièrement la 1ère partie chapitre 1 (« l'origine du néant ») et chapitre 2 (« la mauvaise foi »), ainsi que le début de la 4ème partie (« Etre et faire : la liberté »)- Les Réflexions sur la question juive (le portrait de l'antisémite) 1946, collection Essais en Folio- https://www.youtube.com/watch?v=Qc0WvffrlIU, archive France Culture « la liberté selon JP Sartre », texte de Sartre lu par lui-même, paru la 1ère fois en 1944 dans Les Lettres françaises et publié ensuite sous le titre « La République du silence » dans Situations III chez Gallimard
Les Rendez-vous de PHILOPOP- émission du 23 janvier 2022L'état d'urgence : une menace pour la sûreté des citoyens ?Réflexion à partir de la lecture de l'Esprit des Lois de Montesquieu (1748), Etat d'urgence contre le terrorisme (novembre 2015), état d'urgence sanitaire (depuis mars 2020) … L'état d'urgence est en principe un état temporaire qui, pour faire face à un péril imminent, confère des compétences exceptionnelles au pouvoir exécutif et aux autorités administratives, et conduit exceptionnellement à restreindre des libertés. Mais l'inscription au droit commun des mesures d'exception d'abord présentées comme provisoires et la pérennisation de l'état d'urgence ne conduisent-elles pas l'Etat à suivre inexorablement la pente de ce que Montesquieu appelait le « despotisme » ? Jusqu'où l'Etat peut-il aller sans se transformer en instrument d'oppression ? Pour Montesquieu, le mal à combattre est toujours l'arbitraire, sous quelque forme que ce soit, car il est source de violence et de crainte. Aussi définit-il la liberté politique comme son antidote : elle est « cette tranquillité d'esprit qui provient de l'opinion que chacun a de sa sûreté » (XI, 6). Comment l'établir et la maintenir ? Comment instituer l'Etat si l'on veut qu'il protège la liberté politique et ne puisse tomber dans « l'abus de pouvoir » ? Nous allons suivre la démarche de Montesquieu dans les Livres XI et XII de L'Esprit des Lois. 1- L'institution de l'Etat est nécessaire pour établir la liberté et mettre un terme à l'arbitraire et à la violence auxquels les hommes seraient livrés s'il ne réglait pas leur coexistence par des lois (Montesquieu ne distingue pas Etat et gouvernement). Au comble de l'arbitraire, il y a le gouvernement despotique où « un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et par ses caprices » (II, 1). A ce gouvernement s'opposent les « gouvernements modérés » qui sont réglés par des lois (nous les appelons aujourd'hui Etats de droit) 2- Il faut que dans ces Etats une constitution distribue les pouvoirs dans des mains distinctes pour assurer vraiment les conditions de la liberté politique.a- Le despotisme ne désigne pas seulement le gouvernement despotique, il est aussi une menace qui pèse sur les gouvernements modérés quand il y a « abus de pouvoir ». Pour éviter ce mal, la solution est de le diviser et « d'arrêter le pouvoir par le pouvoir » par une constitution qui distribue les pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) dans des organes distinctsb- L'exemple de la Constitution d'Angleterre permet d'étudier les conditions de la liberté politique: 1- on y trouve un équilibre des pouvoirs législatif et exécutif par leur liaison et leur enchaînement (ils ne sont pas séparés, sinon ils ne pourraient pas se faire contrepoids) ; 2- on y trouve un partage du pouvoir législatif entre des forces sociales et politiques aux intérêts opposés (les nobles et le peuple) ; 3- le seul pouvoir qui est séparé des deux autres, est le pouvoir judiciaire (indépendance de la justice). 3- Il faut encore que cesse l'arbitraire qui affecte les lois pénales (« les lois criminelles ») : « C'est de la bonté des lois criminelles que dépend principalement la liberté du citoyen » (XII, 2). Pour cela :a- Il faut une procédure rigoureuse d'instruction qui protège l'innocence des citoyens (« Quand l'innocence des citoyens n'est plus assurée, la liberté ne l'est pas non plus »)b- Le criminel ne doit pas être confondu avec un ennemi : il est d'abord un citoyen dont il faut protéger les droits jusqu'au moment où cette protection cesse, une fois sa culpabilité établie et sa peine prononcée. Celle-ci ne doit pas être confondue avec une « rétention de sûreté » qui consiste à interner préventivement un individu considéré comme « suspect » ou « dangereux » (voir l'évolution sécuritaire du droit pénal contemporain)c- Il faut une qualification précise des crimes et une classification qui assure une juste proportion entre les crimes et les peines (la criminalisation des opinions et des actions  « qui choquent la religion », les blasphèmes, entraîne une violence sans limite et « détruit la liberté des citoyens ») et encore un usage modéré des peines qui tienne compte des limites naturelles de la sensibilité humaine  (la surenchère répressive ne fait pas reculer la criminalité). Conclusion : La pérennisation de l'état d'urgence risque de transformer l'Etat de droit en Etat sécuritaire qui restreint et menace la liberté des citoyens. Sans des lois qui préservent les citoyens aussi bien de l'arbitraire des autres que de celui de l'Etat, la liberté ne peut être protégée. Elle est inséparable de la sûreté. Bibliographie :De l' Esprit des Lois de Montesquieu, surtout les livres XI et XII (1748)Montesquieu, les lois et les mœurs, par Didier Carsin, collection « Philosophie en cours » chez Démopolis (2017)Libertés et sûreté dans un monde dangereux par Mireille Delmas-Marty au Seuil (2010)Penser l'ennemi, affronter l'exception, par J.C. Monod, édition La Découverte/poche (2016)La Démocratie en état d'urgence par Stéphanie Hennette-Vauchez au Seuil (2022)Pauses musicales :J.S. BACH, CONCERTO NO.5 IN F-MINOR FOR HARPSICHORD AND STRINGS (BWV 1056) - LARGO, MARIA JOÃO PIRESFauré: Pavane / Rattle · Berliner PhilharmonikerJohann Sebastian BACH: Adagio, BWV 974
Les Rendez-vous de PHILOPOP, émission du 19 décembre 2021 Que signifie : «être français»? L'identité nationale est-elle essentiellement une affaire d'origine? La nation est-elle une «mère»? Notre réflexion s'appuiera sur la lecture de la conférence d'Ernest Renan, prononcée à la Sorbonne en 1882, Qu'est-ce qu'une nation? Cette conférence fait souvent référence. 1- Le contexte historique: l'annexion à l'Allemagne de l'Alsace et de la Moselle en 1871 La discussion entre Renan et l'historien allemand David StraussSi l'identité nationale est une affaire d'origine, D. Strauss a raison: l'Alsace et la Moselle sont allemandes2- La méthode de la conférence: examiner les différents critères qui sont proposés de la nation afin d'établir celui qui est légitime - La nation n'est ni une race, ni une ethnie, ni une langue, ni une cultureDéfinir l'identité nationale en termes d'origine culturelle, c'est enfermer les hommes dans une identité particulière figée et nier leur dimension universelle : « N'abandonnons pas ce principe fondamental, que l'homme est un être raisonnable et moral, avant d'être parqué dans telle ou telle langue, avant d'être membre de telle ou telle race, un adhérent de telle ou telle culture »La nation n'est rien sans la volonté des hommes. Sa définition légitime : «La nation est un principe spirituel (…) L'existence d'une nation est un plébiscite de tous les jours». 3 – La nation «est un plébiscite de tous les jours» fondé sur une mémoire communeElle n'est pas une pure construction de la volonté : les hommes ne peuvent vouloir continuer de vivre en nation sans la mémoire d'un passé communIl faut distinguer la question des origines de la nation de celle de son principe (qui est pour la 1ère fois affirmé par la Révolution française de 1789)La mémoire sur laquelle est fondée la nation, est une mémoire affective, nécessairement sélective et oublieuse, qui permet de préserver son existence4- Examen critique de la thèse de Renan: si la nation a besoin d'être portée par une mémoire commune, l'histoire est-elle pour elle une menace, en tant que discipline critique? Les nations sont des constructions historiques dont l'unification s'est faite le plus souvent au prix de conflits violents (par exemple, la croisade des Albigeois aux XII et XIII èmes siècles, les guerres de religion au XVI ème siècle en France)Pour préserver leur existence, faut-il bannir les études historiques qui impliquent un regard critique à l'égard de la mémoire des hommes? L'adhésion à la nation exige-t- elle une forme d'idéalisation du passé qui repose sur l'oubli de ses pages noires? Un exemple d'occultation du passé : le «mythe résistancialiste » selon lequel la grande majorité des Français avaient combattu l'occupant nazi pendant la seconde guerre mondiale (Henry Rousso, dans le Syndrome de Vichy) Une nation qui n'assume pas son passé a-t-elle un avenir? Bibliographie : Qu'est-ce qu'une nation ?, par Ernest Renan, collection Champs/FlammarionLe syndrome de Vichy, par Henry Rousso, Editions SeuilVichy, un passé qui ne passe pas, par Henry Rousso et Eric Conan, Collection Folio Cette émission a été donnée sous un autre titre (La nation est-elle une «mère»?) le 28 juin 2020 sur Radio Ouest track.
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