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Questions d'environnement

Questions d'environnement
Author: RFI
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La Terre est en surchauffe, l’ensemble du vivant chaque jour plus menacé et la science très claire : les activités humaines sont responsables de cette situation. Le temps compte pour agir afin de préserver nos conditions de vie sur la planète. Quels sont les bouleversements en cours ? Comment les décrypter ? Et quelles sont les solutions pour enrayer cette dégradation, pour adapter nos modes de vie et nos infrastructures au changement du climat, pour bâtir un avenir plus durable pour tous ? À tour de rôle, les spécialistes environnement de la rédaction de RFI ouvrent la fenêtre sur notre monde en pleine mutation.
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Deux milliards de personnes dans le monde consomment des insectes pour se nourrir. Mais en Occident, l'élevage de vers ou de sauterelles se heurte aux habitudes culturelles et à un impact écologique finalement plus élevé. Et s’ils étaient l’avenir de nos assiettes ? Selon la FAO, l’agence de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture, dans un rapport publié en 2013, les insectes représentent l’une des solutions à la faim dans le monde, une solution de surcroit écologique : puisque manger de la viande a un coût énorme en termes d’émissions de gaz à effet de serre, et puisqu’on a besoin de protéines, mangeons des insectes. Une proposition qui a pu surprendre en Occident, alors que deux milliards de personnes dans le monde mangent des insectes, en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud pour l'essentiel. « Il y a des raisons culturelles majeures, estime Corentin Biteau, qui préside, en France, l’Observatoire national d’élevage d’insectes. Souvent, ce sont des insectes qui sont récoltés dans la nature directement, comme moyen de subsistance, pour répondre à un besoin de calories. Beaucoup de ces peuples mangent d’ailleurs de moins en moins d’insectes. » Autant de protéines que dans un steak Environ 2 000 espèces d’insectes sont consommées dans le monde – des fourmis, des chenilles, des sauterelles ou encore des abeilles. Il y a à peu près autant de protéines dans 100 grammes de criquets que dans 100 grammes de bœuf ou de poulet, et c’est moins gras. Sur le papier, les insectes n’ont que des avantages, mais en Occident, même si on peut ingérer des insectes sans le savoir (comme ce papillon passager clandestin du paquet de riz acheté au supermarché), et à part si on est candidat au jeu télévisé de survie Koh-Lanta, l’entomophagie reste ultra-marginale, voire taboue. « La raison principale, c’est le dégoût, le manque de familiarité avec les insectes. Cela prend énormément de temps avant de s’habituer à un nouveau type de nourriture. D’ailleurs, la plupart des entreprises du secteur de l’élevage d’insectes ont quitté le marché de l’alimentation humaine », souligne Corentin Biteau. En France, 5 % des insectes d’élevage sont consommés par les humains, essentiellement sous forme de snacks salés, de chips. Les 95 % restants servent à l’alimentation animale, pour les animaux d’élevage et les animaux domestiques. Feraient-ils moins la fine bouche ? On ne leur demande pas leur avis. Nourrir des bœufs avec des insectes semble une solution idéale ; on arrêterait de donner du soja au bétail, alors que le soja est responsable de la déforestation. Quant à Minou, pourquoi ne mangerait-il pas des croquettes aux vers plutôt qu’au poulet ? Mais c’est un marché de niche, et ces croquettes aux insectes sont beaucoup plus chères et surtout beaucoup moins écologiques que les croquettes normales fabriquées avec les résidus - les déchets de viande récupérés dans les abattoirs. Les croquettes aux insectes ont ainsi un bilan carbone plus élevé et émettent jusqu'à dix fois plus de gaz à effet de serre que les croquettes classiques. À lire aussiFrance: les producteurs de farines d'insectes ont du plomb dans l'aile Le CO2 des insectes Dès lors qu’il s’agit d’élever des insectes pour les manger, le bilan environnemental de l’entomophagie n’est pas terrible. « Les insectes ont besoin d'une température de plus de 25 ºC, ce qui coûte évidemment beaucoup d’énergie. Pour produire l’alimentation des insectes, l’impact environnemental est plus élevé. Si on utilise des céréales qu’on fait pousser et qu’on donne à des insectes qui serviront à nourrir des animaux d’élevage, il y a énormément de pertes. La plupart des études indiquent ainsi que les insectes émettent plus de gaz à effet de serre que le soja ou la farine de poisson », résume Corentin Biteau. Pas très écologique, l’élevage d’insectes pour l’alimentation n’est pas non plus très rentable d’un point de vue économique. Malgré de grandes ambitions et un certain nombre de subventions publiques, l’élevage d’insectes n’a pas décollé. Pire, plusieurs entreprises rencontrent des difficultés, à l’image de Yinscet, une société contrainte de licencier 90 % de son personnel. Sauf à ne plus vraiment avoir le choix, les insectes ne sont pas près d’arriver dans toutes les assiettes. À lire aussiL'Afrique et la France partagent leurs savoir-faire sur les fermes d'insectes
Le changement climatique et les activités humaines menacent la mer d'Aral ou la mer Caspienne en Asie centrale. À l'inverse, en Afrique, le lac Tchad retrouve son âge d'or, après avoir disparu à 90 %. On nage en plein paradoxe. Alors que le niveau des mers et des océans est en train de monter, à cause de la fonte de la calotte glaciaire et à cause de la hausse des températures qui dilate l'eau, les mers intérieures, elles, ont tendance à reculer, voire disparaitre. La mer d'Aral, célèbre pour ses bateaux rouillés ensablés ; la mer Morte, qui porte de mieux en mieux son nom, parce qu'Israël détourne 95 % de l'eau du Jourdain qui l'alimente, selon Amnesty International ; la mer Caspienne, la plus grande mer intérieure au monde, mais jusqu'à quand ? Par endroit, elle s'est retirée de 50 kilomètres, et peut perdre 30 centimètres de profondeur en une année. Qu’est-ce qu'une mer intérieure ? Ce n’est pas une mer ! « On appelle mer toute étendue d’eau qui est reliée à l’océan global. La mer Méditerranée est reliée à l’océan Atlantique via le Détroit de Gibraltar, précise l'hydrologue Pierre Chevallier, professeur émérite à l'IRD, l'Institut pour la recherche et le développement. Une mer intérieure est une étendue d’eau qui se trouve dans une région continentale et qui n’a pas de sortie. Autrement dit, c’est un lac en fait. » Des lacs géants appelés mers parce que l'eau y est souvent salée, en raison de la géologie. À lire aussiLa mer Morte, point le plus bas de la planète, se meurt Stérilisation de la mer d'Aral Le niveau d'une mer intérieure est un équilibre entre les apports en eau et les prélèvements d'eau. Et à cet égard, plusieurs phénomènes sont à l'œuvre pour expliquer le recul des mers intérieures. Il y a d'abord les activités humaines. C'est clairement ce qui s'est passé pour la mer d'Aral. On a pompé l'eau des rivières qui l'alimentent pour la culture du coton – pensez-y, pensez à la mer d'Aral chaque fois que vous achetez un tee-shirt jetable. Il y a bien sûr aussi le changement climatique, qui perturbe le cycle des pluies, en volume (il pleut moins dans ces régions), mais aussi en termes de distribution au cours de l'année. « Si la précipitation est plus forte au printemps, elle va immédiatement être soumise à des températures de printemps et d’été qui sont plus importantes, et donc une partie significative de la précipitation va être rapidement reprise par l’évaporation. C’est l’eau qui s’évapore et le sel qui reste. Ce qui, dans le cas de la mer d’Aral, a conduit à une sorte de stérilisation : l’eau est devenue tellement salée que la vie n’en était plus possible », décrit Pierre Chevallier. Le réchauffement climatique agit aussi en amont, avec une baisse de la cryosphère : moins de glaces et de neiges en montagne, c'est moins d'eau dans les rivières qui alimentent les mers intérieures. Le lac Tchad va mieux À l'inverse, le lac Tchad, lui, se porte bien. Il se porte mieux alors qu’il avait presque 90 % de sa surface dans la deuxième moitié du XXe siècle, en raison de la sécheresse – le lac Tchad, comme la plupart des grands lacs africains, dépend surtout des aléas climatiques, de la pluviométrie. Aujourd'hui, dans la région, le changement climatique apporte beaucoup plus de pluies. « Les eaux de pluie sont déposées dans le lac Tchad par l’intermédiaire de deux fleuves. À partir des années 2010, la pluviométrie dans le Sahel est bonne. Les résultats des recherches qui ne sont pas encore publiés indiquent qu’en 2024 le lac Tchad a atteint environ 24 000 km2 », révèle Zakinet Dangbet, enseignant chercheur à l'université de N'Djamena. Le lac Tchad a quasiment retrouvé son niveau des années 1960, alors qu'il était tombé à 2 000 km2 au plus fort de la crise. Le changement climatique est parfois paradoxal.
Le géant américain de l'informatique arrête les mises à jour de sécurité de son système d'exploitation, avec 400 millions d'ordinateurs concernés et risquant de partir à la décharge ; un scandale économique et écologique. « Ils accompliront des choses que leurs parents n’auraient jamais imaginé, parce que tous ces enfants grandiront à l’ère de Windows 10. Le futur commence maintenant » : c’était en 2015. Microsoft lançait, à grand renfort de publicités, son nouveau système d’exploitation, Windows 10. Mais 10 ans plus tard, alors que les enfants ne sont peut-être pas encore tout à fait des adultes, le « futur » appartient déjà au passé. C’est en effet aujourd’hui que le géant de l’informatique américain arrête les mises à jour de sécurité de Windows 10, rendant les ordinateurs personnels encore plus vulnérables aux virus et cyberattaques. À force de pétitions et protestations, les consommateurs européens viennent d’obtenir un sursis d’un an ; Microsoft promet d’assurer des mises à jour, mais se garde bien d’en faire la publicité. Pour le reste du monde, il n’y a pas 36 solutions : il faut soit payer pour avoir des mises à jour de sécurité, soit passer à Windows 11. Mais de nombreux ordinateurs ne sont pas assez puissants, ce qui contraint leurs utilisateurs à acheter un nouveau PC. Les fabricants, évidemment, se frottent les mains. La planète, un peu moins. À lire aussiLa fin des mises à jour de sécurité de Windows 10, «un gaspillage écologique insoutenable» Jusqu'à 400 millions d'ordinateurs rendus obsolètes Les conséquences environnementales s’annoncent énormes, alors qu’on estime que jusqu’à 400 millions d'ordinateurs dans le monde sont concernés. « L’impact environnemental d’un ordinateur est lié à plus de 90 % à sa production, souligne Julie Caillard, chargée de plaidoyer de l’association française HOP, Halte à l’obsolescence programmée. Le renouvellement est une source d’impact très importante puisqu’il stimule la production de manière prématurée. Si on a un remplacement de ces 400 millions d’ordinateurs incompatibles, on pourrait avoir l’émission de plus de 70 millions de tonnes de CO2, ce qui est assez considérable et dont on pourrait se passer au vu de la situation actuelle. » L'émission de 70 millions de tonnes de CO2 serait comme si on brûlait plus de 100 millions de barils de pétrole. D’un point de vue juridique, au regard de la loi française, la fin de Windows 10 n’est pas considérée comme de l’obsolescence programmée, même si on s’en approche. L’obsolescence programmée est un concept presque aussi vieux que le capitalisme pour pousser à consommer, notamment des produits difficiles à réparer. « Ce sont des produits assez complexes, avec souvent beaucoup de pièces miniaturisées ; on se retrouve dépendant des constructeurs », relève Julie Caillard. Autre phénomène pointé du doigt : « l’obsolescence culturelle, ou l’obsolescence marketing, pour donner envie de la nouveauté. Acheter par exemple le nouvel aspirateur qui fait aussi serpillère plutôt que de conserver son vieux balai parce qu’il n’est pas à la mode et qu’il marcherait moins bien pour ramasser la poussière ! » Petites amendes, gros bénéfices Le phénomène de l’obsolescence programmée est particulièrement marqué dans le secteur du numérique, en particulier pour les téléphones. Plus de 700 millions de portables sont jetés chaque année dans le monde. La technique la plus répandue est la mise à jour qui rend obsolète votre téléphone qui marchait très bien juste avant, comme Apple l’avait fait juste avant le lancement de l’iPhone 8, en 2017. « Quand on a un iPhone qui se met à ne plus très bien fonctionner du jour au lendemain à cause d’une mise à jour, on va peut-être être poussé à acheter la dernière version alors qu’on aurait pu continuer avec son iPhone sans problème », rappelle Julie Caillard, de l'association HOP. Après la révélation de ce scandale, Apple avait été condamné en France à 25 millions d’euros d’amende. Une « douloureuse », vraiment ? Cette année-là, la firme américaine avait réalisé quelque 80 milliards d’euros de bénéfices.
Une espèce animale sur trois risque à terme de disparaître de la planète. Mais certaines politiques de conservation sont des succès, à l'image de la renaissance du tigre en Asie. Au Congrès mondial de la nature, qui s’ouvre aujourd’hui à Abu Dhabi, aux Émirats arabes unis, l'UICN, l'Union internationale pour la conservation de la nature, va dévoiler sa nouvelle liste rouge des espèces menacées. Une liste publiée chaque année, et qui s'allonge chaque année. Mais dans un avenir (et même un présent) sombre pour la biodiversité, il y a toutefois quelques bonnes nouvelles, que symbolise un animal emblématique et charismatique : le tigre. Au début du XXe siècle, environ 100 000 tigres vivaient en Asie. Un siècle plus tard, on n’en comptait plus que 3 200, à cause de la chasse, du braconnage et de la disparition de son habitat naturel sous la pression humaine. Une hécatombe, et une espèce au bord de l'extinction. Mais aujourd'hui le tigre est un symbole de la résilience de la nature. Vivre avec le tigre Le tigre est la preuve que ce qu'on appelle les politiques de conservation peuvent réussir. En 2010, sous la pression d'ONG, notamment le WWF, le Fonds Mondial pour la nature, un Sommet du tigre est organisé à Saint-Pétersbourg, avec les 13 pays qui abritent le grand prédateur tigré : la Russie, l'Inde, la Chine ou encore le Népal. Avec un objectif, doubler la population des tigres en 12 ans – en 2022, c’était l’année du tigre dans le calendrier lunaire… En Thaïlande, le nombre de tigres a triplé en 20 ans. Au Kazakhstan, où le félin avait disparu depuis 70 ans, sa réintroduction est aussi un succès. Et en Inde, où vivent les trois quarts des tigres de la planète, la population a doublé en 12 ans. « On a fait cela en préservant des espaces dans lesquels le tigre peut vivre sans être tué, sans être affamé par le manque de nourriture, et par ailleurs où les gens peuvent vivre aussi sans se faire manger par le tigre, explique Yann Laurens, qui dirige le pôle Biodiversité terrestre du WWF France. On a donc mis en place des programmes dans lesquels on protège les populations locales, et d’autre part on fait en sorte que dans les forêts concernées il y ait du gibier dont le tigre a besoin pour manger. On lutte aussi contre le braconnage ». À lire aussiAu Népal, la population de tigres sauvages a presque triplé en douze ans Le retour du loup La cohabitation entre humains et animaux est l’une des clés de la réussite des politiques de conservation, alors que l'ONG Survival International dénonce régulièrement le déplacement de populations locales pour faire de la place au tigre. Conséquence de ces expulsions, les villageois deviennent hostiles au tigre, et complices des braconniers. Les activités humaines dans la nature doivent aussi être repensées. « Quand une espèce a disparu, quand un écosystème s’est dégradé, c’est parce que la manière de produire et de consommer, la manière d’élever le bétail, de semer, etc., a été modifié dans un sens qui va vers l’industrialisation. Conserver la nature, cela se fait avec des gens qui veulent bien travailler d’une manière qui va être favorable à la biodiversité », estime Yann Laurens. En France, la cohabitation humains-animaux est aussi l’enjeu de la présence du loup. Le prédateur avait été éradiqué au début du XXe siècle. Il y en a un millier aujourd'hui. Il n'a pas été réintroduit, il est revenu tout seul, en passant la frontière italienne. Une bonne nouvelle pour la biodiversité. Mais une source de conflits avec les éleveurs. Alors pour protéger le loup, il faut protéger les moutons. « On a mis en place des mesures pour permettre à l’élevage de cohabiter avec le loup, en améliorant la protection des troupeaux. On fait en sorte que le loup laisse les éleveurs tranquilles, pour que les éleveurs laissent le loup tranquille », résumé Yann Laurens, du WWF. Les activités humaines sont les premières responsables du recul de la biodiversité. Sauver des animaux, c'est aussi sauver notre humanité. À lire aussiFrance: le nouveau plan loup frustre les éleveurs et indigne les défenseurs de la nature
Les multinationales recherchent les « havres de pollution », des pays où les règles environnementales sont moins strictes. Main d'œuvre moins chère, droits des travailleurs très théoriques, fiscalité avantageuse… Ce sont quelques-unes des raisons pour lesquelles des entreprises choisissent de délocaliser leurs activités. Mais un autre phénomène joue dans les investissements directs à l'étranger (IDE). Des entreprises vont s'implanter dans ce qu'on appelle des havres de pollution, comme on parle de havre de paix ; un endroit « protégé » où on peut polluer en toute tranquillité. À lire aussiEnvironnement: l'ONU valide la création d'un «Giec» de la pollution chimique Ce phénomène a par exemple été observé en Amérique du Nord, quand les États-Unis ont mis en place le Clean Air Act, pour limiter la pollution et les émissions de CO2. « Des entreprises ont délocalisé au Mexique pour bénéficier d’une rigueur environnementale plus faible », raconte l'économiste français Raphaël Chiappini, professeur à l'université de Bordeaux, et co-auteur d'une étude qui confirme ce phénomène des havres de pollution. « C’est vraiment cela qu’on montre : les investissements directs à l'étranger sortant des pays riches tendent à se localiser dans les pays émergents à faible rigueur environnementale », résume-t-il. Des pays où non seulement la réglementation est moins stricte, mais où elle pourra aussi être contournée plus facilement. Paradis environnementaux Comme il y a des paradis fiscaux, pour échapper à une imposition plus lourde, il existe donc aussi des paradis environnementaux, pour échapper à des normes environnementales plus strictes. Le respect des règles ayant un coût pour les entreprises, certaines préfèrent, pour préserver leurs profits, aller polluer ailleurs, même si ce n'est pas l'unique motivation d'une délocalisation. « Il y a effectivement toute une batterie de déterminants des décisions de délocalisation des firmes multinationales, mais les politiques environnementales entrent en compte comme un facteur significatif. Pour autant, on ne voit pas aujourd’hui que c’est aujourd’hui un facteur plus important que le coût de la main d’œuvre », nuance Raphael Chiappini. La recherche des havres de pollution a deux conséquences pour les pays riches. Depuis les années 90, et l'essor de la mondialisation, les importations de biens polluants ont augmenté dans les pays développés. À l'inverse, une part de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans ces pays développés pourrait s’expliquer par la délocalisation d’activités polluantes. Les entreprises ne sont d'ailleurs pas obligées de s'implanter directement en utilisant des sous-traitants sur place. Taxe carbone Pour éviter ce phénomène des havres de pollution, l'Union européenne a mis en place une taxe carbone à ses frontières, qui va commencer à s'appliquer progressivement l'année prochaine. « La taxation carbone aux frontières peut permettre de corriger ces déséquilibres entre les délocalisations dans les pays émergents et la réimportation ensuite avec un contenu important de CO2. En taxant ce CO2 inclus dans les importations, cela peut gommer cette incitation des entreprises à se délocaliser dans les pays à politique environnementale plus laxiste », relève Raphael Chiappini. On pourrait aussi imaginer une harmonisation mondiale des normes environnementales – on pourrait rêver… À lire aussiLa Chine instaure une taxe sur la pollution industrielle
La marche à pied est bonne pour la santé, l'économie et l'environnement. Une étude de l'Ademe a même chiffré à 57 milliards d'euros par an les gains pour la société française. C’est le moyen de déplacement le plus écologique qui soit : la marche à pied, qui a accompagné l’Histoire de l’humanité, depuis que nos ancêtres ont adopté la bipédie – il y a des millions d'années déjà, ils marchaient sur leurs deux jambes. On marche aussi pour faire la révolution « Marchons, marchons », appelle l’hymne national français, La Marseillaise. En Chine, afin d’arriver au pouvoir, Mao avait lancé « la Longue marche ». Au Maroc, « la Marche verte » a permis de s'emparer du Sahara occidental. En France encore, on peut marcher pour se faire élire président : Emmanuel Macron avait lancé le mouvement « En marche », en marche vers l’Élysée. À lire aussi1. La marche qui soigne Mais le plus souvent, on marche sans le savoir, sans s’en apercevoir – la marche ne se résume pas à une promenade ou une randonnée, c’est au quotidien. « Il y a plein de formes de marches qu’on connait mal, souligne Mathieu Chassignet, ingénieur mobilités durables à l'Ademe, l'agence française de la transition écologique. Il y a par exemple la marche pour se rendre à un arrêt de transport collectif, qui correspond à une pratique importante en minutes par jour en moyenne. Il y a d’autres formes de marche dans les espaces privés, comme dans un supermarché ou un centre commercial, par exemple, où on fait de longues distances. Ça peut être au bureau, et ça peut être dans notre domicile. » Les Français marchent ainsi en moyenne 1h12 par jour, moins qu’il y a 40 ans avant qu'on installe des zones commerciales à l'extérieur des centres-villes. Marcher sans consommer d'essence Marcher ne présente que des avantages. La marche à pied, c'est bon pour la santé, l'économie et le climat, comme le montre une étude de l'Ademe : la marche rapporte en France 57 milliards d'euros par an. Aux deux tiers, « ce sont les gains sur la santé, l’amélioration de l’espérance de vie », précise Mathieu Chassignet, qui a participé à cette étude. Une meilleure santé entraine aussi une amélioration des gains de productivité au travail. « On sait qu’un salarié actif est plus productif qu’un salarié inactif ». La marche engendre aussi « des réductions de coût pour les collectivités, puisqu’il est moins cher de faire des trottoirs que de faire de la voirie automobile. C’est aussi un gain pour les ménages, puisque quand on se déplace à pied plutôt qu’en voiture, c’est tout bête, mais cela coûte moins cher et cela permet donc de faire des économies. La diminution du bruit, de la pollution et de la congestion » représente enfin 8 % des gains. Quand on marche, pas besoin d'essence, pas d'émission de CO2. À lire aussiActivité physique: bien marcher, ça s'apprend! Mais il y a des obstacles à la marche, et pas seulement parce qu'on est paresseux ! La marche représente en France en moyenne un quart des déplacements, mais seulement 12 % à la campagne, « d’une part parce qu’il y a moins d’activités à proximité, d’autre part parce que la place du piéton est parfois inexistante. Pleins de rues ou de routes à la campagne sont sans trottoir, par exemple, donc on ne peut même pas marcher, relève Mathieu Chassignet, de l’Ademe. On ne peut pas se contenter de ne pas prendre en compte la marche dans les politiques publiques. Il faut donner davantage d’espaces aux piétons, sécuriser les trajets. Il y a parfois des trottoirs beaucoup trop étroits dans nos villes, donc il faut des trottoirs larges et pas encombrés en permanence par du stationnement et des poubelles. » Le mythe des 10 000 pas Mais combien de pas faut-il faire pour rester en bonne santé ? Tout dépend de son âge, mais globalement 6 000 à 8 000 pas par jour suffisent – au-delà, comme l’ont montré plusieurs études, il n’y a pas véritablement de gains pour la santé, alors qu’on parle souvent de 10 000 pas par jour. Un mythe, en réalité, inventé par une entreprise japonaise au moment des Jeux olympiques de Tokyo, en 1964. Elle vendait un podomètre baptisé Manpo-Kei. Man, en japonais, signifie 10 000. Un chiffre rond, qui ne reposait sur rien, juste sur sa valeur marketing, et qui est resté. La publicité nous fait souvent marcher.
La Suède autorise dès aujourd'hui les consommateurs à jeter à la poubelle leurs vieux vêtements, car la filière de recyclage est saturée en raison de l'essor de la fast fashion. La surproduction textile encourage la surconsommation et alimente les décharges. La France innove, pour tenter de combattre la pollution textile, avec l’entrée en vigueur ce mercredi 1er octobre d’un nouvel étiquetage sur les vêtements pour informer sur l'impact environnemental du tee-shirt ou du pantalon qu'on achète, dans le but de freiner une consommation effrénée. Quelque 100 milliards de pièces sont vendues chaque année dans le monde – un poids environnemental aussi fort que l'aviation. L’étiquetage mis en place uniquement en France est une avancée pour l'information des consommateurs, mais il reste au bon vouloir des marques. Et encore faut-il que le consommateur en tienne compte. Car le consommateur consomme, et de plus en plus. En France, le marché textile a explosé, plus 40% en 10 ans, selon l’association Zero Waste, qui milite, comme son nom l'indique, pour le zéro déchet. C'est désormais le règne de l'ultra fast fashion, la production de vêtements à faible coût, en grande quantité et presque en temps réel. Avec une enseigne emblématique, Shein, qui propose 1000 nouvelles références chaque jour. Quand la surproduction engendre la surconsommation. « Si on veut résister à cette consommation permanente, il faut vraiment avoir une forte volonté, parce qu’il y a du marketing, de la publicité, des promotions permanentes. Il y a vingt ans, on n’avait que quatre collections par an (printemps, été, automne, hiver), aujourd’hui des marques font 52 collections par an », souligne Pauline Debrabandère, chargée de plaidoyer pour l'association Zero Waste. À lire aussiÉco-score textile: le coût environnemental des vêtements arrive sur les étiquettes en France Du dressing à la poubelle L'ultra fast fashion a conquis la planète, et l'a polluée. La mode rapide, c'est rapide, et ça se jette rapidement. Les filières de collecte croulent sous les vêtements. À tel point qu'à partir d'aujourd'hui, la Suède, pourtant à l'avant-garde écologique, autorise les citoyens à jeter leurs vêtements à la poubelle. Toutes les études le disent : se débarrasser d'un vêtement qu’on a porté moins de dix fois est désormais la règle. Les marques détruisent même des vêtements qui n'ont jamais été vendus. Selon l'Agence européenne de l'environnement, près de 90% des vêtements dont se débarrassent les Européens sont jetés à la poubelle et incinérés. Ceux qui échappent à la benne à ordure sont dirigés soit vers le marché de la seconde main (le vêtement d'occasion), soit le recyclage. D’où l’importance, par exemple, de ne pas jeter nos vieux jeans à la poubelle. « S’il est en bon état, on va le proposer à la vente dans nos boutiques, explique Emmanuel Pilloy, le président du Relais, la principale entreprise de collecte de vieux vêtements en France. S’il est craqué, il ne faut surtout pas le jeter à la poubelle. Il a une deuxième vie possible dans la toiture de votre maison ; on va transformer cette fibre pour en faire des panneaux d’isolation pour protéger votre maison du froid et du chaud ». Un jean, ça tient chaud même quand on ne le porte pas. Décharges au sud Les vêtements qui ne sont pas recyclés peuvent donc avoir une seconde vie. C’est la seconde main, souvent dans les pays du Sud, en Afrique ou en Asie. Mais tout ne se passe pas comme prévu désormais. « Même ces pays-là aujourd’hui croulent sous les vêtements. La Chine commence elle-même à exporter de la seconde main, voire de la fast fashion, directement en Afrique ou en Asie. Nos vêtements se retrouvent non pas portés une seconde fois mais finissent parfois dans une décharge à ciel ouvert à l’autre bout du monde », relève Pauline Debrabandère, de Zero Waste. Accra, au Ghana, accueille ainsi une célèbre décharge textile, sur une plage, avec des problèmes de santé pour les habitants. Les vêtements, bien souvent en polyester, partent aussi dans l'océan. Des vêtements en plastique fabriqués avec du pétrole jetés à la mer, c'est carrément la triple peine écologique, et à la fin ce sont les poissons qui pleurent. À lire aussiLe Ghana devenu la décharge de la fast fashion d’Europe
Un milliard de repas sont jetés chaque jour dans le monde. Un scandale humanitaire et environnemental. Le chiffre choc est rappelé chaque année par les Nations unies à l’occasion de la Journée internationale de sensibilisation contre aux pertes et gaspillages de nourriture, le 29 septembre : l’équivalent d’un milliard de repas est jeté dans le monde chaque jour. Dans le monde, parce que ce n’est pas qu’un problème de riches. On jette beaucoup, et toujours trop, dans les pays développés, mais les plus pauvres ne sont pas épargnés par le phénomène. Entre les pays riches et les pays les plus pauvres, il y a seulement 7 kilos de déchets alimentaires de différence. Résultat : en 2022, chaque habitant de la planète a produit en moyenne 132 kilos de déchets alimentaires. Autre chiffre pour évaluer l'ampleur du phénomène : 20% de la production alimentaire mondiale part chaque année à la poubelle. Ce qu’on gaspille, ce sont évidemment d'abord les produits frais, en particulier les fruits et légumes. En France, au pays de la baguette, on se distingue, et c'est le pain qu'on jette le plus. Tout le monde jette, du producteur au consommateur. En ce qui concerne les professionnels de l’agro-alimentaire, c'est ce qu'on appelle les pertes alimentaires, entre la récolte et l'expédition. Dans le monde, plus de 13% de la production de fruits et légumes est ainsi perdue. Il y a d'abord les aléas climatiques et météorologiques, comme des gelées tardives en France, dans le département de la Loire, en 2021, qui avaient provoqué la perte de 90% de la récolte des fruits à noyau. Il y a aussi les maladies, les ravageurs, et l’agriculteur peut parfois perdre un tiers d'une récolte. Fruits et légumes « moches » Dans ces cas, on n'y peut pas grand-chose. En revanche, il y a un phénomène tout à fait évitable : quand les producteurs sacrifient des fruits ou des légumes qui ne correspondent pas aux canons de la beauté végétale : pas les bonnes couleurs, pas la bonne forme, pas le bon calibre... C'est ce qu'on a appelé en France les fruits et légumes « moches ». Des opérations de vente à moindre à prix dans les supermarchés se sont soldées par un échec. Pour le consommateur, seul ce qui est beau est bon – une vue de l'esprit qui a la dent dure. Il arrive aussi que les agriculteurs laissent pourrir les fruits sur la branche, quand les prix s'effondrent, ce qui arrive quand l'offre devient soudain trop importante et qu’il n'est pas rentable de les ramasser. Et puis il y a le transport : certains fruits sont fragiles et sont jetés à l'arrivée. Alors, pour limiter la casse, vous trouvez souvent des fruits encore verts, bien durs, sans saveur, privés de soleil bien trop tôt. Du champs à la poubelle Après les pertes alimentaires, il y a le gaspillage. C'est par exemple, la vielle pêche que vous avez laissé pourrir au fond du frigo (à votre décharge, il faut dire qu'elle était cachée par un vieux pot de crème fraîche à moitié consommé). Au pire, on peut la valoriser, et la mettre au compost, pour nourrir la terre et les futures récoltes. Un moindre mal. Les occasions de jeter de la nourriture sont multiples : parce qu'on achète trop quand on fait ses courses ; parce qu'on ne finit pas son assiette, à la maison, au restaurant, à la cantine.... Au-delà du coût économique, 1 000 milliards de dollars chaque année, au-delà du scandale humanitaire, quand 800 millions de personnes dans le monde ne mangent pas à leur faim, le gaspillage a aussi un coût environnemental. Un quart des surfaces cultivées dans le monde servent à produire des aliments qui finiront à la poubelle. Il y a toute l'eau qu'on utilise pour faire pousser ces fruits, ces légumes ou ces céréales qu'on ne mange pas ; la nourriture animale qu'on a utilisée pour produire un steak ou une cuisse de poulet qui ne sera jamais consommé. Le gaspillage alimentaire est un pillage planétaire, qui représente 8 à 10% des émissions de gaz à effet de serre, cinq fois plus que le transport aérien. Le troisième plus grand contributeur à la crise climatique, après les États-Unis et la Chine, c'est le gaspillage alimentaire.
Le président français annonce une initiative au G7 pour lutter contre le deuxième gaz responsable du changement climatique, après le dioxyde de carbone. Plus réchauffant et moins longtemps. Il passe généralement sous les écrans radar, et pas seulement parce qu’il est inodore et incolore. Le méthane, puissant gaz à effet de serre, est un peu l’oublié de la lutte contre le réchauffement climatique. On parle beaucoup moins du CH4 (son petit nom scientifique) que du CO2. Le méthane est pourtant le deuxième gaz responsable de la crise climatique après le dioxyde de carbone. Ce qu’a voulu rappeler la semaine dernière, Emmanuel Macron lors du sommet climat organisé à New-York aux Nations-Unies. « Fixons des objectifs contraignants sur le méthane, a appelé le président français. La réduction du méthane est le chemin le plus rapide pour une baisse des émissions. Nous en ferons aussi une priorité du G7 que la France aura à présider l’année prochaine », à partir du 1er janvier 2026, pour un an. Le méthane, sur un siècle, est un gaz 25 fois plus réchauffant que le CO2, et même 80 fois plus sur 20 ans, grâce à sa capacité à absorber certains rayonnements. Il garde plus de chaleur et d’énergie. « Heureusement pour nous, le méthane n’a pas une durée de vie illimitée, comme le CO2. Il n’a pas 150 ans de vie, on est plutôt sur une dizaine d’années. C’est pour cela qu’on s’intéresse énormément au méthane, parce qu’il peut disparaître rapidement », souligne le climatologue Thomas Lauvaux. En agissant sur le méthane, on peut très vite faire baisser de 0,1 ou 0,2 degré le réchauffement. 60% des émissions de méthane sont d'origine anthropique, humaine. L'agriculture produit du méthane (les vaches et leurs quatre estomacs, en rotant ; les rizières émettent aussi beaucoup de méthane). On trouve aussi du méthane dans les décharges. Et il y a bien sûr le secteur industriel, l'exploitation des énergies fossiles. Une pollution planétaire mise en lumière il y a quelques années grâce à un satellite européen et une société française, Kayrros. « Ce fut un moment assez incroyable, se souvient Antoine Rostand, le président de Kayrros. On a pu pour la première fois compter les grands émetteurs, les grosses pollutions dans le monde, et ce fut un choc, parce que tout le monde pensait qu’il n’y en avait qu’une ou deux par an. On s’est rendu compte qu’il y en avait mille par an. » « On sait qui pollue » Y a-t-il du méthane près de chez vous ? Une carte interactive permet de le découvrir, mais il faut plutôt habiter en Russie, en Chine ou au Turkménistan, là où se trouvent les plus grosses pollutions. Ces émissions de méthane sont bien souvent des fuites, de la négligence, « énormément la maintenance de sites pour réparer les pièces du matériel, pour des questions de sûreté aussi, précise Thomas Lauvaux, professeur à l'Université de Reims en Champagne, qui a participé à la première grande étude qui a quantifié cette pollution mondiale. Dans beaucoup d’endroits, on libère simplement le gaz qui va s’échapper dans l’atmosphère. Pendant très longtemps, comme c’est un gaz qui n’a pas d’odeur et pas de couleur, on a simplement dégazé vers le haut de l’atmosphère, et puis le gaz partait. En revanche, il y a des sources qui, elles, sont continues. Par exemple, on ventile les mines de charbon pour que les mineurs qui sont en bas n’aient pas d’intoxication au méthane [le fameux coup de grisou], et là, c'est un flux en continu qui libère une à deux tonnes par heure de méthane. » Alors qu’une coalition internationale lancée en 2021, sans contrainte, n’a donné aucun résultat, il s’agirait d’imposer des sanctions aux pollueurs, des amendes… « Aucune industrie n’est capable de s’auto-réguler, cela n’existe pas, estime Antoine Rostand, le patron de Kayrros, qui salue l’initiative d’Emmanuel Macron au G7. C’est pour cela qu’il faut absolument l’intervention du politique. C’est donc très bien que la France prenne le leadership là-dessus. On sait qui pollue. Il faut mettre en place maintenant un système de responsabilisation et je pense que c’est un vrai sujet pour le G7. » Et ce sera peut-être le moyen d'obtenir enfin, et à court terme, un résultat tangible dans la lutte contre le changement climatique.
Le moustique Aedes aegypti, vecteur d'une cinquantaine de maladies, menace 4 milliards de personnes. Originaire des forêts africaines, il s'est rapproché des humains il y a 5 000 ans avant de poursuivre sa conquête planétaire. C’est un ami qui vous veut du mal. Disons que lui vous considère comme son ami, parce qu’il aime le sang humain. Aedes aegypti, l’une des quelque 3 500 espèces de moustiques identifiées dans le monde, représente une menace pour 4 milliards de personnes à travers la planète, en raison de toutes les maladies dont il est le vecteur. Dengue, zika, chikungunya, fièvre jaune… Il peut transmettre en tout une cinquantaine de virus rien qu'en piquant un humain. À l'origine, pourtant, Aedes aegypti ne s'intéressait pas aux humains. Mais cela a changé avec la mondialisation, la découverte de l'amour du sang humain, et puis sa résistance aux insecticides, comme le raconte une étude internationale publiée dans la revue Science. Aedes aegypti s'est établi en Afrique continentale il y a 85 000 ans, dans les forêts tropicales. Les animaux de ces forêts sont alors le repas des femelles pour nourrir leurs larves : oiseaux, mammifères et même reptiles. Les humains vont devenir sa proie favorite bien plus tard. À lire aussiMoustique : l’animal le plus dangereux au monde Premiers contacts humains Il y a environ 5 000 ans, le Sahara devient un désert. Et parce que les moustiques ont besoin d'eau pour se reproduire, ils vont migrer près des populations humaines qui stockent de l'eau. Le moustique apprend à apprécier le sang des humains en Afrique de l'Ouest, comme le montre une toute petite une mutation génétique entre les moustiques forestiers et cette sous-espèce qui préfère le sang humain et qui va entamer, quelques milliers d'années plus tard, une nouvelle migration. Elle va conquérir le monde, et d’abord le Nouveau monde, comme on appelle alors l'Amérique, colonisée par les Européens, qui ont besoin de main d'œuvre sur place, et qui lancent la traite négrière : les moustiques débarquent par bateau en Amérique en même temps que les esclaves. C'est l'étude du génome, la carte d'identité génétique des moustiques, qui le montre : les moustiques sénégalais, angolais et argentins sont alors très proches. Mutation et résistance En Amérique du Sud et dans les Caraïbes en particulier, Aedes aegypti ne trouve pas sa place dans les forêts déjà bien occupées par d'autres espèces de moustiques. C'est donc là qu’il achève sa « domestication » complète, une domestication à l'envers. Ce ne sont pas humains qui le domestiquent - personne n'a envie d'un moustique comme animal de compagnie - ce sont les moustiques qui décident de vivre avec les humains. Ce phénomène, chez les animaux, a un nom : la synanthropie. Et là, on peut dire qu'Aedes aegypti va vivre sa meilleure vie. À la différence des humains, évidemment. Les piqures, les maladies, personne n'aime ça. Alors, on utilise des insecticides. Mais un moustique, en un an, peut produire 15 générations. Cela va vite, et certains moustiques, qui portaient par hasard une mutation génétique qui les rendait résistants, ont rapidement plus de descendants ; la sélection naturelle va les rendre dominants. Et cette mutation et cette résistance se retrouve aujourd'hui chez des moustiques en Afrique (au Sénégal, au Burkina-Faso notamment). Aedes aegypti a fait le voyage en sens inverse, pour retourner en Afrique, toujours aussi nuisible à l'humanité, avec en prime une résistance aux insecticides. À lire aussiComment reconnaître les symptômes de la dengue et se protéger de la maladie? La colonisation continue Cette résistance aux produits chimiques et cette invasion planétaire, ont un coût humain. La moitié de l'humanité est aujourd’hui exposée à la dengue. En 20 ans, le nombre de cas a été multiplié par dix dans le monde, avec près de 8 000 morts pour les cas les plus graves. On estime qu'il y a désormais près de 400 millions de cas de dengue chaque année sur la planète. Un bilan qui devrait s'alourdir, à cause du réchauffement climatique. Les larves d'Aedes aegypti ne sont pas capables de résister au froid, mais avec des hivers plus doux, les pays sous climat tempéré devraient bientôt être colonisés. Son cousin d’Asie, Aedes albopictus, plus connu sous son nom de star moustique tigre, est lui déjà présent dans une partie de l’Europe (ses larves sont moins frileuses). Et il ne cesse de gagner du terrain vers le nord, avec les maladies qu’il transmet lui aussi, comme la dengue, dont a recensé en France cet été une vingtaine de cas autochtones. Des maladies tropicales touchent désormais des pays tempérés. C’est aussi cela, le réchauffement climatique : des hivers plus chauds, et des étés plus piquants. À lire aussiEt si on tuait tous les moustiques?
La Chine inaugure une nouvelle « route de la soie » qui passe par l'Arctique, profitant du dégel provoqué par le réchauffement climatique. Une route commerciale plus courte, mais plus risquée en termes de pollution et de marée noire. C'est une nouvelle « route de la soie » où il fait froid. La Chine a inauguré aujourd'hui une liaison maritime commerciale régulière entre l'Asie et l'Europe passant par l'Arctique, sur la voie nord-est qui longe les côtes de Russie. Du point de vue de Pékin, c’est forcément une manière d’affirmer un peu plus sa puissance et sa présence sur toutes les mers du globe. Sur le papier, on pourrait aussi se dire que c'est une bonne nouvelle pour le climat : en théorie, les gros navires de commerce devraient consommer moins de fuel, émettre moins de CO2, puisque la route est plus courte, 5 000 kilomètres de moins en longeant la Sibérie par rapport à la route maritime classique qui passe par l’océan Indien et le canal de Suez. Alors oui, c’est peut-être moins de carburant, mais c’est une nouvelle pollution pour ces glaces immaculées. « Ces carburants émettent beaucoup de particules dans l'atmosphère, et ces particules, on les observe dans la glace, témoigne Romain Troublé, le président de la Fondation Tara, qui va naviguer dans l’Arctique, pas pour y faire du commerce mais de la recherche scientifique. Elles se déposent partout et en fait, ces petites particules qui n'ont l'air de rien, quelques millimètres noirs, qu'on appelle le black carbone, attirent la chaleur sur la glace et encouragent la fonte. » Passer par le pôle Nord plutôt que par l’océan Indien est un vieux rêve que le changement climatique rend de plus en plus tangible. Cette nouvelle Route de la soie où il fait très froid, il y fait moins froid qu’avant… L’Arctique fait partie de ces régions du monde particulièrement exposées au changement climatique. Selon le Giec, les experts scientifiques du climat, l’Arctique se réchauffe 3 à 4 fois plus vite que le reste du monde. Résultat, l’été arctique dure de plus en plus longtemps. C’est en ce moment, en septembre, que la route du Nord n’a plus de glace. Elle est donc navigable, et avec la crise climatique, cette période s’étend, deux ou trois mois par an. À tel point qu’à l’horizon 2030, ou 2040, et c’est presque demain, l’été arctique sera pratiquement sans glace, navigable même en passant par le pôle : une route centrale, encore plus courte. Marée noire impossible à nettoyer L'Istanbul Bridge, ce navire parti de Chine à destination du Royaume-Uni, avec près de 5 000 conteneurs à bord, n’est pas le premier à passer par l’océan Arctique. Conquérir les mers, même le plus hostiles, c’est presque aussi vieux que l’humanité. En 1951, les actualités célèbrent une expédition canado-américaine qui « vient de rentrer dans l’histoire » en empruntant la route nord-ouest de l’Arctique, qui longe les côtes canadiennes. Sur la voie nord-est, coté Russie, depuis le milieu des années 2010, on y navigue de plus en plus – le trafic a doublé en 20 ans, ce qui augmente statistiquement les risques d’accidents. « Un jour il y a aura un problème, il y aura une marée noire, une pollution, et là il y a très peu de moyens pour l'endiguer. L'été étant très court, un mois et demi plus tard il fait nuit, il fait moins 25°C, il y a de la glace partout, donc c'est impossible à nettoyer. C'est ça le risque ! », souligne Romain Troublé. Il y a aussi un risque direct pour la biodiversité. Comme sur toutes les mers du globe, un bateau qui passe, bien souvent c’est un animal qui trépasse. « Ces navires altèrent la biodiversité comme partout dans le monde, relève Romain Troublé de la Fondation Tara. Que ce soit au Sri Lanka ou n'importe où, on voit des bateaux qui passent à 20 nœuds (37km/h) et on voit beaucoup de collisions avec des mammifères et des espèces marines. En Arctique, ce n'est pas différent, sauf que le trafic est aujourd'hui assez limité. » La plus grande menace reste la disparition de la banquise. Que se passera-t-il pour tous ces animaux ? On est aujourd’hui incapable de le dire. On sait que la glace va fondre, mais on ne sait pas ce que vont devenir ceux qui y vivent. À lire aussiQu'est-ce que l'«Arctic Express», le nouveau pari commercial de Pékin?
C'est aujourd'hui la Journée européenne du bio. Mais l'agriculture biologique est en crise, notamment en France, alors que les prix limitent la consommation. L'Union européenne célèbre chaque année la Journée du bio, après avoir fixé en 2021 un objectif ambitieux : consacrer au bio, en 2030, 25% des terres agricoles européennes. Un objectif « hors de portée », a estimé dernièrement la Cour des comptes européenne, tant le secteur de « la bio » affronte des difficultés. Après des années d'essor, « l'agriculture bio traverse une crise sans précédent, constate Julien Bourgeois, président de FOREBio, une fédération d'agriculteurs et d'entreprises. Suite à la crise du Covid et à la hausse des prix de l'énergie, on a eu des hausses de charges dans les fermes, avec des prix qui ont baissé dans la filière bio parce qu'on a connu pour la première fois une saturation du marché. Certains ont ainsi préféré arrêter l'agriculture biologique. » La part des surfaces bio en France a ainsi reculé ces deux dernières années, avec à peine 10% aujourd'hui. C'est dans la moyenne européenne, sachant qu'en Autriche, un quart des surfaces agricoles sont bio, et c'est même 45% pour le Liechtenstein, qui n'est pas dans l'UE, et qui n’a donc pas que des banques sur son petit territoire coincé entre l’Allemagne et la Suisse. Au niveau mondial, le bio représente tout juste 2% des terres agricoles. À lire aussiAutriche : l'avenir de l'agriculture biologique en question Prix en baisse dans les fermes, en hausse dans les magasins Mais la consommation semble reprendre cette année en France, timidement, après des années de recul. Le bio représente un peu plus de 4% des ventes, ce qui reste très marginal. Parce que le bio coûte beaucoup plus cher à produire que l'agriculture conventionnelle, intensive, qui utilise des pesticides (il y a donc moins de pertes), sur de grandes surfaces (il y a donc des économies d'échelle). Le bio coûte cher à produire et il se retrouve encore plus cher dans les rayons des magasins qui ne lésinent pas sur leurs marges. « Depuis deux ou trois ans, les prix ont baissé à la production (on arrivait à une saturation des volumes), mais les prix n’ont pas baissé dans les rayons, constate Julien Bourgeois, qui produit des céréales et de la viande bio dans l'Yonne, en Bourgogne. Donc là, il s’agit d’un positionnement commercial des produits bio comme produits d’élite, le summum de la qualité, ce qui peut s’entendre. Mais il y a certainement eu des augmentations de marges. Et avec les Français qui ont un peu moins de sous dans leurs portefeuilles, ça n’a pas aidé à apporter du crédit au bio. » Sans parler de la grande distribution qui a sorti de ses rayons un quart des produits bio. À écouter aussiEn France, face à la crise de l'agriculture biologique Pourquoi aider le bio ? Les acteurs politiques français aussi s'en prennent au bio. Le sénateur Laurent Duplomb, et sa loi très controversée et partiellement censurée, voulait par exemple supprimer l'Agence bio, une agence gouvernementale qui fait la promotion de l'agriculture biologique. Le gouvernement sortant vient d'ailleurs de lui sucrer 15 millions d'euros de budget. Ces dernières années, la France a aussi supprimé des aides à l'installation ou à la conversion vers l'agriculture biologique. Mais pourquoi faudrait-il aider l'agriculture bio ? En Europe, on aide bien l'agriculture conventionnelle, intensive, avec la PAC, la Politique agricole commune, depuis les années 1960. La bio en bénéficie, mais pour seulement 1%, ce qui n’est pas cher payé au regard des bénéfices environnementaux que procure l'agriculture bio. « Dès lors qu’on est dans des pratiques bio, le seul fait de ne pas utiliser de désherbants, d’insecticides, c’est déjà favorable à la biodiversité, rappelle Julien Bourgeois, de FOREBio. On répond aujourd’hui à des enjeux de société. On l’a vu par le passé, la bio a connu des phases de croissance à chaque grosse crise sanitaire, comme la vache folle… » Si on mangeait beaucoup moins de vache, justement, l’agriculture bio pourrait nourrir toute la planète – si c’est pas bio, ça… À lire aussiLa PAC est-elle suffisamment écologique ?
Le trou dans la couche d'ozone diminue grâce à l'engagement de tous les pays de la planète. Revers de la médaille : cette « guérison » augmente le réchauffement climatique. Petit tour d'horizon de quelques progrès environnementaux parfois contre-productifs. Les bonnes nouvelles sont rares, et une bonne nouvelle est tombée mardi à l’occasion de la Journée internationale pour la préservation de la couche d’ozone : elle « guérit », a annoncé le patron des Nations unies António Guterres. Le trou dans la couche d’ozone, observé à la fin des années 1970, rétrécit. La couche d'ozone, qui nous protège des rayons ultraviolets (sans elle, il n'y aurait de vie sur Terre que dans les océans), devrait ainsi retrouver son état des années 1980 au plus tôt autour de 2040. Et c’est grâce notamment au protocole de Montréal, signé en 1987, l'engagement de tous les pays de la planète à bannir, dans l'industrie, les gaz responsables du trou. Il s’agit là d’une des rares politiques environnementales internationales couronnées de succès. Comme quoi, quand on veut, on peut… Mais, on s'en est aperçu assez récemment, la réduction du trou de la couche d'ozone accroit le réchauffement climatique, parce qu'elle piège la chaleur dans l'atmosphère. Est-ce pour autant une raison de regretter le protocole de Montréal ? Bien souvent, il y a un mal pour bien. Rien qu'aux États-Unis, une étude a montré que près de 450 millions de cancers de la peau seront ainsi évités en un siècle. Et pour le réchauffement climatique supplémentaire, on sait ce qu'il faut faire : diminuer massivement nos émissions de CO2. À lire aussiEnvironnement: la «couche d’ozone guérit» et devrait se reconstituer aux alentours de 2050, selon l’ONU Moins de kérosène, plus de voyageurs On observe d’ailleurs d’autres effets pervers dans des politiques publiques environnementales. Dans le transport maritime par exemple. Pour remplacer le fuel, les bateaux naviguent de plus en plus au gaz naturel liquéfié (GNL). C'est moins de pollution. Revers de la médaille, on s'est rendu compte qu'il y avait des fuites de méthanes. Les navires laissent dans leur sillage des nuages de ce gaz encore plus climaticide à court terme que le CO2. Est-ce une raison pour regretter le bon vieux fioul rempli de particules fines ? Non, là encore, on sait ce qu'il faut faire : réduire massivement nos émissions de gaz à effet de serre. Des progrès contre-productifs, on en trouve aussi dans le transport aérien. L'aviation a réussi en diminuer de 15 % à 20 % sa consommation de kérosène. Grâce à ces économies de carburant, les compagnies peuvent baisser leur prix. Des billets moins chers, c'est davantage de voyageurs. Résultat, le gain climatique espéré est nul, le secteur aérien continue d'émettre toujours plus de CO2. Mais on sait ce qu'on peut faire ; décider de moins prendre l'avion, pour éviter cet effet rebond. Le paradoxe de Jevons L’effet rebond est un phénomène observé par un économiste britannique pendant la révolution industrielle, William Jevons, qui a donné son nom au paradoxe de Jevons. Il s'était rendu compte que les progrès réalisés dans les machines à vapeur, qui fonctionnaient avec moins de charbon, ne conduisaient pas à une baisse de la consommation globale de charbon, bien au contraire. Une amélioration technologique simule la croissance et donc simule la consommation d'énergie. Un phénomène observé aussi dans l’éclairage nouvelle génération. Les ampoules led consomment 5 à 10 fois moins d'électricité. Résultat, on en met partout, on éclaire davantage. Les bonnes vieilles affiches publicitaires sont remplacées par des LED. La facture d’électricité ne baisse pas et la pollution lumineuse augmente. O n pourrait aussi parler de la climatisation, parfois employée pour s'adapter au réchauffement climatique. Sauf qu'elle participe au réchauffement climatique. De même pour les barrages hydroélectriques, qui produisent une énergie renouvelable : ils ont des conséquences sur l'environnement, la biodiversité, quand des paysages disparaissent sous des immenses retenues d'eau. Ou les éoliennes, mortifères pour les oiseaux. La vie se résume à des choix, et rarement un choix n'est parfait, sinon le choix serait vite fait. La question est presque philosophique : que fait-on du progrès ? Comme disait l'adage, on n'arrête pas le progrès, mais le progrès a encore des progrès à faire. À lire aussiAdaptation au changement climatique: l'ONU déplore un recul du financement des pays en développement
Le fondateur de l'ONG Sea Shepherd, invité en France à la Fête de l'Huma, a été conspué ce week-end par des militants de la gauche radicale. Pourquoi l'ont-ils traité d'écofasciste ? Quels sont les ressorts de l'écofascisme, l'écologie d'extrême droite ? « Paul Watson n’est pas un camarade ! » Le slogan, scandé par des militants de la gauche radicale, a perturbé samedi 13 septembre à la Fête de l’Huma, près de Paris, l’intervention d’une icône de l’environnement, Paul Watson. Il était passé par la case prison pour sa défense des baleines. On l’a même traité d’« écofasciste », un terme réservé à l’écologie d’extrême droite. Un terme d’ailleurs qu’on entend souvent à droite contre la gauche écologiste qui voudrait imposer des restrictions pour lutter contre la crise climatique. Ce qu’il est reproché à Paul Watson ? Certaines déclarations sur l’immigration ou les femmes, ainsi que certaines fréquentations. « Paul Watson est effectivement un militant qui sauve des baleines, mais qui est également proche de pleins de personnalités d’extrême droite, affirme ainsi une jeune militante antifasciste dans une vidéo enregistrée à la Fête de l’Huma et postée sur les réseaux sociaux. C’est quelqu’un qui fréquente Brigitte Bardot, condamnée à de multiples reprises pour incitation à la haine raciale. Mais vu qu’elle sauve des animaux, ça peut être une camarade… » Suffit-il de fréquenter Brigitte Bardot pour être écofasciste ? La réponse est un peu plus compliquée. « L’écofascisme, c’est une conception de l’écologie qui va valoriser une forme d’harmonie entre une communauté humaine et son territoire d’appartenance, définit l’universitaire français Antoine Dubiau, auteur d’un livre intitulé Ecofascismes (éditions Grévis). Le but de l’écologie serait de préserver cette harmonie quoi qu’il en coûte. C’est une forme de justification écologique du rejet de toute forme d’immigration. » Une idéologie « blanche » Il est justement reproché à Paul Watson certaines positions sur l’immigration, mais il s’en est défendu, affirme rejeter « toutes les frontières », et dénonce plutôt l’exploitation de la main d’œuvre immigrée aux États-Unis. En revanche, il est indéniable que Paul Watson, qui préfère les animaux aux humains, est malthusien, du nom de l’économiste britannique Thomas Malthus, qui plaidait pour une limitation des naissances face aux ressources limitées de la planète. Une théorie qui est reprise par les écofascistes. Pour eux, la surpopulation est une menace, même si c’est un malthusianisme à dimension variable. « Ils sont plutôt malthusiens pour le reste du monde, mais plutôt natalistes pour leur propre culture, leur propre civilisation, leur propre identité, précise Antoine Dubiau. Ils vont plutôt défendre le fait que "les blancs" doivent faire plus d’enfants et continuer à se reproduire, et plutôt critiquer la surpopulation du reste du monde et des "non-blancs et non-blanches". Pourtant, si on rapporte l’empreinte écologique par habitant, les pays occidentaux sont très largement responsables du ravage écologique. » L’écologie d’extrême droite, c'est le culte de la nature, d'un territoire et de racines menacés par l'étranger. L'écofascisme légitime les inégalités, puisque dans la nature certaines espèces seraient supérieures aux autres. Des « écolo-conservateurs » qui existent « depuis très longtemps » Il n’y a donc pas qu’à gauche que l’on défend l’environnement. Pour paraphraser la célèbre réplique de Valéry Giscard d’Estaing face, à François Mitterrand (« Vous n’avez pas le monopole du cœur »), la gauche n’a pas le monopole des fleurs. Par nature, l'écologiste est conservatrice. Il y avait même un courant pro-environnement au sein du parti nazi. « Certes, la gauche est la première famille politique qui s’est appropriée pleinement la question écologique, devenue un sujet central dans la plupart des organisations de gauche aujourd’hui, constate Antoine Dubiau, chercheur à l’université de Genève. Il se trouve que des penseurs écolo-conservateurs, il y en a depuis très longtemps, parfois même depuis plus longtemps que ceux de la gauche écologiste. Mais l’écologie d’extrême droite, ce n’est pas la même chose que l’écologie de gauche. » Il y a en effet des nuances de taille. Le tueur de l’attentat de Christchurch en Nouvelle-Zélande (51 morts dans une mosquée en 2019) se revendiquait « écofasciste ».
On savait déjà que le plastique envahissait tous les recoins de la planète, du sommet de l’Himalaya aux abysses marins, jusque dans le placenta des femmes enceintes et même dans nos cerveaux. Une récente étude révèle une nouvelle source de pollution : les masques chirurgicaux, omniprésents depuis la pandémie de Covid-19. Au plus fort de la crise sanitaire, on estime que 130 milliards de masques étaient utilisés chaque mois dans le monde. Des millions de tonnes de déchets qui, une fois jetés dans la nature, se dégradent lentement, libérant du plastique et des microplastiques. Une pollution invisible mais massive Une équipe de l’université de Coventry (Royaume-Uni), dirigée par la chercheuse Anna Bogush, a analysé plusieurs types de masques – du simple masque chirurgical aux modèles FFP2. Leur étude, publiée dans la revue Environmental Pollution, montre que tous libèrent des particules plastiques lorsqu’ils sont immergés dans l’eau, et cela sans avoir été abîmés, ni manipulés. Les masques filtrants (FFP2/FFP3) relâchent par ailleurs 3 à 4 fois plus de microplastiques que les masques chirurgicaux standard. « Nous avons observé que tous relâchaient des microplastiques, et en grand nombre », explique Anna Bogush. Multipliez ce constat par des milliards d’unités, et la pollution devient colossale. Des impacts environnementaux et sanitaires Ces microplastiques perturbent les écosystèmes et finissent par se retrouver dans la chaîne alimentaire. Nous les respirons, nous les ingérons, et leur accumulation dans le corps humain suscite des inquiétudes croissantes. Mais les particules plastiques ne sont pas les seules substances en cause. Les chercheurs ont également mis en évidence la libération de bisphénol B, un perturbateur endocrinien utilisé comme substitut du bisphénol A, longtemps employé avant d’être interdit dans de nombreux pays. Problème : le bisphénol B, lui aussi dangereux pour la santé, reste autorisé dans certaines régions du monde, comme aux États-Unis. Des solutions encore à construire Faut-il pour autant arrêter de porter des masques en cas de maladie ? Non, leur utilité sanitaire n’est pas remise en question. Mais, selon Anna Bogush, cette prise de conscience doit inciter à agir : « Notre but, c’est d’améliorer les normes. On ne veut pas effrayer, mais aider. Il faut mettre en place des politiques de collecte et pousser les industriels à produire différemment ». En attendant des filières de recyclage adaptées ou des matériaux moins nocifs, un geste simple peut déjà limiter les dégâts : ne pas jeter son masque n’importe où.
Aux États-Unis d'anciens haut-gradés de l'armée et d’anciens membres des services de renseignement alertent sur les conséquences de la politique climatosceptique de Donald Trump sur la sécurité nationale. Fin juillet 2025, le ministère de l'Énergie a publié un rapport intitulé « Examen critique des impacts des émissions de gaz à effet de serre sur le climat américain ». Depuis sa publication, les scientifiques s'insurgent contre les erreurs, falsifications et omissions que contient ce document. Ce texte de 150 pages vise à semer le doute sur la réalité du changement climatique et son origine humaine, selon les chercheurs. C'est maintenant au tour des experts en sécurité de s'exprimer sur le rapport. Et leur réponse publique à l'administration Trump est particulièrement sévère. « Le rapport du ministère de l’Énergie présente le changement climatique comme incertain et cette incertitude comme une raison de ne pas agir ! », fustige Erin Sikorsy qui dirige le Center for Climate and Security à Washington. Pour cet ancien membre du Conseil national de renseignement, le gros problème est là : « dans le domaine de la sécurité nationale, plus l’insécurité est grande et plus nous devrions nous préparer ». L’évaluation des risques est un aspect essentiel pour garantir la sécurité nationale américaine, souligne aussi l’amiral Paul Zukunft qui a commandé les gardes côtes américains entre 2014 et 2018. La qualité de l’évaluation des risques liés au changement climatique dépend de la qualité des informations et des données scientifiques disponibles. Mais l’accès a ces informations et données est désormais obstrué pour des raisons idéologiques, s’inquiète Paul Zukunft qui fut aussi membre de l’état-major interarmées des Etats-Unis. « Les deux mots qui suscitent ce que j'appelle un véritable ‘rejet organique’ au sein de l'administration Trump sont ‘changement climatique’. C'est comme une autruche qui cache sa tête dans le sable : ‘Ne me dites pas ce qui se passe dans le monde autour de moi ! Je ne veux pas l'entendre !’ Mais cette attitude ne change rien à la réalité sur le terrain ». Opérations et infrastructures militaires affectées par le changement climatique En 2019 déjà, le Département de la défense faisait état de dizaines de bases militaires sur le sol américain confrontées aux impacts liés au changement climatique, « qu'il s'agisse d'ouragans sur la côte du Golfe du Mexique, de précipitations diluviennes dans le centre du pays ou d'incendies de forêt en Californie », énumère Erin Sikorsky. « Ces phénomènes météorologiques extrêmes perturbent les opérations militaires en interrompant les entraînements et les missions des forces armées, mais affectent aussi les infrastructures de l’armée. Ils perturbent leur alimentation électrique, rendent certaines parties des installations inaccessibles et causent des dommages qui entraînent le déplacement de certaines missions ». « C'est à Hampton Roads, en Virginie, que l'impact du changement climatique sur nos infrastructures militaires est le plus important », raconte aussi l’amiral Paul Zukunft. « Là-bas, la plus grande base navale américaine subit un affaissement du sol et l'élévation du niveau de la mer. Que fera l’administration pour consolider la base avant qu'elle ne soit littéralement submergée ? Ce problème ne concerne pas seulement cette base navale, mais une grande partie de nos infrastructures côtières, qu'il s'agisse d'aéroports ou d'installations de traitement des eaux ». Sans adaptation au changement climatique, l’armée américaine affaiblie sur la scène internationale Les experts en sécurité nationale sont formels : sans évaluation scientifique des risques causés par les effets du changement climatique, une adaptation adéquate des forces armées américaines est impossible. Ce manque de réactivité affaiblit déjà les capacités américaines sur la scène internationale, prévient l’ancien commandant des garde-côtes américains. « Regardez ce qui se passe avec la fonte des glaces en Arctique », soupir Paul Zukunft. « C'est un océan qui s'ouvre devant nos yeux, alors que les États-Unis n'ont pas les moyens nécessaires pour surveiller ces hautes latitudes. Sur l'ensemble de notre flotte nous ne disposons que de deux brise-glaces performants ! La Russie en possède plus de vingt, dont certains à propulsion nucléaire. La Russie a même militarisé certains de ses îlots dans cette région ». Pour ces anciens haut-gradés de la sécurité nationale américaine, le changement climatique constitue un « multiplicateur de menaces ». Ne pas les prendre en considération pour des raisons idéologiques compromettra l’état de préparation des forces armées et des services de renseignement. « Nous allons agir à l’aveuglette », s’inquiète Erin Sikorsky du Center for Climate and Security à Washington. « Alors que nos adversaires, et notamment la Chine qui est très lucide sur la menace climatique, auront de meilleures informations et seront donc mieux préparés ». Dans ce contexte, ce qui est mis en danger pas la politique climatosceptique de l'administration Trump, n'est rien de moins que la capacité de l'armée et des services de renseignement à remplir leur mission : protéger la sécurité des Américains et des intérêts vitaux des États-Unis. À lire aussiÉtats-Unis: le chef du renseignement militaire renvoyé après un rapport sur les frappes en Iran
Pour freiner le réchauffement de la planète et sa cohorte de catastrophes meurtrières, il faut émettre moins de gaz à effet de serre. Tous les secteurs économiques s’y mettent, y compris la culture. En cette rentrée littéraire, RFI se pose donc la question d'environnement suivante : comment réduire les émissions carbone du livre ? 60 % des émissions carbone du livre papier viennent de la fabrication du papier : transformer des arbres coupés en pâte à papier, puis en immenses feuilles de papier. Deuxième source d’émissions de gaz qui contribuent au réchauffement climatique, le transport de ce papier vers les imprimeurs, cela compte pour 10 %. En Europe, ce transport se fait surtout par la route. Les usines à papier qui fournissent la France, par exemple, sont situées en Italie, en Allemagne et pour beaucoup en Scandinavie. Enfin, pour fabriquer les encres et faire tourner les rotatives pour imprimer les livres, il faut de l’énergie. Ce sont souvent des énergies fossiles donc là aussi, il y a des émissions. Est-ce que ces émissions pèsent lourd ? Le livre ne fait pas partie des activités humaines les plus responsables du changement climatique, certes, mais réduire ces émissions carbone est stratégique pour le secteur, car il est vulnérable aux effets du changement climatique. « Là où j'émets, c'est souvent là où je suis fragile », explique Benoît Moreau. Aujourd’hui à la tête de l’entreprise Ecograff, il travaille sur les problématiques environnementales dans l’industrie graphique depuis 2006. « Au niveau du bois en Europe, on voit les problématiques d'incendies, les problématiques de parasites - dans tout l'est de la France, il y a des scolytes qui ont attaqué les forêts » donc le bois sera moins disponible, détaille-t-il. « Il y a aussi une problématique d'usage, c'est-à-dire que le bois dont on fait aujourd’hui du papier, on peut aussi l’utiliser pour faire de l'énergie, donc on va avoir un problème de disponibilité ». Même chose au niveau de l'accès à l'eau, qui sera de plus en plus compliqué. « Il y a donc de grosses fragilités pour le secteur, cela veut dire qu'il y a tout un travail à faire pour optimiser la consommation de papier. » Réduire le gaspillage de papier et le nombre de livres invendus Le premier levier pour décarboner le livre, c’est donc de fabriquer des livres avec moins de papier. Réduire les pertes de papier qu'il y a actuellement à chaque étape : à l'impression, au pliage, à la coupe et au reliage. Et réduire le pilon : aujourd'hui 20 % des livres produits ne sont jamais vendus et sont détruits. Ils ont juste été promenés entre les distributeurs, les centres de stockage et les libraires, sans jamais trouver preneur ou preneuse. Pour freiner cette sur-fabrication, une piste consiste à lancer des réimpressions d'exemplaires au juste besoin, au fil de la demande. Cela s’appelle le Tirage Court Dynamique. Cela veut dire réimprimer un livre déjà sorti par bloc de quelques centaines voire dizaines d’exemplaires, en fonction de la demande. Et pas 1 000 exemplaires d’un coup, comme on le fait actuellement, car cela oblige à dépenser de l’énergie et à artificialiser des zones naturelles pour stocker des ouvrages qui ne seront peut-être jamais vendus. À lire aussiPartir en livre : comment redonner le goût de la lecture aux jeunes Surabondance de nouveautés Autre défi : la surabondance de nouveautés. Les éditeurs le reconnaissent, depuis une quinzaine d'années, c'est la course à toujours plus de nouveautés. 80 000 nouveaux titres sortent chaque année en France, dont de très nombreux livres de reproduction, explique Fanny Valembois, du Bureau des Acclimatations. Ce collectif travaille sur les transformations écologiques de la filière culture. « Il y a quelques années, un libraire m'avait dit 'non mais regarde, moi en rayon, j'ai quatre titres déjà sur la cuisine à la plancha' et donc je m'étais amusée à compter le nombre de références disponibles ce jour-là. Sur la cuisine à la plancha, j'avais trouvé 57 références différentes. Est-ce que 57 titres différents sur la cuisine à la plancha, c'est de la création ou est-ce que c'est de la reproduction industrielle pour occuper les tables des libraires ? », interroge-t-elle. Pour Fanny Valembois, pas de doute, à cause de cette frénésie, chaque livre est tiré à moins d'exemplaires, chaque auteur est moins rémunéré et tout cela contribue à « invisibiliser la création qui n'a plus la place d'exister dans ce marché-là », affirme-t-elle. Donner de la valeur à la lecture Autre piste pour réduire l'empreinte carbone du livre : aujourd'hui, le système économique de l'édition et la rémunération des auteurs sont basés sur la vente d'un livre, pas sur le fait qu'il soit lu. Demain, pour moins gaspiller et mieux rémunérer les auteurs, on pourrait payer pour lire un livre, pas pour le posséder. En plus des bibliothèques, des lieux de location de livres existent en Inde, aux États-Unis, en Suède. C'était aussi le cas en France aux XVIIIème et XIXème siècles. En cette rentrée, plusieurs librairies vont l'expérimenter à nouveau en proposant un abonnement payant à leurs clients pour lire une dizaine de livres sélectionnés et n'en conserver qu'un seul à la fin. Quant à vous, lecteurs et lectrices, vous pouvez d’ores et déjà donner de nouvelles vies à vos livres, en les faisant circuler. À lire aussiLa 26e édition du Salon international du livre d’Alger met à l'honneur le continent africain
Dans l'hémisphère nord, l'été touche à sa fin. Et cette année encore, il a été marqué par des températures extrêmes. Les Chinois ont vécu l'été le plus chaud jamais enregistré. Le thermomètre a frôlé les 47 degrés au Maroc. Et en France, la ministre de la Transition écologique a qualifié cet été de « basculement ». Alors que le changement climatique intensifie les vagues de chaleur partout sur la planète, de plus en plus de scientifiques étudient leurs effets sur notre santé. La chaleur nous fait elle vieillir plus vite ? La réponse est « oui », à en croire une étude publiée par un groupe de chercheurs taïwanais dans la revue Nature. Ces scientifiques ont observé plus de 20 000 personnes pendant quinze ans. C'est la première fois qu'une étude est consacrée aux effets de la chaleur à long terme sur le vieillissement de l'organisme humain. Déterminer notre âge biologique Il faut savoir que nous avons, tous, deux âges. L'âge chronologique, c'est-à-dire le nombre d'années écoulées depuis notre naissance, et l'âge biologique. L'âge biologique prend en compte la santé métabolique, la fonction des organes, la force musculaire, la mémoire, et d'autres indicateurs physiologiques. Pour déterminer le vieillissement dû à la chaleur, les scientifiques taïwanais ont régulièrement mesuré le taux d'albumine dans le foie, la pression sanguine et la capacité à expirer de l'air. C’était leurs indicateurs pour évaluer l'écart entre l'âge chronologique et l'âge biologique des personnes suivies. Le groupe de chercheurs a ensuite croisé ces données physiologiques avec leur lieu de résidence, pour calculer à quel point leurs patients ont été exposés à la chaleur au cours des années. Plus il fait chaud, plus rapidement notre organisme vieillit Plus un corps subit des températures élevées, plus son âge biologique dépasse son âge réel. Le quart des patients les plus exposés à la chaleur vieillit 3% plus vite par an. Cela semble peu. Mais ce pourcentage correspond à d'autres facteurs à risque, comme le stress, une mauvaise alimentation ou un manque d'activité physique qui font également vieillir notre corps plus vite. L'étude a aussi démontré que les personnes les plus affectées étaient les travailleurs manuels, les habitants de régions avec peu de climatisation et les résidents des zones rurales. Tous les âges concernés C'est la première fois que des travaux scientifiques démontrent que les effets d'une exposition répétée à la chaleur extrême s'accumulent sur le moyen et sur le long terme dans l'organisme humain. Et, deuxième nouveauté : tous les âges sont concernés. On savait déjà que les personnes âgées vieillissaient plus vite en raison de la chaleur. Mais on ne savait pas que cela concernait également les enfants. Or le vieillissement prématuré de notre organisme représente des risques, comme l'affaiblissement de notre système immunitaire, l'apparition de maladie et in fine le risque d’une mort prématurée. Cette étude est circonscrite aux habitants de Taïwan et on ne sait pas encore si ses résultats sont transposables à d'autres régions et d'autres populations. Mais elle met en évidence la corrélation importante entre vieillissement et températures élevées. À lire aussiLe réchauffement climatique affecte aussi notre santé mentale
Depuis lundi ONG, chercheurs et entrepreneurs - venus de 80 pays - sont réunis à Dakar pour parler innovation et transformation de l’agriculture en Afrique. La quinzième édition du Forum africain des systèmes alimentaires a placé la jeunesse au cœur des débats. C'est sur elle que repose la lourde tâche de mettre fin à l'insécurité alimentaire dont souffrent les populations africaines, alors que le continent compte 65% des terres arables de la planète. Le constat de Benjamin Njenga est alarmant : « La plupart des agriculteurs africains ont entre 50 et 60 ans ». Ce Kenyan a co-fondé en 2017 Apollo Agriculture, une entreprise technologique basée à Nairobi qui aide aujourd'hui près de 400 mille agriculteurs au Kenya et en Zambie à transformer leurs cultures de subsistance en agriculture commerciale. Pour attirer les jeunes vers l'agriculture, estime-t-il, il faut comprendre leurs besoins et lever les obstacles. « Nous devons investir dans des cultures qui permettent d'obtenir des rendements rapides. La plupart des jeunes veulent gagner de l'argent rapidement. Mais pour cela, il faut d'abord les aider à accéder à des financements. Puisque, poursuit Benjamin Njenga, beaucoup de ces jeunes n'ont ni de terres ni de capital à investir. Ils n'ont pas non plus de garanties. Nous devons donc être en mesure de leur proposer un financement très flexible ». Changement climatique : le défi ultime Un défi qui plane au-dessus de tous les autres, c'est le changement climatique. Selon les données de l'Organisation météorologique mondiale, l'augmentation des températures a déduit la croissance de la productivité agricole en Afrique de 34% depuis des années 1960. La vulnérabilité du continent africain est bien supérieure à celle observée dans d’autres régions du monde. Notamment, parce que « la plupart des petits exploitants agricoles dépendent encore de la pluie pour leur production », souligne Benjamin Njenga. « Très peu d'entre eux ont recours à l'irrigation. Cette dépendance à la pluie a un impact considérable dans l’ère du changement climatique alors que les sécheresses et les inondations sont plus fréquentes et plus longues. Les ravageurs et les maladies constituent également un défi majeur ». Investir dans l’adaptation et la résilience Il s'agit donc de permettre aux jeunes en Afrique d'accéder aux techniques d'adaptation aux effets du changement climatique. De très nombreux programmes existent déjà. Mais ces connaissances et le savoir-faire ne sont pas encore accessibles à tous. Et l'adaptation seule ne suffira pas à convaincre les jeunes Africains à se lancer dans l'agriculture, une voie certes essentielle pour nourrir le continent mais dont l'avenir s'annonce complexe. « Même si nous encourageons les jeunes agriculteurs à planter davantage d'arbres, à utiliser des semences plus résistantes à la sécheresse, à adopter des systèmes d'irrigation pour réduire leur dépendance à la pluie, nous devons continuer à les soutenir », souligne Benjamin Njenga. « Tout simplement parce qu'il va nous falloir continuer de produire de la nourriture malgré les sécheresses et autres catastrophes naturelles qui vont s'amplifier. Conséquemment, il faut également investir dans la capacité des agriculteurs à se relever après une catastrophe. Comment les aider à souscrire des assurances et transférer ainsi une partie des risques climatiques sur les marchés financiers ? Il reste donc encore beaucoup à faire dans ces deux domaines : aider les agriculteurs à s'adapter, mais aussi à résister au changement climatique ». Autant de questions éminemment politiques dont doivent s'emparer les parlements et les gouvernements africains. À lire aussiSénégal: le Forum des systèmes alimentaires africains s’ouvre à Dakar sous le signe de la jeunesse
Le secteur de la construction représente près d'un quart des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Face à l’urgence climatique, il tente de se décarboner. Conséquence : entre 2015 et 2035, le recours au bois dans la construction et la rénovation devrait y augmenter de plus de 30% en Europe. Mais si le bois est un matériau renouvelable, les forêts sont fragilisées par les températures et les sécheresses records. Pour atténuer ce dilemme, il existe pourtant une solution : le bois de réemploi. Comme son nom l'indique, le bois de réemploi est un bois qui a déjà servi et qu'on va réutiliser pour un usage similaire à celui pour lequel il a été initialement conçu. « On va, par exemple, retirer un parquet en bois de l'endroit où il est installé, puis on va le reconditionner, le poncer, ou le réparer s'il a été endommagé pour pouvoir le poser ensuite dans un autre endroit », explique Denis Blanchard, responsable de la filière bâtiment chez Ecomaison, un éco-organisme français qui organise la collecte, le tri, et la valorisation de meubles et de matériaux de la maison. Le bois de réemploi est différent du bois recyclé Le bois recyclé est également du bois qui a déjà servi mais qui est ensuite transformé par des procédés industriels pour devenir une nouvelle matière première, comme du bois qui est broyé pour ensuite fabriquer des panneaux. Le réemploi, au contraire, ne modifie ni la forme ni la fonction du bois. Il ne fait l’objet d’aucune transformation majeure. Les avantages écologiques sont évidents, estime Denis Blanchard : « Un produit de réemploi utilisé dans une construction a un impact carbone nul, parce qu'on économise la matière première. Ce sont autant d’arbres qu'on ne coupera pas. De plus, on économise toute l'énergie et la chaîne logistique autour du processus de fabrication du produit. Et puis la logique de réemploi se fera dans un périmètre géographique limité. Dans ce cas-là, on aura aussi un gain sur la partie transport. Donc le bois de réemploi est définitivement la meilleure proposition pour les enjeux de la construction de demain ». Le bois de réemploi : un bon réflexe pour les particuliers Pour les particuliers qui construisent ou rénovent leur logement, le bois de réemploi peut être une alternative plus écologique mais aussi plus économique. En France, ce sont avant tout « les entreprises sociales et solidaires qui, sous le nom de "recyclerie" ou "ressourcerie", proposent du bois récupéré sur des chantiers à des tarifs très intéressants », souligne le responsable d’Ecomaison. Une filière encore marginale En France, le secteur de la construction produit chaque année plus d'1,6 million de tonnes de déchets de bois. Mais pour l'instant seuls 1% à 2,5% sont valorisés dans le réemploi. Cela est dû, entre autres, aux règlementations qui rendent encore difficile la réutilisation du bois, notamment pour le gros œuvre. « Pour le gros œuvre, explique Denis Blanchard, il y a un système d’assurance décennale. Cela veut dire que le professionnel en charge du gros œuvre doit assurer une garantie décennale. Mais pour cela il faut que les assurances soient prêtes à réassurer des produits issus du réemploi. Or, cela constitue aujourd'hui une barrière. Par exemple, il est très difficile pour une charpente qui a été démontée d'obtenir une garantie décennale dans le cadre d'un nouveau projet. En revanche, pour tous les matériaux de seconde œuvre, comme une porte ou du faux plancher, il n’y a pas de frein assurantiel. Et dans ce secteur, le bois de réemploi prend aujourd’hui de plus en plus sa place. C’est un bon moyen d’éviter le gaspillage ». Reste l’urgence de décarboner le secteur de la construction pour freiner le changement climatique. Dans ce cadre, le réemploi du bois est l'un des éléments pour y arriver et figure d’ailleurs dans un nombre croissant de cahiers des charges de chantiers. La filière s'organise et se développe, en Europe et dans le monde entier.