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Afrique économie
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Author: RFI
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© France Médias Monde
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Chaque jour sur RFI, vivez la mutation de l'économie africaine. Chefs d'entreprises, décideurs, africains de tous bords et de toute condition témoignent dans Afrique Économie, votre rendez-vous de l'Économie africaine sur RFI.
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L’Afrique de l’Ouest est grandement dépendante de l'océan, cependant 20% des produits de la pêche illégale dans le monde serait issue de cette région. C’est pourquoi les États de la Cédéao s’organisent pour lutter contre la pêche INN, la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. La sous-région perdrait environ 2,3 milliards de dollars chaque année. Des programmes comme WASOP, porté par l'UE, tentent également de soutenir les États. Une lutte difficile sur le terrain, mais également. Avec notre envoyée spéciale à Mindelo, Ertzon Georges attend d’embarquer sur un petit bateau. « Ça a beaucoup changé. Quand j’ai commencé, dès que tu sortais, tu trouvais du poisson. Maintenant, il faut aller très loin », témoigne-t-il. Sur le petit débarcadère de pêche artisanale, beaucoup sont ceux qui attribuent la raréfaction du poisson à la pêche INN. La lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée se fait au niveau national, mais aussi régional, comme l'expliqué le Dr Khallahi Brahim, secrétaire permanent de la Commission sous-régionale des pêches, basé à Dakar. « Nous travaillons suivant trois axes. Un axe renforcement des capacités des États membres à travers des formations, à travers la fourniture de certains équipements et matériels. Le deuxième axe, c'est l’amélioration du cadre juridique avec l'élaboration et l'adoption de certains instruments juridiques qui permettent donc de cadrer l'action », détaille-t-il. « En dernier, c'est la lutte effective, mener des opérations conjointes. C'est-à-dire que nous prenons des patrouilleurs au niveau de notre sous-région et nous embarquons nos inspecteurs des pêches. Et donc, nous ratissons la zone pour voir s'il y a des bateaux qui exercent la pêche INN », ajoute le Dr Khallahi Brahim. Le développement de moyens technologiques comme l’imagerie satellitaire aide les États, mais les moyens techniques restent insuffisants face à la difficulté que représente la poursuite en mer. Il y a également parfois un manque de volonté politique, dénonce Jorge Santos, le ministre capverdien de la Mer. « On doit voir ce problème comme un problème de coopération internationale, mais aussi d’application des lois, parce qu’on a malheureusement, dans notre sous-région, des institutions, des personnes qui protègent ça », souligne le ministre. Il appelle ses voisins à réagir : « Il est nécessaire de définir une stratégie claire et transparente parce qu’à côté de la pêche illégale, existent le trafic de drogue, le trafic d'êtres humains, l’immigration illégale, le terrorisme et la piraterie. Ce sont des choses qui vont ensemble. » Des contrôles doivent notamment être réalisés par les pays côtiers avant que les produits de la mer soient exportés. Des contrôles auxquels participe l’Agence européenne des pêches. Certains manquements peuvent conduire l’Union européenne à appliquer des sanctions. Une position parfois hypocrite selon le ministre capverdien : « Je pense que s'il y a la pêche illégale, c'est parce qu'il y a un marché pour la pêche illégale. Mais où est le marché de la pêche illégale ? C'est à cette question que l'on doit répondre », interpelle-t-il. Des contrôles des certificats de captures sont également prévus à l’entrée sur le territoire européen. Des procédures peu respectées par certains États, souligne un rapport de la Cour des comptes européenne. Sollicitée par RFI, la Commission européenne assure s’attaquer au problème avec, par exemple, la numérisation du système de traçabilité prévue en début d’année prochaine. À lire aussiPourquoi faut-il combattre la pêche illégale?
Le gombo, que l'on retrouve d'ordinaire dans l'assiette des Sénégalais en soupe kandia, commence à se faire une place dans leurs salles de bain. Ce légume gluant, riche en antioxydants, possède des vertus hydratantes et anti-âge qui séduisent désormais les marques de cosmétiques locales. Reportage dans une entreprise dakaroise qui mise sur ce nouvel or vert. Avec notre correspondante à Dakar, Dans le laboratoire de la marque Trésors d'Afrique, à Dakar, on s'affaire autour des préparations. En blouse blanche, les employées ont des allures de scientifiques. « Ici, c'est pour la recherche et développement. Il nous arrive ici, au laboratoire, de changer un produit, ou bien de créer un nouveau produit », explique Ndeye Thiaba Diouf, la directrice des opérations, qui nous fait la visite guidée. Ici, avec la gamme « Chouette mama », priorité aux produits locaux : aloe vera, bissap, karité, mais aussi le gombo, ce petit légume vert et gluant qu'on connaît surtout en cuisine. Ndeye Ndiapaly Diouf, responsable du laboratoire émulsion, en extrait le jus. « Ici, on fait des crèmes, des laits et des sérums. Le lait de gombo, on le fabrique à base de gombo naturel frais qu'on achète au marché, et toujours avec de l'eau déminéralisée. On met de l'eau et on laisse macérer jusqu'au lendemain », détaille-t-elle. 27 000 produits Trésors d'Afrique vendus Ce mucilage, un jus épais issu du gombo, est intégré à plusieurs produits : shampoings, crèmes pour le visage ou pour le corps... Très hydratant, le légume se révèle aussi un puissant anti-âge. « De la même manière que le baobab traite l'acné et la peau grasse, le gombo, son travail, c'est l'anti-âge. À partir de 25 ans, on commence à ne plus avoir le collagène dont on en a besoin pour avoir une peau lisse et tout ce qui va avec. Donc le gombo est là pour compléter cela », promeut-elle. Ce secret est encore méconnu au Sénégal, où le gombo reste surtout associé à la soupe kandia. Seules quelques femmes l'utilisent déjà pour nourrir leurs cheveux. Chaque année, 27 000 produits Trésors d'Afrique sont vendus dans plusieurs points de vente au Sénégal, mais également en ligne vers l'étranger. « D'après les études qu'on a fait, ce sont les étrangers, les expatriés et même les Sénégalais qui viennent de l'extérieur qui achètent plus nos produits. La marque, malheureusement, est connue plus à l'étranger qu'au Sénégal », note Ndeye Ndiapaly Diouf. À lire aussiPensez à consommer du Gombo ! Le marché global des cosmétiques pour l'Afrique est en plein boom Une campagne marketing est en préparation pour faire découvrir ces cosmétiques made in Sénégal aux Sénégalaises. Et, pour les producteurs, c'est une nouvelle filière pleine de promesses. À Thiès, Mamour Gueye, producteur de gombos qui exporte une partie de sa production vers la France, y voit un débouché local bienvenu. « C'est plus avantageux de vendre sur le marché local que de faire de l'export », assure l'agriculteur. « Sur le marché local, il n'y a pas de contrainte. Par contre, quand tu envoies ton gombo, deux jours après, on te fait des réclamations sur le noircissement du produit. Tout ne peut pas aller à l'exportation. Donc s'il y a de la transformation, c'est vraiment une bonne chose », poursuit Mamour Gueye. Le marché global des cosmétiques pour l'Afrique est en plein boom. Il devrait passer de 3,87 milliards de dollars en 2024 à plus de 7 milliards en 2033. À lire aussiEntre modernité et tradition : les routines beauté qui marchent
Sur le continent, le défi des infrastructures est immense. L’Afrique accuse dans ce domaine un déficit de financement de plus de 100 milliards de dollars par an. Un déficit d’autant plus difficile à combler que les pays donateurs diminuent leur participation. Sur le continent, de plus en plus d’acteurs appellent à l’augmentation des financements africains, pour réduire la dépendance extérieure. De notre correspondante à Luanda, Alors que de nombreux pays occidentaux ont réduit cette année leur enveloppe dédiée à l’aide au développement, les pays africains doivent plus que jamais repenser leur mode de financement des infrastructures. Un défi mais aussi une opportunité. « Ce sont les aides qui ont diminué, ce qui est une très bonne chose, parce que c'est de la dette, juge Amine Idriss Adoum, directeur en charge des infrastructures à l’agence de développement de l’Union africaine-NEPAD. Nous croyons de plus en plus que l'Afrique ne peut pas se développer avec de l'argent qui vient de l'extérieur. L'Afrique doit se développer avec un financement qui est domestique. » À lire aussiL’Afrique doit-elle renoncer à l’aide publique au développement ? Mobiliser le financement domestique Ce financement domestique existe, mais il reste difficile à mobiliser pour les projets locaux. « Nous accusons souvent les pays étrangers, les médias internationaux de parler du risque en Afrique. Mais nous devons faire le premier pas nous-mêmes, estime l’économiste. Nous avons environ 4 000 milliards de dollars d'actifs qui appartiennent à nos différents fonds de pension, à nos fonds souverains, etc. Et, malheureusement, ces actifs ne sont pas investis en Afrique dans des activités productives », déplore-t-il. Pour attirer les investisseurs privés, il est nécessaire de rendre les projets d’infrastructures plus attractifs car le continent souffre d’une perception de risque élevé. « Un problème fondamental pour le financement des infrastructures en Afrique, c’est le coût très élevé du capital, explique Federico Bonaglia, directeur adjoint du centre de développement de l’OCDE. Pour réduire ce coût du capital, il faut que les projets soient bien ficelés. » Rendre les projets bancables Une priorité donc pour rassurer les investisseurs, y compris ceux du continent : avoir des projets bancables. Nombre d’entre eux, comme les projets hydroélectriques dans le bassin du Congo, le plus notable étant le barrage du grand Inga, sont en effet enlisés depuis des années. Notamment à cause de problèmes de gouvernance. « Si vous devez investir dans la production d'électricité, vous devez être sûr qu'il y a quelqu'un qui va acheter cette électricité, souligne Federico Bonaglia. Et ceci touche à des sujets tels que la gouvernance d'entreprise. Un exemple qui a réussi, c'est l'Egypte avec l'énergie solaire. Parce qu'ils ont travaillé sur ces questions, justement, de gouvernance d'entreprise et de qui va racheter derrière l'énergie qui sera produite. » Au sommet de Luanda, l'Alliance des institutions financières multilatérales africaines, a sélectionné avec le NEPAD, l'agence de développement de l'UA, onze projets prioritaires, avec un objectif de financement d’un montant initial de 1,5 milliard de dollars. Parmi eux : une liaison maritime entre les îles des Comores ou encore une voie ferrée entre le Tchad et le Cameroun. À lire aussiBanque africaine de développement: le nouveau président invite à «changer de paradigme» face aux défis du continent
Un peu plus de six mois après le lancement de la bourse des matières premières agricoles, RFI se plonge dans ce système encore en phase pilote, censé fluidifier les transactions de trois produits : le maïs, la noix de cajou et la noix de cola. Concrètement, les échanges se fondent sur des « récépissés d'entreposage » censés garantir la traçabilité des marchandises et donc la transparence de la filière. Plongée dans ces entrepôts. De notre correspondant à Abidjan, C'est un trésor caché dans des dizaines de milliers de sacs en toile de jute empilés sur des palettes dans des hangars poussiéreux. À l'intérieur, 8 000 tonnes de noix de cajou. Joyce en est le gardien. Masque chirurgical sur le visage, ce gestionnaire d'entrepôt explique son métier : « Ça consiste à suivre un camion, une marchandise livrée par un fournisseur. C'est de vérifier que c'est stocké dans les normes. Le risque du produit est sur le compte du gestionnaire d'entrepôt, donc on tient compte de cela jusqu'à la sortie du produit. » En plus de services de manutention, la société de Joyce, Diaouné Frères, gagne 5 francs CFA par mois pour chaque kilo de noix de cajou gardé dans ses entrepôts homologués par l'Arré (Autorité de régulation des récépissés d'entreposage). Une affaire jugée rentable par la directrice générale de l'entreprise, pour qui ce système améliore la confiance des acheteurs. Surtout, Joyce émet les récépissés d'entreposage. Une carte d'identité de la marchandise où figurent, entre autres, le propriétaire, mais aussi le poids et la qualité du stock, certifiés par des contrôleurs agréés. À lire aussiDes avancées économiques et sociales grâce à l'amélioration du stockage en Afrique [2/2] Une mission : élargir le système d'entreposage à la filière cacao Le récépissé est aussi un titre de propriété, qui peut être négocié à la bourse des matières premières agricoles, voire utilisé comme un « gage » auprès des banques en vue de refinancer l'activité des producteurs. Pour Justin Koffi, directeur général de l'Arré, ce système commence à faire ses preuves. « Nous sommes aujourd'hui dans tous les entrepôts, à peu près à une vingtaine de milliards de francs CFA de transactions (30 millions d'euros). Donc ce système aussi a été mis en place dans le but d'installer des bourses physiques comme la bourse des matières premières agricoles qui a commencé par l'anacarde, le maïs, la cola. » Justin Koffi espère élargir le système d'entreposage à la filière cacao entre autres. « Ça permettra au producteur d'avoir une traçabilité réelle » Le docteur Henry Biego est directeur exécutif de l'Intercola, l'interprofession des producteurs et négociants de la noix de cola, dont la Côte d'Ivoire est l'une des principales productrices. Lui voit le système des récépissés d'entreposage comme une opportunité d'amélioration de la transparence de sa filière et un moyen d'atteindre des marchés au-delà de la seule Afrique de l'ouest, qui représente 90% des exportations ivoiriennes. « Ça permettra au producteur d'avoir une traçabilité réelle sur sa noix de cola depuis sa plantation, une idée du prix, de la cotation, et d'avoir une traçabilité sur le client éventuel. C'est vraiment de donner de la crédibilité et de la traçabilité au niveau de la filière, et au niveau étatique. Ça va également permettre d'avoir des spécifications au niveau de la qualité de ces noix, et en retour, de permettre aux producteurs de produire les noix pour ces marchés-là », développe-t-il. Aujourd'hui, la Côte d'Ivoire compte une dizaine d'entrepôts homologués d'une capacité totale de 33 000 tonnes. Près de 17 000 tonnes de produits y sont actuellement stockées, essentiellement de la noix de cajou (98%). À lire aussiCôte d'Ivoire: la filière de la noix de cajou, exemple de coopération entre Européens et Africains
L’Afrique de l’Ouest fait face à une émigration importante de sa jeunesse, notamment vers l’Europe. C’est le cas au Cap-Vert, particulièrement depuis que le Portugal – en quête de main d’œuvre – a mis en place un visa pour faciliter l’entrée des populations lusophones. Dans un pays d’1.4 million d'habitants, ces départs sont durement ressentis dans les milieux économiques. Avec notre envoyée spéciale à Mindelo, À l’entrée de l’usine de conserves de Frescomar, les employés doivent pointer, car sur les 1 200 personnes nécessaires pour faire tourner l’entreprise, difficile de savoir si les employés vont se présenter, explique son directeur Manuel Monteiro. « En termes de main-d'œuvre, nous sommes confrontés à un défi, car ces dernières années, nous avons connu un flux massif de jeunes qui ont émigré. Nous perdons beaucoup de travailleurs, à la fois des techniciens et des ouvriers », explique-t-il. Le directeur explique que depuis le mois d'août, Frescomar a reçu plus de commandes et les besoins de production ont augmenté. « Nous cherchons donc de la main-d'œuvre pour cela, mais nous n'en trouvons pas. L'entreprise étudie même la possibilité de faire venir de la main-d'œuvre d'autres pays, car nous savons que les hôtels ont déjà commencé à procéder ainsi », met en avant Manuel Monteiro. Les départs ont « laissé un vide ici » Même son de cloche au port. Depuis la mise en place des facilités de migration vers le Portugal, Suzane Vicente voit disparaître les professionnels du secteur formés. « Cette ouverture a facilité l'immigration des Capverdiens au Portugal. Je pense que cela a beaucoup contribué. Par exemple, de nombreux pêcheurs sont partis aux Açores, déplore le président de l’Association des armateurs de pêche. C'est une grande perte pour nous en tant qu'armateurs ne pas avoir de professionnels dans le secteur. Cela finit par compliquer la pêche. Il y a beaucoup de pêcheurs, de maîtres d'équipage et de conducteurs qui ont donc émigré à la recherche d'une vie meilleure et cela a laissé un vide ici », poursuit Suzane Vicente, qui regrette un certain désamour envers la profession. « Il existe un programme de formation à la pêche, mais nous devons le généraliser. Nous devons également sensibiliser la jeune génération, qui n’est pas très attirée par le secteur de la pêche », note-t-il. Pays insulaire, fort de 1 000 km2 de côtes, le Cap-Vert cherche à créer de l’emploi dans le secteur de l’économie bleue pour donner des perspectives à sa jeunesse. Créer de l’emploi localement pour limiter les flux migratoires, un enjeu pour l’Union européenne. C'est pourquoi elle investit dans des programmes comme WASOP en Afrique de l’Ouest afin de créer de l’emploi. « C'est une manière de faire en sorte que chacun puisse trouver des emplois où il est, dans sa ville, dans son pays, dans sa région, et donc c'est évidemment un enjeu absolument majeur de développement pour l'ensemble du continent africain, explique Jérémie Pellet, directeur d’Expertise France – l’agence en charge de la coordination du programme. Et de manière générale, pour l'ensemble des populations. » L’économie bleue représenterait un potentiel de huit millions d’emplois supplémentaires dans la région. À lire aussiCap-Vert: la jeunesse regarde vers les États-Unis
La guerre a stoppé la production agricole dans certaines régions. Alors que la période de semis d'hiver vient de commencer, les autorités soudanaises, basées à Port Soudan et soutenues par la 'agence des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), s'efforcent de la relancer. À environ 100 km au sud de Khartoum, le projet Gezira est l'un des plus grands projets d'irrigation au monde. S'étendant sur un million d'hectares, il regroupe certaines des terres les plus fertiles du pays, situées au confluent des fleuves du Nil blanc et du Nil bleu. Avant la guerre, cette région produisait plus de la moitié des céréales du pays, incluant blé, sorgho, millet, légumes, arachides et coton. Aujourd'hui, l'activité agricole est presque à l'arrêt. Les fermiers ont fui, et le matériel a été pillé. Tout doit être reconstruit, explique le professeur Timmo Gaasbeek, expert en sécurité alimentaire. « Le projet Gezira a été très affecté par les combats entre l’armée soudanaise et les forces paramilitaires. Tous les équipements ont été pillés par ces paramilitaires : les pompes pour l’irrigation, les tracteurs. Et cela va être difficile de remplacer cet équipement. Le pays n’a pas de dollar, et donc si vous n’avez pas d’argent, vous ne pouvez pas importer ce dont vous avez besoin. Et même si vous arrivez à planter, si vous n’avez pas d’engrais, la production sera faible. Les Soudanais sont en train de revenir, mais cela va être difficile de relancer la production. » Avec la guerre, la production agricole du Soudan a chuté drastiquement. Le pays est passé de six millions de tonnes de céréales par an à moins de trois millions. Certaines régions productrices, comme Kassala et Gedaref dans l'Est, ont été épargnées, tandis que d'autres comme Gezira et Sennar, dans le Sud-Est, ont été entièrement détruites. Les défis des petits producteurs La principale difficulté pour les petits producteurs est d'obtenir des crédits pour financer la reprise de leurs cultures. Hongjie Yang, directeur de la FAO au Soudan, explique les efforts en cours pour soutenir les agriculteurs. « Nous travaillons afin de soutenir les agriculteurs dans la plantation de la saison d’hiver, principalement des légumes. En tant qu’organisation technique, nous mobilisons les fonds pour soutenir ces agriculteurs, en leur fournissant des semences de bonne qualité et en remettant sur pied les infrastructures. Un des fermiers que j’ai rencontrés m’a expliqué qu’avant la guerre, ils utilisaient des pompes pour faire venir l’eau dans leurs champs. Aujourd’hui, ce matériel est cassé. Ils ont donc besoin d’aide pour acquérir des pompes, ils ont besoin d’électricité pour les faire fonctionner. Et s’il n’y a pas d’électricité, nous leur fournissons des panneaux solaires pour faire marcher ces pompes. » Le mois dernier, la FAO a également lancé un programme de vaccination du bétail pour relancer l'élevage. Le Soudan était autrefois le plus grand pays d'élevage et d'exportation de bétail d'Afrique de l'Est, avec plus de 100 millions de têtes de bétail, représentant plus de 20 % du PIB du pays. À lire aussiLe Soudan du Sud, déjà dans une situation extrême, n'a jamais reçu si peu d'aide internationale
Au Congo-Brazzaville, les petites et moyennes entreprises ont beaucoup de peine à se financer pour croître et investir. Afin de les soutenir, la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale pour le secteur privé, a accordé à Bank of Africa-Congo un prêt de 14,5 milliards de francs CFA (quelque 21 millions d’euros) qui doit donc servir à financer les entreprises locales. Avec notre correspondant à Brazzaville, Un certain nombre de PME dans la cible et qui devraient bénéficier de prêts font déjà des projets. Ilithe Ongania dirige depuis neuf ans le Système d’observation et de reconnaissance aéroterrestre et maritime ou SORAM. Aux yeux de ce patron de PME, la ligne de financement allouée par la SFI à Bank of Africa-Congo sera bénéfique, car au Congo-Brazzaville, les PME reçoivent encore assez peu de soutien. « Nous, les jeunes entreprises, nous avons besoin de grandir. Et, pour grandir, vous avez besoin d’un levier. Les leviers, il y en a beaucoup, mais le plus important généralement, c'est le financement. Dans la culture des banques commerciales de notre environnement, il est très difficile d’avoir accès à des crédits d’investissement », explique ce patron. Une frilosité des banques qui « freine le développement de nos entreprises ». Cet acteur espère que ce financement de la SFI va créer des opportunités pour « développer l’entreprise, devenir plus grand, investir parce qu’il y a un besoin de faire beaucoup plus d’investissements, afin de répondre aux différentes demandes qui sont là. » Au moins 10% des financements pour les femmes entrepreneuses Acquérir davantage de drones est l’un des objectifs de Soram, qui tient à satisfaire les besoins de ses différents clients. Selon les signataires de l’accord de prêt, au moins 10% seront dédiés aux entreprises dirigées par des femmes. Ce dont se réjouit Francine Nzamba, directrice générale de l’entreprise FN2 plus, qui exerce dans le graphisme et l’imprimerie. « Dans ce pays, il y a quand même des femmes qui entreprennent, mais nous ne sommes pas entendues. Nous voulons avoir une place, prendre une place dans l’économie congolaise. Si les banques commencent à nous accompagner dans notre développement, ça ne peut être qu’une bonne chose pour nous », lance-t-elle. Promotrice de la société Glacy Congo, spécialisée dans la transformation des fruits congolais en glaces, Christine Matondo connaît des difficultés d’approvisionnement en énergie, et elle fait déjà des projets. « J’espère qu’avec ce prêt, on va pouvoir passer aux panneaux solaires ; gagner en indépendance vis-à-vis de l’énergie. Je suis très confiante parce que je suis déjà bénéficiaire des services de la Bank of Africa », se félicite-t-elle. Les prêts vont jusqu'à 50 millions de francs CFA, l'équivalent de 76 000 euros, remboursables sur deux ans. Le taux d'intérêt, aux environs de 10%, est jugé satisfaisant par ces PME, qui n'obtiennent que très rarement un crédit. À lire aussiDévelopper les PME en Afrique: le défi de l’investissement
Au Sénégal, les grands chantiers se multiplient : routes, logements, chemins de fer… Derrière cette frénésie de construction, il y a une filière souvent méconnue, mais essentielle, celle des carrières : de sable, de calcaire, d'argile ou encore de basalte. Si la demande est forte et constante, le secteur doit encore composer avec des conditions de travail difficiles et un accès à l’électricité souvent limité. Sable, calcaire, argile… Le Sénégal est riche en matériaux de construction, indispensables aux chantiers qui pullulent dans le pays. « Là, c'est le sable siliceux qu'on peut utiliser dans la verrerie, détaille Bob Adama Dione, enseignant chercheur en géotechnique à l’École nationale des mines. Il y a aussi les sables utilisés dans la construction, qui sont des sables que l'on mélange avec le ciment. Ensuite les cailloux et enfin le béton. » La demande est constante pour les carrières du pays, comme celles de CSE Granulats, qui exploite du basalte. « Il y a de la demande, constate Mor Thiam, directeur des opérations. C'est du matériau très prisé. Nous, on est arrivé en 2018. On est à peu près les derniers arrivés. On a des concurrents, mais on a quand même réussi à se faire une place. » Peu d'automatisation Le secteur est dynamique, tiré par les projets d’envergure tels que le Train express régional. « La demande va beaucoup dépendre des gros projets de l'État, reconnaît Mor Thiam. Il y a eu le projet de la [ligne de train] TER pour le réseau ferroviaire, par exemple. Tout ce qui est ballast, ce sont des choses qu'on va produire pour les chemins de fer. Le port de Ndayane, qui est actuellement un gros projet pour l'État, a besoin de gros blocs. » Le travail en carrière reste difficile, poussiéreux et largement manuel. Malgré cela, les entreprises n’ont pas de mal à recruter, dans un pays où le chômage avoisine les 20 %. Certaines visent désormais une montée en gamme, avec l’automatisation progressive des activités. « Quand on prend l'exemple des carrières en France, qui sont plutôt automatisées, il faut dix ou quinze personnes pour faire tourner une carrière qui produit entre 300 et 600 000 tonnes l'année, compare Mor Thiam. Nous, dans nos carrières, on est quand même sur des centaines de personnes. » Problèmes d’électricité Un obstacle freine encore cette ambition : l’accès à une électricité fiable, indispensable pour alimenter des équipements plus modernes et réduire les coûts de production. Un enjeu suivi de près par la Société financière internationale, qui appuie la structuration du secteur minier. « On sait que le déficit énergétique en Afrique est important, concède Fatoumata Sissoko Sy, manager Infrastructures et ressources naturelles de la SFI pour l'Afrique de l'Ouest. Parfois, pour un projet minier, le coût de l'électricité peut représenter jusqu'à 35 % du coût total. C'est considérable. Les mines utilisent souvent des sources alternatives comme des générateurs diesel, des centrales électriques qu'elles-mêmes construisent. » Le secteur espère aussi tourner la page des difficultés traversées ces dernières années : les retards de paiement de l’État ont fragilisé de nombreuses entreprises du BTP, ralentissant les chantiers et la demande en matériaux.
Avec une bande côtière de 30 000 kilomètres, l’économie de l’Afrique de l’Ouest est éminemment dépendante de l’océan. Les secteurs liés correspondent à 55% du PIB de la région. « L’économie bleue » représente donc une réelle opportunité. Cependant, les activités humaines, la surpêche, la pollution, le changement climatique mettent en péril cette ressource précieuse. Environ 12 milliards de dollars d’investissements seraient nécessaires pour financer une « économie bleue » durable, un secteur en cours de structuration. Avec notre envoyée spéciale à Mindelo, Avec un potentiel estimé à 405 milliards de dollars pour la région d'ici à 2030, il semblait évident pour le Cap-Vert, petit État insulaire, de se tourner vers les opportunités qu'offre l’économie bleue. Praia a donc été parmi les premières à se lancer dans les « blue bonds », ces émissions obligataires lancés par la Banque mondiale pour financer la protection des océans. « On l'a lancé depuis deux ans. Maintenant, avec les "blue bonds", les banques financent des activités dans le domaine de l'économie bleue, au niveau du tourisme, de la pêche, de la transformation et de l’aquaculture. Avant, les gens disaient que l'économie bleue était un secteur de risque élevé. Mais ils commencent à voir que cela ne représente pas un risque si élevé. C'est possible, c'est virtuose. Elle peut donner beaucoup de revenus à l’économie et aux familles », explique le ministre de la Mer, Jorge Santos. La Banque ouest africaine de développement (BOAD) s'implique déjà dans ce secteur, comme l'explique son « monsieur climat », Ibrahim Traoré. Pour le dernier plan quinquennal – qui se termine cette année –, la banque s’est donnée comme objectif de verdir 25% de ses financements. Parmi eux, certains sont en réalité des projets « bleus », comme les investissements réalisés au niveau des ports, de la « green économie » ou le financement de digues. La stratégie de la banque est donc d’aujourd’hui de « faire en sorte que la différence entre l'économie verte et l'économie bleue soit distincte et que les critères d'investissement et les critères en lien avec la question du changement climatique soient bien définis et bien déterminés ». Faciliter l'accès aux financements localement L'agence française de coopération technique, Expertise France, souhaite contribuer à ces chantiers et travailler notamment à la construction d’une architecture financière adaptée. Avec le nouveau programme européen Océan durable de l'Afrique de l'Ouest (WASOP), Laure Kuhn Bruma, sa coordinatrice, souhaite poursuivre le travail mené avec la Banque d'investissement et de développement de la Cédéao (BIDC). Celle-ci a obtenu son accréditation auprès du Fonds vert pour le climat et développé une ligne de crédit pour l’agriculture durable. « On est en train de voir avec la BIDC s'il est possible de ‘’blue-iser’’ en quelque sorte cette ligne de financement. Cela pourrait avoir du sens afin – avec notre assistance technique – d'identifier et de développer un produit financier qui soit adapté à l'économie bleue durable », détaille Laure Kuhn Bruma. Objectif : permettre des retombées de financements locaux plus importants : « La BIDC va chercher des fonds auprès d'un organisme multilatéral qui va permettre de développer des lignes de financement dans les banques nationales, commerciales et institutions de microfinance. On a un accès au financement qui est amélioré. » Début novembre, au Cap-Vert, les banques de développement ouest-africaines ont également rejoint la Coalition océan du réseau Finance en commun (FiCS) avec l'ambition de mobiliser près de 12 milliards de dollars pour une économie bleue durable dans la région. À lire aussiLa «blue economy», le nouvel eldorado maritime pour les investisseurs?
La Libye est toujours divisée entre un Gouvernement d'unité nationale (GUN), installé à Tripoli, et un Gouvernement de stabilité nationale (GSL), basé à Benghazi. Pour accélérer la reconstruction libyenne, chacune des entités a créé une zone économique spéciale sur la côte méditerranéenne : celle de Misrata à l'ouest et celle de Syrte à l'est. Les représentants de ces zones franches se sont retrouvés dans la même enceinte à Paris, invités par la France à faire la promotion de la Libye auprès des entreprises françaises. C'est une première. L'événement Ambition Africa, à Paris, est sponsorisé par la « Misurata Free Zone » (zone franche de Misrata), une émanation du Gouvernement d'unité nationale (GUN) de Tripoli, en Libye. Le directeur général de cette zone franche de l'ouest libyen, Ayman Hmeida Al-Derwish, en fait la promotion auprès des investisseurs français : « Il s'agit d'une zone de 750 hectares comprenant un port et la zone d'investissement, précise-t-il. C'est l'un des plus grands ports libyens. Il reçoit près de 65% des marchandises entrant en Libye. Récemment, la zone franche de Misrata s'est tournée vers les services pétrochimiques, dans le port. » Les investisseurs y bénéficient d'une exonération totale des droits de douane et des taxes pendant la durée de leur investissement, ainsi que de la pleine propriété de l'entreprise au sein de la zone franche. L'ouest mise sur le port de Misrata, l'est sur l'aéroport de Syrte L'autorité rivale, le Gouvernement de stabilité nationale (GSL) de l'est libyen, n'est pas en reste. Le directeur de son Agence nationale de développement, Mahmud Elforjan, fait la promotion, lui, de la zone franche autour du nouvel aéroport de Syrte : « L'aéroport de Syrte est un aéroport vital au centre de la Libye, plaide-t-il. Il accueille plus de trois millions de voyageurs par an et il est situé à un point stratégique reliant l'est et l'ouest de la Libye et reliant la mer Méditerranée au cœur de l'Afrique. Les entreprises françaises sont invitées à investir et à travailler avec nous dans les domaines de la reconstruction, des infrastructures, de l'agriculture, de la logistique et du commerce, dans le cadre des nombreux projets que nous lancerons prochainement. » « Les entreprises françaises ne sont pas visibles en Libye » Pour l'heure, les investisseurs français sont largement doublés par leurs concurrents en Libye. « Tous nos concurrents y sont : les Italiens, les Allemands, les Espagnols, les Américains, les Turcs, les Égyptiens, les Chinois, etc. Les entreprises françaises ne sont pas présentes ou pas visibles en Libye, déplore Philippe Garcia, le directeur Afrique du Nord de Business France, l'agence publique chargée d'accompagner les entreprises françaises à l'étranger. Partant de ce constat, notre rôle, depuis 2023 – et on l'accentue cette année et en 2026 –, c'est de voir à quel point toutes les opportunités qu'on nous présente, à l'est comme à l'ouest, sont sérieuses, et elles le sont. Quels sont les délais de réalisation ? Quels sont les financements mis à disposition ? Notre boulot, c'est aussi de dérisquer l'activité des entreprises françaises. » La division de la Libye en deux entités politiques n'est pas ou plus un problème ni pour l'ambassadeur de France, ni pour Business France, qui a signé un protocole d'accord avec les deux zones franches libyennes. L'agence française organisera également, au premier semestre 2026, un tour de France pour les importateurs libyens de biens de consommation, afin de leur faire découvrir les produits français. À lire aussiLibye: Misrata, après la guerre, les affaires
Les autorités de Tunis s'en sont félicitées : les investissements étrangers ont augmenté de 28 % dans le pays sur les neuf premiers mois de 2025, grâce aux secteurs de l'énergie et de l'industrie. Mais les petites et moyennes entreprises (PME) tunisiennes bénéficient très peu de ces financements. L'an dernier, elles ont connu des investissements en hausse de 12 %, un chiffre qui reste insatisfaisant selon les entrepreneurs et les économistes. De notre correspondante à Tunis, « Pour répondre aux aspirations du peuple tunisien en emplois, en liberté et en dignité, nous sommes conscients qu'il subsiste encore beaucoup d'entraves à l'investissement et que d'autres réformes restent à entreprendre », admet le ministre de l'Économie Samir Abdelhafidh, lors d'un colloque sur l'investissement et l'attractivité économique. Car des freins perdurent encore pour l'investissement en Tunisie, malgré une croissance remarquée cette année. Depuis 2018, les autorités ont pourtant supprimé une cinquantaine d'autorisations auxquelles les investisseurs devaient auparavant se soumettre. Mais les problèmes de logistique, de numérisation, les lourdeurs structurelles et un manque de cadre juridique clair sont toujours des obstacles, observe la femme d'affaires Wafa Makhlouf : « Beaucoup de marchés sont encore fermés, régulés ou contrôlés par des oligopoles. Donc, cela empêche l'arrivée de nouveaux acteurs et bride la concurrence. Même si on libère les secteurs, sans un cadre juridique clair et stable, les investisseurs resteront méfiants. » L'économiste Ridha Chkoundali souligne également la nécessité de réformes plus profondes pour améliorer l'investissement dans les entreprises locales. « Sur le plan institutionnel, les taux d'intérêt sont trop élevés, les marchés financiers financent très peu les investissements, la charge fiscale est très élevée pour les entreprises formelles face à une économie informelle très développée », détaille l’expert. Dans la nouvelle loi de finances discutée au Parlement, l'investissement est très focalisé sur les « entreprises communautaires » : les coopératives à but social lancées par le président de la République. « Le projet de loi de finances 2026 considère que la croissance ne peut provenir pour une grande part que des entreprises communautaires. Il met à leur disposition des mesures très incitatives, mais aussi, il prévoit quelques lignes de financement à montant très faible pour les petites et moyennes entreprises ou les petits agriculteurs, détaille Ridha Chkoundali. Il me semble que les entreprises communautaires ne peuvent en aucun cas remplacer le secteur privé, et ils ne peuvent être qu'un complément. » Aujourd'hui, le pays compte 230 entreprises communautaires, dont 60 sont actives. Mais il est encore trop tôt pour mesurer leur impact dans l'économie. À lire aussi«Tout le monde sort malade»: à Gabès, la colère des ouvriers du Groupe chimique tunisien
Le Sénégal dispose de gisements d’or, de phosphates, de zircon, de matériaux de construction, mais le secteur a longtemps été dominé par les compagnies étrangères. Aujourd’hui, le secteur minier sénégalais veut miser sur les compétences locales. Avec 32% des exportations du pays et une demande d’emplois croissante, il s’impose comme un levier de développement économique à condition de retenir les talents formés sur place. Avec notre correspondante à Dakar, Au Salon des Mines à Dakar, les allées ne désemplissent pas. Les jeunes diplômés affluent, CV en main, pour tenter leur chance auprès des sociétés minières présentes. « Connaissez-vous les mines ? Avez-vous de l’expérience dans le domaine minier ? », questionne un potentiel recruteur. Neuf cents candidatures reçues pour à peine une centaine de postes. Mais les besoins sont en constante augmentation confirme Binta Gueye Fall, secrétaire générale de l’amicale des diplômés de l’École supérieure des mines et de la géologie : « Il y a de plus en plus de sociétés parce qu'on sait que le Sénégal est devenu un pays minier, donc on a un très fort potentiel. On voit que côté exploration, il y a énormément de sociétés. Côté exploitation, il y en a des sociétés qui vont, d'une année à l'autre, passer à l'exploitation des gisements. » Les candidats, souvent encore étudiants, rêvent d’un avenir dans un secteur jugé prometteur, comme Abdou Karim Seck, 23 ans, élève ingénieur en électromécanique à l’École polytechnique de Dakar. « Dans la promotion, je pense que tout le monde cherche dans ce secteur. C'est notre secteur de rêve, car il est en pleine extension et aussi, c'est un secteur qui paye bien », témoigne-t-il. « Il faut savoir que trouver du travail au Sénégal, ce n’est pas facile. Beaucoup d'entreprises privilégient les contrats de stage, souligne Ousseynou Ndoye, étudiant ingénieur en génie des procédés. Mais je pense que j'aurai l'opportunité de trouver un travail ici, au Sénégal, mais la possibilité d'aller à l'extérieur pour pouvoir chercher du travail, je ne l’écarte pas. » « Nous allons proposer des situations compétitives » Alors pour retenir ces jeunes spécialistes au Sénégal, les sociétés savent qu’elles doivent, elles aussi, s’adapter. Moustapha Niang est responsable RH de la société sénégalaise minière Boya, qui s’apprête à exploiter deux sites dans le sud du pays : « Le marché est ouvert, mais quand même, nous allons proposer des situations compétitives, donc des situations de vie en entreprise compétitives par rapport à l'étranger pour les maintenir ici, avec peut-être l'aide de l'État et des pouvoirs publics. » La Mauritanie voisine suit la même voie : elle mise désormais sur la formation locale et veut remplacer progressivement les postes d’encadrement par des nationaux. Ibrahima Bâ Madine, directeur de la promotion et de la géologie minière au ministère des Mines mauritanien. « Il y a certaines qualifications dont ne disposent pas les Mauritaniens. Donc faire en sorte que les Mauritaniens secondent les expatriés pour pouvoir à long terme assurer les postes qu'ils occupent. Cela va permettre, entre autres, donc le passage de transfert de compétences, mais aussi augmenter un peu l'assiette d'emplois », explique-t-il. Avec plus de 235 milliards de francs CFA de revenus en 2022, le secteur minier sénégalais pèse désormais 4,5 % du PIB.
Environ un quart du PIB du Cap-Vert vient du tourisme. L’année dernière, le pays a accueilli plus de 1,4 million de touristes sur ses îles, près de trois fois sa population, un secteur qui croît de plus de 10% chaque année. Une croissance portée par la volonté politique et l’aménagement d’infrastructures comme un port de croisière à Mindelo, ou encore l’arrivée récente de dessertes aériennes à bas coût d’easyJet. Cependant, les écosystèmes de l’archipel sont très sensibles : biodiversité, tortues, lieu de naissance des baleines. Développer un tourisme durable, c’est le défi que se sont lancées les autorités cap-verdiennes. Avec notre envoyée spéciale à Mindelo, C’est le début de la saison touristique sur l’archipel. À Mindelo, au marché artisanal, les vendeurs attendent avec impatience les touristes, comme Ndiagua, d’origine sénégalaise. Il y a quelques jours, un bateau de croisière de plusieurs milliers de personnes a accosté, une aubaine pour ce marchand. « On souhaite avoir des bateaux comme ça, les grands bateaux de croisière, c'est mieux pour nous. C’est un bon business. Quand ils arrivent en bateau, ils descendent, ils vont faire le tour de l’île avec des guides, ils font le tour de la ville, puis ils viennent ici au marché pour faire des achats », se réjouit-il. Haut comme un bâtiment de 12 étages, le Mein Shiff n’est pas passé inaperçu. « C'est un des plus grands du monde. Il était ici avec presque 4 000 personnes, touristes et travailleurs », détaille avec fierté le ministre de la Mer, Jorge Santos. La venue de tels bateaux est rendue possible grâce au tout nouveau terminal de croisière dont les travaux se sont achevés cette année. Avec une jetée de 400 mètres de longueur, le port peut accueillir quasiment l’ensemble des bateaux de croisière sur le marché. Un tourisme de masse sous contrôle, assure le ministre : « C'est un port qui commence à être un port vert. Les bateaux rentrent, ils stoppent leurs moteurs, ils consomment l'énergie renouvelable de l'île. Le système Onshore Power Supply dans le port, c'est justement pour annuler la pollution parce qu'un navire comme cela, la pollution, c'est terrible. C'est presque tous les voitures ensemble de l'île. Mais nous nous sommes préparés pour ça. » Le Mein Shiff est le premier des onze navires de croisière attendus en novembre. Tommy Melo est sans doute le défenseur de l’environnement le plus connu de l’île. À la tête de l’ONG Biosfera, il travaille actuellement à la création d’un centre pour faire de la pédagogie auprès de ces touristes. « Parce que lorsqu’ils viennent visiter, nous n’avons rien à leur montrer. Donc, ils passent juste par ici dans leur bus, ils regardent "oh comme c’est beau" et remontent sur leur bateau. Donc, nous voulons leur donner un aperçu des écosystèmes de l’île, de la nature et des problèmes bien sûr, afin qu’ils quittent São Vicente un peu sensibilisé à ce qui existe ici », détaille le biologiste qui affirme ne pas être contre la venue de ces gros bateaux de croisière. « Non, je ne suis pas contre, nous devons simplement avoir des règles. Par exemple, ces gros bateaux viennent, mais nous n’avons rien pour les détritus. Comment allons-nous faire avec 2 000 personnes qui traversent chaque jour la ville ? Nous devons avoir des infrastructures pour les recevoir comme il faut », insiste-t-il. L’arrivée en nombre de touristes crée également des tensions sur certaines ressources, notent des observateurs. Sur cette île par exemple, 100% de l’eau consommée provient de la désalinisation.
Au Sénégal, l’urgence est à la protection des ressources halieutiques. Face à la surpêche, des brigades locales connues sous le nom de CLPA - conseil local pour la pêche artisanale, sont chargées de surveiller les eaux, là où l’État est absent : des pêcheurs et acteurs du secteur, bénévoles, qui repèrent et traquent les pratiques illicites. Pour adopter les bons comportements, l’organisation Greenpeace les a réunis le 18 novembre lors d’un exercice en mer très mouvementé au large de Saly, au sud de Dakar. Sa pirogue est encerclée, ses filets cernés. Ce pêcheur d’une quarantaine d'années est surpris en pleine infraction. Il vient de remonter une grande quantité de sardinelles trop jeune pour être capturées. « Ça, c’est zéro tolérance, s'exclame Kaly Ba, responsable de la campagne « Océan » chez Greenpeace Afrique. Ils sont en train de se tirer une balle dans le pied en exterminant la ressource, pour satisfaire une industrie de farine et de poisson qui ne va même pas bénéficier aux populations africaines. » Selon le Code de la pêche maritime au Sénégal, les engins et la marchandise du pêcheur doivent être confisqués et une amende d’au moins 200 000 francs CFA réglée. Mais tout ne se passe pas comme prévu. « Le pêcheur est en train de verser de l’essence sur sa pirogue, il menace de la brûler si on s’approche ! » Après plusieurs minutes de poursuites, le pêcheur est trop menaçant. Trois mineurs se trouvent à bord de la pirogue interpellée. L'opération devient risquée. Il échappe alors à toutes sanctions immédiates et des preuves de l’infraction sont envoyées aux autorités compétentes à terre. « Il faut que l’État mette le paquet » « Chez Greenpeace, c’est ce qu’on ne veut plus !, s’exclame Kaly Ba. On veut des sanctions. Si les sanctions sont là, ils ne répéteront plus ce genre de choses. Là, il n’y a qu’à voir la taille des filets, ils sont destinés à attraper uniquement les jeunes poissons, les tout petits poissons, donc ça ne permet pas à l’espèce de se régénérer. » Ces épisodes de résistance, Ibrahima Mar les connaît. Coordinateur du réseau national des conseils locaux pour la pêche artisanale (CLPA), il vit dans la même communauté que ceux qu’il est chargé de sanctionner. Il estime que les acteurs de la pêche ne peuvent pas faire, seuls, figure d’autorité. « Nous, on vit ensemble, on est des familles. Aujourd’hui, il faut que l’État, qui est neutre, qui n’a pas de copains, qui n’a pas de parents, mette le paquet !, réclame-t-il. Si aujourd’hui, on arrivait à être accompagnés par des militaires, ce serait plus efficace. » Fin de l’opération. Le chef de mission du jour, Pape Moustapha Ngom, remonte le moral de ses troupes. Il est agent de l’État à la Direction de la protection et de la surveillance des pêches (DPSP). « Il faut savoir aborder l’acteur, discuter avec lui, le ramener à la raison, souligne-t-il. Ce n’est pas facile, mais nous resterons des requins. Je tiens vraiment à vous remercier », ajoute-t-il, sous les applaudissements. Il y a un an, les nouvelles autorités ont promis de publier une liste vérifiée des bateaux autorisés à pêcher au Sénégal. C’est une des mesures prises pour protéger un secteur de la pêche menacé par la rareté grandissante des poissons, alors qu’il fait vivre 17 % de la population active. À lire aussiQue va changer l’accord de l’OMC sur la fin des subventions néfastes à la pêche?
Le Congo-Brazzaville se mobilise face au défi des infrastructures de l'intelligence artificielle (IA). La capitale abritera bientôt un data center, financé en partie par la Banque africaine de développement (BAD). Il s'agit de développer la souveraineté du Congo en matière d'IA, et de permettre aux startups d'entraîner les modèles d'IA sur les données locales. Un immeuble en voie de finition se dresse sur l’avenue qui traverse Bacongo, le deuxième arrondissement de Brazzaville, la capitale du Congo-Brazzaville. Il s’agit d’un data center, destiné à loger les données numériques. « Au sein de ce data center, explique Eric Armel Ndoumba, conseiller aux télécommunications du ministre congolais des Postes et télécommunications, on peut héberger des ordinateurs de puissance, des supercalculateurs qui permettent de traiter des données massives, des données que l’intelligence artificielle (IA) utilise pour entraîner des modèles ». L’infrastructure est financée en grande partie par la Banque africaine de développement (BAD). Le rôle de l’État est déterminant, estime le ministre. « Ce sont des infrastructures que nous devons mettre à la disposition de nos jeunes startups, pour entraîner des modèles d'IA. Parce que ces startups n’ont pas d’argent, n’ont pas de moyens pour acheter ce genre d’ordinateurs », souligne-t-il. Souveraineté des données « Nous avons aujourd’hui un data center que l’État congolais est en train de construire, se félicite Eric Songo, le directeur de la sécurité des services d’information à la Banque postale du Congo. Il va naturellement servir de socle, de base, pour permettre cette éclosion, ce développement, tout en gardant la souveraineté des données ». La dynamique engagée par le Congo est également saluée par l’institution financière régionale. « Nous recevons des données et des rapports qui nous confirment que la République du Congo a fait beaucoup d’efforts », souligne Juan Bang Edu Mangué, directeur des systèmes d’informations à la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC). Brazzaville abrite déjà le Centre africain de recherches en intelligence artificielle (Caria). Selon les données de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique, le continent ne détient à ce jour que 2 % des data centers construits à travers le monde. À lire aussiComment l'Afrique veut performer dans la course à l'intelligence artificielle
En Éthiopie, le taux de pauvreté atteint 43% en cette année 2025, estime la Banque mondiale. Les conflits et les chocs climatiques, notamment, ont fait grimper l'inflation, plongeant de nombreux Éthiopiens dans la précarité. Un recul après des années de progrès dans la réduction de la pauvreté. Bekele est assis derrière le petit comptoir de son échoppe. Épicier dans le quartier de Haya Huwlet, à Addis-Abeba, la capitale de l'Éthiopie, le jeune homme attend les clients, qui se font de plus en plus rares ces derniers mois. « Les prix ont augmenté ces derniers temps, se plaint-il. L'huile, qui était à 1 450 birrs le litre, est à 1 550. Le paquet de couche est passé de 500 à 550 birrs. Le paquet de farine de 105 à 120 birrs. Pour nous, c'est très négatif, car on a du mal à vendre. » Avec l'inflation, « je dois travailler plus qu'avant » L'inflation, observe l'Agence centrale éthiopienne des statistiques, a frappé de plein fouet les ménages urbains, cette année, avec un taux de 13,5%. L'augmentation constante des prix, surtout des produits de première nécessité, complique considérablement le quotidien des Éthiopiens. « Ça ne fait qu'augmenter, déplore Hailu, chauffeur de taxi et père d'un bébé de huit mois. Aujourd'hui, on est à 120 birrs le litre d'essence. Quand j'ai commencé il y a quatre ans, il était à 76 birrs. Je dois travailler plus qu'avant : quand j'ai commencé, je travaillais huit à neuf heures par jour. Aujourd'hui, je suis plutôt à 14 heures-15 heures en une journée. » Sécheresse et conflits Cette hausse des prix est en partie consécutive à l'arrêt des subventions sur le carburant par le gouvernement, décidé en 2024. Mais d'autres facteurs expliquent cette pression inflationniste à deux chiffres. « L'une des raisons de cette hausse est que la production agricole n'a pas augmenté au même rythme que la consommation, observe Samson Berhane, analyste indépendant, spécialiste en finance. Une autre cause importante de cette hausse, c'est bien sûr l'instabilité dans le pays. Elle contribue depuis longtemps maintenant à l'inflation en Éthiopie, car elle affecte l'offre. » Depuis plusieurs années, l'Éthiopie est minée par les conflits. Autre facteur aggravant : les épisodes de sécheresse, qui pèsent sur la production du secteur agricole. Des réformes économiques en attente de résultats Pour compenser la hausse du coût de la vie, le gouvernement a bien tenté de soutenir le pouvoir d'achat, en augmentant les prestations sociales. Mais il a aussi entamé des réformes de l'économie, dont les résultats se font encore attendre. « Pour observer les véritables impacts des réformes sur la pauvreté, je pense qu'il nous faudra du temps, estime l'économiste. Nous verrons alors si ces mesures permettent de la réduire ou, au contraire, de l'aggraver encore. » En 2024, selon l'ONU, l'Éthiopie pointait à la 175e place sur 191 du classement de l'Indice de développement humain. À lire aussiUne usine d'engrais à Gode: l'Éthiopie veut être autosuffisante et vise l'exportation
Moins de 3% des entreprises cotées dans le monde le sont en Afrique, selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Mais les places financières du continent progressent de façon spectaculaire depuis l'an dernier. Rien que sur les six premiers mois de l'année 2025, les actions de la bourse du Ghana ont bondi de 49%, la bourse du Nigeria a gagné 36%, celle du Maroc 35%, la Bourse régionale des valeurs mobilières en Côte d'Ivoire a progressé de 16%... Comment expliquer ces performances ? La Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) en Côte d'Ivoire a gagné plus de 2 000 milliards de francs CFA de capitalisation – l'équivalent de 3 milliards d'euros – en moins d'un an. La bonne santé des marchés d'actions africains est d'abord, selon les experts, le reflet de la croissance économique du continent (4% prévus en 2025), qui se manifeste dans beaucoup de secteurs. « Les sociétés cotées sur les bourses africaines dans le domaine bancaire ont des performances relativement solides, souligne le directeur général de la BRVM, Edoh Kossi Aménounvé. Quand on regarde le secteur des télécommunications, c'est pareil. Quand on regarde la grande distribution, la consommation générale, c'est pareil. Par conséquent, les investisseurs, quand ils se mettent dans une position d'avoir à acheter des actions des sociétés cotées sur les bourses africaines, ont une demande qui est forte. Et par conséquent, on a une évolution positive des cours, et donc une performance des indices boursiers du continent. » Investisseurs canadiens La faiblesse du dollar avantage aussi les sociétés africaines exposées au billet vert. « Avec la baisse du dollar, cette exposition et les charges financières qui en découlent sont moindres, explique l'économiste. Il est clair que ça augmente le résultat de la société. » Avec un retour sur investissement parmi les plus élevés au monde, les bourses africaines attirent ainsi de nouveaux investisseurs, qui se détournent des marchés américains à cause de la guerre commerciale lancée par Donald Trump. « Même ceux qui ne regardaient pas l'Afrique, comme le Canada, commencent à regarder l'Afrique, observe Stanislas Zeze, PDG de l'agence de notation Bloomfield Investment Corporation. Donc ils font attention aux réformes, se rendent compte qu'il y a une évolution significative en termes de gestion des finances publiques, en termes de réorganisation des secteurs privés, en termes de capacité de production, etc. » Décolonisation des bourses africaines Cette diversification géographique des investisseurs est une tendance de fond. « En fonction des zones, des pays et des bourses, il y avait une relation avec les entreprises ou les nations colonisatrices, rappelle l'expert. Et progressivement, il y a une diversification extraordinaire qui se fait, parce que les liens historiques coloniaux sont en train de se défaire. Aujourd'hui, ce sont des liens business qui sont en train de se créer. » La moitié des investisseurs sur les bourses africaines sont des nationaux : 30% sont des investisseurs régionaux et 20% des investisseurs internationaux. Mais la part de ces derniers progresse à mesure qu'ils bénéficient de facilités à rapatrier chez eux les gains réalisés en Afrique. À lire aussiL'Éthiopie inaugure son premier marché d'actions en plus de cinquante ans
Les autorités guinéennes ont, en août 2025, créé une société à capitaux publics, Nimba Mining Company (NMC), pour reprendre une mine de bauxite à la société émirienne Guinea Alumina Corporation (GAC). La raison ? Elle n'avait pas construit d'usines de transformation après 20 années d'activité. Alors que GAC employait beaucoup de cadres étrangers, NMC se veut une entreprise avec presque 100% de travailleurs guinéens. Ce qui pose un grand défi, et les observateurs s'interrogent : la mine de bauxite pourra-t-elle maintenir son niveau de performances, sans ces cadres étrangers ? Lors de la cérémonie de chargement de la première cargaison de bauxite de Nimba Mining, début novembre en Guinée, le ministre des Mines, Bouna Sylla, affichait des objectifs ambitieux à atteindre, avec un maximum de cadres et d'ingénieurs guinéens. « Notre pays, qui dispose d'une part déterminante des réserves mondiales de bauxite, doit maîtriser la chaîne de valeur, déclarait-il. C'est l'ambition que porte NMC [Nimba Mining Company] : faire de la bauxite guinéenne un moteur de souveraineté, d'industrialisation et d'emplois qualifiés. Cette ambition repose sur des fondamentaux clairs. » Parmi ces fondamentaux, détaillait-il : le « renforcement du contenu local, avec des emplois qualifiés, de la sous-traitance, de la formation et la montée en compétence des jeunes Guinéennes et Guinéennes ». Maintenir un standard élevé Oumar Totiya Barry, directeur de l'Observatoire guinéen des mines et des métaux (OGMM), s'inquiète du départ des cadres étrangers de GAC. Cette perte de compétences pourrait avoir des effets négatifs à court et moyen terme. « L'ancienne société GAC était réputée être très performante en termes de pratiques sociales et environnementales et en termes de management industriel. Avec la nationalisation, l'expérience peut nous amener à nous interroger sur la capacité de la nouvelle société à maintenir ce standard très élevé en termes de pratiques sociales et environnementales », analyse-t-il. Pôle de compétences et formation Le directeur de Nimba Mining, le Français Patrice L'Huillier, se veut rassurant. Un « pôle de compétences » doit voir le jour prochainement, où cadres et ingénieurs guinéens pourront parfaire leur formation et travailler dans différentes sociétés minières du pays. « Dans l'électronique industrielle, dans l'automatisme, dans la planification minière, détaille-t-il, dans les sujets très pointus techniquement où on peut former de jeunes cadres et ingénieurs guinéens, dans l'utilisation des technologies où, actuellement, on est obligé de faire appel à des expatriés, des étrangers, alors qu'on a le potentiel pour former des jeunes Guinéens et Guinéennes qui sont tout à fait capables de faire le travail. » L'objectif est de remplacer tous les cadres étrangers par des nationaux bien formés, sans nuire à l'efficacité de l'entreprise. À lire aussiGuinée: les autorités inaugurent le méga-projet minier de Simandou
En RDC, le cobalt, le coltan et le germanium sont considérés comme des minerais stratégiques. Mais leur rentabilité, notamment celle du cobalt, a baissé à cause de la surproduction enregistrée en 2024. L’exploitation, quasiment artisanale, du coltan dans l’est du pays, échappe en outre à l’État. Face à cette situation, la société civile a appelé, lors du forum Alternative mining Indaba, à la mise en place d’une nouvelle politique nationale sur les minerais stratégiques. En définissant trois substances minérales comme stratégiques en 2018, la RDC, qui détient 70 % des réserves de cobalt, voulait mieux contrôler et valoriser ses ressources, pour en tirer profit au maximum. « C’était à l’époque du boom du cobalt, donc on a voulu le sortir du lot en le désignant minerai stratégique. On a également défini le germanium et la colombo-tantalite [coltan, NDLR] comme stratégiques, se souvient l’ancien ministre des Mines, Simon Tuma Waku. La production de coltan reste artisanale Sept ans plus tard, l’ancien ministre estime qu’il est urgent de revoir cette décision. « Nous produisons combien de tonnes de colombo-tantalite ? Pour le moment, la production est artisanale. Le germanium, il n’y a que la société STL qui produit, constate-t-il. C’est l’ensemble des minerais qui doivent être considérés comme stratégiques », juge-t-il. Actuellement, la RDC n’a pas encore défini de vision claire sur tous ses minerais. Et pourtant, selon les projections de l’Agence internationale de l'énergie (AIE), la demande mondiale de certains d’entre eux pourrait quadrupler d'ici à 2050. « Si on a une production de 3 millions de tonnes de cuivre, d'ici à 2050, on aura peut-être besoin de 15 millions ou de 20 millions de tonnes, anticipe Fabien Mayani, le responsable du programme climat au sein du Centre Carter. De même, pour le cobalt, aujourd’hui, la production de la RDC s’élève à 200 000 tonnes et le besoin pourrait aller jusqu’à un million de tonnes ». Élargir la liste au cuivre ? Du côté du gouvernement, un groupe de travail étudie la mise en place d’une stratégie nationale sur la gestion des minerais stratégiques, avec l’appui de l’ONG internationale Ressource Matters. « Je pense que c'est important de dire quels sont les minerais stratégiques sur lesquels nous voulons vraiment nous concentrer, estime Jimmy Munguriek, représentant de Ressource Matters en RDC. La stratégie du gouvernement doit aussi définir le profil des investisseurs. Il y a également le rôle de l’État. Le système de quota ne devait pas seulement s’appliquer sur le cobalt. Et le dernier élément de la stratégie porte sur la transformation des minerais. » Le ministère des Mines souhaite pour sa part la mise en place rapide d’une politique nationale sur les minerais stratégiques, qui tiendra compte, assure-t-il, des recommandations de la société civile. À lire aussiColtan, cuivre, or: la difficile traçabilité des minerais en Afrique centrale
Dans le désert marocain, le dromadaire est un animal miracle. Il nourrit évidemment, mais constitue aussi un capital, une source de revenus, d’emplois et joue un rôle socioculturel de premier plan. Pourtant, la filière est aujourd’hui menacée par le changement climatique. La ville de Guelmim est considérée comme la porte du Sahara au Maroc. Cet ancien centre caravanier, sur la route de Tombouctou, abrite le plus grand marché aux dromadaires du Maroc, le souk Amhayrich. Un terrain caillouteux de 10 000 m³, à la sortie de la ville. Ici, il n’y a rien pour faire de l’ombre, sinon un immense pylône, auquel sont accrochés de gros projecteurs. « Allo, Monsieur Omar, vous allez bien ? Ne vous inquiétez pas, votre animal je vais vous l’envoyer ». Assis au pied de la structure, Mohammed, 33 ans, est éleveur de dromadaires. Un métier qui se transmet de père en fils dans sa famille. « C’est dur, témoigne-t-il. Si tu veux réussir dans ce domaine, il faut avoir la foi et le sérieux suffisant. Par exemple, nous, il nous arrive de faire des transactions sans demander d’acompte, avec la parole pour seule monnaie d’échange ». Diminution du cheptel Le lieu perd soudain sa quiétude, quand percent les cris d’un jeune dromadaire qu’on retire à son troupeau. « Ce marché est connu en Afrique pour la vente de dromadaires, assure-t-il. Les gens viennent de partout au Maroc. Ici, tu trouves les dromadaires toute l’année et toute la semaine. » L’animal est présent à chacune des grandes étapes de la vie des habitants du désert. « Tes dromadaires, c’est comme tes enfants. C’est un héritage culturel et, dans notre région du Sahara, si tu veux offrir un cadeau à quelqu’un, il n’y a rien de mieux qu’un dromadaire », ajoute Mohammed. Filière exclue du soutien à l'élevage Mouloud, 39 ans, est commerçant au souk Amhayrich. Il s’inquiète de la diminution du cheptel. Dans la région, la sécheresse sévit depuis dix ans déjà. « Il y a eu une grande augmentation des prix des dromadaires, notamment de l’étalon, observe-t-il. La sécheresse a fait exploser les coûts, car il faut bien continuer à nourrir les animaux. Le salaire du berger constitue aussi une charge importante. On le paie entre 300 et 400 euros par mois. On n’arrive même plus à trouver de candidats. On fait appel à des Mauritaniens désormais. Ces bergers-là peuvent rester un an, deux ans, quand les Marocains ne dépassent pas un mois, deux mois, avant de partir. » Il n’y a pas que la sécheresse qui détruit les pâturages. « Les constructions, les fermes ont morcelé les grands espaces », observe Mouloud. Aujourd’hui menacé, le dromadaire pourrait pourtant être un atout face au changement climatique, grâce à sa grande capacité d’adaptation. Au sein de la filière, certains dénoncent leur exclusion des dispositifs actuels de soutien à l’élevage.



