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C'est dans ta nature
C'est dans ta nature
Author: RFI
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C'est dans ta nature, le rendez-vous hebdomadaire de RFI avec la biodiversité. Reportages et infos sur les végétaux et les animaux, leurs comportements, leurs secrets, leurs rôles dans les écosystèmes et dans la mondialisation. Tout ce dont on parle ici, C'est dans ta nature !
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Des Lions de l'Atlas aux Éléphants de Côte d'Ivoire, en passant par les Aigles du Mali et les Guépards du Bénin, pourquoi la majorité des sélections nationales de foot en Afrique ont-elles pour emblème des animaux ? Six équipes de foot africaines sur dix ont pour emblème un animal, parce que l'Afrique abrite quelques-unes des espèces les plus charismatiques, à commencer par le lion. Trois pays se sont choisi comme emblème le roi des animaux, dans l'espoir d'être les dieux du stade : le Cameroun, et les Lions indomptables, le Maroc et les Lions de l'Atlas, une sous-espèce disparue à l'état naturel, et le Sénégal, avec les Lions de la Teranga. « Par sa crinière, le lion impose la respectabilité. Il vous fait peur, souligne le journaliste Rémy N’Gono, consultant à Radio Foot Internationale. Quand les Sénégalais entrent dans un stade, ils agissent comme des lions : ils se jettent sur la proie. Ils ont faim. Ils ont envie de te dévorer ! » Des animaux puissants Les félins, superprédateurs, se taillent d’ailleurs la part du lion. « L’animal représente souvent la puissance dans les totems. Prenez le léopard du Zaïre de Mobutu Sese Seko. Il avait décidé que ce serait et son emblème et l’emblème de l’équipe nationale », rappelle Rémy N’Gono. « Dans le choix d’un emblème, précise le sociologue du sport Patrick Mignon, il y a quelque chose qui relève de ce qu’on va penser être un consensus sur une représentation de soi ; quel est, effectivement, l’animal sur lequel on va pouvoir trouver un accord qui satisfera tout le monde. À partir de là, c’est aussi une image qu’on renvoie à l’adversaire. » La force tranquille des Zébus de Madagascar, le mordant des Scorpions de Gambie, ou la puissance des Étalons, l’animal symbole du Burkina Faso… On choisit un emblème, lié à son pays, pour ses qualités physiques. « En Afrique, il y a des animaux qui sont beaucoup respectés, mais qu’aucune équipe ne peut prendre comme nom ou comme sobriquet. Par exemple : la tortue. Tout le monde te dira en Afrique que c’est l’animal le plus intelligent. Mais le football représente un combat, donc à partir de cet instant, on cherche celui qui peut avoir la force de pouvoir gagner, pas par la ruse, mais par la détermination, l’endurance, le côté physique », explique Rémy N’Gono. La loi de la jungle sur la pelouse Trois pays ont choisi l'aigle : la Tunisie, le Nigeria et le Mali. Mais que dire alors des Hirondelles du Burundi ? En 2023, le Bénin a officiellement changé de nom. Les Écureuils sont devenus les Guépards. Ce qui fait sourire Rémy N’Gono : « Dans la forêt, où les fauves sont là, l’écureuil est sur des branches en train de chercher des noix de palmiste. Mais qu’est-ce que l’écureuil peut gagner ? Du coup, [les Béninois] se sont dit : nous allons devenir des guépards. Mais vous le savez très bien : l’âne a beau changer de nom, il restera toujours un âne ! ». En 2019, les Lions de la Teranga se faisaient battre en finale par les Fennecs, les renards rusés du désert algérien. La loi de la jungle n'est pas toujours respectée. À lire aussiLe lion de l’Atlas, disparu mais vivant
Les poulpes ont-ils vraiment neuf cerveaux ? Comment sont-ils capables de résoudre des problèmes complexes ? Gros plan sur les plus perspicaces des animaux invertébrés. [REDIFFUSION DU 18 MAI 2025] C'est une expérience, réalisée par le commandant Cousteau, qui a révolutionné la compréhension des céphalopodes et suscité le plus grand intérêt pour cette famille de mollusques à laquelle appartiennent les poulpes, les sèches ou les calamars. Un poulpe est placé devant un bocal dans lequel est enfermé un crabe. « Que fait le poulpe ? Non seulement il voit qu'il y a un crabe – très bonne vision. Ensuite, il arrive à comprendre qu'il y a un couvercle. Et il arrive à trouver les moyens, avec ses bras munis de ventouses, d'ouvrir le bocal, c'est-à-dire de tourner le couvercle, raconte Laure Bonnaud-Ponticelli, professeure au Muséum national d'Histoire naturelle à Paris. Quand les scientifiques se sont aperçus de cela, ils se sont dit : "Ah, mais en fait, ces bêtes ont un cerveau qui pourrait correspondre au nôtre". Et comme nous sommes intelligents, on s'est dit : "Ils sont donc intelligents." » Les poulpes ou les pieuvres (ce sont les mêmes animaux, le mot pieuvre ayant été inventé par Victor Hugo) sont les invertébrés les plus intelligents. En regardant un tuto sur une vidéo, un poulpe avait ensuite été capable de résoudre le problème auquel il était confronté. En revanche, contrairement à une idée reçue, ces céphalopodes n'ont pas neuf cerveaux. « Ils ont un gros cerveau, précise Laure Bonnaud-Ponticelli. Et puis ils ont des espèces de petits amas de cellules nerveuses à la base de chacun de leurs huit bras. Il semblerait qu'il y ait malgré tout une certaine autonomie de ces mini-centrales nerveuses qui pourraient commander les bras indépendamment. » Paul le poulpe C'est aussi ce cerveau qui commande l'incroyable capacité des poulpes à changer de forme, de texture et de couleur, pour se fondre dans le paysage, en un millième de secondes. « Ils ont dans leur peau un très grand nombre de cellules qui sont responsables de ces changements. Quand un ordre est donné par le cerveau à la vitesse de l'influx nerveux, si rapide qu'on ne le voit pas à l'œil nu, tout est interconnecté. Ce qui fait que l'animal va complètement disparaître aux yeux des prédateurs, également aux yeux des proies », explique Laure Bonnaud-Ponticelli. Un poulpe avait défrayé la chronique pendant la Coupe du monde de football en 2010. Le célèbre Paul le poulpe, une pieuvre enfermée dans un aquarium en Allemagne. Un champion des pronostics qui désignait presque toujours le drapeau du futur vainqueur. Mais ici pas d'intelligence ni de compétence sportive. C'était juste le hasard, les poulpes ne voyant pas les couleurs. La question de la semaine
Le sommet mondial de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées), qui s'est achevé vendredi 5 décembre en Ouzbékistan, a accordé la plus forte protection à l'animal emblématique du Congo-Kinshasa, mi-girafe mi-zèbre. Rediffusion du 28 janvier 2024 Les Congolais ont sûrement vu plus d'okapis sur leurs billets de banque que dans la forêt. L'animal est si rare et si discret que ceux qui ont pu le croiser dans les forêts tropicales d'Ituri, dans le nord-est du pays, où l'espèce est endémique, sont des privilégiés. « Je suis chanceux, reconnaît Berce N'Safuansa, qui gère le projet okapi de l'ONG Wildlife Conservation Global au sein de la Réserve de faune à okapis, créée en 1992 et inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco cinq ans plus tard. C'est fantastique, vous ne pouvez pas imaginer l'enthousiasme qu'on a d'être en face d'un okapi ! » Et pour cause ! Avec sa tête de girafe (il est, avec la girafe, l'une des deux seules espèces encore vivantes de la famille des giraffidés), son corps d'antilope, les pattes avant et l'arrière-train rayés noir et blanc comme un zèbre, et son coup de langue phénoménal (40 centimètres de long), l'okapi est un animal plein de mystères, quasi mythique, surnommé parfois la licorne africaine. Unique, rare et irremplaçable Unique au Congo-Kinshasa, mondonga (okapi en lingala) n'a été découvert par un explorateur européen qu'à la toute fin du 19ᵉ siècle. En 1901, il est scientifiquement nommé Okapia johnstoni. Il s'agit d'un des trois derniers mammifères recensés dans le monde. Mais, depuis bien longtemps, l'okapi était connu des populations locales. « Ici, nous avons par exemple la communauté locale des Mbuti, les Pygmées : pour elle, l'okapi représente un ami de leurs ancêtres. C'est donc un animal qu'il faut protéger, qu'il ne faut pas tuer pour sa viande ou pour un quelconque besoin », explique Berce N'Safuansa. L'okapi tient une place à part parmi la riche faune qu'abrite le Congo-Kinshasa. « C'est un animal d'une importance capitale, poursuit Berce N'Safuansa, à cause de la valeur exceptionnelle et universelle qu'il représente : une espèce unique, rare, irremplaçable, qui ne vit à l'état sauvage qu'en République démocratique du Congo. » Braconniers et miliciens Si rare que l'espèce est menacée : en danger, selon la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). « Dans un avenir proche, prédit Berce N'Safuansa, cette espèce se retrouvera dans la catégorie probablement la plus élevée, le risque d'extinction, avec des effectifs en baisse. » Les principaux prédateurs de l'okapi ? Les léopards et les humains. L'habitat naturel du ruminant est chaque jour menacé par les activités humaines illégales. Berce N'Safuansa pointe « les braconnages armés, en quête de la peau de l'okapi, de sa viande, de sa graisse, de ses os, tellement recherchés aujourd'hui sur le marché noir. À cela, il faut ajouter la perte des habitats naturels ainsi que la présence de groupes de milices et de mineurs illégaux dans et autour de la réserve. » Les milices armées qui sévissent dans la région n'épargnent personne, ni les okapis ni les humains. Il n'existe pas de recensements récent et scientifique de la population d'okapis, compte tenu des difficultés du terrain et de la grande discrétion de cet animal solitaire. On estime seulement qu'il ne reste, à l'état naturel, que plusieurs milliers d'okapis. À lire aussiRDC: une réserve à Okapis d'Ituri menacée par l'exploitation minière
Comment survivre l'hiver, quand la nature offre peu de nourriture ? Certaines espèces ont trouvé la parade, en faisant des réserves de nourriture, et c'est même parfois utile à la biodiversité. (Redif du 24/02/2024) Quand vient l'hiver, en climat tempéré, quand la nature se met en veille, les ressources alimentaires se font rares, et les animaux ont trois solutions pour subsister. Migrer : l'Afrique est une terre d’accueil pour de nombreux oiseaux européens. Hiberner, même si on vient de voir un ours des Pyrénées sortir de sa tanière en février, trompé par des températures trop douces. Troisième solution : constituer des stocks, des réserves de nourriture avant l'hiver. Un animal est un grand spécialiste, à tel point qu'une banque française, la Caisse d’épargne, l'a choisi comme emblème. L'écureuil peut accumuler chaque automne plusieurs milliers de noix et de noisettes, des fruits à coques – coques en stock – cachés un peu partout. On a vu d’ailleurs des écureuils faire semblant d'enterrer des noisettes, pour tromper de potentiels voleurs. Parce qu'on s’espionne entre congénères… Un oiseau plante des arbres Spécialiste aussi des enterrements, le geai des chênes, est, comme son nom l’indique, grand amateur de glands, le fruit du chêne. Cet oiseau de la famille des corbeaux peut engloutir cinq ou six glands, avant d’aller les cacher dans la terre – jusqu’à 5 000 glands enterrés chaque année. Mais il a les yeux plus gros que le ventre. Il peut aussi en oublier, même si sa mémoire est remarquable. Alors ces glands abandonnés finiront par germer, et donneront des arbres. Le geai a un vrai rôle écologique. Il peut replanter, malgré lui, des forêts de chênes. Les fruits abandonnés ou oubliés par l'écureuil donneront, eux aussi, naissance à des arbres. La taupe, elle, accumule des centaines de vers de terre, soigneusement rangés dans des garde-manger souterrains. Les chouettes et les hiboux cachent leurs proies, des rongeurs, dans les arbres - c’est l’hiver, elles se conservent, pas besoin de frigo. Même les chiens enterrent leurs os Sous d’autres climats, des animaux cachent aussi leur nourriture, mais pour d’autres raisons. Les crocodiles peuvent immerger leur proie dans l’eau pour attendrir la viande. Une espèce de belette d’Amérique centrale planque les bananes vertes, et attend qu’elles murissent. Les chiens, vous l’avez peut-être remarqué, enterrent des os. Nos toutous tout bien nourris aux croquettes bio (oui, ça existe) n'ont pourtant nul besoin de faire des stocks. Mais voilà, c'est dans leurs gènes, du temps lointain où ils étaient des loups, pas encore domestiqués. La peur de manquer est inscrite dans leur ADN.
C'est l'automne dans l'hémisphère nord, et sous climat tempéré les feuilles des arbres comment à jaunir. Mais pourquoi les feuilles tombent ? (Redif du 21/10/2021) (Redif du 21/10/2021) Elles aiment la chaleur et le soleil… Alors, quand les températures diminuent, quand la lumière se fait plus rare, le signal est donné. Les feuilles des plantes ne font plus de photosynthèse (le soleil ne nourrit plus la plante) et la chlorophylle, qui donne aux feuilles leur couleur verte, disparaît, au profit de tanins aux couleurs de l’automne. Mais ce n’est pas seulement pour faire joli. « On dit souvent que le changement de couleur de la feuille est lié au fait que la chlorophylle est dégradée, explique le botaniste Marc-André Selosse. Mais d’autres composés s’installent, des composés jaunes, des composés rouges, qui vont absorber une partie des rayons lumineux et chauffer la feuille à l’entrée de l’hiver, et la protéger le temps qu’elle finisse de recycler tout son contenu vers le tronc. » C’est alors que toutes les feuilles tombent, les feuilles des arbres au feuillage caduc. Les arbres à feuillage persistant perdent aussi leurs feuilles, mais tout au long de l’année, ce qui passe inaperçu. « L’intérêt d’avoir des feuilles persistantes, c’est de redémarrer la photosynthèse plus vite au printemps, poursuit Marc-André Selosse. Quand les conditions de température et d’éclairement redeviennent vivables, la feuille est déjà présente : la photosynthèse repart plus vite. » Les plantes à feuillage persistant ont ainsi une longueur d'avance, quand les plantes aux feuilles caduques ont « une sorte de retard à l’allumage ». Un engrais... Mais revenons à l'automne sous climat tempéré. Les feuilles qui tombent sont des feuilles mortes, mais dans la mort, il y a de la vie ! « La feuille brune qui tombe par terre a un avenir, petit à petit, cette matière organique est attaquée par des microbes, ce qui libère de l'azote, du phosphate et tout un tas de ressources qui pourront servir aux racines l'année suivante. », explique Marc-André Selosse. « Les feuilles mortes se ramassent à la pelle », chantait Yves Montand dont a célébré (le 13 octobre 2021) le 100e anniversaire de la naissance. Mais c'est une idée qu'il faut donc oublier. Les tapis de feuilles mortes, appelés aussi litière forestière, abritent toute une vie animale et microbienne. Et plus tard, l'humus ainsi formé permettra de favoriser la croissance des arbres. ... et un désherbant « Il y a des pratiques qui consistent à ramener les feuilles mortes de forêt et à s’en servir comme un équivalent de paille pour servir de litière aux animaux, rappelle Marc-André Selosse. Dans certains pays, comme la France médiévale, on pense que le sol forestier s’est appauvri parce qu’on lui soustrayait ces feuilles mortes qui normalement, en se dégradant, auraient dû entretenir sa fertilité. » Certains paysages d'Europe centrale se sont ainsi transformés, les résineux prospérant sur les sols appauvris et acides. Mais les feuilles mortes ne produisent pas seulement de l'engrais, elles peuvent faire office de désherbant, grâce aux toxines qu’elles contiennent. Il s'agit, pour ces arbres, d'éliminer toute concurrence à leur pied. « C’est vrai que sous des pins, des eucalyptus, votre gazon pousse mal, constate Marc-André Selosse. C’est normal : la plante avec ses feuilles mortes est en train de désherber. C'est ainsi : la nature n’est pas faite pour être un jardin ! » La question de la semaine
Ces oiseaux parcourent plusieurs centaines de kilomètres pour rejoindre leur pigeonnier, à plus de 70km/h de moyenne. Leurs capacités d'orientation sont aussi exceptionnelles. « Voilà, c'est parti ! » Rémi Seimpère est colombophile, éleveur de pigeons voyageurs, et il vient de lâcher l'un de ses 130 oiseaux qui logent dans le pigeonnier situé au fond de son jardin de la banlieue sud de Paris. « C'est parti, il va faire son petit sport quotidien, et les autres ont compris que c'est l'heure du petit entraînement, donc ça va partir comme des fusées ! », s'exclame-t-il. Les pigeons trépignent dans le pigeonnier, agitent leurs ailes, jusqu'à ce que Rémi Seimpère ouvre la trappe. Alors les uns après les autres, à la queue leu leu, les oiseaux s'envolent dans le ciel. Sauf une femelle, qui préfère rester sur le toit de l'autre pigeonnier, celui où sont placés les mâles. « Elle a été séparée, il n'y a pas très longtemps, de son mâle qui se trouve dans le pigeonnier d'à côté. Elle a moins envie de voler que de rejoindre son conjoint », rigole Rémi Seimpère. Voyageur et sédentaire Les pigeons voyageurs, aux pattes beaucoup plus musclées que les pigeons biset – ceux qu'on rencontre en ville –, sont de véritables sportifs. À chaque course, l'oiseau est lâché loin de son pigeonnier, à 500, 600 ou même 1 000 kilomètres, et il rentre à toute vitesse, à 70 km/h au moins, avec des pointes qui peuvent atteindre les 120km/h pour les plus performants quand le vent est favorable. C'est le paradoxe du pigeon voyageur, comme le souligne le colombophile : « Il est voyageur avant tout parce qu'il est sédentaire. Il est attaché à son pigeonnier. Il ne faut pas croire que le pigeon voyageur part de son pigeonnier, va quelque part et revient. Ce n'est pas un migrateur. » Mais comme les oiseaux migrateurs, le pigeon possède quelques qualités d'endurance et des capacités pour se repérer dans l'espace et s'orienter. Les sens de l'orientation Au-dessus de nos têtes, les pigeons libérés tout à l'heure continuent leur vol groupé. Ils se dégourdissent les ailes, et ça fait partie de leur entraînement. « Ils vont tourner autour de leur pigeonnier pendant 30, 40, 50 minutes, voire une heure, et c'est ainsi qu'ils repèrent les lieux autour de leur pigeonnier. Donc on peut supposer qu'ils ont une mémoire visuelle, détaille Rémi Seimpère. Ensuite, quand on les éloigne à un ou deux kilomètres, pour les premiers entraînements, on suppose qu'ils ont une bonne vue qui leur permet de revenir. Certainement qu'ensuite, ils repèrent les lieux par leur odorat, par d'autres moyens, avec des entraînements qui se déroulent à dix, vingt, trente ou cinquante kilomètres. Le pigeon s'oriente alors avec le champ magnétique terrestre, grâce à une sorte de boussole qui se trouve sous les narines. C'est le cumul de plusieurs sens qui leur permet de revenir chez eux. » Pigeons dopés Longtemps, dans l'armée, les pigeons voyageurs ont été utilisés pour transmettre des messages. Un pigeon héroïque avait même été décoré de la Croix de guerre 14-18. La technologie les a supplantés, mais la colombophilie perdure, avec 8 300 éleveurs en France. « Je compare souvent notre passion aux chevaux de course : le fait de faire de l'élevage, d'améliorer continuellement la race et de les faire participer à des concours ou des courses. » Mais la passion peut rendre fou. En 2020, un colombophile chinois a acheté un pigeon belge plus d'1,5 million d'euros. Et il y a même des cas de dopage, avec « de l'EPO, de la cortisone, des choses qui permettent au pigeon d'aller au-delà de ses capacités naturelles », regrette Rémi Seimpère. Si un jour, un pigeon remporte l'ascension de l'Alpe d'Huez à vélo, on se sera vraiment fait pigeonner ! À lire aussiInde: un pigeon voyageur, soupçonné d'être un «espion chinois», relâché après huit mois d'enquête
Le cinquième pays le plus vaste de la planète abrite plus de 10% des espèces vivantes sur Terre. Du capybara à l'hévéa, petit tour d'horizon des plantes et des animaux les plus emblématiques du Brésil. Il s'appelle le Curupira, et c'est la mascotte officielle de la COP30, le sommet mondial sur le climat qui s'ouvre officiellement ce lundi 10 novembre à Belém, aux portes de l'Amazonie. Mais le Curupira n'est ni une plante, ni un animal ; c'est un personnage légendaire et folklorique, aux cheveux roux, qui hante la forêt amazonienne et la protège, en chassant les braconniers et les bûcherons. Le Brésil abrite 10% de toutes les espèces vivantes sur Terre, grâce à son climat tropical et l'immensité de ses forêts où on pourrait croiser le jaguar, le plus gros félin du continent. Il n'a aucun prédateur, à part l'Homme, évidemment. En 15 ans, la population des jaguars a chuté de 80%, en particulier à cause de la déforestation. Gros rongeur et araignée géante Tant qu'il y aura des arbres, il y aura des paresseux, qui passent une grande partie de leur temps à dormir et le reste à manger. Il leur faut avaler beaucoup de feuilles, parce que celles-ci ne sont pas très caloriques. Elles ne sont pas très faciles à digérer non plus ; les paresseux ont parfois besoin de plusieurs semaines pour y parvenir. Chez ces animaux, même le système digestif est paresseux. Parmi les animaux mignons du Brésil, il y a aussi le capybara, devenu star des réseaux sociaux. C'est le plus gros rongeur au monde. C'est aussi au Brésil qu'on trouve la plus grande araignée : la mygale goliath, 30 centimètres d'envergure. Elle est aussi grosse qu'un gros rat, a des griffes à ses huit pattes, et on l'entend même marcher ! Record de plantes Le Brésil abrite aussi plus de 50 000 espèces de plantes. Aucun pays n'en a autant. Et le tiers est endémique et ne pousse qu'au Brésil. C'est le cas d'un arbre, le pernambouc, emblème national, en voie d'extinction, surexploité depuis la colonisation parce qu'on en tire de la teinture rouge. On en fait aussi des archets pour jouer du violon. Depuis des années, des musiciens pétitionnent pour que le pernambouc échappe à l'interdiction totale de son commerce. L'hévéa, lui, produit du latex, un liquide blanc, toxique, pour dissuader les herbivores et tuer les pathogènes. L'hévéa, endémique en Amazonie, a ensuite été planté partout en Afrique et en Asie, dans les colonies françaises ou britanniques, pour en tirer du caoutchouc et fabriquer des pneus. Sur toutes routes de la planète, il y a donc un peu d'hévéa, mais ce n'est pas très naturel. La question de la semaine
Depuis des millénaires, les humains utilisent les vertus et les propriétés des champignons de mille façons. Il est le champignon le plus cher au monde, bien plus cher que la truffe. Il ne pousse que sur les plateaux de l'Himalaya, à 4 000 mètres d'altitude. Il est rare et aurait des vertus aphrodisiaques. « Il est réputé comme "le viagra de l'Himalaya", souligne Hubert Voiry, mycologue (spécialiste des champignons). Je suis allé au Népal ce printemps et on en a trouvé à 35 euros les deux grammes. » Plus de 17 000 euros le kilo : c'est l'amour à tout prix. On l'appelle le champignon chenille parce qu'il pousse en parasitant une chenille. « Le champignon est à l'intérieur de la chenille et se nourrit à ses dépens. À la fin de vie de la chenille, le champignon l'oblige à se rapprocher du niveau du sol. La chenille meurt et le champignon en sort en formant une sorte de petit clou qui apparaît parmi l'herbe », décrit Hubert Voiry. Pour se droguer ou se soigner Dans le livre qu'il vient d'écrire, Dix champignons qui ont changé la vie des hommes (éditions Actes Sud), Hubert Voiry raconte ainsi comment l'humanité utilise les champignons depuis la préhistoire pour se nourrir, fabriquer de l'alcool, allumer du feu, se droguer ou se soigner. « Beaucoup de champignons ont des propriétés médicinales qui renforcent le système immunitaire. Les champignons renferment des polysaccharides, des sucres complexes, qui réduisent les radicaux libres, et participent donc à la défense de l'organisme. Mais il ne faut pas occulter le fait que bien des espèces de champignons sont mortelles. Donc, on peut imaginer qu'il y a eu des essais non concluants ! » Les propriétés des champignons sont multiples. Ils permettent de fabriquer du similicuir, des matériaux de construction... À l'avenir, on pourrait même fabriquer des puces électroniques grâce au mycélium, le réseau de filaments sous-terrain des champignons. « Le mycélium du champignon envoie des messages chimiques et électriques et il y a des recherches en cours pour utiliser le mycélium comme une puce électronique, explique Hubert Voiry. On est loin d'avoir approfondi le monde des champignons. On est loin aussi d'avoir découvert tous les champignons. » Plus de 150 000 espèces de champignons sont connues dans le monde et on en découvre chaque année 1 500. Les champignons, ça pousse comme des champignons. À lire aussiJusqu’où nous entraineront les terrifiants champignons parasites? La question de la semaine
La nature est ingénieuse, grâce à des milliards d'années d'évolution. Et les humains s'inspirent de plantes et d'animaux pour concevoir ou améliorer des produits. (Rediffusion du 21 janvier 2024) Vous les avez peut-être remarquées, en vous promenant dans la nature, en marchant dans les herbes hautes, ces petites boules piquantes qui s’accrochent à vos chaussettes, aux lacets de vos chaussures, ou même à vos jambes poilues... Ce sont des fruits, et c’est comme ça que certaines plantes font voyager leurs graines pour aller coloniser d’autres territoires : en s’agrippant aux poils des animaux. Ces petits fruits piquants, un ingénieur suisse les avait remarqués sur son chien, au début des années 1940. Il s’agissait des fruits d’une plante, la bardane, et c’est en les examinant au microscope, en découvrant que chaque épine se terminait par un crochet, qu’il avait inventé le velcro, les scratchs, ces fermetures éclair sans fermeture éclair. C’est le biomimétisme, quand la nature ingénieuse, grâce à des milliards d’années d’évolution, inspire les humains... En étudiant le vol des oiseaux, leurs ailes, Léonard de Vinci avait, dès le XVe siècle, posé les bases de l’aéronautique. Plus tard, fin XIXe, un ingénieur français, Clément Ader, faisait voler le premier avion, qui ressemblait à une chauve-souris. Le train à grande vitesse du Japon, le Shinkansen, est célèbre pour son nez, la locomotive de tête, qui s’étire comme le bec long et fin d’un oiseau, le martin-pêcheur, capable de fendre l’eau sans bruit, sans éclaboussure. Ce fut la solution trouvée face aux changements de pression à l’entrée des tunnels qui provoquaient des nuisances sonores. Le train au bec d’oiseau y a aussi gagné en vitesse et en économie d’énergie. 20 % d’énergie produite en plus aussi pour des éoliennes, grâce à leurs pâles dentelées, semblables aux nageoires des baleines à bosse, si agiles malgré leur poids. Requin, lotus et termitière Les nageurs, qui ont des palmes comme les canards, vont aussi plus vite grâce à une combinaison qui copie la peau des requins, lisse en apparence, mais munie de millions d’écailles microscopiques. Le requin mako peut ainsi dépasser les 50 kilomètres-heure. Il y a aussi l’effet lotus : les feuilles de la plante aquatique ressemblent à la peau des requins : des micro-aspérités empêchent l’eau de pénétrer ; le lotus est hydrophobe, et les gouttes qui roulent à sa surface ont une fonction autonettoyante, pour que la photosynthèse soit parfaite. Au fil de l’évolution, les êtres vivants s’adaptent à leur milieu ; la nature est un laboratoire de recherche permanent. On fabrique des vêtements chauds inspirés de la fourrure des ours polaires. La climatisation d’un immeuble d’Harare au Zimbabwe a été conçue en prenant modèle sur des termitières. Une colle superglue est composée d’une molécule présente dans la bave d’escargot. Les aiguilles, en médecine, prennent la forme de la trompe des moustiques, qui piquent sans qu’on s’en aperçoive.
Les premières gouttes tombées du ciel sont un signal vital. Dans les déserts le plus souvent, des plantes et des animaux reprennent vie pour donner la vie. Quelques gouttes de pluie, et c'est la vie qui repart. À la première averse, les escargots sortent de leur coquille, où ils s'étaient mis en sommeil, parfois pendant trois ans dans certains déserts, pour attendre un taux d'humidité satisfaisant. Se terrer, s'enterrer, c'est le lot de toutes ces plantes et ces animaux accros au bulletin météo. Pour eux, la pluie est une bonne nouvelle, parce qu'elle réveille leur libido. C'est le cas pour un crapaud du désert australien, qui peut s'enterrer pendant deux ans. « Quand il pleut, ils vont sortir et se reproduire, explique Anthony Herrel, chercheur au Muséum national d'histoire naturelle à Paris. On connait tous le développement des têtards. Chez nous, cela prend un ou deux mois. Eux vont réduire ce cycle de vie. Le développement des têtards et leur métamorphose prennent seulement une semaine ou dix jours. Les petits vont se métamorphoser avant d'entrer dans le sable, pour attendre la prochaine pluie. » Agents dormants Quand la pluie tombe enfin, c'est une course contre la montre qui démarre, et c'est la même stratégie pour les dipneustes, des poissons « préhistoriques » dotés d'un poumon pour survivre hors de l'eau, planqués dans la boue. « Dans les périodes où l'eau n'est pas disponible, il va s'enterrer dans la boue et va créer un cocon autour de lui qui évite de perdre de l'eau. Il va attendre en état de dormance, jusqu'à ce qu'il y ait une nouvelle pluie. Il va alors sortir de son cocon et se reproduire », décrit Anthony Herrel. Des plantes aussi attendent la pluie. La rose de Jéricho se met en boule, avant de s'ouvrir et de reverdir dès les premières gouttes. Un symbole de résurrection. Comme la mousse, qui se dessèche complètement, ne respire plus, arrête la photosynthèse, en hibernation totale, et retrouve des couleurs quand la pluie revient. Il y a aussi des graines, de vrais agents dormants, enterrées dans le sable du désert d'Atacama au Chili. « C'est un désert où il y a très peu de pluie, rappelle Anthony Herrel. En revanche, au moment où la pluie arrive, le désert va se transformer complètement, avec des fleurs partout, issues de ces graines présentes dans le sol. Elles vont se reproduire dans un temps très court, et ensuite elles vont attendre que la pluie arrive. » Le cycle de la pluie est aussi celui de la vie. La question de la semaine
Stop aux idées reçues ! L'humain n'a pas le monopole de l'hygiène. Certaines espèces animales peuvent même parfois être plus propres que nous… « Sale bête ! » Qui n'a jamais juré ainsi ? Au sens propre, pourtant, un animal n'est pas si sale. Il y en a même qui battent des records de propreté. Prenez le chat. Il dort beaucoup, mais il se lèche aussi beaucoup : plus d'un tiers de son temps à faire sa toilette. Et quand Minou se lèche, ça le calme. Les rats, qui symbolisent pourtant la crasse et les maladies, sont peut-être plus propres que les chats, se lavent fréquemment et transmettent moins de maladies que nos félins adorés. S’ils font les poubelles, c'est pour se nourrir. D'ailleurs sans eux, nos rues seraient beaucoup plus sales. Propres cousins Lui aussi a une triste réputation : le cochon. Et pourtant, il est sûrement l'animal le plus propre de la ferme. S'il se roule dans la boue, c'est pour protéger sa peau sensible. Et son caca, il le fait loin de là où il dort. Les chimpanzés sont nos plus proches cousins dans le règne animal, plus propres aussi par certains égards. Une étude a montré que leurs lits étaient plus hygiéniques que les nôtres remplis de bactéries. Il est vrai que leur lit, ils le refont chaque jour. Les chimpanzés, et de nombreux singes, enlèvent aussi les parasites de leurs congénères. C'est bon pour le lien social, la cohésion du groupe. Au Japon, une colonie de macaques est célèbre pour prendre des bains dans un onsen, une source thermale chaude, et cela fait baisser leur taux de glucocorticoïde, l'hormone du stress. Le spa, ça détend, n'est-ce pas ? Sa propre peau Le gecko lui n'aime pas l'eau. Mais le petit lézard n'en a pas besoin : sa peau est hydrophobe, ce qui lui évite de servir de refuge aux microbes. Le raton-laveur, comme son nom l'indique, trempe dans l'eau sa nourriture avant de la manger, moins pour la laver que pour la ramollir. Chez les poissons, il y a le rémora, qui s'accroche au requin et se délecte de ses parasites. C'est du mutualisme, chacun y trouve son compte. Le dauphin, lui, n'en a pas besoin. Les parasites ont bien du mal à s'accrocher à sa peau, si lisse et si brillante, aux aspérités de l'ordre du nanomètre (1 million de millimètres...). Le propre n'est pas le propre de l'homme. La question de la semaine
Pourquoi certains arbres et plantes ont-ils de grandes feuilles ? Et d'autres plus petites ? Il est ici notamment question de soleil et d'eau. Finalement, la taille, ça compte. Et ça s'explique. La dimension des feuilles des arbres et des plantes dépend d'abord de la génétique, mais l'environnement a aussi son mot à dire, l'eau et le soleil en particulier. Les feuilles des plantes tropicales, en sous-bois, sont ainsi souvent très larges. « Quand on est une plante en sous-bois, on vit dans l'ombre des grands, des géants. Il y a donc très peu de lumière qui arrive au sol. Donc, plus la feuille est grande, plus la surface de capture de la lumière est grande. Ce qui va donc permettre à cette feuille de capturer plus facilement le peu de lumière qui arrive au sol », explique la biologiste Catherine Lenne, enseignante chercheuse à l'université de Clermont-Ferrand. Ici de grandes feuilles pour pallier le manque de soleil, alors que sous climat aride, les feuilles, elles, sont plus petites, adaptées au manque d'eau. Une petite feuille, c'est moins de stomates, et donc moins de fuites. « Les stomates sont les bouches d'aération qui se trouvent sous la feuille, poursuit Catherine Lenne. Elles se ferment et s'ouvrent pour permettre à la feuille de puiser de l'air, du dioxyde de carbone ou de l'oxygène pour respirer. C'est aussi par là que l'eau de la feuille sort, sous forme de vapeur. Donc en climat sec, une petite feuille perd moins d'eau qu'une grande feuille. C'est donc moins dangereux pour l'arbre d'avoir de petites feuilles que de grandes feuilles ». Feuilles à poils Ces feuilles, en zone aride, sont aussi souvent à poils. « La feuille d'un olivier est très velue sur sa face inférieure. La feuille de chêne vert également ; elle est toute blanche en face inférieure. Ses poils vont retenir de l'air comme une fourrure. Cet air retenu par les poils n'est pas soumis au vent. Il est donc plus humide que l'air sec autour de l'arbre. La vapeur d'eau va donc moins sortir de la feuille », précise Catherine Lenne, qui travaille aussi sur la biomécanique des arbres au sein du laboratoire Piaf. Et puis il y a des feuilles encore plus petites, à tel point qu'on les appelle des aiguilles : ce sont les feuilles des conifères, des sapins, qu'on trouve surtout là où il fait froid. Ces feuilles sont vernissées, plus épaisses. « Elles sont aussi très riches en tissus lignifiés – elles deviennent dures comme du bois finalement. Ces tissus lignifiés sont des tissus morts, il y a donc finalement moins de cellules vivantes à l'intérieur de l'aiguille qui risquent de geler », détaille Catherine Lenne. Chez les végétaux, la taille des feuilles est une adaptation, pas un complexe. La question de la semaine
C'est un moment exceptionnel de la nature, et ce sont des moyens exceptionnels que France Télévisions a déployé en région parisienne pour filmer la période de reproduction des cervidés 24 heures sur 24, quand le mâle devient fou d'amour. « Le brame du cerf, c'est un peu la finale de la Champions League de la nature ! Même les gens qui ne sont pas passionnés par la nature vont voir au moins une fois dans leur vie le brame du cerf », assure Pierre Singer, le président de l'Espace Rambouillet, une forêt des Yvelines, près de Paris, qui accueille pendant trois semaines le tournage d'une émission de télévision inédite en France. Produite par France Télévisions, Le Brame du cerf, calquée sur le modèle de la slow télé inventée en Scandinavie, où des millions de téléspectateurs suivent en temps réel, 24 heures sur 24, les pérégrinations des élans par exemple. Une téléréalité sans bellâtre ni cagole, mais avec des animaux. L'Espace Rambouillet, créé en 1972 par l'Office national des forêts, concentre quelque 70 cervidés sur 250 hectares, et organise chaque année des sorties pour aller entendre le raire, le célèbre cri d'amour déchirant la forêt que le cerf émet. Cette fois, plus besoin de sortir de chez soi : bien calé devant son écran, et grâce à sept caméras et micros installés à des endroits stratégiques, comme les points d'eau, on peut assister à l'un des plus saisissants spectacles de la nature : quand commence le brame, la période de reproduction des cervidés. À lire aussi«Slow TV» en France: «C'est très important de parler du cerf, mais aussi de son écosystème de plus en plus menacé» Un énorme désir Excepté l'ours, le cerf est le plus grand mammifère des forêts françaises, et c'est en ce moment, au début de l'automne, qu'il entre en action. En tout cas, il aimerait bien. « Les mâles vont tout à coup avoir une voix qui va apparaitre, pas comme on le raconte parfois de façon un peu romantique et un peu anthropomorphique pour séduire les femelles, mais plutôt pour exprimer une énorme frustration et un énorme désir. Leur taux de testostérone est multiplié par mille, la pression des vaisseaux sanguins dans les testicules est devenue considérable. Ces animaux sont en recherche de très nombreuses femelles. Il faut attendre, patiemment, et le cerf n'a pas de patience. Il va donc détruire des fougères, de petits arbres, se rouler dans la boue... Il ne mange plus, il ne boit plus, il ne dort plus. Il va perdre jusqu'à 25 % de sa masse corporelle », détaille Pierre Singer. Comportement fou Le cerf violent impressionne les humains, beaucoup moins les autres habitants de la forêt. « Ce comportement complètement fou du cerf laisse quand même beaucoup les femelles dans l'indifférence », précise Pierre Singer, comme on peut le voir sur les images. Un cri long et puissant a beau résonner dans la forêt, les biches continuent de brouter tranquillement… La période est exceptionnelle, mais la nature vit sa vie : « On voit un blaireau passer, on voit un renard se faufiler... La vie continue autour du cerf ! » Toute cette agitation du cerf n'a qu'un but, mais le clou du spectacle n'a pas été filmé. Il se révèle finalement assez décevant, comme le raconte Pierre Singer : « Le cerf est dans un tel état de pression sexuelle que les choses sont très rapides. On n'a pas pu y assister, c'est tellement rare. On dit que le cerf fait la chandelle, parce que pour s'accoupler, il va monter sur la femelle et va s'en extraire très vite, en étant presque comme un I, comme une chandelle. » Vite fait, bien fait, l'essentiel est là, pour le cerf, qui doit perpétuer son espèce ; le jeu en vaut la chandelle. La question de la semaine
Éléphants, pigeons, sangliers et même chiens ont appris à se méfier de l'espèce humaine quand elle lui veut du mal. Parlez-vous l'éléphant ? Les éléphants, eux, reconnaissent les langues et dialectes humains. L'expérience a été menée au Kenya auprès de dizaines de troupeaux. On diffusait par haut-parleur des phrases du peuple des Massaï, et d'autres de l'ethnie des Kamba. Pas de changement notable de comportement avec les Kamba, pacifistes. En revanche, face aux voix des Massaï, les éléphants devenaient nerveux, avant de se regrouper, identifiant un danger, celui des Massaïs qui tuent régulièrement des pachydermes. Un éléphant se trompe rarement. À lire aussiLes barrissements des éléphants comparables à des noms pour se désigner, selon une récente étude Les pigeons, eux, gardent la mémoire des visages. C'est ce qu'ont montré deux chercheurs français. L'un, bienveillant, donnait à manger aux pigeons, alors que l'autre s'amusait à leur faire peur, à les chasser. Un mois plus tard, les deux scientifiques sont revenus. Les pigeons se sont tout de suite approchés du gentil, en évitant le méchant. La corneille, l'un des oiseaux les plus intelligents, est aussi capable de se souvenir de ceux qui leur font du mal, ou les dérangent, comme nous le racontait le biologiste Frédéric Jiguet, qui a l'habitude d'attraper des corneilles pour les baguer. « Je capture des corneilles, ici, au Jardin des plantes depuis quelques années, et des individus me reconnaissent et sonnent l’alarme auprès de leurs congénères pour signaler que le méchant monsieur est là, témoigne le chercheur au Museum national d'histoire naturelle. En 2020, on a eu un confinement assez long, je suis revenu début juin, avec un masque. J’étais à peine entré dans le jardin qu’une corneille donnait l’alerte à toutes les autres en disant : "Cette personne est là, elle est revenue !" » Il y a aussi le cas des Bernaches, des oies migratrices, qui comprennent très bien le sens d'un coup de fusil. On s'est aperçu qu'elles avaient appris à contourner les zones de chasse. C'est aussi pour éviter de croiser des humains que des mammifères sont devenus nocturnes, comme les cerfs, les sangliers. Un apprentissage collectif. Mais quand la chasse est interdite, on les voit plus souvent le jour. On termine avec une histoire de pizza et de chien, « le meilleur ami de l'homme ». Un chien agressif en présence de certains humains, mais pas tous, sans qu'on sache pourquoi. Jusqu'à ce qu'on comprenne que chaque personne à ses yeux indésirables venait de manger de la pizza. Les chiens sentent très bien les odeurs, et pas seulement celle de la mozzarella : leur odorat est 40 fois plus développé que le nôtre. Mais pourquoi une telle phobie de la pizza chez ce chien ? C'est un traumatisme lié à l'enfance ; le jeune chiot avait reçu un coup de pied d'un livreur de pizza. Et depuis, il associait l'odeur de la pizza à un danger. La question de la semaine
Des animaux affichent parfois des couleurs éclatantes dans la nature : un signal d'avertissement destiné aux prédateurs, pour les prévenir qu'ils sont toxiques ou venimeux. (Rediffusion) Il y a dans la nature, des animaux qui se cachent, se camouflent, pour éviter d'être mangés. Et puis il y a, au contraire, ceux qui affichent clairement la couleur. Rouge, orange ou jaune, souvent associé au noir. « Ce sont les couleurs les mieux perçues par les prédateurs, explique Romain Nattier, chercheur au Muséum national d'histoire naturelle à Paris. Si on regarde autour de nous, on a un environnement majoritairement dominé par du vert, du marron. Et donc ces couleurs-là, repérables par les prédateurs, tranchent avec leur environnement. L’objectif, c'est vraiment d’être vu, de faire un signe aux prédateurs pour dire : "Je suis là, tu me vois, mais tu ne vas pas me manger, car tu sais que je suis toxique". » À lire aussiPapillons, abeilles...: des insectes chargés d'électricité Les couleurs éclatantes du papillon monarque annoncent sa toxicité, les bandes jaunes et noires du frelon son venin. Mais comment le prédateur sait-il cela ? « Il mange un certain insecte, il le recrache. Si cet insecte-là dispose de protections chimiques, il le recrache et il apprend petit à petit à associer ce patron de coloration dans la nature à une certaine toxicité. C’est en fait ce que nous faisons, nous, humains, surtout les enfants. Ils arrivent à attraper une guêpe ou une abeille une première fois... Ils se font piquer, et ils arrivent ensuite à associer assez naturellement un bruit ou un patron de coloration à un certain danger, et après, ils ne le font plus ! », sourit Romain Nattier. Gagnant-gagnant Faire peur avec des couleurs, c'est donc ce qu'on appelle l'aposématisme - qui peut aussi prendre parfois la forme d'un signal olfactif -, un phénomène particulièrement répandu chez les proies les plus nombreuses dans le monde animal, les amphibiens (salamandres, grenouilles) et les insectes (guêpes ou coccinelles). L'aposématisme, c'est gagnant-gagnant : pour la proie, qui n'est plus une proie, et pour le prédateur, qui évite ainsi un mauvais repas. À tel point que certaines proies, pas du tout toxiques ou venimeuses, se sont mises à tricher ! « Elles ne sont absolument pas venimeuses ou toxiques et miment une autre espèce qui l’est. Par exemple, ce qu’on appelle les mouches à miel, les syrphes, des mouches qui présentent des patrons de coloration vraiment similaires aux guêpes. Mais ce sont des mouches qui ne piquent pas ! », raconte Romain Nattier. Autre exemple fameux : le serpent faux corail, non venimeux, qui imite les bandes orange et noir du serpent corail. Et ça, c'est grâce à la sélection naturelle. « L’individu qui, par hasard, présente un certain patron de coloration associé à une certaine toxicité se fait moins manger par ses prédateurs, et donc petit à petit, en fait, ces populations-là arrivent à se reproduire davantage, et donc à reproduire ce trait-là, qui est ensuite fixé dans l’espèce », détaille Romain Nattier. Dans la nature, tous les moyens sont bons pour sauver sa peau. La question de la semaine
Petite balade olfactive pour sentir les fleurs. Leurs odeurs parfois surprenantes, destinées à attirer les pollinisateurs. (rediffusion) « Essayez de vous rapprocher de quelques branches en fleurs », nous invite-t-on. On se penche et on fourre son nez partout, pour une promenade odorante organisée pour un petit groupe dans les jardins de l'École du Breuil, à Paris, par Giulio Giorgi, auteur de Botanique olfactive (éditions Nez). Une invitation à « sentir la nature ». Mais pourquoi les fleurs ont un parfum ? C'est leur technique de drague. « L'une des plus grandes différences entre les végétaux et les animaux, c'est que les plantes à fleurs ne vont pas draguer leurs semblables, souligne Giulio Giorgi. Elles ne vont pas draguer d'autres plantes comme nous le ferions en draguant un autre humain. En fait, elles draguent des intermédiaires, des pollinisateurs. Tout ça est quand même magique ! Ça veut dire qu'elles développent un langage commun, et ce langage est bien l'odeur. » Le petit groupe chemine parmi les plantes et les arbustes fleuris en ce début de printemps parisien et ensoleillé. « Vous avez tous senti cette plante ?, demande Giulio Giorgi devant un berbéris, un arbuste muni d'épines et de grappes de petites fleurs jaunes. Elle est très particulière ! Je ne sais pas ce que vous en pensez… » « Moi, je sentais l'eau de javel ! », répond une des participantes. « J'ai l'impression que le monde est divisé en deux par le berbéris, remarque Giulio Giorgi. Il y en a qui le sentent et qui le trouvent très agréable, et il y en a qui détestent parce que ça leur rappelle des émanations humaines qui commencent par "S". » Des rires s'élèvent parmi les visiteurs. « Ne soyez pas dégoûtés, parce que ce sont des odeurs faites pour attirer les pollinisateurs. Pas mal d'espèces dans le genre Berbéris ont des odeurs spermatiques. » Des parfums et des goûts Le soleil réveille et sublime les molécules olfactives. Certaines plantes, pourtant, ne sentent que le soir, comme le jasmin de nuit, qu'on appelle aussi galant de nuit. « C'est une fleur qui sent à partir du coucher de soleil, explique l'écologue et paysagiste. Pourquoi ? Parce que ses pollinisateurs sont des papillons de nuit. Puisque dégager des molécules olfactives demande une énergie à la plante, elle va optimiser ça. Elle va dire : "Je ne vais pas le faire pendant la journée, je le fais pendant la nuit". » Le nez repoudré par le pollen des fleurs, on poursuit la balade, au gré des fleurs que l'on rencontre et dont on essaie de deviner le parfum : une odeur de miel ici, une autre de cannabis là (mais il n'y pas de cannabis qui pousse à l'École du Breuil !)... On s'arrête devant un magnolia aux immenses fleurs blanches, très parfumées. Et quand ça sent, il y a parfois aussi du goût : « Les pétales de magnolia sont comestibles. Et ils ont un goût exceptionnel. Quand vous les mangez, vous avez l'impression de croquer dans une endive qui a été trempée dans une sauce au gingembre. » L'odorat des abeilles On entend le chant des oiseaux. Les insectes aussi sont de la partie. « On voit qu'il y a des abeilles qui sont au travail ! Ce que nous, on sent, ce n'est pas ce que les pollinisateurs sentent. Les abeilles n'ont pas une très bonne vue, mais ont un odorat excellentissime, bien meilleur que le nôtre. Il m'arrive régulièrement de voir un arbre ou une plante qui est bourré d'abeilles et qui ne sent rien », raconte Giulio Giorgi. Dans les villes, l'odorat des humains est particulièrement en difficulté. À cause de la pollution, les parfums se font rares – à part celui des gaz d'échappement. « Les particules fines ont une propriété absorbante vis-à-vis des odeurs végétales. On va donc moins sentir les parfums des arbustes parce qu'ils sont beaucoup plus absorbés par la pollution », explique l'auteur de Botanique olfactive, un très joli guide illustré pour « sentir la nature au fil des saisons », commenté par des parfumeurs. C'est la fin de la balade. On en a plein le nez et on a pris son pied. La question de la semaine
L'oiseau le plus grand sur Terre est incapable de s'arracher à la terre. Un handicap compensé par une vitesse de pointe, au sol, exceptionnelle. (Rediffusion du 23 février 2025) C'est l'oiseau de tous les superlatifs. L'autruche, qu'on ne rencontre qu'en Afrique, est l'oiseau le plus grand au monde, 2,50 m environ pour le mâle. L'oiseau le plus lourd, jusqu'à 150 kg. C'est enfin l'oiseau le plus rapide, au sol : une autruche peut courir pendant une demi-heure, pour échapper aux prédateurs de la savane africaine, avec des pointes à 70 km/h. Mais on ne peut pas avoir toutes les qualités. L'autruche ne sait pas voler – c'est d'ailleurs le cas de quelque 80 espèces d'oiseaux sur Terre qui restent sur terre. C'est d'abord une question de poids. Et puis l'autruche, à la différence des oiseaux volants, ne possède pas de bréchet, au niveau du sternum, un os où sont rattachés les muscles des ailes. À lire aussiLes derniers secrets des oiseaux migrateurs De gros œufs, de gros yeux Mais cela n'a pas toujours été le cas. L'ancêtre de l'autruche, au moment des dinosaures, savait voler. Une capacité qu'il a perdue en l'absence de prédateur, après l'extinction des dinosaures et avant que les mammifères deviennent les maîtres de la prédation. L'abandon du vol a permis à l'autruche de muscler ses pattes, lui donnant la force de pouvoir assommer un lion qui s'approcherait un peu trop près. L'autruche est aussi un oiseau qui pond les œufs les plus gros parmi tous les oiseaux : 1,5 kg, l'équivalent d'une vingtaine d'œufs de poule. L'autruche possède enfin les yeux les plus gros de tous les vertébrés : 5 cm de diamètre, des yeux plus grands que ceux de l'éléphant. L'autruche a ainsi des yeux plus gros que son cerveau. Mais n'en tirez aucune conclusion ! À lire aussiÀ quoi rêvent les oiseaux ?
Le festival Ciné-Jardin, jeudi 28 août à Paris, projette en plein air le film Le Chêne et ses habitants, de Laurent Charbonnier et Michel Seydoux. Une fiction tournée avec des acteurs non-professionnels : tous les animaux qui vivent grâce à un chêne de la campagne française. Un film sorti au cinéma il y a deux ans et demi. Rediffusion du 27 février 2022 « Ce sont tous des bons acteurs ! Je trouve que les mulots sont formidables, les geais sont assez bons aussi, ils se démerdent, très très forts, ils transmettent des émotions... » Le producteur et réalisateur Michel Seydoux est fier de ses acteurs, à poils et à plumes, des personnages principaux comme des seconds rôles, qui gravitent autour de ce chêne, un arbre de 110 ans, filmé sous toutes ses branches, dans la forêt de Chambord, par le cinéaste animalier Laurent Charbonnier. Quatorze mois de tournage au fil des saisons, du printemps au printemps, 350 heures d’images et 44 semaines de montage pour aboutir à un petit bijou naturaliste : Le Chêne et ses habitants, un film de près de 1h30, sorti en France mercredi 23 février 2022, où tous les acteurs tiennent leur propre rôle. Nature foisonnante Le tournage avait commencé avec le premier confinement anti-Covid de mars 2020. « Il n’y avait plus un avion dans le ciel, plus un bûcheron avec une tronçonneuse, se souvient Michel Seydoux. Il n’y avait plus de promeneurs, il n’y avait plus rien, il n’y avait plus de chasse, plus d’élément perturbateur, et donc tout d’un coup les animaux étaient tous ensemble autour de l’arbre. » Ce qui donne des scènes exceptionnelles et presque surréelles où sur un même plan apparaissent par exemple un héron, un chevreuil, des sangliers... Une nature idéale et foisonnante. « Il y a des scènes qu’on n’a pas osé monter, ça faisait “manifestation pour le pouvoir des animaux”, tellement il y avait d’espèces ! Des rouges-gorges qui viennent dans les pattes des chevreuils, ce sont des choses qu’on ne voit pas souvent. » L’arbre de Noé Le chêne est le héros du Chêne, un « arbre de Noé », comme Laurent Charbonnier avait intitulé le projet originel, planté au cœur de cet écosystème. Le chêne est d’abord un hôte qui accueille et abrite de nombreuses espèces : l’écureuil, qui y a construit sa maison de branches et de brindilles au plus haut. La chouette effraie, qui dort dans un trou du tronc. Les mulots qui ont construit leur terrier sous ses racines... C’est aussi, et surtout, un chêne nourricier ; tout le monde s’arrache ses fruits ! Le gland est un personnage en soi. « Quand on a travaillé sur le scénario, on a fait le listing de tous les animaux pour qui le gland avait de l’importance, raconte Michel Seydoux. Les cervidés qui les mangent, ou les mulots qui les transportent et qui les mettent dans leur terrier comme réserve pour l’hiver, les geais qui vont les planter - au moment de l’époque glaciaire, la forêt avançait de près de 500 mètres par an grâce aux geais et aux écureuils qui les transportaient. » Au cœur d’un écosystème Les glands servent aussi de nurserie pour le balanin, un insecte doté d’une longue trompe courbée : la femelle perce le gland et y pond, pour que la larve s’en nourrisse. Dans Le Chêne, il y a des scènes de sexe, de tendresse, une course poursuite… C’est la vie animale dans un superbe film qui célèbre le vivre-ensemble dans la nature. Où tout se tient. « Vous avez un écosystème autour d’un arbre, vous avez des espèces qui sont indépendantes ; si vous cassez ce système-là, tout disparaît. Donc c’est le savoir-vivre ensemble, l’indispensabilité des uns par rapport aux autres. Alors évidemment de temps en temps, il y en a quelques-uns qui se font bouffer, c’est la vie ! Mais ce qui me donne beaucoup d’espoir, conclut Michel Seydoux, c’est que les gens peuvent, avec leur culture, dans chaque endroit, comprendre l’importance de protéger cette formidable biodiversité. » À lire aussiPando, l'arbre forêt
La mer Méditerranée est en surchauffe. La canicule qui touche la quasi-totalité de la France en cet été 2025 entraîne une canicule marine. Un phénomène de plus en plus récurrent, partout sur la planète. Ce qui n'est pas sans conséquence pour les plantes et les animaux marins, en particulier les coraux. (Rediffusion du 11 juin 2023) « Elle est bonne ? » Oui, et même un peu trop. La température de la mer Méditerranée pourrait atteindre ce week-end les 30 degrés, alors qu'une canicule frappe la quasi-totalité de la France depuis une semaine. Le record de 2003 pourrait ainsi être dépassé. Une eau plus chaude, c’est peut-être un rêve d’humains, mais ça peut tourner au cauchemar pour la biodiversité marine. Une première conséquence pour les animaux qui peuplent les mers et les océans a déjà été observée depuis plusieurs années, dans l’hémisphère nord comme dans l’hémisphère sud : des formes de migrations climatiques. Des espèces marines montent vers le nord ou descendent vers le sud pour y trouver une eau plus fraîche. À l’inverse, en Méditerranée, on a assisté « via le canal de Suez, à l’arrivée d’espèces vivant initialement dans la mer Rouge, relève Serge Planes, directeur de recherche au CNRS. Il y a donc forcément une compétition : les espèces autochtones de Méditerranée se retrouvent à devoir partager de la ressource avec ces nouvelles espèces ». Un réchauffement de taille Le réchauffement climatique, et donc le réchauffement de l’eau des mers et des océans, peut même influer sur la taille de certains poissons. Selon une étude de l’Ifremer, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, les sardines ont perdu en moyenne 4 centimètres en 10 ans, parce que la quantité disponible de microalgues, leur nourriture, est en baisse. Mais les premières victimes des canicules marines sont les récifs coralliens, une espèce « structurante » : un tiers des espèces marines de la planète en dépendent. L’eau y est peu profonde et se réchauffe encore plus vite. Les coraux blanchissent, et risquent la mort, avec la disparition de la zooxanthelle. « Cette petite algue unicellulaire en symbiose avec le corail fournit au corail ce qu’on appelle les chaînes carbonées : en gros le sucre, l’énergie dont le corail a besoin », explique Serge Planes, spécialiste des récifs coralliens en Polynésie française. Le réchauffement de l’eau entraîne la disparition de la zooxanthelle « et le corail va se retrouver presque sans aucun partenaire pour lui produire de l’énergie. Vous allez alors avoir un corail affamé, qui va, entre guillemets, "mourir de faim", tout simplement par manque de sucre, ce qui entraîne des morts cellulaires et la mort de la colonie ». De l’espoir pour les coraux Quand les canicules marines se prolongent, le taux de mortalité des coraux dépasse les 50 %, « jusqu’à 70 % », selon, Serge Planes, par ailleurs directeur scientifique de la mission Tara dans le Pacifique, pour qui tout n’est pas perdu. « On ne va changer drastiquement les émissions de CO2, et on ne va donc pas changer drastiquement le réchauffement qu’on observe. En revanche, dans les dix ans à venir, on peut changer certains comportements qui sont tous les autres stress que subissent les coraux : les stress liés aux pollutions, les stress liés à la transformation des bassins versants et l’apport de sédiments... Je pense que c’est sur cela qu’il faut jouer pour, finalement, ne laisser les récifs coralliens devant qu’un seul stress, le stress climatique. Et on pourrait là faire gagner en résilience ces récifs coralliens et leur permettre de passer finalement les caps à venir de canicules marines ». L’espèce humaine a encore les moyens de limiter les dégâts qu’elle a provoqués - tant qu’il y a de l’espoir, il y a de la vie !
La mésaventure d'une cigogne, le bec coincé dans une canette en aluminium de Coca-Cola, dans l'est de la France, illustre une nouvelle fois les dangers de la pollution et des déchets humains pour la biodiversité. (Rediffusion du 25/06/2023) C’est une histoire qui a failli bien se terminer, l’histoire de la cigogne et de la canette de Coca. Un agriculteur, Paul Bubba, avait aperçu l'échassier dans un champ près de Vesoul, dans l’est de la France, son long bec coincé dans une canette, avant qu’elle ne s’envole. Mobilisation générale pour retrouver et sauver l’animal. Ce qui fut fait, grâce à un avis de recherche lancé par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Une classe d'enfants, en sortie scolaire, l'a aperçue quelques jours après, bien plus loin, et la cigogne, affaiblie, a pu enfin être secourue. « Ça faisait à peu près 15 jours qu’elle avait cette canette dans le bec. On était presque au maximum de la survie de l’oiseau, précise Bernard Marchiset, le président de la LPO Bourgogne Franche-Comté. On était un peu surpris, d’ailleurs, qu’elle ait pu faire 150 km pour aller dans la Saône-et-Loire depuis Vesoul. C’est impressionnant, la résistance de cet oiseau ! » Mais la cigogne, incapable de boire et de manger pendant autant de temps, avait perdu la moitié de son poids, et deux jours après, elle est morte, en centre de soin, victime de la pollution humaine. « Bêtise humaine » Pourquoi la cigogne a-t-elle donc plongé son bec dans une canette en aluminium ? « Beaucoup de canettes contiennent du sucre, qui attire des insectes, et la cigogne a très certainement voulu attraper des insectes à l’intérieur de la canette », explique le président de la LPO Bourgogne Franche-Comté, qui témoigne que « beaucoup de personnes ont été touchées par la bêtise humaine de quelqu’un qui a jeté une canette dans la nature sans penser aux conséquences qu’il pourrait y avoir sur le vivant et la biodiversité. » L’aluminium met une centaine d’années à se dégrader dans la nature… C’est quatre fois plus pour le plastique qui provoque de nombreux dégâts chez les oiseaux. « On a des milans qui ont niché il y a trois ou quatre ans à côté du lac, ici, près de Vesoul. Ils avaient tapissé leur nid de sacs plastiques. C'étaient des nids tout bleus, raconte Bernard Marchiset. Là, il n’y a pas de problèmes vis-à-vis de l’oiseau, mais il y a tous ceux qui ingèrent des plastiques. L’océan est une véritable poubelle et on a beaucoup d’exemples chez les oiseaux d’eau qui ingèrent des bouts de plastiques et qui en meurent. » Océans de plastique Des millions de tonnes de plastique se retrouvent chaque année dans les océans. En 2050, il pourrait y avoir en mer plus de plastique que de poissons. Selon l’Unesco, 1 million d’oiseaux et 100 000 mammifères marins meurent chaque année dans le monde à cause de la pollution plastique. Des tortues aussi, qui confondent les sacs plastiques avec les méduses. Sans parler des poissons, qui ingèrent le microplastique et qui se retrouvent dans votre assiette – n’en jetez plus ! À écouter aussiMonsieur Chang, héros mal payé de la collecte de déchets à Pékin



