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C'est dans ta nature

Author: RFI

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C'est dans ta nature, le rendez-vous hebdomadaire de RFI avec la biodiversité. Reportages et infos sur les végétaux et les animaux, leurs comportements, leurs secrets, leurs rôles dans les écosystèmes et dans la mondialisation. Tout ce dont on parle ici, C'est dans ta nature !

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La nature est ingénieuse, grâce à des milliards d'années d'évolution. Et les humains s'inspirent de plantes et d'animaux pour concevoir ou améliorer des produits. (Rediffusion du 21 janvier 2024) Vous les avez peut-être remarquées, en vous promenant dans la nature, en marchant dans les herbes hautes, ces petites boules piquantes qui s’accrochent à vos chaussettes, aux lacets de vos chaussures, ou même à vos jambes poilues... Ce sont des fruits, et c’est comme ça que certaines plantes font voyager leurs graines pour aller coloniser d’autres territoires : en s’agrippant aux poils des animaux. Ces petits fruits piquants, un ingénieur suisse les avait remarqués sur son chien, au début des années 1940. Il s’agissait des fruits d’une plante, la bardane, et c’est en les examinant au microscope, en découvrant que chaque épine se terminait par un crochet, qu’il avait inventé le velcro, les scratchs, ces fermetures éclair sans fermeture éclair. C’est le biomimétisme, quand la nature ingénieuse, grâce à des milliards d’années d’évolution, inspire les humains... En étudiant le vol des oiseaux, leurs ailes, Léonard de Vinci avait, dès le XVe siècle, posé les bases de l’aéronautique. Plus tard, fin XIXe, un ingénieur français, Clément Ader, faisait voler le premier avion, qui ressemblait à une chauve-souris. Le train à grande vitesse du Japon, le Shinkansen, est célèbre pour son nez, la locomotive de tête, qui s’étire comme le bec long et fin d’un oiseau, le martin-pêcheur, capable de fendre l’eau sans bruit, sans éclaboussure. Ce fut la solution trouvée face aux changements de pression à l’entrée des tunnels qui provoquaient des nuisances sonores. Le train au bec d’oiseau y a aussi gagné en vitesse et en économie d’énergie. 20 % d’énergie produite en plus aussi pour des éoliennes, grâce à leurs pâles dentelées, semblables aux nageoires des baleines à bosse, si agiles malgré leur poids. Requin, lotus et termitière Les nageurs, qui ont des palmes comme les canards, vont aussi plus vite grâce à une combinaison qui copie la peau des requins, lisse en apparence, mais munie de millions d’écailles microscopiques. Le requin mako peut ainsi dépasser les 50 kilomètres-heure. Il y a aussi l’effet lotus : les feuilles de la plante aquatique ressemblent à la peau des requins : des micro-aspérités empêchent l’eau de pénétrer ; le lotus est hydrophobe, et les gouttes qui roulent à sa surface ont une fonction autonettoyante, pour que la photosynthèse soit parfaite. Au fil de l’évolution, les êtres vivants s’adaptent à leur milieu ; la nature est un laboratoire de recherche permanent. On fabrique des vêtements chauds inspirés de la fourrure des ours polaires. La climatisation d’un immeuble d’Harare au Zimbabwe a été conçue en prenant modèle sur des termitières. Une colle superglue est composée d’une molécule présente dans la bave d’escargot. Les aiguilles, en médecine, prennent la forme de la trompe des moustiques, qui piquent sans qu’on s’en aperçoive.
Les premières gouttes tombées du ciel sont un signal vital. Dans les déserts le plus souvent, des plantes et des animaux reprennent vie pour donner la vie. Quelques gouttes de pluie, et c'est la vie qui repart. À la première averse, les escargots sortent de leur coquille, où ils s'étaient mis en sommeil, parfois pendant trois ans dans certains déserts, pour attendre un taux d'humidité satisfaisant. Se terrer, s'enterrer, c'est le lot de toutes ces plantes et ces animaux accros au bulletin météo. Pour eux, la pluie est une bonne nouvelle, parce qu'elle réveille leur libido. C'est le cas pour un crapaud du désert australien, qui peut s'enterrer pendant deux ans. « Quand il pleut, ils vont sortir et se reproduire, explique Anthony Herrel, chercheur au Muséum national d'histoire naturelle à Paris. On connait tous le développement des têtards. Chez nous, cela prend un ou deux mois. Eux vont réduire ce cycle de vie. Le développement des têtards et leur métamorphose prennent seulement une semaine ou dix jours. Les petits vont se métamorphoser avant d'entrer dans le sable, pour attendre la prochaine pluie. » Agents dormants Quand la pluie tombe enfin, c'est une course contre la montre qui démarre, et c'est la même stratégie pour les dipneustes, des poissons « préhistoriques » dotés d'un poumon pour survivre hors de l'eau, planqués dans la boue. « Dans les périodes où l'eau n'est pas disponible, il va s'enterrer dans la boue et va créer un cocon autour de lui qui évite de perdre de l'eau. Il va attendre en état de dormance, jusqu'à ce qu'il y ait une nouvelle pluie. Il va alors sortir de son cocon et se reproduire », décrit Anthony Herrel. Des plantes aussi attendent la pluie. La rose de Jéricho se met en boule, avant de s'ouvrir et de reverdir dès les premières gouttes. Un symbole de résurrection. Comme la mousse, qui se dessèche complètement, ne respire plus, arrête la photosynthèse, en hibernation totale, et retrouve des couleurs quand la pluie revient. Il y a aussi des graines, de vrais agents dormants, enterrées dans le sable du désert d'Atacama au Chili. « C'est un désert où il y a très peu de pluie, rappelle Anthony Herrel. En revanche, au moment où la pluie arrive, le désert va se transformer complètement, avec des fleurs partout, issues de ces graines présentes dans le sol. Elles vont se reproduire dans un temps très court, et ensuite elles vont attendre que la pluie arrive. » Le cycle de la pluie est aussi celui de la vie. La question de la semaine
Stop aux idées reçues ! L'humain n'a pas le monopole de l'hygiène. Certaines espèces animales peuvent même parfois être plus propres que nous… « Sale bête ! » Qui n'a jamais juré ainsi ? Au sens propre, pourtant, un animal n'est pas si sale. Il y en a même qui battent des records de propreté. Prenez le chat. Il dort beaucoup, mais il se lèche aussi beaucoup : plus d'un tiers de son temps à faire sa toilette. Et quand Minou se lèche, ça le calme. Les rats, qui symbolisent pourtant la crasse et les maladies, sont peut-être plus propres que les chats, se lavent fréquemment et transmettent moins de maladies que nos félins adorés. S’ils font les poubelles, c'est pour se nourrir. D'ailleurs sans eux, nos rues seraient beaucoup plus sales. Propres cousins Lui aussi a une triste réputation : le cochon. Et pourtant, il est sûrement l'animal le plus propre de la ferme. S'il se roule dans la boue, c'est pour protéger sa peau sensible. Et son caca, il le fait loin de là où il dort. Les chimpanzés sont nos plus proches cousins dans le règne animal, plus propres aussi par certains égards. Une étude a montré que leurs lits étaient plus hygiéniques que les nôtres remplis de bactéries. Il est vrai que leur lit, ils le refont chaque jour. Les chimpanzés, et de nombreux singes, enlèvent aussi les parasites de leurs congénères. C'est bon pour le lien social, la cohésion du groupe.  A​u Japon, une colonie de macaques est célèbre pour prendre des bains dans un onsen, une source thermale chaude, et cela fait baisser leur taux de glucocorticoïde, l'hormone du stress. Le spa, ça détend, n'est-ce pas ? Sa propre peau Le gecko lui n'aime pas l'eau. Mais le petit lézard n'en a pas besoin : sa peau est hydrophobe, ce qui lui évite de servir de refuge aux microbes. Le raton-laveur, comme son nom l'indique, trempe dans l'eau sa nourriture avant de la manger, moins pour la laver que pour la ramollir. Chez les poissons, il y a le rémora, qui s'accroche au requin et se délecte de ses parasites. C'est du mutualisme, chacun y trouve son compte. Le dauphin, lui, n'en a pas besoin. Les parasites ont bien du mal à s'accrocher à sa peau, si lisse et si brillante, aux aspérités de l'ordre du nanomètre (1 million de millimètres...). Le propre n'est pas le propre de l'homme. La question de la semaine
Pourquoi certains arbres et plantes ont-ils de grandes feuilles ? Et d'autres plus petites ? Il est ici notamment question de soleil et d'eau. Finalement, la taille, ça compte. Et ça s'explique. La dimension des feuilles des arbres et des plantes dépend d'abord de la génétique, mais l'environnement a aussi son mot à dire, l'eau et le soleil en particulier. Les feuilles des plantes tropicales, en sous-bois, sont ainsi souvent très larges. « Quand on est une plante en sous-bois, on vit dans l'ombre des grands, des géants. Il y a donc très peu de lumière qui arrive au sol. Donc, plus la feuille est grande, plus la surface de capture de la lumière est grande. Ce qui va donc permettre à cette feuille de capturer plus facilement le peu de lumière qui arrive au sol », explique la biologiste Catherine Lenne, enseignante chercheuse à l'université de Clermont-Ferrand. Ici de grandes feuilles pour pallier le manque de soleil, alors que sous climat aride, les feuilles, elles, sont plus petites, adaptées au manque d'eau. Une petite feuille, c'est moins de stomates, et donc moins de fuites. « Les stomates sont les bouches d'aération qui se trouvent sous la feuille, poursuit Catherine Lenne. Elles se ferment et s'ouvrent pour permettre à la feuille de puiser de l'air, du dioxyde de carbone ou de l'oxygène pour respirer. C'est aussi par là que l'eau de la feuille sort, sous forme de vapeur. Donc en climat sec, une petite feuille perd moins d'eau qu'une grande feuille. C'est donc moins dangereux pour l'arbre d'avoir de petites feuilles que de grandes feuilles ». Feuilles à poils Ces feuilles, en zone aride, sont aussi souvent à poils. « La feuille d'un olivier est très velue sur sa face inférieure. La feuille de chêne vert également ; elle est toute blanche en face inférieure. Ses poils vont retenir de l'air comme une fourrure. Cet air retenu par les poils n'est pas soumis au vent. Il est donc plus humide que l'air sec autour de l'arbre. La vapeur d'eau va donc moins sortir de la feuille », précise Catherine Lenne, qui travaille aussi sur la biomécanique des arbres au sein du laboratoire Piaf. Et puis il y a des feuilles encore plus petites, à tel point qu'on les appelle des aiguilles : ce sont les feuilles des conifères, des sapins, qu'on trouve surtout là où il fait froid. Ces feuilles sont vernissées, plus épaisses. « Elles sont aussi très riches en tissus lignifiés – elles deviennent dures comme du bois finalement. Ces tissus lignifiés sont des tissus morts, il y a donc finalement moins de cellules vivantes à l'intérieur de l'aiguille qui risquent de geler », détaille Catherine Lenne. Chez les végétaux, la taille des feuilles est une adaptation, pas un complexe. La question de la semaine
C'est un moment exceptionnel de la nature, et ce sont des moyens exceptionnels que France Télévisions a déployé en région parisienne pour filmer la période de reproduction des cervidés 24 heures sur 24, quand le mâle devient fou d'amour. « Le brame du cerf, c'est un peu la finale de la Champions League de la nature ! Même les gens qui ne sont pas passionnés par la nature vont voir au moins une fois dans leur vie le brame du cerf », assure Pierre Singer, le président de l'Espace Rambouillet, une forêt des Yvelines, près de Paris, qui accueille pendant trois semaines le tournage d'une émission de télévision inédite en France. Produite par France Télévisions, Le Brame du cerf, calquée sur le modèle de la slow télé inventée en Scandinavie, où des millions de téléspectateurs suivent en temps réel, 24 heures sur 24, les pérégrinations des élans par exemple. Une téléréalité sans bellâtre ni cagole, mais avec des animaux. L'Espace Rambouillet, créé en 1972 par l'Office national des forêts, concentre quelque 70 cervidés sur 250 hectares, et organise chaque année des sorties pour aller entendre le raire, le célèbre cri d'amour déchirant la forêt que le cerf émet. Cette fois, plus besoin de sortir de chez soi : bien calé devant son écran, et grâce à sept caméras et micros installés à des endroits stratégiques, comme les points d'eau, on peut assister à l'un des plus saisissants spectacles de la nature : quand commence le brame, la période de reproduction des cervidés. À lire aussi«Slow TV» en France: «C'est très important de parler du cerf, mais aussi de son écosystème de plus en plus menacé» Un énorme désir Excepté l'ours, le cerf est le plus grand mammifère des forêts françaises, et c'est en ce moment, au début de l'automne, qu'il entre en action. En tout cas, il aimerait bien. « Les mâles vont tout à coup avoir une voix qui va apparaitre, pas comme on le raconte parfois de façon un peu romantique et un peu anthropomorphique pour séduire les femelles, mais plutôt pour exprimer une énorme frustration et un énorme désir. Leur taux de testostérone est multiplié par mille, la pression des vaisseaux sanguins dans les testicules est devenue considérable. Ces animaux sont en recherche de très nombreuses femelles. Il faut attendre, patiemment, et le cerf n'a pas de patience. Il va donc détruire des fougères, de petits arbres, se rouler dans la boue... Il ne mange plus, il ne boit plus, il ne dort plus. Il va perdre jusqu'à 25 % de sa masse corporelle », détaille Pierre Singer. Comportement fou Le cerf violent impressionne les humains, beaucoup moins les autres habitants de la forêt. « Ce comportement complètement fou du cerf laisse quand même beaucoup les femelles dans l'indifférence », précise Pierre Singer, comme on peut le voir sur les images. Un cri long et puissant a beau résonner dans la forêt, les biches continuent de brouter tranquillement… La période est exceptionnelle, mais la nature vit sa vie : « On voit un blaireau passer, on voit un renard se faufiler... La vie continue autour du cerf ! » Toute cette agitation du cerf n'a qu'un but, mais le clou du spectacle n'a pas été filmé. Il se révèle finalement assez décevant, comme le raconte Pierre Singer : « Le cerf est dans un tel état de pression sexuelle que les choses sont très rapides. On n'a pas pu y assister, c'est tellement rare. On dit que le cerf fait la chandelle, parce que pour s'accoupler, il va monter sur la femelle et va s'en extraire très vite, en étant presque comme un I, comme une chandelle. » Vite fait, bien fait, l'essentiel est là, pour le cerf, qui doit perpétuer son espèce ; le jeu en vaut la chandelle. La question de la semaine
Éléphants, pigeons, sangliers et même chiens ont appris à se méfier de l'espèce humaine quand elle lui veut du mal. Parlez-vous l'éléphant ? Les éléphants, eux, reconnaissent les langues et dialectes humains. L'expérience a été menée au Kenya auprès de dizaines de troupeaux. On diffusait par haut-parleur des phrases du peuple des Massaï, et d'autres de l'ethnie des Kamba. Pas de changement notable de comportement avec les Kamba, pacifistes. En revanche, face aux voix des Massaï, les éléphants devenaient nerveux, avant de se regrouper, identifiant un danger, celui des Massaïs qui tuent régulièrement des pachydermes. Un éléphant se trompe rarement. À lire aussiLes barrissements des éléphants comparables à des noms pour se désigner, selon une récente étude Les pigeons, eux, gardent la mémoire des visages. C'est ce qu'ont montré deux chercheurs français. L'un, bienveillant, donnait à manger aux pigeons, alors que l'autre s'amusait à leur faire peur, à les chasser. Un mois plus tard, les deux scientifiques sont revenus. Les pigeons se sont tout de suite approchés du gentil, en évitant le méchant. La corneille, l'un des oiseaux les plus intelligents, est aussi capable de se souvenir de ceux qui leur font du mal, ou les dérangent, comme nous le racontait le biologiste Frédéric Jiguet, qui a l'habitude d'attraper des corneilles pour les baguer. « Je capture des corneilles, ici, au Jardin des plantes depuis quelques années, et des individus me reconnaissent et sonnent l’alarme auprès de leurs congénères pour signaler que le méchant monsieur est là, témoigne le chercheur au Museum national d'histoire naturelle. En 2020, on a eu un confinement assez long, je suis revenu début juin, avec un masque. J’étais à peine entré dans le jardin qu’une corneille donnait l’alerte à toutes les autres en disant : "Cette personne est là, elle est revenue !" » Il y a aussi le cas des Bernaches, des oies migratrices, qui comprennent très bien le sens d'un coup de fusil. On s'est aperçu qu'elles avaient appris à contourner les zones de chasse. C'est aussi pour éviter de croiser des humains que des mammifères sont devenus nocturnes, comme les cerfs, les sangliers. Un apprentissage collectif. Mais quand la chasse est interdite, on les voit plus souvent le jour. On termine avec une histoire de pizza et de chien, « le meilleur ami de l'homme ». Un chien agressif en présence de certains humains, mais pas tous, sans qu'on sache pourquoi. Jusqu'à ce qu'on comprenne que chaque personne à ses yeux indésirables venait de manger de la pizza. Les chiens sentent très bien les odeurs, et pas seulement celle de la mozzarella : leur odorat est 40 fois plus développé que le nôtre. Mais pourquoi une telle phobie de la pizza chez ce chien ? C'est un traumatisme lié à l'enfance ; le jeune chiot avait reçu un coup de pied d'un livreur de pizza. Et depuis, il associait l'odeur de la pizza à un danger. La question de la semaine
Des animaux affichent parfois des couleurs éclatantes dans la nature : un signal d'avertissement destiné aux prédateurs, pour les prévenir qu'ils sont toxiques ou venimeux. (Rediffusion) Il y a dans la nature, des animaux qui se cachent, se camouflent, pour éviter d'être mangés. Et puis il y a, au contraire, ceux qui affichent clairement la couleur. Rouge, orange ou jaune, souvent associé au noir. « Ce sont les couleurs les mieux perçues par les prédateurs, explique Romain Nattier, chercheur au Muséum national d'histoire naturelle à Paris. Si on regarde autour de nous, on a un environnement majoritairement dominé par du vert, du marron. Et donc ces couleurs-là, repérables par les prédateurs, tranchent avec leur environnement. L’objectif, c'est vraiment d’être vu, de faire un signe aux prédateurs pour dire : "Je suis là, tu me vois, mais tu ne vas pas me manger, car tu sais que je suis toxique". » À lire aussiPapillons, abeilles...: des insectes chargés d'électricité Les couleurs éclatantes du papillon monarque annoncent sa toxicité, les bandes jaunes et noires du frelon son venin. Mais comment le prédateur sait-il cela ?  « Il mange un certain insecte, il le recrache. Si cet insecte-là dispose de protections chimiques, il le recrache et il apprend petit à petit à associer ce patron de coloration dans la nature à une certaine toxicité. C’est en fait ce que nous faisons, nous, humains, surtout les enfants. Ils arrivent à attraper une guêpe ou une abeille une première fois... Ils se font piquer, et ils arrivent ensuite à associer assez naturellement un bruit ou un patron de coloration à un certain danger, et après, ils ne le font plus ! », sourit Romain Nattier. Gagnant-gagnant Faire peur avec des couleurs, c'est donc ce qu'on appelle l'aposématisme - qui peut aussi prendre parfois la forme d'un signal olfactif -, un phénomène particulièrement répandu chez les proies les plus nombreuses dans le monde animal, les amphibiens (salamandres, grenouilles) et les insectes (guêpes ou coccinelles). L'aposématisme, c'est gagnant-gagnant : pour la proie, qui n'est plus une proie, et pour le prédateur, qui évite ainsi un mauvais repas. À tel point que certaines proies, pas du tout toxiques ou venimeuses, se sont mises à tricher ! « Elles ne sont absolument pas venimeuses ou toxiques et miment une autre espèce qui l’est. Par exemple, ce qu’on appelle les mouches à miel, les syrphes, des mouches qui présentent des patrons de coloration vraiment similaires aux guêpes. Mais ce sont des mouches qui ne piquent pas ! », raconte Romain Nattier. Autre exemple fameux : le serpent faux corail, non venimeux, qui imite les bandes orange et noir du serpent corail. Et ça, c'est grâce à la sélection naturelle. « L’individu qui, par hasard, présente un certain patron de coloration associé à une certaine toxicité se fait moins manger par ses prédateurs, et donc petit à petit, en fait, ces populations-là arrivent à se reproduire davantage, et donc à reproduire ce trait-là, qui est ensuite fixé dans l’espèce », détaille Romain Nattier. Dans la nature, tous les moyens sont bons pour sauver sa peau. La question de la semaine
Petite balade olfactive pour sentir les fleurs. Leurs odeurs parfois surprenantes, destinées à attirer les pollinisateurs. (rediffusion) « Essayez de vous rapprocher de quelques branches en fleurs », nous invite-t-on. On se penche et on fourre son nez partout, pour une promenade odorante organisée pour un petit groupe dans les jardins de l'École du Breuil, à Paris, par Giulio Giorgi, auteur de Botanique olfactive (éditions Nez). Une invitation à « sentir la nature ». Mais pourquoi les fleurs ont un parfum ? C'est leur technique de drague. « L'une des plus grandes différences entre les végétaux et les animaux, c'est que les plantes à fleurs ne vont pas draguer leurs semblables, souligne Giulio Giorgi. Elles ne vont pas draguer d'autres plantes comme nous le ferions en draguant un autre humain. En fait, elles draguent des intermédiaires, des pollinisateurs. Tout ça est quand même magique ! Ça veut dire qu'elles développent un langage commun, et ce langage est bien l'odeur. » Le petit groupe chemine parmi les plantes et les arbustes fleuris en ce début de printemps parisien et ensoleillé. « Vous avez tous senti cette plante ?, demande Giulio Giorgi devant un berbéris, un arbuste muni d'épines et de grappes de petites fleurs jaunes. Elle est très particulière ! Je ne sais pas ce que vous en pensez… » « Moi, je sentais l'eau de javel ! », répond une des participantes. « J'ai l'impression que le monde est divisé en deux par le berbéris, remarque Giulio Giorgi. Il y en a qui le sentent et qui le trouvent très agréable, et il y en a qui détestent parce que ça leur rappelle des émanations humaines qui commencent par "S". » Des rires s'élèvent parmi les visiteurs. « Ne soyez pas dégoûtés, parce que ce sont des odeurs faites pour attirer les pollinisateurs. Pas mal d'espèces dans le genre Berbéris ont des odeurs spermatiques. » Des parfums et des goûts Le soleil réveille et sublime les molécules olfactives. Certaines plantes, pourtant, ne sentent que le soir, comme le jasmin de nuit, qu'on appelle aussi galant de nuit. « C'est une fleur qui sent à partir du coucher de soleil, explique l'écologue et paysagiste. Pourquoi ? Parce que ses pollinisateurs sont des papillons de nuit. Puisque dégager des molécules olfactives demande une énergie à la plante, elle va optimiser ça. Elle va dire : "Je ne vais pas le faire pendant la journée, je le fais pendant la nuit". »  Le nez repoudré par le pollen des fleurs, on poursuit la balade, au gré des fleurs que l'on rencontre et dont on essaie de deviner le parfum : une odeur de miel ici, une autre de cannabis là (mais il n'y pas de cannabis qui pousse à l'École du Breuil !)... On s'arrête devant un magnolia aux immenses fleurs blanches, très parfumées. Et quand ça sent, il y a parfois aussi du goût : « Les pétales de magnolia sont comestibles. Et ils ont un goût exceptionnel. Quand vous les mangez, vous avez l'impression de croquer dans une endive qui a été trempée dans une sauce au gingembre. » L'odorat des abeilles On entend le chant des oiseaux. Les insectes aussi sont de la partie. « On voit qu'il y a des abeilles qui sont au travail ! Ce que nous, on sent, ce n'est pas ce que les pollinisateurs sentent. Les abeilles n'ont pas une très bonne vue, mais ont un odorat excellentissime, bien meilleur que le nôtre. Il m'arrive régulièrement de voir un arbre ou une plante qui est bourré d'abeilles et qui ne sent rien », raconte Giulio Giorgi. Dans les villes, l'odorat des humains est particulièrement en difficulté. À cause de la pollution, les parfums se font rares – à part celui des gaz d'échappement. « Les particules fines ont une propriété absorbante vis-à-vis des odeurs végétales. On va donc moins sentir les parfums des arbustes parce qu'ils sont beaucoup plus absorbés par la pollution », explique l'auteur de Botanique olfactive, un très joli guide illustré pour « sentir la nature au fil des saisons », commenté par des parfumeurs. C'est la fin de la balade. On en a plein le nez et on a pris son pied. La question de la semaine
L'oiseau le plus grand sur Terre est incapable de s'arracher à la terre. Un handicap compensé par une vitesse de pointe, au sol, exceptionnelle. (Rediffusion du 23 février 2025) C'est l'oiseau de tous les superlatifs. L'autruche, qu'on ne rencontre qu'en Afrique, est l'oiseau le plus grand au monde, 2,50 m environ pour le mâle. L'oiseau le plus lourd, jusqu'à 150 kg. C'est enfin l'oiseau le plus rapide, au sol : une autruche peut courir pendant une demi-heure, pour échapper aux prédateurs de la savane africaine, avec des pointes à 70 km/h. Mais on ne peut pas avoir toutes les qualités. L'autruche ne sait pas voler – c'est d'ailleurs le cas de quelque 80 espèces d'oiseaux sur Terre qui restent sur terre. C'est d'abord une question de poids. Et puis l'autruche, à la différence des oiseaux volants, ne possède pas de bréchet, au niveau du sternum, un os où sont rattachés les muscles des ailes.  À lire aussiLes derniers secrets des oiseaux migrateurs De gros œufs, de gros yeux Mais cela n'a pas toujours été le cas. L'ancêtre de l'autruche, au moment des dinosaures, savait voler. Une capacité qu'il a perdue en l'absence de prédateur, après l'extinction des dinosaures et avant que les mammifères deviennent les maîtres de la prédation. L'abandon du vol a permis à l'autruche de muscler ses pattes, lui donnant la force de pouvoir assommer un lion qui s'approcherait un peu trop près. L'autruche est aussi un oiseau qui pond les œufs les plus gros parmi tous les oiseaux : 1,5 kg, l'équivalent d'une vingtaine d'œufs de poule. L'autruche possède enfin les yeux les plus gros de tous les vertébrés : 5 cm de diamètre, des yeux plus grands que ceux de l'éléphant. L'autruche a ainsi des yeux plus gros que son cerveau. Mais n'en tirez aucune conclusion !   À lire aussiÀ quoi rêvent les oiseaux ?
Le festival Ciné-Jardin, jeudi 28 août à Paris, projette en plein air le film Le Chêne et ses habitants, de Laurent Charbonnier et Michel Seydoux. Une fiction tournée avec des acteurs non-professionnels : tous les animaux qui vivent grâce à un chêne de la campagne française. Un film sorti au cinéma il y a deux ans et demi. Rediffusion du 27 février 2022 « Ce sont tous des bons acteurs ! Je trouve que les mulots sont formidables, les geais sont assez bons aussi, ils se démerdent, très très forts, ils transmettent des émotions... » Le producteur et réalisateur Michel Seydoux est fier de ses acteurs, à poils et à plumes, des personnages principaux comme des seconds rôles, qui gravitent autour de ce chêne, un arbre de 110 ans, filmé sous toutes ses branches, dans la forêt de Chambord, par le cinéaste animalier Laurent Charbonnier.  Quatorze mois de tournage au fil des saisons, du printemps au printemps, 350 heures d’images et 44 semaines de montage pour aboutir à un petit bijou naturaliste : Le Chêne et ses habitants, un film de près de 1h30, sorti en France mercredi 23 février 2022, où tous les acteurs tiennent leur propre rôle. Nature foisonnante  Le tournage avait commencé avec le premier confinement anti-Covid de mars 2020. « Il n’y avait plus un avion dans le ciel, plus un bûcheron avec une tronçonneuse, se souvient Michel Seydoux. Il n’y avait plus de promeneurs, il n’y avait plus rien, il n’y avait plus de chasse, plus d’élément perturbateur, et donc tout d’un coup les animaux étaient tous ensemble autour de l’arbre. » Ce qui donne des scènes exceptionnelles et presque surréelles où sur un même plan apparaissent par exemple un héron, un chevreuil, des sangliers... Une nature idéale et foisonnante. « Il y a des scènes qu’on n’a pas osé monter, ça faisait “manifestation pour le pouvoir des animaux”, tellement il y avait d’espèces ! Des rouges-gorges qui viennent dans les pattes des chevreuils, ce sont des choses qu’on ne voit pas souvent. » L’arbre de Noé  Le chêne est le héros du Chêne, un « arbre de Noé », comme Laurent Charbonnier avait intitulé le projet originel, planté au cœur de cet écosystème. Le chêne est d’abord un hôte qui accueille et abrite de nombreuses espèces : l’écureuil, qui y a construit sa maison de branches et de brindilles au plus haut. La chouette effraie, qui dort dans un trou du tronc. Les mulots qui ont construit leur terrier sous ses racines... C’est aussi, et surtout, un chêne nourricier ; tout le monde s’arrache ses fruits ! Le gland est un personnage en soi. « Quand on a travaillé sur le scénario, on a fait le listing de tous les animaux pour qui le gland avait de l’importance, raconte Michel Seydoux. Les cervidés qui les mangent, ou les mulots qui les transportent et qui les mettent dans leur terrier comme réserve pour l’hiver, les geais qui vont les planter - au moment de l’époque glaciaire, la forêt avançait de près de 500 mètres par an grâce aux geais et aux écureuils qui les transportaient. » Au cœur d’un écosystème  Les glands servent aussi de nurserie pour le balanin, un insecte doté d’une longue trompe courbée : la femelle perce le gland et y pond, pour que la larve s’en nourrisse. Dans Le Chêne, il y a des scènes de sexe, de tendresse, une course poursuite… C’est la vie animale dans un superbe film qui célèbre le vivre-ensemble dans la nature. Où tout se tient. « Vous avez un écosystème autour d’un arbre, vous avez des espèces qui sont indépendantes ; si vous cassez ce système-là, tout disparaît. Donc c’est le savoir-vivre ensemble, l’indispensabilité des uns par rapport aux autres. Alors évidemment de temps en temps, il y en a quelques-uns qui se font bouffer, c’est la vie ! Mais ce qui me donne beaucoup d’espoir, conclut Michel Seydoux, c’est que les gens peuvent, avec leur culture, dans chaque endroit, comprendre l’importance de protéger cette formidable biodiversité. »   À lire aussiPando, l'arbre forêt
La mer Méditerranée est en surchauffe. La canicule qui touche la quasi-totalité de la France en cet été 2025 entraîne une canicule marine. Un phénomène de plus en plus récurrent, partout sur la planète. Ce qui n'est pas sans conséquence pour les plantes et les animaux marins, en particulier les coraux. (Rediffusion du 11 juin 2023)  « Elle est bonne ? » Oui, et même un peu trop. La température de la mer Méditerranée pourrait atteindre ce week-end les 30 degrés, alors qu'une canicule frappe la quasi-totalité de la France depuis une semaine. Le record de 2003 pourrait ainsi être dépassé. Une eau plus chaude, c’est peut-être un rêve d’humains, mais ça peut tourner au cauchemar pour la biodiversité marine. Une première conséquence pour les animaux qui peuplent les mers et les océans a déjà été observée depuis plusieurs années, dans l’hémisphère nord comme dans l’hémisphère sud : des formes de migrations climatiques. Des espèces marines montent vers le nord ou descendent vers le sud pour y trouver une eau plus fraîche. À l’inverse, en Méditerranée, on a assisté « via le canal de Suez, à l’arrivée d’espèces vivant initialement dans la mer Rouge, relève Serge Planes, directeur de recherche au CNRS. Il y a donc forcément une compétition : les espèces autochtones de Méditerranée se retrouvent à devoir partager de la ressource avec ces nouvelles espèces ». Un réchauffement de taille Le réchauffement climatique, et donc le réchauffement de l’eau des mers et des océans, peut même influer sur la taille de certains poissons. Selon une étude de l’Ifremer, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, les sardines ont perdu en moyenne 4 centimètres en 10 ans, parce que la quantité disponible de microalgues, leur nourriture, est en baisse. Mais les premières victimes des canicules marines sont les récifs coralliens, une espèce « structurante » : un tiers des espèces marines de la planète en dépendent. L’eau y est peu profonde et se réchauffe encore plus vite. Les coraux blanchissent, et risquent la mort, avec la disparition de la zooxanthelle. « Cette petite algue unicellulaire en symbiose avec le corail fournit au corail ce qu’on appelle les chaînes carbonées : en gros le sucre, l’énergie dont le corail a besoin », explique Serge Planes, spécialiste des récifs coralliens en Polynésie française. Le réchauffement de l’eau entraîne la disparition de la zooxanthelle « et le corail va se retrouver presque sans aucun partenaire pour lui produire de l’énergie. Vous allez alors avoir un corail affamé, qui va, entre guillemets, "mourir de faim", tout simplement par manque de sucre, ce qui entraîne des morts cellulaires et la mort de la colonie ». De l’espoir pour les coraux Quand les canicules marines se prolongent, le taux de mortalité des coraux dépasse les 50 %, « jusqu’à 70 % », selon, Serge Planes, par ailleurs directeur scientifique de la mission Tara dans le Pacifique, pour qui tout n’est pas perdu. « On ne va changer drastiquement les émissions de CO2, et on ne va donc pas changer drastiquement le réchauffement qu’on observe. En revanche, dans les dix ans à venir, on peut changer certains comportements qui sont tous les autres stress que subissent les coraux : les stress liés aux pollutions, les stress liés à la transformation des bassins versants et l’apport de sédiments... Je pense que c’est sur cela qu’il faut jouer pour, finalement, ne laisser les récifs coralliens devant qu’un seul stress, le stress climatique. Et on pourrait là faire gagner en résilience ces récifs coralliens et leur permettre de passer finalement les caps à venir de canicules marines ». L’espèce humaine a encore les moyens de limiter les dégâts qu’elle a provoqués - tant qu’il y a de l’espoir, il y a de la vie !
La mésaventure d'une cigogne, le bec coincé dans une canette en aluminium de Coca-Cola, dans l'est de la France, illustre une nouvelle fois les dangers de la pollution et des déchets humains pour la biodiversité. (Rediffusion du 25/06/2023) C’est une histoire qui a failli bien se terminer, l’histoire de la cigogne et de la canette de Coca. Un agriculteur, Paul Bubba, avait aperçu l'échassier dans un champ près de Vesoul, dans l’est de la France, son long bec coincé dans une canette, avant qu’elle ne s’envole. Mobilisation générale pour retrouver et sauver l’animal. Ce qui fut fait, grâce à un avis de recherche lancé par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Une classe d'enfants, en sortie scolaire, l'a aperçue quelques jours après, bien plus loin, et la cigogne, affaiblie, a pu enfin être secourue. « Ça faisait à peu près 15 jours qu’elle avait cette canette dans le bec. On était presque au maximum de la survie de l’oiseau, précise Bernard Marchiset, le président de la LPO Bourgogne Franche-Comté. On était un peu surpris, d’ailleurs, qu’elle ait pu faire 150 km pour aller dans la Saône-et-Loire depuis Vesoul. C’est impressionnant, la résistance de cet oiseau ! » Mais la cigogne, incapable de boire et de manger pendant autant de temps, avait perdu la moitié de son poids, et deux jours après, elle est morte, en centre de soin, victime de la pollution humaine. « Bêtise humaine » Pourquoi la cigogne a-t-elle donc plongé son bec dans une canette en aluminium ? « Beaucoup de canettes contiennent du sucre, qui attire des insectes, et la cigogne a très certainement voulu attraper des insectes à l’intérieur de la canette », explique le président de la LPO Bourgogne Franche-Comté, qui témoigne que « beaucoup de personnes ont été touchées par la bêtise humaine de quelqu’un qui a jeté une canette dans la nature sans penser aux conséquences qu’il pourrait y avoir sur le vivant et la biodiversité. » L’aluminium met une centaine d’années à se dégrader dans la nature… C’est quatre fois plus pour le plastique qui provoque de nombreux dégâts chez les oiseaux. « On a des milans qui ont niché il y a trois ou quatre ans à côté du lac, ici, près de Vesoul. Ils avaient tapissé leur nid de sacs plastiques. C'étaient des nids tout bleus, raconte Bernard Marchiset. Là, il n’y a pas de problèmes vis-à-vis de l’oiseau, mais il y a tous ceux qui ingèrent des plastiques. L’océan est une véritable poubelle et on a beaucoup d’exemples chez les oiseaux d’eau qui ingèrent des bouts de plastiques et qui en meurent. » Océans de plastique Des millions de tonnes de plastique se retrouvent chaque année dans les océans. En 2050, il pourrait y avoir en mer plus de plastique que de poissons. Selon l’Unesco, 1 million d’oiseaux et 100 000 mammifères marins meurent chaque année dans le monde à cause de la pollution plastique. Des tortues aussi, qui confondent les sacs plastiques avec les méduses. Sans parler des poissons, qui ingèrent le microplastique et qui se retrouvent dans votre assiette – n’en jetez plus ! À écouter aussiMonsieur Chang, héros mal payé de la collecte de déchets à Pékin
Pando, l'arbre forêt

Pando, l'arbre forêt

2025-08-0203:30

Le plus vieil arbre au monde, et l'un des plus grands êtres vivants de la planète, pousse aux États-Unis. Un peuplier faux-tremble qui se développe depuis 80 000 ans par reproduction végétative. (1ʳᵉ diffusion le 1/12/2024) Un grondement, des craquements… C'est un son qu'on n'avait jamais entendu : les vibrations des racines et des millions de feuilles d’un arbre, enregistrées par l'artiste américain Jeff Rice, grâce à un micro posé dans la terre, sur une racine. Et ce n'est pas n'importe quel arbre : Pando, le nom qu'on a donné à un peuplier faux-tremble qui pousse dans l'Utah, aux États-Unis. Un arbre qui est aussi une forêt. Une colonie de clones Plus de 40 000 troncs émergent sur 43 hectares, tous issus d’un seul arbre, grâce à la reproduction végétative, quand l'arbre produit ses propres clones par drageonnage. « La plante peut émettre, à partir des racines, des prolongations qui émergent du sol et font une nouvelle plante, tout à fait similaire aux précédentes, puisque c’est le même patrimoine génétique, explique André-Jean Guérin, le coauteur d'un livre dont Pando est le narrateur, Des forêts, des arbres et des hommes (éditions EDP sciences). C’est comme cela qu’un individu comme Pando peut arriver à démultiplier le nombre de ses représentants, en quelque sorte. Chacun des arbres, en réalité, ne vit pas forcément très longtemps, 100 ou 150 ans maximum. Mais au total, cette colonie dure, paraît-il, depuis 80 000 ans. » À lire aussiCOP16: ce que la biodiversité (r)apporte à l'humanité Menacé par les cervidés Pando est ainsi le plus vieil arbre au monde. Mais pas forcément immortel, menacé par l'affluence des touristes, qui piétinent le sol et empêchent l'émergence de nouveaux drageons. Menacé surtout par des prédateurs. « Les grands mammifères herbivores sauvages boulottent les jeunes troncs de Pando, parce que les grands prédateurs carnivores ont été écartés de sa proximité. Lorsque Pando était plus jeune, il y avait encore des tigres à dents de sabre, un redoutable prédateur carnivore qui faisait fuir les cerfs, les rennes et les autres animaux qui pouvaient s’en prendre aux jeunes pousses de Pando, raconte André-Jean Guérin. Aujourd’hui, ils n’y sont plus, donc les avis autorisés qui ont étudié Pando considèrent qu’il est plutôt sous la menace et plutôt dans une phase de fin de vie. Mais ça peut durer encore des milliers d’années, bien plus que nous ! » Contrairement, à nous, humains, Pando n'a besoin de personne pour se reproduire.
L'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle accueille en moyenne 250 000 avions par an et plus de 530 espèces de plantes et d'animaux. Reportage près des pistes du plus grand aéroport de France, à la rencontre d'une biodiversité parfois inattendue. (rediffusion du 25 septembre 2024) Un gros oiseau de fer passe presque au-dessus de nos têtes. C'est un avion d'Air France, à 100 mètres du sol, tout près d'atterrir à l'aéroport de Roissy, Paris-Charles-de-Gaulle (CDG), au nord de Paris, dans un vacarme assourdissant. On ne s'entend plus, à 300 mètres à peine de la piste. Mais quelques secondes plus tard, le silence (toute proportion gardée) est là, et c’est un autre oiseau qu’on entend. « C'est un pic-vert qui rigole comme ça, note Nicolas Croizé, ornithologue pour AéroBiodiversité, une association qui défend et recense la biodiversité dans les aéroports français. On peut entendre comme maintenant des moments d'accalmie où les oiseaux vont être capables de chanter, et donc de s'identifier, de retrouver leurs jeunes, de former des couples... S'ils sont ici, c'est qu'ils s'y sont adaptés et qu'ils y sont bien. » Les aéroports, d'où décollent et où atterrissent les avions émetteurs de 3% des émissions mondiales de CO2, le principal gaz à effet de serre responsable de la crise climatique, peuvent paradoxalement abriter une riche biodiversité. À CDG, on a déjà compté plus de 530 espèces végétales et animales, et donc pas mal d'oiseaux. « Je crois qu'en face il y a l'épervier », qui s'est envolé quand on l'a regardé. Autour de nous, en contrebas de la piste, de la prairie, des plantes, des arbres, et un immense bassin récupérateur des eaux de pluie qui tombent sur le tarmac. En ce matin de septembre, le niveau de l'eau est au plus bas, sécheresse oblige. Mais au loin, quelques canards barbotent. « Là-bas, près de la berge, ce sont principalement des canards colvert, décrit Nicolas Croizé. Au milieu, beaucoup plus petits, ce sont des grèbes castagneux, ce sont ceux qu'on voit plonger. » « Ah, on a eu une nidification de l'autre côté », lui répond Emmanuel Vesval, référent environnement à l'aéroport de Roissy. Nids d'oiseaux Plusieurs nids de différentes espèces d'oiseaux ont été observés depuis le printemps. « Qu'il y ait de la reproduction, c'est intéressant, souligne Nicolas Croizé. Ça veut dire que les oiseaux ne sont pas seulement de passage et qu'ils vont y passer toute la saison, donc qu'il y a de quoi s'alimenter, de quoi se reposer, de quoi faire un nid. » « Quand vous voyez des cigognes, ça peut surprendre ! Comme on a une partie humide, avec de l'eau, au niveau migratoire on peut avoir beaucoup d'oiseaux qui viennent entre novembre et février », précise de son côté Emmanuel Vesval. Les naturalistes d'AéroBiodiversité effectuent des visites régulières dans des zones où on ne pénètre que sur autorisation spéciale. « On se déplace trois fois par an sur les aéroports, explique Nicolas Croizé. On vient en avril, en juin et en septembre. Le but de notre venue, c'est de faire l'inventaire de toutes les espèces qu'on va pouvoir retrouver sur la plateforme. » Ils sont les bienvenus. Au conseil d'administration d'AéroBiodiversité siègent les patrons des aéroports parisiens, soucieux de présenter une autre image que celle véhiculée par les plateformes aéroportuaires : pollution, nuisances sonores... « Sur les 3 800 hectares de plateforme à Roissy, on a quand même 1 200 hectares de prairies aéronautiques, assure Emmanuel Vesval. On ne peut pas dire qu'elles sont polluées puisqu'on a beaucoup d'espèces qui y vivent. On a une biodiversité qui est tout de même assez impressionnante. » Un renard en bord de piste On est descendu un peu plus bas encore. Un petit ruisseau coule au milieu de saules. Les oiseaux reprennent leur chant dès qu'un avion est passé. Oiseaux et avions ne font pourtant pas bon ménage. « Ce qui va poser problème, c'est surtout la quantité, le nombre d'oiseaux qui vont se retrouver au même moment au même endroit, explique Meriem Methlouti, chargée d'études naturalistes pour AéroBiodiversité. Et c'est pour cela que les effaroucheurs essaient de les éloigner quand un avion s'approche de la piste. Sur certains aéroports, des rapaces sont dressés, mais pas à Charles-de-Gaulle. » « En général, ce sont des gens, formés, avec des véhicules, qui émettent des sons d'oiseaux, par exemple, ou qui tirent au fusil en l'air, pour que les oiseaux s'envolent de la piste. C'est à la fois pour éviter les accidents avec les avions, mais aussi pour limiter l'impact des avions sur les oiseaux, pour éviter qu'ils tuent des oiseaux lors de collision », complète Nicolas Croizé. Mais il n'y a pas que des oiseaux à CDG. On peut aussi croiser des mammifères, des lapins par exemple, que le voyageur, à travers le hublot, aperçoit parfois gambader dans la prairie que longe la piste, indifférent au bruit effrayant de l'avion. « On n'en voit pas autant qu'il y a des années, relève pourtant Emmanuel Vesval. On a l'impression que ça se régule tout seul, parce qu'on n'a pas de maladies, on n'a pas de tout ça...» Le régulateur justement, on l'a aperçu ce matin. Une patrouille de gendarmes en voiture s'arrête à notre hauteur. « Vous avez vu du renard aujourd'hui ?, leur demande Emmanuel Vesval. J'ai vu l'effaroucheur côté sud, apparemment, ils annonçaient un renard en bord de piste. » Une salade et une infusion La promenade se prolonge jusqu'à l'extrémité est de la plateforme aéroportuaire et prend des airs bucoliques. Le chant d'une bergeronnette grise. Le cri de corneilles. Des orties. Des baies d'églantiers, si rouges en cette veille d'automne. « C'est le gratte-cul ! C'est le poil à gratter !, rigole Meriem Methlouti, botaniste. On les mange en confiture. On a trouvé de la verveine et de la camomille, on peut se faire une petite infusion. Là il y a de la tomate sauvage, la morelle, et puis il y a de la mâche, du panais, de la carotte...» « On pourrait presque faire une salade au niveau de la plateforme, avec tout ce qu'on a en plantes ! », conclut dans un sourire Emmanuel Vesval. On entend encore un avion atterrir. On ne les compte plus. On se croirait presque à la campagne.
Il n'y a pas que des oiseaux ou des poissons migrateurs. Une exposition du Jardin botanique de Bordeaux présente les stratégies employées par les végétaux pour aller se reproduire ailleurs. (rediffusion du 22 décembre 2024) Vous n'allez plus regarder vos chaussures de la même manière. L'exposition « Migrations du Vivant », consacrée aux migrations végétales au Jardin botanique de Bordeaux, dans le sud-ouest de la France (alors que les migrations animales font l'objet d'une autre exposition au Muséum de Bordeaux, jusqu'au 9 novembre 2025), commence avec l'expérience réalisée par l'artiste-essayiste Gérard Hauray, intitulée Leçons de chausses. Il a collecté, chez des voyageurs, les graines et les spores accrochées à leurs semelles. Il les a plantées et elles ont poussé dans de petites jardinières exposées dans la serre. « Ça prend en quelques mois : des tapis bactériens, ensuite des algues, des mousses, et puis petit à petit, avec les années, on peut voir apparaître carrément des plantes, détaille Mélissa Portes, chargée de projets muséographiques. Ces micro-paysages sont le témoignage de choses qui ont voyagé sous les pieds des gens. » À la base, pourtant, et c'est ce qui les différencie des animaux, les plantes sont immobiles, le pied dans la terre. « Elles sont de souche, comme on dit souvent, sourit Mélissa Portes. Mais sans migration, sans mouvement, il n'y a pas de vie. » Et la vie des plantes, sur Terre, a commencé par une migration. « Les plantes, à l'origine, étaient aquatiques, et sont sorties progressivement. Ici, on a Cooksonia, l'une des premières plantes terrestres vascularisées, qui fait partie des ancêtres des plantes terrestres qui sont sorties de l'eau. » Une explosion à 250 km/h La migration des plantes est une histoire de reproduction. Il s'agit d'aller planter sa graine ailleurs. On poursuit la visite avec Mélissa Portes, devant le fruit d'un arbre bombardier : « Lorsque le fruit arrive à maturité, la pression grandit jusqu'à ce qu'elle devienne trop forte et que le fruit explose. L'arbre bombardier peut projeter ses graines à 250 km/h et jusqu'à 30 à 45 mètres environ. » Mais d'autres plantes voyagent encore plus loin, grâce aux animaux — comme la bardane, dont les graines s'accrochent à la laine des moutons, et qui a permis l'invention du velcro. Et même beaucoup plus loin grâce à l'eau — les noix de coco ou les sargasses peuvent voyager sur des milliers de kilomètres. Ou encore grâce au vent. « Pour le pollen du pin, ça peut être plusieurs centaines de kilomètres, et d'ailleurs, sur le pollen du pin maritime, on peut observer deux ballonnets, remplis d'air, qui permettent de s'envoler plus facilement encore. » Plantes xénophobes D'autres ont des migrations plus modestes, mais quotidiennes. C'est le cas du phytoplancton, dans la mer, pour rechercher la lumière. « On a des algues unicellulaires qui vont être capables de migrations journalières, en lien avec la lumière. Elles descendent dans la colonne d'eau quand il fait nuit et remontent quand il fait jour pour effectuer la photosynthèse. » Mais face aux migrations, il y a des comportements xénophobes. « La conquête d'un milieu, c'est prendre la place, et il ne faut pas que les autres viennent à côté, souligne Mélissa Portes. C'est le cas de la piloselle. Par ses racines, elle va dégager des toxines qui empêchent les autres plantes d'approcher. » Parfois les plantes ressemblent à des humains... À lire dans C'est dans ta natureAutant en emporte le vent
La pomme de terre est le produit de la terre le plus consommé par l'humanité – en dehors des céréales – et classée pilier de la sécurité alimentaire mondiale. Récit d'une conquête planétaire partie d'Amérique du Sud. (Rediffusion du 20/10/2024) C'est l'histoire d'une success story planétaire. La pomme de terre, ou la patate, est aujourd'hui, hormis les céréales – le riz ou le blé –, le produit de la terre le plus consommé sur Terre. « Tout le monde aime la pomme de terre ! », souligne la journaliste Marie-Laure Fréchet, qui lui a consacré un ouvrage, Le Grand livre des patates (éditions Flammarion). Solanum tuberosum n'a pratiquement que des avantages, à tel point que l'agence des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) considère la pomme de terre comme un pilier de la sécurité alimentaire mondiale.« Quand on maîtrise sa culture, c'est très productif, peu onéreux. On peut la produire sous différents climats. C'est une culture relativement facile, qui se conserve, et ça aussi, c'est important, relève Marie-Laure Fréchet. C'est une source de glucide, un féculent, indispensable à l'alimentation. On mange moins de pain, mais on mange un peu plus de pomme de terre. » La patate n'est pas une pomme Chaque année, 375 millions de tonnes de patates sont cultivées dans quelque 150 pays. Mais cela n'a pas toujours été le cas pour une plante domestiquée dans les Andes, en Amérique du Sud, il y a approximativement 12 000 ans. Les conquistadors espagnols la ramènent en Europe au XVIe siècle, comme la tomate, de la même famille que la patate. Mais elle a du mal à s'imposer. « Contrairement au cacao, par exemple, à d'autres produits exotiques qui ont pu être ramenés, on ne sait pas trop quoi faire de la pomme de terre, raconte Marie-Laure Fréchet. On lui trouve toutes sortes de défauts. Bien moins savoureuse qu'aujourd'hui, elle était sans doute assez amère. Et surtout, on se méfiait de ce qui venait de la terre. On ne savait pas trop ce que c'était et c'est pour ça qu'on l'a appelée pomme de terre. Mais la pomme de terre n'est pas une pomme, elle n'est pas un fruit. » La patate, en effet, ne pousse pas dans les arbres, mais bien dans la terre ; c'est un tubercule, et du point de vue de la botanique, c'est bien un légume. La conquête mondiale de la pomme de terre commence par l'Espagne donc, l'Europe du Sud, mais aussi l'Allemagne : « Il y a même eu un édit d'un empereur de Prusse pour obliger les Allemands à cultiver chacun un petit lopin de pomme de terre. » Mais en France, pendant longtemps, la patate nourrissait seulement les cochons. Frites françaises La France, depuis, s'est rattrapée : elle est le premier pays exportateur au monde, et aussi le troisième pays d'Europe en termes de consommation, derrière l'Allemagne et la Pologne. Et c'est à Paris qu'on a inventé les frites, il y a plus de 200 ans. « La frite a fait beaucoup pour la promotion de la pomme de terre, parce qu'elle sublime son goût », estime Marie-Laure Fréchet, Grande Huile de la Confrérie de la frite fraîche maison. « Dans la région des Hauts-de-France, on est en train d'implanter de nombreuses usines de frites pour exporter des frites surgelées en Chine et en Inde. » La Chine, par sa taille, est devenue le premier producteur mondial de pomme de terre. En Afrique, la patate, qui demande quatre fois moins d'eau que la culture du riz, a réellement pris son essor ces 30 dernières années, et elle est aujourd'hui la quatrième culture vivrière. Partout dans le monde, la patate donne la frite, la pêche, la banane, ou... la patate. La question de la semaine
Pourquoi le monde animal compte-t-il plus d’espèces carnivores ? Pourquoi les mammifères herbivores sont-ils généralement plus grands que les carnivores ? Et pourquoi y a-t-il aussi peu d’espèces omnivores ?  (Rediffusion du 30/07/2023) « Ça sent la chair fraîche ! » Ce cri du cœur de l’ogre dévoreur d’enfants dans Le Petit Poucet, le conte de Perrault, est aussi celui des animaux carnivores… Quoique certains, peu regardants, se contentent de chair avariée – les charognards. Le premier animal identifié sur la planète par des chercheurs américains en 2019, était un carnivore, il y a 800 millions d'années. Ce choanoflagellé, un micro-organisme unicellulaire aquatique, invisible à l'œil nu, se nourrissait de bactéries. Il serait donc l’ancêtre de tous les animaux, y compris les herbivores. Herbivores tardifs Les animaux qui mangent de l'herbe, des plantes... des herbivores, donc, (on ne dit pas vegans) sont apparus bien plus tard, sans qu'on sache très bien pourquoi – le tout premier d'entre eux, il y a 300 millions d'années. Le début d’une révolution biologique, permettant l’explosion de la biodiversité face à une ressource abondante. Le nombre d’insectes, par exemple, a bondi il y a 130 millions d'années, quand de nombreuses plantes à fleur sont apparues. D'une manière générale, en tout cas chez les mammifères terrestres, les carnivores sont plus petits que les herbivores. Tout simplement parce qu'un lion n'aurait pas suffisamment de calories pour survivre s'il faisait la taille d'un éléphant. Si le lion dort autant, ce n'est pas qu'il est paresseux, mais qu'il mange rarement à sa faim. Carnivores majoritaires Et pourtant, aujourd’hui, ce sont les herbivores les plus menacés de disparition, parce que la végétation diminue sous la pression humaine. Près des deux tiers des animaux sont carnivores. Un tiers herbivore. Et il y a seulement 3% d'omnivores, qui mangent de tout, ce qui nécessite un organisme plus complexe – ils sont donc plus rares. Les dents des carnivores sont acérées, pour déchirer la viande, alors que les herbivores ont des canines plates, pour broyer les plantes. Les carnivores n'ont qu'un estomac, alors que les herbivores ont un système digestif sophistiqué pour mieux décomposer les fibres végétales, en particulier la cellulose. Carnivore ou herbivore, tous les goûts sont dans la nature. À lire aussi«Sommes-nous des mammifères comme les autres ?» La question :
Paludisme, dengue, zika... Les moustiques sont les vecteurs de maladies parfois mortelles pour les humains. Le petit insecte piquant est responsable d'environ 800 000 décès par an. D'où l'idée récurrente d'éradiquer tous les moustiques de la planète. Mais est-ce vraiment une bonne idée ? [REDIFFUSION] Vous avez très certainement déjà tué un moustique, sans doute guidé par votre instinct de survie, puisque le moustique – la femelle moustique – est l'animal le plus dangereux pour les humains : il provoque environ 800 000 morts par an. Alors peut-être qu'en écrasant entre vos mains l'un de ces insectes piquants vous êtes-vous demandé : et si on tuait tous les moustiques pour sauver des vies humaines ? « C’est plutôt un fantasme d’éradiquer les moustiques de la surface de la Terre », répond Frédéric Simard, directeur de recherche à l’IRD, l'Institut de recherche pour le développement, basé à Montpellier dans le sud de la France. « On n’est absolument pas capable de cela. Les moustiques sont présents sur la planète depuis bien avant nous et ils y seront probablement encore après nous. » Les premiers moustiques sont apparus sur Terre il y a environ 250 millions d'années, quand notre plus lointain ancêtre, Homo habilis, a fait ses premiers pas il y a moins de 3 millions d'années. Le moustique est écologique En finir avec les moustiques serait surtout une mauvaise idée en raison des nombreux services écologiques que rendent les moustiques là où ils se trouvent, c'est-à-dire partout sur la planète, sauf en Antarctique et dans un petit pays insulaire, l'Islande. « Ils sont tout petits, mais ils sont très nombreux, rappelle Frédéric Simard. Ils sont une source de nourriture importante pour tous les insectivores, terrestres et aquatiques. Ils peuvent aussi, à l’âge adulte, contribuer à la pollinisation. Il faut savoir que les moustiques, mâles comme femelles, se nourrissent de sucre – ils vont butiner les fleurs. » Les moustiques ont également un rôle souvent méconnu : ils filtrent l’eau. « Les larves qui se développent dans l’eau vont être un maillon initial de la dégradation des feuilles mortes qui tombent dans les flaques d’eau par exemple. Elles vont les réduire en bouille pour transformer l’azote organique en azote minéral et le rendre disponible pour les plantes. » On connait 3 500 espèces de moustiques sur la planète, et seulement cinq ou six transmettent, malgré elles, des virus, comme la dengue, ou des parasites, comme le paludisme. Ces moustiques dangereux gagnent du terrain en raison de la mondialisation et du réchauffement climatique  – en témoigne la très rapide colonisation de la France par le moustique-tigre, une espèce exotique envahissante. Soigner le mal par le mâle La chimie et l'utilisation d'insecticides ayant montré leurs limites (au fil de générations, les moustiques développent une résistance) et leurs effets négatifs sur les autres espèces animales (en frappant les insectes indifféremment), on a imaginé d'autres moyens de démoustication dans certaines zones habitées. L'IRD développe ainsi une technique pour provoquer la ponte d’œuf non fécondé. « On va stériliser les mâles en les exposant à une dose de radiation aux rayons X, comme si on leur faisait passer une radio », décrit Frédéric Simard. « Ça va détruire les spermatozoïdes, et ensuite on va lâcher ces mâles dans l’environnement pour qu’ils s’accouplent avec les femelles. » Lors d’une expérimentation sur l’île de La Réunion, l’IRD a ainsi fait baisser de moitié la fertilité des moustiques. « La technique commence à marcher, mais nécessite du développement, de l'ingénierie. Il va falloir construire des usines de production de moustiques à grande échelle pour être capable de traiter des grandes surfaces », plaide Frédéric Simard. Ou comment soigner le mal par le mâle.    
Les plantes monocarpes accumulent toute leur vie de l'énergie pour produire une seule fois des fleurs, des fruits et des graines. Une reproduction unique dans leur existence. Après quoi, elles meurent. Vivre, fleurir et mourir. Ce pourrait être le titre d'un film, mais c'est, en réalité, le destin des plantes monocarpes – qui veut dire, en grec ancien, un seul fruit. L'une des plus célèbres de ces plantes qui finissent en beauté, c'est l'agave, originaire du Mexique, qui sert à faire la téquila. Une plante succulente, dans tous les sens du terme. À la fin de sa vie, elle développe une hampe florale de 10 mètres de haut. Mais il faut être patient. L'agave ne fleurit qu'au bout de 10,15 ou parfois 30 ans. Une fois pollinisée, la plante meurt. Elle aura tout de même pris soin de donner des rejets, à tel point que l'agave est déclaré invasif dans les calanques de Marseille où on doit l'arracher. Des bananes et la mort De nombreuses plantes n'ont qu'une floraison dans leur vie, ce sont les plantes annuelles, qui vivent toute une saison avant de mourir sous climat tempéré à l'approche de l'hiver. Mais pour elles, la floraison n'entraîne pas la mort immédiate. Au contraire des plantes monocarpes, comme le blé, ou encore le bananier. Après la floraison, il y a des bananes, et juste après, c'est la mort. À Madagascar, un palmier ne fleurit qu'une fois, au bout de 50 ans, donne des milliers de graines, avant de mourir. On l'a appelé le palmier suicidaire. Un autre palmier, le talipot, un géant qui pousse en Inde, va vivre 80 ans avant de donner la plus grande inflorescence au monde : une immense couronne de fleurs de 8 mètres de haut. Une couronne mortuaire composée de 10 millions de fleurs, comme un chant du cygne. Une stratégie, pas une tragédie Mais pourquoi ne fleurir qu'une fois, et mourir ensuite ? C'est une stratégie, pas une tragédie. Ces plantes accumulent toute l'énergie de toute une vie pour fleurir et mourir ensuite, épuisées. Mais fleurir beaucoup. C'est une floraison tape-à-l’œil pour attirer d'un coup le plus de pollinisateurs et ainsi maximiser les chances de se reproduire, souvent dans des milieux hostiles. Mais parfois, tout ne se passe pas comme prévu. Les fleurs exceptionnelles peuvent attirer les herbivores, et il n'y aura alors jamais de graines. Au Mexique, les agaves sont victimes du réchauffement climatique, qui peut déclencher la floraison trop tôt, et trop faible. Les plantes monocarpes, c'est un peu tout ou rien, et parfois c'est rien.  La question de la semaine
Ces organismes marins, parmi les plus anciens apparus dans l'océan, fascinent autant qu'ils sont craints pour leurs piqûres urticantes. Les activités humaines encouragent leur prolifération. Méduse, en anglais, se dit jellyfish. Ces organismes marins en forme de champignon, aux couleurs fascinantes, mais craintes pour leurs piqûres, sont bien gélatineux, composés d'eau à 98%, mais ce ne sont pas des poissons. Les méduses font partie du zooplancton, porté par les courants marins. Et c'est pour cette raison qu'elles possèdent un venin redoutable. « Quand on est un animal qui se déplace très peu, il faut développer un système qui permet de tuer ou paralyser extrêmement rapidement ses proies, explique Delphine Thibault, enseignante-chercheuse à l'université d'Aix-Marseille. Le déclenchement des cellules urticantes est très souvent le résultat du toucher. C'est un phénomène mécanique ». Méduse tueuse C'est donc par réflexe que les méduses peuvent piquer les baigneurs. Elles n'en veulent pas particulièrement aux humains. « Ce n'est pas de la défense, ce sont juste des rencontres malencontreuses », poursuit Delphine Thibault. Des rencontres qui peuvent coûter cher. En Australie, la méduse la plus dangereuse au monde peut tuer un homme en deux minutes. « Il y a certainement plus de mortalité par méduses que par requins ». Un « beau palmarès » pour un animal à l'organisme en apparence très simple, apparu sur Terre, enfin en mer, il y a 650 millions d'années. Les méduses n'ont pas de squelettes, « pas de cerveau, pas de cœur, mais éventuellement des yeux aussi développés que les humains. Elles font partie des premiers organismes pluricellulaires, qui ont pu peupler quasiment tous les océans, coloniser aussi les rivières et les lacs d'eau douce », précise Delphine Thibault. Méduses et humains, un couple infernal Les humains les redoutent, mais si les méduses prolifèrent, c'est à cause des humains. Elles n'ont rien à craindre du réchauffement climatique, qui favorise sans doute leur reproduction. Rien à craindre non plus de l'acidification des océans – elles n'ont pas besoin de beaucoup d'oxygène. Et la surpêche est leur alliée, qui élimine la concurrence, les petits poissons pélagiques. « Les anchois et les sardines mangent en grande partie la même chose que les méduses. Cette quantité de nourriture devient disponible pour les méduses qui vont savoir en profiter », souligne Delphine Thibault. C'est pour se nourrir que de nombreuses espèces de méduses remontent une fois par jour à la surface, avant de redescendre à des centaines de mètres au fond de l'eau. Il s'agit des plus grandes migrations au monde, quotidiennes. On reste médusé.
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