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Chronique des matières premières

Chronique des matières premières
Author: RFI
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© Radio France Internationale
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Céréales, minerais ou pétrole, les ressources naturelles sont au cœur de l’économie. Chaque jour, la chronique des matières premières décrypte les tendances de ces marchés souvent méconnus.
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Au Kenya, les exportations d’avocats suspendues à partir d’aujourd’hui. L’AFA, l’Autorité pour l’agriculture et la nourriture, a pris cette décision il y a dix jours. L’objectif : protéger la qualité de l’avocat kényan sur le marché mondial, en évitant la commercialisation de fruits immatures. La décision de l’Autorité pour l'agriculture et la nourriture fait suite à une étude menée sur l’ensemble du pays. « Les volumes de fruits mûrs sont insuffisants pour justifier le transport maritime », explique dans un communiqué le Dr Bruno Linyiru, directeur général de l’AFA. À partir d’aujourd’hui, il est donc interdit d’exporter par bateau des avocats kényans. Cette mesure concerne également les producteurs d’huile. Certaines espèces, comme les avocats Hass, Pinkerton, Jumbo ou encore Fuerte, disposent d’une dérogation très limitée qui en autorise le transport par voie aérienne. L’AFA espère ainsi empêcher des récoltes précoces qui ont deux conséquences négatives : d’abord elles perturbent les cycles de culture, ensuite elles dégradent la valeur de l’avocat kényan sur le marché mondial, qui a parfois la réputation d’être un fruit immature, et de mauvaise qualité. À écouter aussiL'avocat kényan en mauvaise posture face à la vague péruvienne Contestation des producteurs Cette mesure est très contestée par les producteurs d’avocats, qui sont souvent de petits fermiers. Dans le comté de Nyandarua, dans la vallée du Rift, un collectif de producteurs a fait appel de la décision de l’AFA. « Les avocats n’arrivent pas tous à maturité au même moment de l’année, dans toutes les régions productrices, explique Samuel Githaka, directeur de l’Agriculture pour le comté. Les nôtres sont déjà mûrs et ne peuvent plus être exportés. Nous allons perdre beaucoup d'argent », déplore-t-il. Les producteurs de Nyandarua demandent à l’AFA de mettre en place un système de régulation par zones de production. « Sur le principe, la suspension des exportations est cohérente, ajoute un professionnel du secteur de l’huile. Mais on ne peut pas réguler un commerce global avec seulement dix jours de délai. Certains engagements ont déjà été pris, et des contrats ne pourront pas être honorés », poursuit-il en rappelant que certains de ces contrats ont bénéficié d’avances sur marchandises. Le Kenya est aujourd’hui un acteur majeur du secteur de l’avocat dans le monde. Sixième producteur mondial du fruit, il est devenu le deuxième fournisseur d’huile après le Mexique.
Les contrôles chinois sur les exportations de tungstène depuis février ont fait grimper les prix. Or ce métal est utilisé pour sa dureté, sa résistance à l'abrasion qui sont des qualités précieuses pour l’industrie. Parmi les secteurs touchés par cette flambée des prix, il y a celui du pétrole aux États-Unis, et plus précisément les entreprises de forage pétrolier, celles qui mettent en œuvre indirectement la doctrine de Donald Trump « Drill baby drill ». Les exportations de Chine ne sont pas interdites, mais elles se font au ralenti. Résultat, le prix du tungstène a presque doublé entre le 4 février, date des restrictions imposées par Pékin et aujourd'hui. Cette hausse se répercute directement sur le coût de production des outils de forage de haute qualité, et notamment ceux en carbure de tungstène. Selon la taille des forêts utilisées, il faut compter entre 3 000 et 25 000 dollars de plus, selon l'agence Reuters. Les entreprises qui produisent ces outils ont de quoi s'inquiéter pour leur clientèle. Certaines comme R.S.Rock Drilling Tools, se sont d'ailleurs lancées dans des opérations de communication pour convaincre que la qualité, même plus chère, restait un bon investissement. Cette hausse réduit un peu plus les marges d’un secteur soumis aussi à l’augmentation des prix de l’acier et pourrait compliquer un peu plus les ambitions pétrolières de la Maison Blanche. L'industrie mondiale du forage n'est pas la seule à être affectée : les produits semi-finis de tungstène alimentent tous les procédés industriels, précise l'Observatoire français des ressources minérales pour les filières industrielles (Ofremi). La demande en tungstène pour les secteurs de l’énergie et de la défense va être exponentielle d'ici à 7 ans (75% et plus) selon l'organisme qui précise que l’augmentation concerne aussi le secteur de la construction, des produits de grande consommation et le secteur médical. Quelle alternative pour les États-Unis ? Les États-Unis n'ont pas vraiment d'alternative pour s'approvisionner, car la Chine contrôle près de 80% de la production minière de tungstène et plus de 80 % des opérations de raffinage. En 2024, plus d’un quart de l’approvisionnement américain provenait de Chine, selon les services géologiques américains (USGS). Troisième importateur mondial de tungstène, les États-Unis ne produisent pas de minerai de tungstène sur leur sol. Ils misent sur le recyclage, et la transformation locale, comme l'illustre la subvention accordée à une société texane, Melt Technologies, pour soutenir l'installation pilote de production de matériaux en carbure de tungstène. Suite au renforcement des liens commerciaux entre Washington et Kigali, les États-Unis viennent aussi de recevoir ce mois d'octobre leur première cargaison de concentré de tungstène rwandais issu de la mine de Nyakabingo exploitée par Trinity Metals. Le Rwanda produit moins de 2% du tungstène mondial, mais dans la crise actuelle, chaque tonne commercialisée, hors du circuit chinois, devient précieuse. L’Europe mieux lotie ? À la différence des États-Unis, l’Europe produit du minerai en Autriche, au Portugal et en Espagne, mais elle ne maîtrise pas suffisamment les étapes de raffinage et de traitement, ce qui l'oblige à importer 80% du tungstène raffiné dont elle a besoin. Les restrictions à l’exportation imposées par la Chine ont eu un impact sur les importations nettes européennes : elles ont baissé de 60% sur les oxydes sur le premier semestre 2025 par rapport à 2024, de 45% sur les carbures de tungstène et de 20% sur le ferrotungstène, selon des données d'Eurostat. Tout l'enjeu pour l'Europe est de recycler plus. Sa marge de progrès est encore grande, relève l'Ofremi, à condition qu'elle arrive à freiner l'appétit de la Chine qui a intensifié ses importations de concentrés et de déchets métalliques pour faire tourner son industrie manufacturière et pour capter des parts de marché de la fabrication des produits semi-finis. 70% des produits en fin de vie ne sont pas recyclés – par exemple, les pièces d’usure et de coupe intégrés aux outils industriels –, « pourtant le tungstène se recycle très bien et l’Europe détient des capacités performantes » relève l'Ofremi.
La folle ascension des cours du cacao est-elle terminée ? La baisse, constatée cette année, s'est accélérée depuis la mi-août. Les cours ont atteint ces derniers jours leur plus bas depuis février 2024, soit depuis vingt mois. Le cacao new-yorkais se négociait en début de semaine à moins de 6 000 dollars la tonne contre un pic en décembre 2024 à 12 000 dollars la tonne. La baisse des prix s'explique par les nouvelles rassurantes venues d'Afrique de l'Ouest. Les pluies du mois dernier ont été bonnes, et le risque que la nouvelle récolte soit mauvaise s'éloigne. Les cours s'expliquent aussi par un recul de la demande. Les prix records, qualifiés d'intenables à long terme par certains analystes, ont fini par devenir un frein pour les industriels qui ont imaginé d'autres recettes, et pour les consommateurs qui ont appris à manger moins de chocolat. Les fonds spéculatifs participent également à alimenter cette tendance : sentant la baisse se profiler, ils ont liquidé leur position, c'est-à-dire revendu leurs contrats, ce qui donne l'impression que l'offre est plus abondante sur le marché, même si c'est artificiel. Fin de la hausse des prix ? La baisse des cours qui dure depuis plusieurs mois acte un renversement de tendance, au moins à court terme. Elle ne se traduira, en effet, pas immédiatement sur les prix, il y a toujours dans le secteur du cacao un décalage d'au moins six mois, voire plus, ce qui veut dire que la consommation pourrait encore rester tiède. L'hypothèse d'une nouvelle année excédentaire n'est pas exclue : la production mondiale pourrait dépasser la consommation d'environ 186 000 tonnes au cours de la saison 2025-26, soit plus du double de l'excédent de l'année précédente, selon une enquête de l'agence Bloomberg réalisée auprès de plus d'une dizaine de traders et d'analystes en septembre. Ce décalage entre l'offre et la demande, s'il se confirme, ne devrait pas pour autant faire baisser les prix jusqu'aux niveaux d'avant 2023, époque où le cacao s'échangeait entre 2 000 et 3 000 dollars la tonne, relève le Financial Times. Structurellement, la production d'Afrique de l'Ouest reste sous pression, en raison du vieillissement des plantations, de la prévalence de la maladie du swollen shoot et du changement climatique. Baisse structurelle de la production Le relèvement des prix payés aux planteurs en Côte d'Ivoire et au Ghana, pour la campagne cacaoyère 2025-26, ne semble pas en mesure d'enrayer la baisse structurelle de la production. Si selon Rabobank, ces prix encourageront les agriculteurs à livrer plus de fèves aux transformateurs, pour François Ruf, économiste de la filière, cela ne permettra probablement que de ralentir la baisse de la production, pas à inverser la tendance. C'est en particulier vrai au Ghana où la concurrence de l'orpaillage a déjà fait perdre du terrain à la filière. Le pays pourrait d'ailleurs perdre à court terme sa place de deuxième producteur mondial, au profit de l'Équateur. À lire aussiHausse des prix du cacao en Côte d'Ivoire: «Ces prix jamais-vus ne tiennent pas compte de l'inflation»
L'inondation du marché du diamant par les pierres synthétiques est une source de préoccupation pour la filière. À tel point qu'en juin dernier, l'industrie du diamant naturel s'est engagée à alimenter un fonds pour une vaste opération marketing. Quatre mois plus tard, les promesses de financement n'ont pas été suivies d'actes. Les signataires se sont engagés à verser 1% de leurs revenus d'exportation de pierres brutes à un fonds collectif. Cette structure, le National Diamond Council, existe depuis longtemps, mais a vu ses moyens chuter avec l'arrêt des financements russes d'Alrosa. L'objectif est de le doter à nouveau de 100 millions de dollars pour mener une vaste campagne de promotion mondiale du diamant naturel. Quatre mois plus tard, les montants promis n'ont pas été débloqués, selon le Centre pour le diamant d'Anvers (AWDC) qui a bataillé pour réunir tous ces acteurs à la même table, et qui demande aujourd'hui à chacun de respecter son engagement, dans une lettre ouverte. « Chaque retard affaiblit la crédibilité de l'engagement que nous avions pris ensemble », écrivent les responsables de l'AWDC. La bataille du marketing Du point de vue des diamantaires, il y a urgence à agir, car les pierres de laboratoire ont provoqué une crise dans le secteur ces dernières années, crise qui s'est traduite par une baisse des ventes et une chute des prix. Pour livrer la bataille, le terrain de la communication est incontournable. « Pendant que nous hésitons, les diamants synthétiques inondent le marché de milliards de dollars de publicité et les influenceurs redéfinissent le discours d'une manière qui sape tout ce que notre secteur représente », relève l'AWDC. Le marketing est d'autant plus important à l'approche de Noël et ensuite du Nouvel An chinois, des périodes cruciales pour la vente de diamants. L'Angola intéressé par De Beers Parmi les contributeurs signataires au mois de juin et rappelés à l'ordre figure l'Angola, où l'industrie s'est réunie en juin. Le pays offre aujourd'hui le plus gros potentiel minier du continent et est devenu, depuis l'année dernière, le premier producteur africain en valeur. Une stature qui s'accompagne d'une ambition : Luanda assure avoir les financements pour acquérir une part du géant De Beers, dont la maison mère Anglo American veut se séparer. Proposition presque concomitante avec celle du Botswana, déjà actionnaire à 15% du groupe et qui souhaite devenir majoritaire. « Des offres, qui, à ce stade, illustrent une volonté panafricaine croissante de gérer les ressources du continent, et qui, si elles se concrétisent, pourraient avoir un impact important sur le marché du diamant », commente un industriel du secteur. À lire aussiLe secteur du diamant s'unit pour redorer l'image des pierres naturelles
Mauvaise nouvelle chez le premier exportateur mondial de bananes, l'Équateur. La maladie baptisée TR4 a officiellement été détectée. Ce qui veut dire que le champignon qui en est responsable est probablement entré dans le pays il y a déjà plusieurs mois. Cette alerte sanitaire est prise très au sérieux, dans un secteur qui n'a pas été épargné par les dernières crises géopolitiques, logistiques et climatiques, et conforte ceux qui plaident pour plus de diversité variétale. (Rediffusion du 25 septembre 2025) Les bananeraies ne seront pas décimées dans les mois qui viennent, mais l'arrivée de la TR4 – fusariose race 4 tropicale – est une nouvelle considérée comme grave, car il n'y a pas de traitement possible. La seule solution, c'est la protection, via un contrôle très strict des surfaces qui sont touchées, pour que la maladie ne se propage pas ailleurs. Concrètement, explique Denis Loeillet, économiste de la filière au Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, « ça passe par l'installation de clôture autour des zones atteintes, la désinfection de tout ce qui entre et sort des plantations, que ce soit les pelles, les chaussures ou encore les roues des véhicules agricoles. » Au Pérou, où la maladie est apparue en 2021, les mesures n'ont pas été suffisantes et des zones entières de culture ont été abandonnées, ce qui a entrainé des baisses de production et une contagion aujourd'hui à l'Équateur. Ailleurs, en Colombie ou encore aux Philippines, on a appris à faire avec, preuve qu'il y a des moyens d'agir pour éviter le pire. Pas d'impact à court terme sur l'approvisionnement L'Équateur met chaque année entre 6 et 7 millions de tonnes de fruits jaunes sur le marché, soit l'équivalent de ce que consomment les 27 pays européens et le Royaume-Uni en un an ! Une maladie chez un géant qui nourrit le monde, inquiète forcément, mais l'avenir dépendra de la vitesse de propagation de l'épidémie. A priori, à court terme, l'effet ne devrait pas être significatif sur les volumes, l'approvisionnement mondial sera largement assuré, mais un effet sur les prix n'est pas à exclure : « Les mesures de biosécurité à mettre en place d'urgence vont augmenter les coûts de production », explique l'expert du Cirad. La grande distribution pourra alors difficilement ignorer la situation lors des négociations à venir et sera probablement contrainte d'acheter plus cher la banane, et peut-être de la revendre à un prix plus élevé aussi. Les limites du tout-Cavendish Avant l'Équateur, 25 pays producteurs ont déjà été touchés par cette maladie, mais le fait que la TR4 arrive en Équateur est perçu comme un marqueur important dans la filière, qui fera probablement bouger les lignes. C'est le signe qu'il est peut-être temps de diversifier les variétés ou de travailler sur la résistance de la banane Cavendish, qui domine le marché depuis les années 1960, mais qui montre aujourd'hui, en Équateur, un peu plus sa vulnérabilité. C'est précisément la mission que s'est donnée, en France, le Cirad, via l'initiative Bana+, un projet de 7,5 millions d'euros qui vise à proposer des variétés résistantes contre la cercosporiose noire et la TR4, deux des principales maladies fongiques qui attaquent le bananier.
La production de cuivre en plein essor en Afrique. Si la République démocratique du Congo est le premier producteur du continent, la Zambie, le numéro 2, devrait connaître une production record cette année. Le pays n'occupe aujourd'hui que la 9e place au niveau mondial, mais c'est un des rares où la production est en hausse. La production zambienne est plus que prometteuse et cela s'illustre par la présence des grands noms du secteur minier tels que Barrick Mining et First Quantum Minerals pour la partie production. D'autres opérateurs ont lancé des activités de prospection, parmi eux Ivanohe, Anglo American ou encore Rio Tinto. Selon les calculs de l'agence Bloomberg, les miniers présents dans le secteur ont au total investi 10 milliards de dollars pour accroître la production qui était l'année dernière d'un peu plus de 820 000 tonnes. L'ambition du président zambien est d'atteindre 3 millions de tonnes, au début de la prochaine décennie, mais pour y arriver, il faudra des investissements encore plus conséquents. À écouter aussiAnglo American et Teck Ressources, un mariage taillé pour le marché du cuivre Une manne pour l'économie nationale ? La hausse des cours, de plus de 20% cette année, est une bonne nouvelle pour tous ceux qui ont investi dans la production sur le continent. Barrick Mining a prévu de récupérer ses derniers investissements en moins de deux ans si les niveaux actuels du marché se maintiennent, selon Bloomberg. Pour la Zambie, qui sort d'une longue période de renégociation de sa dette, c'est la perspective de nouvelles recettes pour soutenir le redressement économique du pays. Il y a moins d'un an, selon une note du cabinet Global Sovereign Advisory, le gouvernement zambien a conclu un accord avec le groupe de négoce suisse Mercuria pour que son cuivre soit mieux valorisé sur les marchés internationaux. À lire aussiLa Zambie souhaite augmenter ses revenus issus de ses mines de cuivre Mines historiques en déclin L'augmentation de la production de cuivre en Zambie ne permettra cependant pas de compenser le ralentissement des mines historiques, notamment celles du Chili, numéro un mondial dans le secteur. Les volumes extraits ne sont pas comparables, la Zambie a produit moins de 4% du cuivre mondial l'année dernière, mais sa production peut donner une bouffée d'air au marché. Selon l'Agence internationale de l'énergie, d'ici 2050, 60 à 90% des ressources qui sont identifiées aujourd'hui pourraient être épuisées d'ici 2050. En parallèle, les besoins vont bondir, car le cuivre est indispensable à la transition énergétique. Hausse des prix inévitable Dans un secteur où les découvertes minières sont rares, la montée en puissance d'un acteur comme la Zambie participera à modérer la hausse des prix, inévitable à moyen terme. À court terme, les prévisions ne plaident pas pour une flambée durable des cours, précise GSA. La hausse progressive des prix de ces derniers mois est essentiellement liée à la multiplication des perturbations et des imprévus de production chez les leaders du secteur – inondation d'une mine en RDC, effondrement minier meurtrier au Chili, et révision de la production de Teck Resources –, hausse contrebalancée par une demande atone en Chine, et le développement du recyclage selon la note du cabinet d'analyse.
L'annonce du plan de sauvetage de la Maison Blanche, dédié aux agriculteurs, tarde à venir en raison du blocage budgétaire qui paralyse une partie de l’État fédéral. Ce plan d'urgence est très attendu par les producteurs de soja, qui souffrent depuis des mois de la chute des importations chinoises. La Chine s'est donné les moyens de se passer de son fournisseur américain. Mais jusqu'à quand ? Difficile de savoir quelle est la marge de manœuvre de la Chine, car plusieurs paramètres entrent en ligne de compte. Ces derniers mois, la Chine a acheté essentiellement du soja du Brésil et d'Argentine pour nourrir ses porcs et ses volailles, mais ces deux pays exportent le gros de leurs volumes d'avril à août. Quand leurs exportations vont se raréfier, les importateurs chinois devront soit acheter ailleurs, c'est-à-dire à cette période de l'année aux États-Unis, soit puiser dans les réserves que Pékin et les industriels ont constituées, en achetant notamment du soja brésilien. L'Empire du Milieu a une tradition de stockage, et a anticipé la crise, personne n'a de doute là-dessus, mais le niveau exact des réserves chinoises est une donnée à laquelle il est quasiment impossible d'avoir accès. Levier politique Au bout du compte, c'est peut-être la politique qui décidera d'une reprise, plus qu'un réel besoin d'approvisionnement. Le soja est clairement un levier pour la Chine, « une arme géopolitique » selon Olivier Antoine, auteur du livre Géopolitique du soja, publié ce mois-ci aux éditions Armand Colin. La Chine a utilisé cette arme lors de la première guerre commerciale en 2018/2019 et la réutilise aujourd'hui, en étant dans une position encore plus forte, car entre-temps, le géant asiatique a continué à diversifier ses fournisseurs. « Ces dernières années la Chine a compris comment transformer sa faiblesse en force » explique Olivier Antoine, sa faiblesse étant son besoin d'acheter plus de la moitié du soja exporté dans le monde, sa force étant d'avoir diversifié ses fournisseurs - Brésil, Argentine, Paraguay, Uruguay pour moins dépendre des États-Unis. La Chine est allée plus loin, pour sécuriser son approvisionnement, explique l'auteur, elle a investi dans toute la chaîne de valeur du soja, en Amérique latine, aussi bien dans la logistique, que dans des entreprises semencières. La Chine achètera-t-elle encore du soja américain demain ? La Chine n'a pas montré qu'elle voulait, dans l'immédiat, se passer totalement du soja américain. Mais à moyen terme ou à long terme, il n'est pas exclu que Pékin cherche à ne plus s'approvisionner du tout aux États-Unis. Les signaux qui confirment la volonté du pays de renforcer sa sécurité alimentaire, et d'être plus résilient se multiplient. La conséquence de cette politique, c'est que les États-Unis ont perdu un moyen de pression. « Les Chinois ont compris que les producteurs de soja étaient un maillon central du système agro-alimentaire américain et qu'ils représentaient aussi un bastion républicain » explique Olivier Antoine. Les producteurs de soja constituent un bloc électoral clé, pour Donald Trump. Un électorat qui a déjà souffert lors de son premier mandat : les producteurs de soja ont perdu 20% de part de marché en Chine, pendant la première guerre commerciale, mais sont restés fidèles. Cette loyauté des communautés agricoles envers Donald Trump fait partie des enjeux de la période actuelle, selon le Financial Times. À lire aussiLe soja américain dans l'attente du plan de sauvetage de la Maison Blanche
C’est le premier grossiste d'ingrédients de chocolat au monde. Avec ses 60 usines, Barry Callebaut, basé à Zurich, en Suisse, fournit les grandes marques, de Mars à Nestlé, mais aussi les chocolatiers gourmets et les restaurateurs en poudre et en beurre de cacao, en blocs et en liquide de chocolat. Mais ce géant continue d'être fragilisé par la raréfaction de sa matière première, le cacao. L'industriel du chocolat vient de voir ses perspectives en Bourse dégradées en fin de semaine dernière. La banque allemande Berenberg ne recommande plus d’« acheter » le titre Barry Callebaut mais juste de le « conserver ». L’action, qui ne valait guère plus de 700 francs suisses en avril dernier, est certes remontée à plus de 1000 francs depuis, mais elle devrait plafonner désormais, alors qu'elle valait trois fois plus, il y a quatre ans. Série de revers Le groupe zurichois a traversé de grosses turbulences. Une épidémie de salmonelle en 2022 dans sa plus grande usine, en Belgique. Les ateliers de produits chocolatés sont fermés pendant des mois, les clients rationnés. Malgré d’énormes investissements dans la sécurité sanitaire, la réputation du géant du chocolat en prend un coup. L'année suivante, c'est le départ brutal du PDG, Peter Boone. Un autre Peter, Feld, imposé par la holding de la famille Jakobs, l’actionnaire majoritaire, supprime alors des emplois et des lignes de production, ce qui fragilise encore les relations commerciales. Dette multipliée par quatre C’est alors que démarre la folle envolée des cours du cacao, multipliés par quatre l'an dernier, après l’annonce de faibles récoltes en Côte d’Ivoire et au Ghana. Ce qui quadruple aussi la dette de Barry Callebaut. Le grossiste est pris en étau : il doit emprunter pour continuer d'acheter de plus en plus cher les fèves qui font tourner ses usines. Mais il ne peut plus passer comme d’habitude la hausse à ses clients. Certains annulent même des commandes ou récupèrent la transformation en interne. Demande de chocolat en berne Aujourd’hui, même si les cours du cacao ont rebaissé, ils restent deux fois supérieurs à la moyenne des dix dernières années, ce qui fait désormais stagner, voire baisser la demande de chocolat – les grandes marques modifient leurs recettes pour intégrer, par exemple, plus de lécithine de soja. Dans ce contexte, difficile pour Barry Callebaut de réaliser ses objectifs de croissance. Sa valorisation boursière n'est plus que de 7,5 milliards de dollars, contre 13 milliards il y a trois ans. Ce qui alimente les rumeurs selon lesquelles, rapporte Bloomberg, le grossiste suisse du chocolat pourrait se retirer de la place financière de Zurich. À lire aussiSur les pistes du trafic de cacao
Les agriculteurs américains sont dans l'attente d'un plan de soutien ce mardi. Le ministre des Finances, Scott Bessent, leur a promis une aide conséquente, en particulier pour les producteurs de soja, très mal en point. Les exportations de soja américain se sont effondrées depuis que la Chine a décidé de réduire drastiquement ses achats aux États-Unis. Les 20% de droits de douane imposés par la Chine en représailles aux taxes américaines ont été plus que dissuasives. Le soja américain n'est plus compétitif par rapport aux origines d'Amérique latine avec cette taxe. Entre janvier et juillet, les exportations américaines de soja vers la Chine ont chuté de 39% en volume et de plus de 51% en valeur. Entre janvier et août, la Chine a acheté 66 millions de tonnes au Brésil, soit les trois quarts des exportations totales du géant d'Amérique latine. La Chine a même acheté deux millions de tonnes de soja en Argentine, en profitant des trois jours pendant lesquels le gouvernement a levé sa taxe à l'exportation de 33%, c'est dire si les importateurs chinois sont sensibles au prix et à quel point ils saisissent toutes les occasions pour ne pas acheter aux États-Unis. Coup dévastateur pour les agriculteurs Plus le temps passe, plus les conséquences sont dévastatrices pour les farmers américains, car la Chine est le premier acheteur de soja au monde, et de très loin. En 2024, les États-Unis ont exporté 27 millions de tonnes de soja vers la Chine, ce qui a représenté un cinquième des importations chinoises de soja pour une valeur de plus de 12 milliards de dollars. À l'heure où la nouvelle moisson débute aux États-Unis, et où la récolte est généralement déjà en partie vendue, la Chine n'a passé aucune commande, ce qui n'était pas arrivé depuis 20 ans. À cette période de l'année, l'Empire du Milieu avait acheté déjà 6,5 millions de tonnes, l'année dernière. La Chine, un marché impossible à compenser Le soja américain s'est exporté plus que d'habitude vers d'autres destinations, le Bangladesh notamment, mais aussi la Thaïlande, le Vietnam, l'Égypte ou encore la Malaisie, mais cela ne suffit pas à compenser la perte du marché chinois. Les exportations américaines, toutes destinations confondues, ont baissé de 8% sur les sept premiers mois de l'année. Dans ce contexte, les silos américains se remplissent, les cours du soja sombrent et pèsent sur les profits de chaque maillon du secteur, comme le rappelle l'agence Bloomberg, que ce soit sur les entreprises qui gèrent les silos à grains, les transformateurs qui fabriquent de l'huile et des tourteaux, ou encore les compagnies ferroviaires qui transportent le soja. Des mesures qui pourraient ne pas suffire Donald Trump a promis de défendre les intérêts des agriculteurs, et en particulier les producteurs de soja lors de sa rencontre avec son homologue chinois Xi Jinping à la fin du mois, en marge du sommet de l'APEC (la Coopération économique Asie-Pacifique) prévu le 31 octobre et 1er novembre en Corée du Sud. « Un accord ne signifierait pas forcément que les exportations reprendront rapidement et au même niveau que par le passé », pointe Olivier Antoine, auteur du livre Géopolitique du soja, publié ce mois-ci aux éditions Armand Colin. Le plan de sauvetage annoncé aujourd'hui ne résoudra pas tout non plus, « il peut être bénéfique à court terme, mais ne compensera pas d'éventuelles pertes de marché qui pourraient être plus durables », prévient Scott Gerlt, économiste en chef de l'American Soybean Association.
Depuis des mois, Donald Trump met la pression sur les Européens pour qu’ils remplacent les derniers achats de gaz russe par des importations américaines. Désormais, les compagnies européennes semblent prêtes à s'engager sur de longues durées à acheter du GNL en provenance des États-Unis. Même si l’Europe n’entend pas accélérer la fin de ses achats de gaz russes, ils ont déjà très fortement diminué. Et Bruxelles prévoit que les derniers contrats s'arrêtent fin 2027. Ce qui est nouveau, c’est que certaines compagnies européennes ont effectivement commencé à passer des contrats de long terme avec des fournisseurs américains. En juillet, le pétrolier italien ENI et l’Allemand Sefe ont signé des contrats de vingt ans. Et en septembre, c’est la major Exxon qui a publiquement reconnu qu’elle espérait à son tour conclure un accord de long terme avec l’Europe. Une production américaine attractive Si les Européens se montrent finalement intéressés par ces contrats, c’est d’abord parce qu’avec la guerre en Ukraine et la diminution des achats de gaz russe, ils ont été contraints de se réorganiser. Ils ont d’abord privilégié le gaz asiatique, puis du GNL américain sur le marché spot. Mais les prix de gros du gaz américain sont actuellement trois fois inférieurs. À moyen terme, l'écart pourrait se resserrer, mais les prix américains devraient rester bien inférieurs à ceux du gaz asiatique et européen. Et question volume, les États-Unis sont prêts. La production américaine de GNL va représenter la moitié de l’augmentation de l’offre mondiale d'ici à 2030. À lire aussiL'Europe consomme moins de gaz naturel liquéfié mais en achète plus à la Russie Un nombre record de projets Car malgré l'incertitude macroéconomique et le besoin d’accélérer la transition énergétique, les États-Unis continuent toujours de miser sur le développement du gaz. Donald Trump n’y est pas étranger. L'activité de liquéfaction de GNL est restée très soutenue depuis le début de l'année. Les États-Unis ont approuvé un nombre de record de projets dans ce domaine. C’est la suite d’un développement sans précédent de cette industrie qui a commencé il y a plus de vingt ans. Entre 2004 et 2024, la production gazière américaine a doublé. Les États-Unis sont devenus le premier exportateur mondial de GNL en 2023. Fin 2024, leur capacité de liquéfaction atteignait près de 120 milliards de mètres cubes par an, soit 20 % de la production mondiale. À lire aussiÉtats-Unis: le président élu Donald Trump veut libérer les énergies fossiles
L'avenir du coton africain était au cœur de la réunion annuelle de l'Association française cotonnière (Afcot), qui s'est tenue les 29 et 30 septembre à Deauville, en France. L'or blanc du continent est devenu, ces dernières années, dépendant de la demande du Bangladesh, son principal client. Mais le Brésil, désormais premier exportateur mondial de coton devant les États-Unis, pourrait changer la donne. Le Bangladesh reste le marché principal pour l'Afrique : environ six balles de coton sur dix y sont exportées. L'année dernière, les importations de coton africain y ont même augmenté de 10%. La part de marché de l'or blanc du continent au Bangladesh est passée de 37 à 40%. Mais il y a, en parallèle, de mauvais signaux : les filateurs bangladais ont eu besoin de 250 000 tonnes supplémentaires cette année, suite à la chute des exportations indiennes, et l'Afrique n'a pas réussi à saisir cette opportunité. Le Brésil est le pays qui a capté la majorité de cette hausse des achats au Bangladesh. Il en a profité pour s'implanter un peu plus sur ce marché, faisant passer son poids dans le pays de 16 à 24%, précise Antonia Prescott, directrice de la rédaction du site d'information et d'analyse Cotton Outlook. Le coton brésilien est ultra-compétitif et offre notamment de meilleures marges aux filateurs. Le Brésil, un « problème » pour le coton africain ? « Le Brésil est notre problème à tous », résumait, le 30 septembre, un acteur africain du coton, lors de la réunion de l'Afcot. Mais derrière cette boutade, il y a une réalité : le coton exerce une pression considérable sur les filières africaines. Parmi ses avantages, on peut citer son coût de production, un des plus faibles de la planète, ses rendements parmi les plus hauts, sa disponibilité parfois dans des délais meilleurs que ceux proposés par l'Afrique, et une qualité standard – notamment pour la qualité Pima –, reconnaît Kassoum Koné, président de l'Association cotonnière africaine. Dans le secteur cotonnier, le Brésil fait l'effet d'un rouleau compresseur : sa production a augmenté de plus de 72% en quatre ans, relève Antonia Prescott, pour atteindre 4 millions de tonnes. Sur la campagne 2024-2025, le Brésil a contribué à la hausse de la production mondiale – qui a augmenté d'1,3 million de tonnes – et à la lente baisse des prix qui déprime aujourd'hui bon nombre d'opérateurs. Avec ses atouts, le coton brésilien fait plus d'ombre à l'Afrique que le coton américain, qui ne pèse pour l'instant pas grand-chose au Bangladesh. La donne pourrait cependant changer si le projet de loi Buying American Cotton devait voir le jour. Déjà, comme par effet d'anticipation, les achats de coton américain du Bangladesh ont augmenté cette année de 20% par rapport à l'année dernière, et ceux du Vietnam de 70%. À lire aussiRetrouvailles cotonnières à Deauville pour l'Afcot, sur fond de marché morose L'Inde, l'autre opportunité L'Inde, autre pays de la filature et du textile du continent asiatique, apparaît aujourd'hui comme un débouché potentiellement intéressant pour l'Afrique. L'Inde est en déficit structurel. Ses besoins, que ce soit dans l'industrie du fil ou de l'habillement, sont de plus en plus en décalage avec la production de coton du pays. Résultat : les importations de coton du pays ont plus que triplé sur la saison 2024-2025, selon les données de Cotton Outlook. Le Brésil s'est taillé la part du lion en multipliant ses exportations par 12, mais la zone franc a pu multiplier ses ventes par cinq. Le coton africain a aussi profité de la suspension des droits d'importation sur le coton annoncée le 18 août par New Delhi, avec effet jusqu'à la fin de l'année. Une fenêtre d'opportunité, de courte durée, qui s'est déjà quasiment refermée, au vu des délais d'expédition à intégrer, mais qui a permis de relancer les ventes. Des filateurs très sensibles au prix L'espoir, c'est maintenant que la mesure soit reconduite, même si les filateurs indiens sont très sensibles au prix, eux aussi, et que les négociants vont devoir faire preuve de persuasion pour les convaincre de continuer à acheter africain plutôt que brésilien. « La qualité du coton de la zone franc ne suffit plus pour rester dans la course », ont reconnu plusieurs participants à la conférence de Deauville. « Il n'y aura pas d'avenir avec un rendement qui reste inférieur à une tonne à l'hectare », a résumé Gérald Estur, expert du secteur.
Deauville, dans le nord-ouest de la France, a accueilli en ce début de semaine, les 29 et 30 septembre, la traditionnelle rencontre de l'Association française cotonnière (Afcot). Un rendez-vous qui a rassemblé près de 300 participants issus d'une quarantaine de pays. Cette rencontre s'est déroulée dans un contexte particulier, celui d'un marché « totalement à l'arrêt », pour reprendre les mots d'un participant. Chacun avec leurs mots, les participants ont tous confirmé et déploré à Deauville l'immobilité du marché et l'absence de lumière au bout du tunnel. « Depuis des mois, on assiste à une lente dérive à la baisse, avec une volatilité minimale des prix », résume Antonia Prescott, directrice de la rédaction du site d'information et d'analyse Cotton Outlook. Les négociants, dont le métier est de choisir le moment opportun pour acheter et vendre en dégageant la meilleure marge, sont comme paralysés par cette quasi-stabilité. « On patauge tous, confie l'un deux, comme pris dans un marécage. » Il y a néanmoins du coton qui est exporté, mais surtout du coton du Brésil et des États-Unis. Les deux origines représentent 65% des ventes mondiales. À écouter aussiLes cours du coton dévissent sur fond de bonnes récoltes mondiales Le coton africain pénalisé La situation est beaucoup plus difficile pour le coton africain, dont le coût de production est beaucoup plus élevé que celui du coton brésilien ou américain. Lors des appels d'offre, explique un négociant, le coton de la zone franc se retrouve en haut de la liste des prix, et donc souvent écarté, malgré sa belle qualité qui fait sa réputation. Quand les sociétés cotonnières africaines finissent par céder des volumes, elles le font généralement à perte. Le seul maillon de la chaîne qui est à peu près épargné, c'est le producteur ouest-africain, dont le coton est garanti par un prix fixé en début de campagne dans chaque État concerné. À écouter aussiLes cotonniers africains sur le qui-vive refusent d'être déclassés Des perspectives 2026 très incertaines Dans un tel paysage, l'humilité s'impose, a rappelé le président de l'Association française cotonnière à Deauville, dans son discours de clôture. Le schéma actuel est celui d'une surproduction mondiale par rapport à une demande qui ne suit pas. Il faudrait qu'un des paramètres ou les deux bougent dans le bon sens pour que la filière africaine retrouve des couleurs. Rien ne dit que la production va ralentir, car les subventions accordées au coton brésilien, indien, chinois et américain pourraient inciter les agriculteurs de ces pays à produire plus, relève un participant. « Les tensions géopolitiques, l'affaiblissement du dollar et la pression sur les matières premières agricoles plaident davantage pour une stabilisation des cours que pour une remontée significative à moyen terme », selon Thierry Devilder, le président de l'Afcot.
L’Ukraine est le plus grand exportateur mondial d’huile de tournesol et la France, le premier producteur de l’Union européenne. Les prix de l’huile de tournesol restent élevés, alors que la récolte de cette année s’annonce une fois de plus réduite. Les prévisions ne sont pas bonnes. Et ce aussi bien dans l’Union européenne qu’en Ukraine, alors que les récoltes de tournesols se poursuivent jusqu’à la fin septembre. Après un été chaud et sec qui a entravé le développement des graines, les cultivateurs français, mais aussi roumains, hongrois ou encore bulgares, s’attendent à une production limitée. Elle est néanmoins un peu plus généreuse que l’an passé. La troisième pire récolte de cette décennie Cela pourrait à nouveau être une des pires récoltes de tournesol que l’UE ait connue ces dix dernières années. En effet, 8,6 millions de tonnes d’huile de tournesol devraient être produites, cette année, selon Argus Media, à peine mieux qu’en 2024 (8,3 millions de tonnes). Alors qu’en 2020 la production européenne a atteint 9,8 millions de tonnes. « Les prix de l’huile de tournesol sont bien plus élevés qu’il y a dix ans. Et comme les récoltes n’ont que très légèrement augmenté, les prix restent à un haut niveau. Une tonne d’huile de tournesol vaut actuellement autour de 1 109 euros, alors que l’hiver dernier, elle valait 1 200 euros la tonne », précise Sébastien Poncelet, analyste chez Argus Media France. Rien à voir cependant avec le pic à 2 700 euros la tonne, après l’agression russe de l’Ukraine, en février 2022. À titre de comparaison : en 2020, à Rotterdam qui est la place de la cotation des huiles, l’huile de tournesol valait en moyenne 700 euros la tonne. L’impact de la guerre en Ukraine Quant à l’Ukraine, les zones de conflit couvrent souvent les zones agricoles, ce qui n’arrange pas les choses. On s’attend à une récolte de 12,9 millions de tonnes, une production là-aussi un peu supérieure à celle de l’année passée (12,3 millions de tonnes, en 2024), d’après les chiffres d’Argus Media. Alors qu’avant la guerre, l’Ukraine produisait jusqu’à 15 millions de tonnes. « Le marché d’huile de tournesol ukrainien reste malgré tout soutenu », note l’expert. Les prix évoluent à des niveaux comparables à ceux de l’UE. La diminution de l’offre d’oléagineux, l’an dernier, comme l’huile de palme ou celle de colza, a également alimenté cette hausse des prix. Cette année, la faible récolte de tournesol devrait être partiellement remplacée par son concurrent, le colza, dont la production s’annonce très bonne. Reste à savoir quel effet cela aura sur les prix. À lire aussiMaroc: la sécheresse fait exploser le prix de l'huile d'olive, en passe de devenir un produit de luxe
La Chine vient de lancer une enquête sur les exportations de noix de pécan des États-Unis et du Mexique. Pékin dénonce des ventes à des prix inférieurs à ceux du marché, ventes qui porteraient préjudice à l'industrie nationale chinoise. La Chine ne produit qu'environ 3 000 tonnes de noix de pécan et a besoin de beaucoup plus pour faire tourner ses usines de transformation, explique José Gutierrez Fernandez, analyste, noix, épices et fruits secs, chez S&P Global Commodity Insights. Depuis 2010, la Chine est le premier importateur mondial et dépend des États-Unis et du Mexique qui fournissent à eux deux 70 % du marché ! La Chine achète aussi en Afrique du Sud, ce qui lui permet d'avoir des fournisseurs aux périodes de récoltes différentes, qui lui garantissent un approvisionnement tout au long de l'année. Cette enquête est donc perçue avant tout comme une mesure de rétorsion contre les taxes américaines. Les noix de pécan avaient déjà été prises dans la tourmente de la guerre commerciale lancée pendant le premier mandat de Donald Trump, Pékin avait à ce moment-là riposté par des droits de 47 % sur la noix de pécan. L'intégration du Mexique dans l'enquête est nouvelle, et interroge, dans la mesure où le Mexique n'est pas le fournisseur principal de la Chine. Impact immédiat ? L'enquête chinoise, annoncée pour durer un an, n'interdit pas aux exportateurs américains et mexicains de vendre en Chine, mais il n'est pas exclu de voir les douaniers chinois mettre plus de temps à approuver les commandes. En pratique, l'enquête se fait déjà sentir : les achats chinois ont chuté depuis un an et les exportations américaines aussi, les deux étant très liés. Sur les quatre premiers de l'année de la campagne commerciale, d'octobre 2024 à janvier 2025, les exportations américaines de noix de pécan ont chuté de 70 %, selon le ministère américain de l'Agriculture. L'ensemble de la saison 2024/2025 a été une des plus basses depuis les années 1990, selon S&P Global Commodity Insights. Coup dur pour les États-Unis et le Mexique Les conséquences de l'enquête pourraient être d'autant plus contraignantes que c'est précisément l'appétit chinois qui a poussé les principaux États producteurs à augmenter leurs volumes de production ces dernières années, Mexique et États-Unis en tête. Toute nouvelle baisse des importations chinoises de noix de pécan va faire augmenter les stocks au Mexique et aux États-Unis et risque d'entrainer de fortes baisses de prix sur ces deux marchés. Sans parler des difficultés pour les agriculteurs : lors de la précédente guerre commerciale, les producteurs de plusieurs États américains avaient été durement touchés, et les États-Unis avaient dû diversifier leurs ventes vers le Canada, Israël, la Hollande ou encore l'Allemagne, explique José Gutierrez Fernandez, mais cela n'avait pas suffi à combler le manque d'achats chinois. Cette enquête va aussi directement compliquer l'approvisionnement de la Chine. Son alternative, c'est d'acheter plus en Afrique du Sud, et auprès d'autres producteurs mineurs tels que l'Argentine, le Brésil et l'Australie. Mais ils ne fourniront jamais assez si les besoins de la Chine restent les mêmes. À lire aussiLa guerre commerciale de Donald Trump redessine les exportations chinoises
Les diamants polis et taillés dans l’Union européenne sont désormais exemptés de droits de douane. L’accord trouvé est rétroactif au 1er septembre. Cette victoire a été obtenue après plusieurs semaines de mobilisation des acteurs européens de la filière, basés en Belgique. C'est une victoire obtenue de haute lutte à en croire la présidente du Centre Mondial du Diamant d'Anvers (AWDC). Derrière cet accord, explique Karen Rentmeesters, il y a des heures d'appels et de réunions, des négociations pratiquement 24h sur 24, et 7 jours sur 7 durant des semaines pour faire admettre à l'administration américaine que les diamants n'ont pas leur place dans une liste de droits de douane, puisqu'ils ne font concurrence à aucune industrie locale américaine. Les États-Unis, un marché incontournable Si les industriels européens du diamant se sont autant battus, c'est parce que les États-Unis représentent un marché majeur, un partenaire « crucial » pour Karen Rentmeesters. Les Américains sont, de fait, les premiers acheteurs au monde de pierres précieuses. Chaque année, l'Union européenne, et donc la Belgique essentiellement, exporte vers les États-Unis pour 2,1 milliards de dollars de diamants : la moitié est liée au négoce de pierres taillées en Inde qui transitent par la Belgique, l'autre moitié à la vente de pierres polies et taillées à Anvers. C'est cette partie-là, qui pèse un milliard de dollars, qui n'est aujourd'hui plus soumise à une taxe de 15 %. Une opportunité pour tailler plus en Belgique ? Avec cet accord, Anvers devient le seul centre commercial important de taille de diamant qui peut exporter des pierres libres de droit aux États-Unis. Tous les autres pays concernés par cette industrie sont taxés, certains très lourdement, comme l'Inde, qui taille plus de 80 % des diamants commercialisés dans le monde, mais qui est aujourd'hui soumis à des droits de 50 %. D'autres acteurs comme le Botswana, la Namibie, l'Afrique du Sud ou encore le Vietnam sont aussi pénalisés à des degrés différents. En attendant que ces pays trouvent des accords bilatéraux avec l'administration Trump, les professionnels belges du secteur se félicitent de voir leur « leur compétitivité en tant que centre commercial et de polissage se renforcer ». Ils espèrent attirer plus de pierres à tailler, même s'ils restent limités par leurs capacités : Anvers compte 350 tailleurs de diamants, contre 500 000 en Inde. À lire aussiLe secteur du diamant s'unit pour redorer l'image des pierres naturelles
Mauvaise nouvelle chez le premier exportateur mondial de bananes, l’Équateur. La maladie baptisée TR4 a officiellement été détectée. Ce qui veut dire que le champignon qui en est responsable est probablement entré dans le pays il y a déjà plusieurs mois. Cette alerte sanitaire est prise très au sérieux, dans un secteur qui n'a pas été épargné par les dernières crises géopolitiques, logistiques et climatiques, et conforte ceux qui plaident pour plus de diversité variétale. Les bananeraies ne seront pas décimées dans les mois qui viennent, mais l'arrivée de la TR4 – fusariose race 4 tropicale – est une nouvelle considérée comme grave, car il n’y a pas de traitement possible. La seule solution, c'est la protection, via un contrôle très strict des surfaces qui sont touchées, pour que la maladie ne se propage pas ailleurs. Concrètement, explique Denis Loeillet, économiste de la filière au Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, « ça passe par l’installation de clôture autour des zones atteintes, la désinfection de tout ce qui entre et sort des plantations, que ce soit les pelles, les chaussures ou encore les roues des véhicules agricoles. » Au Pérou, où la maladie est apparue en 2021, les mesures n’ont pas été suffisantes et des zones entières de culture ont été abandonnées, ce qui a entrainé des baisses de production et une contagion aujourd’hui à l’Équateur. Ailleurs, en Colombie ou encore aux Philippines, on a appris à faire avec, preuve qu'il y a des moyens d’agir pour éviter le pire. Pas d'impact à court terme sur l'approvisionnement L’Équateur met chaque année entre 6 et 7 millions de tonnes de fruits jaunes sur le marché, soit l’équivalent de ce que consomment les 27 pays européens et le Royaume-Uni en un an ! Une maladie chez un géant qui nourrit le monde, inquiète forcément, mais l'avenir dépendra de la vitesse de propagation de l’épidémie. A priori, à court terme, l’effet ne devrait pas être significatif sur les volumes, l’approvisionnement mondial sera largement assuré, mais un effet sur les prix n’est pas à exclure : « Les mesures de biosécurité à mettre en place d’urgence vont augmenter les coûts de production », explique l’expert du Cirad. La grande distribution pourra alors difficilement ignorer la situation lors des négociations à venir et sera probablement contrainte d’acheter plus cher la banane, et peut-être de la revendre à un prix plus élevé aussi. Les limites du tout-Cavendish Avant l’Équateur, 25 pays producteurs ont déjà été touchés par cette maladie, mais le fait que la TR4 arrive en Équateur est perçu comme un marqueur important dans la filière, qui fera probablement bouger les lignes. C’est le signe qu’il est peut-être temps de diversifier les variétés ou de travailler sur la résistance de la banane Cavendish, qui domine le marché depuis les années 1960, mais qui montre aujourd'hui, en Équateur, un peu plus sa vulnérabilité. C’est précisément la mission que s’est donnée, en France, le Cirad, via l’initiative Bana+, un projet de 7,5 millions d’euros qui vise à proposer des variétés résistantes contre la cercosporiose noire et la TR4, deux des principales maladies fongiques qui attaquent le bananier.
Les prix du pétrole résistent dans un contexte en apparence baissier, porté par l'annonce d'une surabondance à venir. Seulement, d'autres points d'incertitude, tels que l'état des stocks chinois ou les volumes de pétrole sanctionnés qui sont commercialisés, rendent difficile la lisibilité du marché. L'offre en pétrole augmente beaucoup plus vite que la demande et, de l'avis général, il faut se préparer à une surabondance de brut dès le quatrième trimestre et au premier semestre 2026. Mais le niveau de cette surabondance est loin de faire consensus – l'Opep+ prévoit une croissance de la consommation deux fois plus forte que l'Agence internationale de l'énergie. « Il y a trop d'angles morts sur le marché » pour dresser un tableau réaliste, résume l'agence Reuters. Parmi les inconnues figurent les stocks de pétrole détenus par la Chine, des stocks sur lesquels le pays ne communique pas. Or, le niveau de ces réserves est en théorie une des données qui peut avoir une influence majeure sur les prix, a fortiori quand il s'agit des stocks du premier importateur mondial de brut. Opacité des stocks chinois Malgré l'absence de données officielles, le recoupement de différentes données permet d'affirmer que depuis le mois de mars, la Chine a importé du brut – notamment de Russie, du Venezuela et d'Iran – à un rythme bien plus élevé que ce qui était nécessaire pour répondre à la demande en carburant du pays. Selon les calculs de Reuters, l'excédent en pétrole brut du pays aurait même bondi à un peu plus d'un million de barils par jour au mois d'août. À lire aussiComment la Chine contourne les sanctions américaines sur le pétrole vénézuélien? Pour l'instant, le marché semble ne pas tenir compte de ces stocks, pointe le Financial Times, comme s'ils étaient invisibles. « Ces stocks ne sont pas nécessairement négatifs, car si les Chinois accumulent, c'est qu'ils vont consommer », explique Charles Thiémélé, directeur Afrique de la société de trading pétrolier et gazier BGN SA, qui précise que la gestion des stocks en Chine ne correspond pas à celle des Occidentaux. Le pétrole sanctionné, mal répertorié Le marché n'est pas en mesure non plus de refléter tous les volumes de pétrole sanctionnés qui naviguent à bord de la flotte fantôme. C'est peut-être ce qui explique que les cours restent depuis le mois de juillet dans une fourchette relativement stable entre 60 à 70 dollars le baril de Brent – une des références mondiales –, et c'est probablement ce qui fait aussi qu'ils ne reflètent pas correctement l'équilibre entre l'offre et la demande. Tant que la Chine achètera beaucoup, elle absorbera une partie de l'excédent mondial, comme le relève Javier Blas, éditorialiste de l'agence Bloomberg, ce qui jouera contre un effondrement des prix. Tant que la production de la Russie et de l'Iran ne sera pas revenue en grâce sur le marché et ne sera pas commercialisée au grand jour, l'impression de manque soutiendra également les prix. Plus que jamais, le marché manque de lisibilité, reconnaît Charles Thiémélé, tout en rappelant que les prix du pétrole sont le fruit de la combinaison de nombreux facteurs et qu'ils « restent liés à la perception que le marché a de la consommation future ». À écouter aussiDétroit d’Ormuz : accès crucial pour les importations de pétrole de la Chine
La République démocratique du Congo donne le feu vert à de nouvelles exportations de cobalt, à compter du 16 octobre, après plusieurs mois d'interdiction. Le pays, principal producteur du métal bleuté utilisé dans les batteries électriques, opte pour un retour contrôlé sur le marché, via l'instauration de quotas d'exportation, jusqu'en 2027. L'option des quotas n'est pas une surprise, c'était une des quelques hypothèses étudiées par les analystes et experts du marché, qui planchaient depuis plusieurs mois sur des scénarios de reprise. Les opérateurs du secteur, qui vivaient dans l'angoisse de ce qu'allaient décider les autorités congolaises, sont désormais fixés, mais pas forcément soulagés. Les quotas autorisés par la RDC – 18 125 tonnes d'ici fin décembre et 96 600 tonnes les deux années qui suivent – ne vont pas augmenter sensiblement l'offre à court terme et sont inférieurs aux attentes. Leur application pose par ailleurs de nombreuses questions, y compris celle de la capacité du pays à mettre en place des contrôles stricts pour faire respecter les volumes alloués à chaque exportateur. À écouter aussiLe jour où les exportations de cobalt congolais reprendront... Déficit en vue, à court terme En février 2025, l'interdiction d'exporter a fait s'envoler les prix de tous les produits à base de cobalt : l'hydroxyde de cobalt exporté par le Congo a plus que doublé, et les prix des matériaux de batterie tels que le sulfate et le tétroxyde de cobalt ont atteint des sommets fin août, rapportent les analystes de Project Blue. Mais cette hausse n'était manifestement pas liée à un déficit de l'offre par rapport à la demande : grâce aux stocks hors de RDC, notamment ceux d'Afrique du Sud, de Zambie et de Malaisie, les raffineries chinoises ont en effet pu continuer à s'approvisionner. Aujourd'hui, elles ne tournent plus à pleine capacité et les stocks d'hydroxyde commencent à être très serrés, pour ne pas dire inexistants, à en croire certaines sources. La pénurie qui n'a pas eu lieu en 2025 se profile donc pour 2026. L'ampleur du déficit varie selon les estimations, de 10 000 tonnes à plus de 60 000 tonnes. Et ce, « même en supposant une baisse de la demande et une croissance plus rapide de la production indonésienne », rapporte Chris Welch, analyste du marché du cobalt pour Argus Media, qui n'exclut pas un resserrement considérable du marché. À écouter aussiL'enfer du cobalt en RDC : l'envers de la transition énergétique Diminuer les stocks pour soutenir les prix L'objectif de la RDC est d'éviter le surplus de production de cobalt métallique en Chine, qui pèse sur les prix, explique l'expert. Le président de l'Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales et stratégiques du pays (ARECOMS) a confié à l'agence Bloomberg vouloir réduire les stocks mondiaux à l'équivalent d'environ un mois de demande, pas plus. Le choix de mettre en place des quotas à long terme et serrés montre que la RDC privilégie le soutien des prix au volume exporté, relève l'analyste d'Argus Media. Cette stratégie conforte également, via certaines des clauses prévues, la capacité de la RDC à influencer les cours mondiaux du cobalt, selon Ying Lu de Project Blue.
Depuis que la Chine a imposé des contrôles très stricts à son exportation, le germanium a vu son prix flamber. Ce métal, utilisé, en minuscule quantité, dans les équipements militaires et les semi-conducteurs, atteint son plus haut niveau depuis quatorze ans. Aucun autre métal n'offre les mêmes propriétés que le germanium. Il faut désormais compter environ 5 000 dollars pour un kilo de germanium, contre 1 000 dollars en 2023, avant que la Chine n'impose ses restrictions, selon l'agence Fastmarkets. Les prix ont réellement explosé à partir de fin 2024, quand les exportations chinoises ont commencé à chuter sérieusement, rapporte le Financial Times. Certains experts n'excluent pas que des entreprises aient choisi de faire des stocks et provoqué une distorsion du marché, qui à son tour renforce la stratégie chinoise de restrictions. La plupart des usages industriels ne nécessitent que quelques grammes ou quelques nanogrammes de germanium. Aujourd'hui, « l'argument du prix n'est plus pertinent, la question est la disponibilité », pointe Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri). Pour cet analyste, il revient aux pays consommateurs de mettre en place avec les industriels une stratégie souveraine d'approvisionnement. L'offre disponible sur le marché a fondu. Des négociants qui achetaient 100 kg de germanium auparavant, racontent dans le Financial Times être obligés de se contenter de 10 kg. Selon plusieurs témoignages cités par le journal britannique, les États-Unis, qui ont importé l'année dernière pour 50 millions de dollars de germanium selon l'USGS, font face à une crise d'approvisionnement « désespérée ». À lire aussiLa Chine restreint les exportations de deux métaux rares Importations en chute aux États-Unis Le commerce du germanium a nettement ralenti. Les États-Unis, qui l'utilisent dans la fabrication des fibres optiques, des cellules infrarouges et des semi-conducteurs, ont vu leurs importations chuter de 40% pour les sept premiers mois par rapport à la même période en 2024. La situation ne devrait guère évoluer, car même si d'autres pays exportent du germanium issu du recyclage, comme le Canada ou encore la Belgique, « la Chine domine la production et n'a aucun intérêt à diminuer sa mainmise sur le secteur », résume Raphaël Danino-Perraud. En 2023, selon le site français MineralInfo, la Chine produisait plus de 94% du germanium raffiné. À lire aussiLes États-Unis devront se passer de gallium, germanium et antimoine chinois Une production liée au zinc Ces prix, qui crèvent le plafond depuis plusieurs mois, pourraient inciter les miniers à extraire plus de germanium, en théorie, mais le germanium est un co-produit du zinc essentiellement, il est donc tributaire de la demande et de la production de cet autre secteur. Les producteurs de zinc sont en tout cas très courtisés par les industriels. L'Américain Lockheed Martin a par exemple annoncé fin août un partenariat stratégique avec Korea Zinc, un groupe de métallurgie sud-coréen, pour sécuriser ses achats.
En fusionnant leurs activités, les deux géants miniers vont créer le cinquième producteur mondial de cuivre. L'extraction de ce qu'on surnomme le minerai de la transition représentera alors 70% de leur production. Ces dernières années, les deux miniers avaient dû résister aux assauts de rivaux qui voulaient les avaler. Le Canadien Teck avait déjoué l'offensive du trader suisse Glencore, le britannique Anglo American, repoussé les offres successives de l’Australien BHP. Avec ce mariage, les deux groupes sortent de la catégorie des proies et regagnent des marges de manœuvre. « Ils vont être en mesure d’investir et d’optimiser leurs coûts sur le marché du cuivre où seuls les très gros acteurs tirent leur épingle de jeu », explique Yves Jégourel, professeur titulaire de la chaire Économie des matières premières et transitions durables, au Conservatoire National des Arts et Métiers. Un marché très volatil Malgré la demande en hausse, le marché du cuivre reste difficile. C’est tout le paradoxe de cette matière première. Si son prix a bien grimpé depuis dix ans, il ne s'envole pas encore, et ce, alors que la teneur en minerai des gisements a tendance à diminuer. « Les cours restent en plus soumis à une forte volatilité », confirme Yves Jégourel. Le marché va par exemple tenir compte du niveau de l’activité chinoise et si cette dernière ralentit, le prix du cuivre risque de baisser. Cela créé de l’incertitude pour les actionnaires et, in fine, freine l’investissement, explique le chercheur en guise d'illustration. Pourtant, les ressources en cuivre vont être de plus en plus exploitées dans les années à venir. Les besoins auront doublé en 2040. Une voiture électrique en contient quatre fois plus qu’une voiture thermique. Le développement des énergies renouvelables aussi réclame du cuivre, tout comme la construction des infrastructures électriques pour lesquelles il n’existe quasiment pas de possibilité de substitution. À lire aussiPar crainte de manquer de cuivre, la Chine relève sa prime à l'achat Des co-actionnaires à convaincre Selon Yves Jégourel, si cette fusion apparaît comme une évidence, c'est principalement parce que Teck Resources et Anglo American possèdent chacun une très importante mine au Chili. Les deux gisements sont distants de seulement une quinzaine de kilomètres : une proximité qui va permettre de créer des synergies et donc réduire les coûts. Notamment de profiter de la production d’Anglo American pour faire tourner l’usine de traitement du minerai de Teck Resources. Les experts soulignent aussi la qualité des autres mines que les deux groupes possèdent. Une fois la création du nouveau groupe Anglo Teck définitivement entérinée, il deviendra le cinquième producteur mondial. Le cuivre représentera 70% de sa production totale. Mais l’opération n’est qu’aux prémices. Sa finalisation prendra entre 18 et 24 mois. Les deux miniers devront notamment trouver des accords avec leurs co-actionnaires. Au Chili, Teck possède 60% de Quebrada Blanca et Anglo American seulement 44% de Collahuasi, à égalité avec Glencore. Il n’est pas impossible que les deux groupes reçoivent dans l’intervalle une meilleure offre, qui fasse capoter le projet commun. Car dans les affaires encore plus qu’ailleurs, il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. À lire aussiLes nouveaux droits de douane américains sur le cuivre secouent le marché
Tellement utile ! Merci pour vos analyses concises qui permettent de mieux comprendre l'économie et la géopolitique