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Le grand invité Afrique

Le grand invité Afrique
Author: RFI
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© France Médias Monde
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Du lundi au samedi, Christophe Boisbouvier reçoit un acteur de l'actualité africaine, chef d'État ou rebelle, footballeur ou avocate... Le grand invité Afrique, c'est parfois polémique, mais ce n'est jamais langue de bois.
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Direction Dakar, au Sénégal, pour retrouver le Grand invité Afrique de ce samedi. Légende de la musique en Afrique et bien au-delà, Cheikh Lô fête ce week-end ses 50 ans de carrière. Et le musicien sénégalais ne compte pas s’arrêter en si bon chemin, puisqu’un nouveau disque sera publié le 26 septembre. Mais avant cette sortie, le chanteur, batteur, guitariste, a accepté de revenir sur des anecdotes de sa vie artistique. Il est interrogé par Guillaume Thibault.
Au Cameroun, c'est dans un mois, le 12 octobre, que les douze candidats s'affronteront dans les urnes pour briguer la présidence de la République. Onze candidats de l'opposition vont donc défier le président sortant Paul Biya, mais il n'y aura qu'un seul tour. Du coup, le candidat Akere Muna propose à ses partenaires de l'opposition de créer un collectif pour trouver un candidat consensuel. Et il s'adresse plus particulièrement à Maurice Kamto, l'opposant dont la candidature a été rejetée. Pourquoi ce choix ? En ligne de Yaoundé, maître Muna répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Il y a trois semaines, vous avez défrayé la chronique en demandant au Conseil constitutionnel de déclarer Paul Biya inéligible à cause de sa supposée dépendance physique et cognitive. Mais vous avez été débouté. Est-ce que vous n'êtes pas déçu par cet échec ? Akere Muna : Non, pas du tout parce que tous ceux qui pensent qu'à 92 ans et après 42 ans d'exercice, on est, n'est-ce pas, aussi frais que quelqu'un de 49 ans, mais tant pis, je pense qu’on a pu démontrer au monde entier la situation qui prévaut au Cameroun. Tout le monde l'a vu, le président, dans ses sorties. Nous avons fourni des vidéos qui montrent le président à Washington. Il ne sait pas où il est, il ne sait pas ce qu'il doit faire. On doit tout lui dire. Et puis on l'a montré complètement embrouillé devant Mo Ibrahim. Et puis on l'a montré, il y a beaucoup d'incidents. Sa femme qui lui demande de lever la main pour saluer, on lui rappelle ce qu'il faut faire. On a même montré un rapport fait par des experts américains sur ce que l'on doit attendre d'un monsieur de 92 ans. C'est un rapport de douze pages quand même. On est devant le destin de 30 millions de Camerounais. Le Cameroun est dans un gouffre financier et moral, difficile à digérer. Vous êtes originaire du nord-ouest du Cameroun. Vous avez été bâtonnier des avocats du Cameroun. Vous êtes l'une des grandes figures de l'ONG Transparency International. Si vous êtes élu, quelles seront vos deux priorités ? La lutte contre la corruption et la crise du nord-ouest et du sud-ouest. Parlant de la lutte contre la corruption, je vous dis que moi président de la République, dans les cinq jours, je ferai sortir des caisses de Glencore [une société minière, NLDR] 800 milliards. Je ferai payer par Glencore à l'État du Cameroun 800 milliards de francs CFA. C’est le résultant de ventes de pétrole à un prix décoté, le résultant de trafics de toutes sortes, de la corruption reconnue par Glencore lui-même. Et dites-vous bien, personne n'est poursuivi. Donc ça, ce serait votre première priorité ? Oui, la première. La seconde, c'est la crise du nord-ouest et du sud-ouest car je connais les racines de ce problème. Moi, originaire du nord-ouest, je connais le problème. Vous êtes onze candidats face à Paul Biya. Mais il n'y a qu'un seul tour. À un mois du scrutin, est-ce que vous croyez encore à la possibilité d'un candidat consensuel de l’opposition ? Je crois que les onze candidats savent qu'il faut donner l'espoir aux Camerounais. Et sur cette base-là, je pense qu'il y a toujours une solution. Moi, j'y travaille et je pense qu’un candidat consensuel, ça peut être deux ou trois ou quatre, mais je pense qu'au final, il faudra attendre que la campagne officielle commence, donc le 27 septembre, pour voir ce qu'il va se passer. Je pense que l’on peut être optimiste du fait que l'on va trouver des candidats qui pourront… Parce qu'en fait, ces élections, c'est un référendum sur pour Biya ou contre Biya. C'est aussi simple que ça. À lire aussiPrésidentielle au Cameroun: le parti au pouvoir présente «l’armée» de Paul Biya pour la campagne En 2018, le principal challenger de Paul Biya était Maurice Kamto, mais aujourd'hui, il est déclaré inéligible. Quel rôle peut-il jouer dans la recherche d'un candidat consensuel de l'opposition ? Je pense qu’il peut être vraiment la personne qui demande à tous les candidats : « Mettons-nous ensemble et sortons un candidat qui va mener le lot », pour la simple raison que lui, il sera quelqu'un de désintéressé puisqu'il n'est pas candidat. Donc ce rôle-là, il peut le jouer. Il peut proposer une réunion à vous tous, les onze candidats, pour que vous vous mettiez d'accord, c'est ça qu'il pourrait faire ? Oui mais voilà, comme je dis souvent, le problème de ce côté du monde, c'est ce qu'il y a beaucoup de chefs, mais pas assez d'Indiens. Donc peut-être que lors d'une séance comme ça, il faudrait quand même faire un gouvernement, je n'en sais rien, mais je pense qu'il a… Lors d'une séance comme ça, il faudrait quoi dites-vous ? Il faudrait peut-être penser à déjà faire un « shadow government ». Un gouvernement fantôme… Oui. À écouter aussiCameroun: «Après l’échec des hommes, il faut que les femmes prennent le pouvoir» Pour un candidat consensuel de l'opposition, est-ce que vous seriez prêt à renoncer à votre candidature et à vous rallier à un autre candidat ? Mais cette question trouve sa réponse en 2018. Je l'ai déjà fait. Pour Maurice Kamto… Ça c'est vrai, je l'ai déjà fait. Avec une seule différence que maintenant, je fais dans le cadre d'un collectif. On est tous ensemble, voilà la direction qu'on va prendre. Et dans ce cadre-là, je pense que c'est plus facile de le faire. Et pour quel candidat vous pourriez vous désister ? Mais je vous dis que ça sortirait d'un collectif, donc je ne peux pas maintenant commencer à dire tel ou tel autre. Mais pour l'instant, ce collectif, on ne le voit pas… Peut-être qu’on ne le voit pas. Mais le fait que vous n'entendez pas la radio ne veut pas dire qu'elle n’émet pas. Il y a des signes annonciateurs d'un tel collectif ou pas ? Moi j'en vois. Et le secret pour l'efficacité de cette stratégie, c'est la discrétion. Vous conviendrez avec moi. Donc pour l'instant, vous ne pouvez pas en parler sur l'antenne ? Voilà. À lire aussiCameroun: l'opposition partagée sur la désignation d'un candidat consensuel à la présidentielle
Au Cameroun, Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya est la seule femme parmi les douze candidats à la présidentielle du 12 octobre. Mais les Camerounais connaissent bien cette opposante politique, qui a repris les rênes de l'UDC, l'Union démocratique du Cameroun, après le décès en 2020 de son mari, Adamou Ndam Njoya. Longtemps députée nationale, Madame Tomaïno Ndam Njoya est aujourd'hui la maire de Foumban, la grande cité de l'ouest du Cameroun. Quelle est son ambition pour son pays ? RFI : Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya, si vous êtes élue, quelles seront vos deux priorités ? Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya : C'est la crise du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui est la toute première des premières. Parce que le Cameroun aujourd'hui est en guerre contre les Camerounais. Et évidemment, la grande deuxième priorité serait les réformes institutionnelles. Parce que depuis 2021, nous avons demandé que le code électoral soit modifié. Nous avons fait un travail de fond. Malheureusement, le pouvoir en place, comme il sait que c'est à travers des fraudes électorales qu'il s'en sort, c'est un problème d'arbitraire. Cette réforme du code électoral, vous l'avez demandée en direct au président Paul Biya lors de ses vœux du Nouvel An. C'était il y a quelques mois. Qu'est-ce qu’il vous a répondu ? Le président a dit qu'il n'était pas au courant que nous avions fait ce travail, et je lui ai répondu que nous allons mettre ce travail à sa disposition, ce que nous avons fait. Et jusqu'aujourd'hui, nous n'avons pas eu un retour. Vous êtes la seule femme candidate à ce scrutin. Si vous êtes élue, qu'est-ce qui changera pour les femmes camerounaises ? Les femmes camerounaises disent : aujourd'hui, 65 ans, ça suffit. Parce que c'est depuis les indépendances au Cameroun que les femmes sont discriminées. Nous n'avons pas de lois qui protègent les femmes, la famille, les enfants. Les femmes sont celles qu'il faut au Cameroun pour apporter la paix. Parce que le Cameroun est divisé. Aujourd'hui, il y a un manque de confiance entre Camerounais, entre les Camerounais et les institutions. Et donc après l'échec des hommes, il faut que les femmes prennent le pouvoir et elles sont prêtes. Voilà 43 ans que Paul Biya gouverne et il est candidat pour un huitième mandat. Face au système Biya, est-ce que vous ne partez pas battue d'avance ? Pas du tout. Le système Biya est là parce qu’il a les moyens de l'État, il a le confort. Mais dans la grande majorité, les Camerounais veulent des élections justes et transparentes. Donc quand on voit le bilan des 43 années de Monsieur Paul Biya, on comprend très vite pourquoi les Camerounais aspirent au changement. La guerre du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, c'est inadmissible. Quelle est la fonction d'un président de la République ? D'abord, incarner l'unité nationale, ce qu’il ne fait pas. Il doit arbitrer le fonctionnement des institutions républicaines, ce qui n'est pas le cas. Tout le monde voit que le régime n'apporte plus rien. Nous sortons d'une grande tournée au niveau national et nous ramenons que les Camerounais veulent le changement, mais par la paix. Qu'est-ce qui vous rend optimiste ? Est-ce que c'est le fait qu'il y ait des fissures au sein du parti au pouvoir et du gouvernement ? Est-ce que c'est l'âge du capitaine ? Normalement, c'est autant de signes qui montrent que si on était vraiment dans une République, l'âge n'aurait pas été un problème parce que nécessairement on aurait compris qu’il faut un mandat renouvelable une seule fois. Donc ça fera partie de nos résolutions urgentes de limiter le mandat présidentiel. Et maintenant, le fait qu'il y ait des problèmes dans la maison, c'est tout à fait normal aussi. C'est-à-dire que, dans le fond, c'est un régime qui a trop duré et les Camerounais souhaitent pouvoir prendre les rênes pour que le Cameroun redevienne cette Afrique en miniature, ce pays respecté dans la sous-région et dans le monde. Et c'est pour ça que nous parlons d'une nouvelle ère. Nous, on est là pour la rupture, c'est-à-dire un nouveau Cameroun, l'ère de la liberté, l'ère de la responsabilité… Parce qu’il y a tribalisme, détournement de fonds publics, corruption, qui laissent de côté la valorisation du travail, l'effort, la méritocratie. Ce sont des valeurs que nous devons retrouver au Cameroun. Les Camerounais sont prêts pour cette rupture. Alors face à Paul Biya, il y a onze candidats de l'opposition et un seul tour. Pour un candidat consensuel de l'opposition, est-ce que vous seriez prête à renoncer à votre propre candidature et à vous rallier à un autre candidat ? Bien sûr, c'est le principe. Parce que, quand on dit consensus, c'est une personne, mais qui est là dans le cadre d'une équipe, par rapport à un plan d'action commun consensuel. Et parmi les dix autres candidats de l'opposition, vous avez déjà en tête l'une ou l'autre de ces personnes pour qui vous pourriez vous rallier ? Celui qui va recueillir le plus de consensus, suivant des critères objectifs qui sont défendables devant le peuple, aura la confiance de l'Union démocratique du Cameroun.
En République démocratique du Congo, une augmentation des salaires des agents de l'État est à l'étude dans le budget 2026. C'est ce qu'annonce aujourd'hui sur RFI le vice-Premier ministre congolais en charge du Budget Adolphe Muzito. L'opposant modéré, qui est arrivé quatrième à la présidentielle de 2023 avec son parti Nouvel Elan, est entré au gouvernement il y a un mois. En ligne de Kinshasa, l'ancien inspecteur des finances Adolphe Muzito répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Après presque sept ans dans l'opposition, vous avez accepté il y a un mois d'entrer dans un gouvernement sous la présidence Tshisekedi. Pourquoi ce changement de cap ? Adolphe Muzito : Face à l'agression de notre pays et au vu de l'élan pris par le pays, je ne pouvais pas ne pas répondre à l'appel solennel du président Félix Tshisekedi afin de lui prêter main forte et mettre mon expérience à sa disposition pour faire avancer la République. Alors, à la suite de ce que vous appelez l'agression dans l'Est de votre pays, d'autres figures de l'opposition ont accepté le principe d'entrer au gouvernement. C'est le cas de Martin Fayulu. Mais celui-ci précise qu'il faut d'abord que le pouvoir organise un dialogue politique national, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Alors, est-ce qu'en entrant dans ce gouvernement, sans dialogue préalable, vous ne mettez pas la charrue avant les bœufs ? Bon, de mon point de vue, le dialogue ne peut se faire qu'autour de Monsieur Tshisekedi. Ce n’est pas le dialogue qui va donner la légitimité. Monsieur Tshisekedi est déjà légitime, c'est lui qui incarne la légalité nationale. S’il recourt à l'opposition, c'est parce qu'il veut associer tous les Congolais pour que nous parlions d'une même voix et qu'il puisse matérialiser la cohésion nationale de manière à faire face à l'ennemi, tout simplement. Donc, moi, je n'avais pas besoin d'attendre, tout en sachant que Monsieur Tshisekedi représente la légalité nationale. Nous sommes agressés. C'est lui qui est à la tête du pays. Il veut l’apport de tout le monde pour que tous les Congolais parlent d'une même voix, pour que psychologiquement, on puisse affaiblir nos agresseurs, notamment le Rwanda et ses sous-fifres. Donc, je n'avais pas besoin d'une légitimité autre que celle dont il est porteur, parce que c'est lui, finalement, qui a été élu par le peuple. Adolphe Muzito, de 2008 à 2012, pendant près de quatre ans, donc, vous avez été le Premier ministre du chef de l'État de l'époque, Joseph Kabila. Or, aujourd'hui, celui-ci est en exil et il est poursuivi par la justice militaire congolaise pour complicité avec les rebelles du M23. Le 25 août, le ministère public a même requis contre lui la peine de mort pour crimes de guerre et trahison. Qu'est-ce que vous en pensez ? Oh, ce que j'en pense, c'est que d'abord, un, il faut respecter la justice. C'est elle qui va se prononcer. Quant au président Kabila, le moment venu, il devra éventuellement faire appel. Je crois que nous sommes un pays démocratique. La justice va toujours examiner son appel. Je trouve Monsieur Tshisekedi d'autant plus généreux que je ne le vois pas en train d'appliquer une telle peine de mort. Mais à ce stade, il faut respecter la justice et attendre son verdict. Mais vous qui connaissez bien Joseph Kabila, puisque vous avez travaillé à ses côtés pendant près de quatre ans, qu'est-ce que vous pensez de son attitude politique actuelle ? Moi, je n'ai pas beaucoup apprécié qu'il soit passé par le Rwanda parce qu'il avait fait la guerre en son temps, il avait repoussé les rebelles. Je ne vois pas comment il peut se hasarder à organiser une rébellion contre le pays ou à soutenir les sous-fifres que sont ces rebelles. Je n'ai pas compris cette attitude. Ce n'est pas une attitude responsable de sa part. Adolphe Muzito, vous êtes le vice-Premier ministre en charge du Budget et vous préparez donc le budget 2026. L’an dernier, le Congo avait prévu un budget de plus de 17 milliards de dollars pour 2025. Mais en juin dernier, le Congo a dû réviser ce budget à la baisse à cause de la guerre et d'un manque à gagner de quelque 700 millions de dollars. Quel budget prévoyez-vous pour l'année prochaine ? Pour 2026, je prévois un budget qui sera autour de 12 milliards en ressources propres. Ça va correspondre, par rapport au budget dont a hérité Monsieur Tshisekedi, ça sera un doublement. Et nous pourrons, je pense, Monsieur Tshisekedi et sa Première ministre pourront, à ce moment-là, dégager les ressources nécessaires pour financer les infrastructures et équiper l'armée et peut-être améliorer les salaires du personnel, des agents de l'État, en dégageant d'autres économies grâce au contrôle que nous pourrions faire, sous le contrôle de la Première ministre, pour extirper des effectifs de l'administration publique tous les agents fictifs introduits par les différents responsables. Donc, il y aura une tendance à l'amélioration des salaires des agents dans une certaine proportion. Donc, nous sommes dans le bon avec ce budget qui pourrait être autour de 12 milliards en ressources propres, avec des ressources extérieures autour des cinq, 6 milliards de dollars. Alors, vous parlez d'un budget en ressources propres de 12 milliards de dollars qui représenterait un doublement par rapport à quel budget, de quelle année ? Par rapport au budget de la fin du quinquennat précédent de Monsieur Tshisekedi, qui était de 8,5 milliards, ça va être un doublement. Oui, parce que, à ces 12 milliards, vous pourriez ajouter 4 milliards de ressources extérieures. C'est ça ? Oui, plus ou moins 5 milliards de dollars grâce au financement de la communauté internationale. À lire aussiRDC: Félix Tshisekedi réclame «la reconnaissance des génocides perpétrés sur le territoire congolais»
Avec près de 2 kilomètres de longueur et 150 mètres de hauteur, le Grand Barrage de la Renaissance éthiopienne va dompter les eaux du Nil Bleu et va devenir aujourd'hui, jour de son inauguration par le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, la plus grande installation hydroélectrique du continent africain. Mais l'Égypte affirme que cet ouvrage est, pour elle, une « menace existentielle ». Les explications de Sonia Le Gouriellec, qui est maîtresse de conférence en science politique à l'Université catholique de Lille, en France. RFI : Qu'est ce qui va changer avec ce barrage dans la vie quotidienne des Éthiopiens ? Sonia Le Gouriellec : Je pense qu'il y a un gain énergétique important pour les Éthiopiens parce qu’ils pourront ainsi à la fois avoir de l'électricité dans leur pays et en exporter dans le reste de la région. D'autant que je crois que près de la moitié des Éthiopiens n'ont pas accès à l'électricité aujourd'hui. Tout à fait. Et puis on est dans un pays avec une démographie très forte, 130 millions d'habitants. Donc, il y a un véritable enjeu, effectivement, de fournir de l'électricité et puis aussi d'atteindre les ambitions économiques du pays, puisqu'il y a de nombreuses zones économiques spéciales qui ont été ouvertes et dont le but est de pouvoir fournir de l'électricité à tout le monde. Alors, l'Égypte est très hostile à ce barrage. Elle affirme qu'il représente une menace existentielle. Est-ce que ces craintes sont fondées ? Alors effectivement, depuis le début, l'Egypte est opposée à la construction de ce barrage. A tel point qu'on a parlé à une époque de bombardements du barrage. Et la crainte aujourd'hui, je dirais, c'est plutôt politiquement une déstabilisation de la région par l'Egypte. L'existence du barrage, ce n'est pas ça qui est véritablement contesté, puisque le barrage, il va être inauguré ce mardi. Donc il est construit, il est fait. C'est une grande réalisation. Ce qui est aujourd'hui véritablement en débat, c'est l'absence de règles claires et contraignantes de sa gestion en période de stress hydrique. L’Egypte a toujours eu une position très constante sur cette question. Toutes les exploitations possibles en amont devraient avoir un accord écrit juridiquement contraignant, avec des règles claires d'opérations, de comment on va gérer au fur et à mesure ces eaux, notamment en période de sécheresse. Et ça, pour l'instant, c'est absent. Donc, bien que Abiy Ahmed, le Premier ministre éthiopien, ait invité le Soudan et l'Egypte à venir à l'inauguration, pour eux, ça, c'est de la diplomatie, c'est des accords à l'oral, mais il n'y a rien de véritablement fixé. Et ça, ça les ennuie beaucoup. Et ce qu'on craint, c'est que le conflit puisse s'exporter sur d'autres terrains, par exemple en Somalie. Donc, la grande crainte de l'Égypte et du Soudan, c'est qu'en cas de sécheresse, les Éthiopiens ne libèrent pas le volume d'eau nécessaire qui est stocké par ce barrage pour lutter contre cette sécheresse. C'est ça ? Exactement. Et qu'on ne s'en tienne qu'à des paroles alors qu'il faudrait quelque chose d'écrit. Or, pour l'instant, vous n'avez aucun document. Il y a une absence de règles claires, contraignantes sur la gestion des eaux du Nil. En juin 2013, le président égyptien de l'époque, l'islamiste Mohamed Morsi, a déclaré publiquement que, contre ce barrage, aucune option n'était exclue. Est-ce que son successeur, son tombeur, le maréchal al-Sissi, pourrait ordonner le bombardement du barrage ? Alors je ne sais pas ce qui relève effectivement du discours politique d'annonce pour effrayer et de ce qui est techniquement possible. Il me semble que, déjà à l'époque de Morsi, ce n'était pas techniquement possible d'imaginer un bombardement. En revanche, ce qui est tout à fait possible et ce qui est en train d'être fait, c'est une façon de déstabiliser un peu plus l'Éthiopie. Et c'est quelque chose qu'on voit par exemple en Somalie en ce moment. L’Egypte a renforcé sa coopération militaire avec la Somalie, en proposant d'ailleurs de remplacer les troupes éthiopiennes par des troupes égyptiennes. Le conflit s'exporte sur ce territoire, comme ça a souvent été le cas. Et l'envoi de 3000 soldats égyptiens à la frontière du Somaliland qui s'est rapproché de l'Éthiopie, c'est peut-être une pression militaire de l'Égypte sur l'Éthiopie, c'est ça ? Tout à fait. Pression militaire sur l'Éthiopie, pression militaire aussi avec l'Érythrée puisqu'on voit qu'il y a un soutien assez explicite de l'Érythrée. Vous avez eu beaucoup de visites d'Egyptiens en Érythrée, vous l'avez eu également à Djibouti. Donc les Éthiopiens ont souvent vu la politique égyptienne dans la Corne de l'Afrique comme une volonté d'encercler l'Éthiopie. Alors autant ça pouvait parfois paraître étonnant, autant là c'est vrai qu'on peut créditer effectivement ce discours. Et ce bras de fer avec le maréchal al-Sissi, est-ce que le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed peut en tirer un avantage politique dans son pays ? Oui bien sûr, parce qu’au niveau interne en Éthiopie actuellement, la situation est instable. Et donc ce projet de barrage sur le Nil est véritablement un totem national. Et c'est ce qu'il essaye de montrer en interne en Ethiopie. Donc effectivement, plus les pays comme l'Egypte vont vouloir contrer ou faire plier l'Ethiopie, plus ça peut être un drapeau nationaliste pour les Éthiopiens. Néanmoins, il y a beaucoup de crises actuellement en Éthiopie parce qu'il y a eu la guerre au Tigré entre 2020 et 2022, et vous avez encore des affrontements aujourd'hui en région Amhara et en région de l'Oromia. Alors il y a les médias pro Abiy Ahmed qui glorifient le moment, ça très clairement, mais on voit un petit peu moins ce barrage dans les médias du Tigré, en pays Amhara, etc, puisqu'ils sont véritablement concentrés sur les défis internes et les conflits qui ont lieu actuellement. À lire aussiGrand barrage de la Renaissance: des revenus d'un milliard de dollars par an pour l’Éthiopie?
Le deuxième Sommet africain sur le climat s’ouvre lundi 8 septembre à Addis-Abeba, où 45 chefs d’État et 25 000 délégués sont attendus pour cet évènement porté par les Nations Unies, l’Union africaine et l’Éthiopie. Celle-ci vient d’ailleurs de présenter sa candidature pour organiser le COP en 2027. L’un des objectifs du sommet de deux jours est de présenter les solutions concrètes en faveur du climat pour le continent africain, d’unifier aussi la voix des États en vue de la COP qui se tiendra en novembre au Brésil. La sénégalaise Aïssatou Diouf Notre invitée est une militante et une référence en Afrique pour les questions environnementales et responsable des politiques internationales et du plaidoyer au sein de l’ONG ENDA Énergie. Elle répond à Guillaume Thibault. RFI : Aïssatou Diouf, pourquoi ce 2ᵉ sommet africain est capital ? L'enjeu pour le continent, c'est à la fois de prendre le train en marche, mais surtout de parler d'une seule voix ? La Semaine africaine du climat est une plateforme stratégique pour l'Afrique, car elle permet aux pays, à la société civile et même au secteur privé de parler d'une seule voix, de défendre nos priorités face aux négociations mondiales. C'est donc le moment de démontrer que le climat peut être un levier de développement et d'emploi pour le continent. Donc, ce sommet va aligner les efforts des pays africains et surtout catalyser des actions concrètes, notamment sur les enjeux que j'ai cités précédemment. Quel message vous tirez du premier sommet qui s'est tenu il y a deux ans au Kenya, à Nairobi ? Les financements promis lors de ce sommet tardent à arriver et surtout, la mise en œuvre sur le terrain est encore très insuffisante. C'est pourquoi, à mon avis, cette édition doit aller beaucoup plus loin pour que les populations africaines voient réellement les bénéfices et les intérêts de ces sommets. Vous attendez beaucoup des discussions sur les questions de transition énergétique. Pour quelle raison est-ce essentiel ? Vous savez, la transition énergétique est un enjeu vital. Nous avons encore plus de 600 millions de personnes sans accès à l'électricité. Donc le défi, il est double. Premièrement, c'est répondre à cette urgence sociale tout en réduisant notre dépendance aux énergies fossiles. Mais également, on sait tous que l'Afrique doit l'aborder aussi comme une opportunité de développement en misant sur ses immenses ressources en solaire, en éolien, en hydraulique. Rappeler également que cette transition doit être juste. Le mot juste a tout son intérêt. Ça doit guider ce processus, cette transition-là. Donc, elle ne peut pas reposer uniquement sur nos budgets nationaux qui sont déjà très contraints. Donc, cela appelle à une solidarité internationale entre les pays du Nord et les pays du Sud. L'argent reste le nerf de la guerre. Dans un récent rapport, les Nations unies indiquent que 2 000 milliards de dollars ont été investis juste l'année dernière, en 2024, dans les énergies propres, mais que le continent africain n'a quasiment rien touché. Pourquoi l'Afrique reste à la marge. Donc, ce qu'il faut aujourd'hui, c'est à l'échelle internationale, réfléchir sur les mécanismes qui sont adaptés aux réalités du continent, amener aujourd'hui les banques de développement à avoir des mécanismes appropriés pour financer cette transition énergétique, le développement des énergies renouvelables et qu'enfin les pays développés respectent leurs engagements financiers. À lire aussiSommet africain sur le climat: le continent se veut source d'innovation et de solution Est-ce que vous imaginez parfois un système de sanctions pour tous ces pays qui promettent des financements, mais qui au final ne les versent jamais ? Maintenant, on sait comment le système onusien est organisé et structuré. Il est très difficile aujourd'hui de sanctionner ces États-là. Par contre, aujourd'hui, on sait que les citoyens constituent une force incontournable qui demande de la redevabilité à leurs Etats. Je pense qu'on peut s'appuyer sur ces citoyens là pour demander aux Etats de rendre compte, mais surtout aux Etats, de respecter leurs engagements. Est-ce qu'aujourd'hui, on pourrait imaginer ou c'est une utopie ? Les Etats Unis d'Afrique du climat ? Pourquoi est-ce que les Etats ont tant de difficultés à s'accorder, à avoir un vrai impact sur des discussions ou sur des négociations, notamment lors des COP ? Je pense qu'on va tendre vers cela. On n'a pas le choix. Si aujourd'hui l'Afrique veut impacter au niveau des discussions à l'échelle internationale, on doit parler d'une seule et même voix. On doit avoir des positions coordonnées portées par nos leaders politiques. Pourquoi est-il difficile d'avoir ce travail de coordination ? On n'a pas tous le même niveau de développement. Ce sont des aspects également géopolitiques où chaque Etat essaie de se positionner. Un pays, par exemple, qui découvre le pétrole et le gaz, va vouloir forcément l'exploiter, alors que les impacts du réchauffement climatique sont là. Il faudrait qu'à l'échelle de l'Union africaine, que nous arrivions à avoir des politiques au niveau continental très coordonnées, qui puissent impacter durablement nos communautés, mais également qu'au niveau international, dans les débats et dans les discussions, que nous puissions peser. Est-ce que la COP 30 qui va se tenir au mois de novembre au Brésil, Je pense qu'il y a beaucoup de pays africains qui sont sortis très déçus de la COP de l'année dernière à Bakou. Cette COP qui se tient en terre brésilienne, plus précisément en terre amazonienne, c'est une symbolique fort pour les pays en développement, notamment la question des forêts, la question de la taxe carbone et j'espère que les conclusions qui seront issues de la Semaine africaine du climat vont être portées par nos décideurs politiques pour pouvoir impacter les conclusions de la COP de Belem. À lire aussi Aïssatou Diouf, militante tout terrain de la cause climatique
« Un goût du thé amer », le second roman de l'écrivain Mohammed Alnaas, récemment traduit en français et édité chez « Le bruit du monde », revient à l'époque du slogan : « le pouvoir aux mains du peuple » et décrit une situation ubuesque et des querelles permanentes entre les habitants d’un village, Géhenne, dans la Libye des années 1990, du temps de la Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste de Mouammar Kadhafi. Quant au narrateur, dans cette fable moderne et audacieuse, il s'adresse à son lecteur tout en prenant un plaisir à se jouer de lui. Mohammed Alnaas joint par Houda Ibrahim. Vos romans s’attaquent à des sujets qui décrivent les spécificités de la société libyenne, une société restée longtemps fermée aux autres. L’écriture est-elle pour vous est un acte d’auscultation de cette société afin de la raconter, de l’exposer ? La société libyenne est restée méconnue des étrangers pendant un certain temps, et peut-être même est-elle restée méconnue d'elle-même. En dehors du sujet politique, il existe un manque de connaissances sur la Libye et le peuple libyen lui-même, que ce soit sous le régime de Mouammar Kadhafi ou même pendant la guerre civile qui a suivi la révolution de février 2011. L'enjeu ici, est que moi, en tant qu’individu, je me comprends mieux que je ne comprends la société libyenne, mais mon histoire personnelle est aussi l'histoire de la société, et en comprenant la société, je me comprends moi-même. Il est vrai que la société libyenne a ses spécificités, comme toutes les sociétés, mais l'idée est de toujours chercher, ce que cette spécificité a de commun avec les sociétés arabes, voire des sociétés de plus grande ampleur. Afin d'écrire sur l'être humain et son histoire, tout en écrivant sur le Libyen et en essayant de le comprendre. Dans votre second roman, Un goût de thé amer, à travers l’histoire d’un village, Géhenne, symbolisez-vous la guerre sans fin qui se déroule en Libye ainsi que le déchirement social ? Personnellement, je n'aime pas que le texte lui-même soit le reflet de la réalité. Le lecteur a certes le droit de percevoir ces intersections entre la réalité et le roman. Or, elles sont nombreuses. L'auteur pose les règles du jeu dès le début, indiquant que l'histoire n'est pas symbolique, mais vraie. Ce qui incite le lecteur à y croire. Il existe bel et bien des intersections entre les combats qui se déroulent dans le village de Géhenne et la guerre civile libyenne. Il semble que le point commun entre l'imaginaire et le réel réside dans une certaine absurdité de la scène elle-même. À lire aussiLa Libye lance le premier appel d'offres pétrolier depuis 17 ans La satire est-elle pour vous le meilleur moyen de raconter cette société ? J'ai débuté dans l'écriture par la satire. Il y a toujours une touche d'humour noir dans mes écrits, que ce soit dans mon précédant roman « Du pain sur la table de l'oncle Milad », ou dans ce roman même. Et auparavant aussi dans le recueil de nouvelles que j’avais écrit sur la guerre civile, la plupart de ces nouvelles avaient un ton dramatique ou sombre. Concernant ce projet, parfois, il n’y a pas de meilleure façon de décrire ce qui se passe, que la satire. Vous dédiez votre roman au fameux écrivain et penseur libyen Sadek alyhoum, quelle valeur représente-t-il pour vous ? Le roman est bien sûr dédié à El-Sadek, je le dédie également à d'autres auteurs et artistes satiriques qui m'ont personnellement influencé, comme Mohammed Al-Zawawi, le plus grand illustrateur de caricature libyen. Le roman lui-même a été initialement écrit dans le style de Mohammed Al-Zawawi, ainsi que celui de Mohammed Tamliya, l'écrivain satirique jordanien, et d'Ibrahim Hmaydan, l'écrivain satirique libyen. Tous ont influencé ma compréhension du rôle de la satire, de la comédie. Contrairement à beaucoup de Libyens qui admiraient les idées et les écrits critiques d'El-Sadek Al-Nayhoum, j'admirais moi sa satire, en particulier son recueil Histoires pour enfants. Il m'a profondément influencé par son style satirique et par sa façon de dessiner certains personnages libyens considérés comme stéréotypés. Ce stéréotype est déjà présent dans les dessins de Mohammed Al-Zawawi. Dans mon roman, un personnage comme Hajja Mabrouka, ressemble à ceux de Mohammed Al-Zawawi, d'El-Sadek Al-Nayhoum et même d'Ibrahim Hmaydan. Ces personnages ne sont pas nés de nulle part ; ils sont une sorte d'accumulation résultant de mes lectures et de mes observations sur la manière dont les Libyens qui m'ont précédé ont abordé la comédie. À lire aussiAu pays des hommes, un chef-d’œuvre de la littérature contemporaine Dans Un goût de thé amer, vous dénoncez également, un système économique installé par le régime Kadhafi et qui réduit en quelque sorte l’être humain à un être dépendant, sans aucune initiative, vous dénoncez cette volonté du pouvoir d’écraser l’être libyen ? Les politiques du régime Kadhafi ont transformé la Libye depuis la proclamation de l'Autorité populaire. Car le colonel souhaitait créer une nouvelle société. L'ironie est que l'objectif de cette nouvelle société était de susciter un esprit d'initiative en toutes choses. Dans toutes ses idées, par exemple, il affirme dans le Livre vert : « L'école est servie par ses élèves », ce qui signifie que l'école n'a pas besoin de personnel d'entretien ni d'employés, mais que ce sont les élèves qui s'en chargent… D'où le concept « des partenaires, et non pas d'employés ». Le régime repose fondamentalement sur l'initiative populaire pour prendre le pouvoir. Soit le peuple ne voulait pas prendre le pouvoir, soit Kadhafi n'a utilisé ces idées que pour accroître son emprise sur le peuple. L'ironie est que le peuple libyen a refusé de prendre l'initiative ou n'a pas trouvé le moyen de le faire. Le régime a véritablement influencé la formation de l'homme libyen. Toutes les politiques adoptées par le colonel Kadhafi et les fonctionnaires travaillant sous ses ordres ont conduit à la création d’une société déformée qui ne se connaît pas elle-même et qui est incapable de trouver des solutions aux problèmes auxquels elle est confrontée. La liberté d’expression en Libye est toujours entravée, même au niveau de la littérature, comment relevez-vous ce défi ? Aujourd'hui, les restrictions imposées aux écrivains libyens se multiplient. Elles sont sociales, religieuses, politiques et sécuritaires. Les restrictions se multiplient et sont pour la plupart inconnues. L'écrivain se retrouve à nager dans un puits dont il ignore le fond. Ceux qui aiment nager explorent eux-mêmes à ce moment-là les dangers, et je suis de ceux qui aiment nager. Nous explorons des idées en cours de route et je relis toujours la scène, mais c'est surtout pour des raisons de sécurité personnelle. Lorsque j'écris, je ne reconnais pas ces restrictions et je les ignore également lorsque je publie. Je ne les regarde pas.
Ils se nomment le clan Kavac ou Skaljari : ces groupes mafieux d’Europe de l’Est aux ramifications mondiales, ont fait de l’Afrique de l’Ouest une nouvelle base pour gérer le trafic illégal de cocaïne à destination de l’Europe. Dans son dernier rapport, l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale pointe les méthodes de développement de ces organisations, notamment la corruption, le rôle des intermédiaires, et l’accroissement de la consommation de cocaïne dans la zone. L’espagnole Lucia Bird Ruiz est directrice de l’Observatoire des économies illicites en Afrique de l’Ouest, c’est elle qui a rédigé ce rapport. RFI : Pour la première fois, des enquêtes indiquent que l'Afrique de l'Ouest est devenue un pivot central du trafic de cocaïne pour des groupes mafieux qui sont basés en Europe de l'Est ? Lucia Bird Ruiz : Oui, et c'est au Cap-Vert que ces réseaux ont commencé à s'implanter. Puis, c'est depuis 2019 que ces groupes ont lancé des opérations dans les pays côtiers de l'Afrique de l'Ouest, opérant principalement sur des routes maritimes. Ce sont des groupes parmi les acteurs les plus importants du commerce mondial de la cocaïne d'aujourd'hui. Ils utilisent la violence, la corruption et donc l'implantation en Afrique de l'Ouest, c'est très concernant pour la région. Est-ce qu'on peut citer quelques-uns de ces groupes, qui ont d'ailleurs des liens parfois avec la mafia italienne ? Par exemple, les clans Kavak et Skaljari, les deux organisations criminelles les plus puissantes du Monténégro, qui sont à l'origine de plusieurs assassinats, ont opéré à l'Afrique de l'Ouest. Et ces réseaux ont des liens avec les mafias italiennes, particulièrement la Ndrangheta. Pourquoi ces groupes ont besoin de l'Afrique de l'Ouest pour développer le trafic de cocaïne ? Le marché de consommation en Europe, ça devient chaque jour plus grand. Mais aussi la pression en Europe sur les routes directe en provenance d'Amérique latine s'est accrue et donc l'Afrique de l'Ouest est devenue de plus en plus importante pour ce trafic. Un tiers de la cocaïne européenne pourrait transiter actuellement par l'Afrique de l'Ouest. Et on prévoit que ce chiffre atteindra la moitié d'ici à 2030. Concrètement, comment est-ce que ces groupes mafieux travaillent en Afrique de l'Ouest ? Il y a deux points-clés à souligner. Le premier, c'est les intermédiaires. C’est vraiment un élément-clé de leur stratégie. Ce sont des nationaux des Balkans qui sont envoyés en Afrique de l'Ouest pendant des mois pour superviser les opérations, en travaillant avec les acteurs locaux, pour faciliter la logistique. Par exemple, un important réseau avait un intermédiaire basé à Freetown en Sierra Leone, qui supervisait l'importation, l'emballage dans des conteneurs, l’établissement d'une société en Sierra Leone et l'exportation vers la Belgique. Ils ont des moyens financiers quasi illimités, le trafic de cocaïne est tellement puissant qu'ils sont capables de s'implanter partout ? Certains de ces groupes ont corrompu les plus hauts niveaux de l'Etat. Par exemple, en Albanie, un ancien membre du Parlement a été arrêté pour son soutien à une organisation criminelle. Et en Afrique de l'Ouest, on s'attendrait à ce qu'ils utilisent des techniques similaires. Comment est-ce qu'ils font transiter la cocaïne d'Afrique de l'Ouest vers l'Europe ? Comme on l’a dit, ils utilisent la voie maritime dans les conteneurs où s’est très compliqué de faire de la surveillance. Mais aussi, ils utilisent des petits bateaux. Par exemple, on a un dirigeant bosniaque d'un groupe qui a parlé avec ses complices de trafic de plus de trois tonnes de cocaïne dans la Guinée-Bissau et les îles Canaries, dans un petit bateau. Vous indiquez dans votre rapport que ces intermédiaires sont parfois payés en cocaïne. Il y a une crainte que ce système entraîne une hausse de la consommation dans la sous-région ? Les produits de synthèse restent les plus largement consommés dans la plupart des pays, mais la consommation de cocaïne, en particulier du crack, augmente également dans de nombreux pays. Et donc, ils vendent la cocaïne dans le marché local et ça pousse la consommation dans la région. Ils s’adaptent aux moyens financiers des habitants de l'Afrique de l'Ouest ? Le prix dans la sous-région a baissé dans beaucoup de pays. Au Ghana, les prix réels, donc en tenant compte de l'inflation, ont chuté de 60 % entre 2019 et 2023. Ce n'est pas la même tendance dans tous les pays de la région, mais dans beaucoup de pays. Et ça inclut le Sénégal, la Guinée. La consommation est vraiment dans une phase d'augmentation. Comment est-ce que les Etats d'Afrique de l'Ouest, comment les autorités au Sénégal, en Sierra Leone ou en Guinée-Bissau peuvent lutter contre la puissance de ces réseaux mafieux ? Il faut vraiment renforcer les systèmes de renseignement pour bien comprendre les opérations de ces groupes, et aussi créer des partenariats stratégiques, des partenariats intercontinentaux entre forces de l'ordre en Afrique de l'Ouest. C'est un défi énorme pour la région parce que c'est une implication pour la santé publique, mais aussi pour la corruption et peut-être à l'avenir sur la violence parce que ces groupes sont tellement violents dans beaucoup de régions du monde. À lire aussiL’Afrique de l’Ouest, nouvelle plaque tournante du trafic de cocaïne vers l’Europe, selon un rapport
Avec notre Grand invité Afrique ce matin, nous allons parler de la coexistence éleveurs - agriculteurs au Tchad. Le gouvernement a lancé le projet d'un code pastoral, afin d'endiguer les conflits intercommunautaires pour l'accès aux ressources, de plus en plus meurtriers. La dernière mouture de 2014 n'a jamais été promulguée, car trop contestée. Et là, encore, il y a une levée de boucliers, en particulier de la part de l'Église catholique, qui accuse le gouvernement de ressortir ce texte, et de prendre le parti des éleveurs. Dans une lettre au vitriol, les évêques dénoncent un projet « scélérat » et « paysanicide », et ils ont refusé de participer à un atelier sur le sujet. Pourquoi cette opposition véhémente ? Comment améliorer la coexistence entre ces deux groupes ? Fulbert Ngodji, chercheur chez International Crisis Group (ICG), travaille notamment sur ces questions de pastoralisme et de transhumance. RFI : Les évêques du sud du Tchad dénoncent un texte « scélérat » qu'il faut « mettre à la poubelle ». Comment est-ce que vous expliquez cette sortie très virulente de la part des prélats ? Fulbert Ngodji : Pour comprendre la réaction des évêques des provinces du sud du Tchad, il faut déjà revenir sur un certain nombre d'éléments de contexte. En 2022, à l'issue du dialogue national inclusif et souverain, la question des conflits agropastoraux avait été identifiée comme une priorité nationale. Et donc, c'est dans ce cadre-là que le ministère de l'Élevage a engagé un processus de révision du code pastoral. L'idée était d'organiser des consultations régionales destinées à recueillir l'avis d'un certain nombre de parties prenantes, y compris celui des autorités ecclésiastiques. Donc, il faut rappeler que le texte avait déjà été adopté à l'Assemblée nationale en 2014, dans un climat de vives tensions, de controverses entre les députés du nord, région qui est historiquement associée à l'élevage, et ceux du sud, la partie du pays qui est aussi associée à l'agriculture. Et justement, à l'époque, le président Idriss Déby n'avait pas promulgué ce texte qui était pourtant adopté par l'Assemblée. Donc pourquoi est-ce que ce débat revient aujourd'hui ? Effectivement, à l'époque, le président Idriss Déby avait suspendu le texte en déclarant sa nullité. Mais aussi cela avait été suivi d'un avis d'inconstitutionnalité par le Conseil constitutionnel. Et donc la défiance des évêques repose sur la crainte, en fait, que cet atelier zonal ne soit qu'une formalité qui viserait à valider un texte perçu comme déséquilibré et favorable aux éleveurs. Quels sont les points qui sont particulièrement contestés ? C'est important de noter que l'élevage au Tchad constitue le deuxième pilier de l'économie nationale, juste après le pétrole, et que le projet du code pastoral, peut-être qu’il avait été pensé dans une logique de soutien à ce secteur stratégique. Mais en fait, cette rationalité économique entre véritablement en tension avec la réalité sociale du pays, dans laquelle l'agriculture reste le principal moyen de subsistance des populations rurales, en ce sens qu'elle assure leur sécurité alimentaire dans un contexte déjà marqué par la précarité. Et donc, effectivement, il y a un certain nombre de dispositions du projet et de ce code qui pose problème. Par exemple, l'article neuf confère un droit prioritaire aux ressources dans les zones d'attache et dans les zones d'accueil aux éleveurs. Et donc ces dispositions sont perçues comme injustes en ce sens qu'elles viennent fragiliser déjà les systèmes de partage coutumiers de ces ressources, en leur substituant un régime de priorisation juridique qui risque d'alimenter les tensions. À lire aussiTchad: les violences agropastorales ont atteint un niveau sans précédent depuis 2021 Ce que dit le gouvernement, c'est qu'il y a un besoin important d'encadrer la transhumance et les pratiques pastorales, parce qu'il y a des conflits qui sont de plus en plus nombreux ? Depuis plusieurs décennies déjà, les flux pastoraux du nord vers le sud se sont intensifiés sous l'effet non seulement du réchauffement climatique, mais aussi de la croissance démographique et de l'augmentation du cheptel, aujourd'hui estimé à plus de 5 millions de têtes. Et donc ce mouvement a modifié la nature même de la transhumance et les provinces du sud, qui étaient initialement des zones d'accueil temporaires, tendent à devenir des zones d'attaches permanentes, en ce sens qu'il y a de plus en plus un mouvement de sédentarisation qui s'observe. Et donc, dans ce nouveau contexte, la dichotomie entre agriculteurs et éleveurs ne suffit plus à décrire la réalité. Il existe aujourd'hui des éleveurs qui sont agriculteurs et des agriculteurs qui sont éleveurs avec des intérêts qui sont imbriqués. Donc justement, il y a un problème non seulement de cadre réglementaire, mais en fait, il devrait davantage penser la question des dynamiques émergentes que ce code-là ne semble pas encore intégrer. Et donc, par exemple, quand j'étais dans le sud du Tchad il y a juste deux ans, en fait, les acteurs ont dénoncé le fait que les éleveurs étaient de plus en plus armés et qu'ils gardaient du bétail appartenant à des hauts cadres de l'armée ou de l'administration centrale. Mais le problème, c'est celui de la faiblesse de l'État qui a tendance à accentuer les tensions. Donc les bergers sont de plus en plus fortement armés. Les communautés locales, elles aussi, s'érigent en autodéfense. C'est pour ça que les conflits se multiplient et sont particulièrement mortels ? Au-delà de cela, il convient de noter quand même que le projet de la révision de ce code-là, de ce code pastoral, intervient dans un contexte déjà tendu. Succès Masra qui est quand même une figure centrale de l'opposition tchadienne, qui est originaire du sud, avait été arrêté à la suite d'un conflit qui avait éclaté dans un village du sud du pays. Cela est venu renforcer la perception selon laquelle l'État est plutôt pro éleveurs. Donc le contexte est plutôt tendu et c'est ça qui pourrait aussi expliquer le caractère assez virulent des propos des évêques. À lire aussiTchad: l'avenir des activités agropastorales en débat
Le Mpox continue de se propager de manière inquiétante en Afrique. En 2025, les cas ont dépassé ceux de 2024. Ce sont plus de 21 000 cas de Mpox qui sont détectés dans treize pays africains, et cela risque de doubler d'ici la fin de l'année. Les coupes des aides en provenance des États-Unis et d’Europe ont fragilisé les systèmes de santé. Au total, 700 000 doses de vaccin ont été administrées, mais les stocks sont insuffisants. La Sierra Leone représente 41% des infections récentes, et la RDC est aussi en première ligne avec 24 000 cas détectés depuis début 2024. On en parle ce matin avec notre Grand invité Afrique : Jean Kaseya, directeur de l’Africa CDC (les centres africains de contrôle et de prévention des maladies). RFI : Avec les coupes budgétaires de l'aide occidentale, est-ce que vous avez déjà mesuré un impact direct sur la réponse aux épidémies ? Jean Kaseya : Je suis très clair là-dessus. Ces coupes peuvent ou sont en train d'accélérer une possible pandémie venant d’Afrique. Le nombre d'épidémies ne fait qu'augmenter d'une année à l'autre. Nous avons toujours ces problèmes d'accès aux médicaments et aux vaccins. Et ça, ce sont des conditions réunies en plus des changements climatiques, en plus de l'insécurité, pour déclencher une pandémie. Mais je sens partout, dans tous les pays où je passe, un réveil. J'étais à Lusaka, en Zambie, il y a quatre jours. Il y a deux jours, j'étais à Luanda et maintenant, je suis à Abidjan. Je vois comment les pays se mobilisent pour trouver des ressources internes et c'est partout en Afrique le cas. Justement, est-ce que ces pays arrivent à trouver des fonds ? Je vais vous donner l'exemple de la RDC où j'ai eu à rencontrer le président Tshisekedi, qui m'a informé que le pays a décidé de mettre en place une taxe de 2 % sur tous les produits importés. En plus de cela, ils ont mis une taxe sur les salaires de toutes les personnes qui travaillent de 2,5 %. Au total, cela va donner autour de 1,5 milliard de dollars additionnels chaque année. Ça, ce sont des ressources concrètes. Le président Mahama me parlait d'un programme qu'on appelle Mahama Cares Ghana. Les pays africains avancent dans la réalité. À lire aussiÉpidémie de mpox: malgré une baisse constatée en Afrique, la vigilance reste de mise En Sierra Leone, le testing est à 100 % et le pays semble se distinguer par une gestion plus efficace du Mpox ? C'est d'abord un grand effort au niveau communautaire pour mobiliser les relais communautaires. C'est former les agents de santé par rapport à la surveillance. C'est mettre en place la vaccination qu’il faut. C’est détecter la comorbidité, ça peut être le VIH ou d’autres maladies. C'est aujourd'hui l'occasion de dire et de tordre le cou à tous ceux-là qui pensent que les Africains n'aiment pas les vaccins. Ce n'est pas vrai. Aujourd'hui, dans la plupart des pays, le taux de testing est de 100 % puisque les gens acceptent de se faire tester pour savoir s’ils sont malades. Là où le vaccin est disponible, le taux de couverture est très élevé. On parle beaucoup d'un sous-groupe du virus appelé le clade 1b, réputé plus mortel : 2000 décès enregistrés depuis 2024. Qu'est-ce qui distingue cette souche des précédentes ? Nous avons tout le temps des mutations qui se font, et nous avons maintenant des combinaisons différentes dans un même endroit au Libéria, où on a eu le clade 2a et 2b au même moment. Nous avons par exemple la RDC où nous avons eu la combinaison de ces différents clades. Ce sont toutes ces combinaisons qui font qu’on ne sait pas la bombe qui peut sortir demain. À lire aussiGuinée: l'épidémie de mpox s'étend dans le pays, un an après son apparition Cet été, le CDC Africa a dévoilé son premier cadre stratégique climat et santé, pourquoi et pour quoi faire ? 70 % des épidémies que nous avons en Afrique sont ce qu'on appelle les épidémies zoonotiques. Donc ça vient de l'animal vers l'homme, interchangeables. Nous avons vu que c'est le changement climatique qui est à la base de tout cela. En plus, nous avons le choléra. Ce choléra est dû principalement aux effets liés aux inondations et à d'autres changements climatiques. Donc voilà pourquoi nous avons décidé de lancer ce plan qui lie le climat et la santé pour mieux combattre les épidémies. Justement, le choléra connaît une recrudescence majeure. Au Soudan, Alima [The Alliance for International Medical Action] estime que si rien n'est fait, la maladie pourrait tuer plus que les armes… Entre 2022 à 2024, il y a eu doublement des cas. On est passé de 104 000 cas à 254 000 cas. Sachant que la saison des pluies va commencer dans quelques jours, je m'attends à ce que si ça continue comme ça, nous puissions avoir plus de 300 000 cas. De janvier à août, nous avons 4900 décès, alors que toute l'année 2024, on n'a eu que 4700 décès. Donc, ça signifie que le choléra actuellement devient un problème de santé publique majeur que nous devons arrêter. Comment faites-vous pour lutter contre les deux épidémies de Mpox et de choléra en même temps, sans diluer les moyens et l’attention ? Malheureusement, nous n'avons pas que ces deux épidémies. Nous en avons d'autres. Nous avons la rougeole, des cas d’Ebola, de Marburg et d'autres épidémies encore. En moyenne, nous avons une nouvelle épidémie par jour et ça, ça fait beaucoup pour nous.
Crises de financement, déplacements et retours forcés, négociation de paix à Doha : de retour à Genève après une tournée dans les Grands Lacs, le patron du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés est le Grand invité Afrique de RFI ce mardi 2 septembre. Filippo Grandi appelle à dépolitiser la question des réfugiés dans la région et ne cache pas ses inquiétudes. Crises de financement, déplacements et retours forcés, négociation de paix à Doha : de retour à Genève après une tournée dans les Grands Lacs, le patron du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés est le Grand invité Afrique de RFI ce mardi 2 septembre. Filippo Grandi appelle à dépolitiser la question des réfugiés dans la région et ne cache pas ses inquiétudes. RFI : Filippo Grandi, qu'est-ce qui vous a le plus frappé sur le terrain ? Filippo Grandi : La situation continue d'être assez catastrophique pour les civils. J'ai visité des petites communautés rurales près de Goma [capitale de la province du Nord-Kivu, dans l’est de la RDC, NDLR], où les gens sont rentrés récemment. Depuis des années de déplacement, ils n'ont absolument rien et c'est très difficile aussi pour des raisons non seulement logistiques et financières, mais politiques, d'amener l'aide à ces personnes. Alors, il y a bien sûr cette fenêtre d'opportunité fournie par les Accords de Washington [entre la RDC et le Rwanda, NDLR] et peut-être encore plus important, le processus de paix à Doha, au Qatar [entre la RDC et le groupe politico-militaire AFC/M23, NDLR]. Il faut absolument que ces négociations continuent, parce que c'est le seul espoir de sortir d'une situation désespérée qui dure maintenant depuis des décennies. On l'a vu la semaine précédente encore, des affrontements ont éclaté dans l'est de la RDC. Est-ce qu'il y a vraiment une fenêtre de compromis ou est-ce qu'on est dans un statu quo où chacun fait semblant de négocier pour gagner du temps, comme le disent certains analystes ? C'est absolument vrai que, pour l'instant, ces pourparlers n'ont pas eu un effet sur le terrain. Cela dit, j'ai rencontré tous les leaderships à Kinshasa, à Kigali et à Goma et bien qu'il y ait beaucoup de cynisme et scepticisme, tout le monde est toujours autour de la table. C'est le seul espoir. L’alternative, c'est une situation encore plus catastrophique pour des millions de civils et c'est ce que tout le monde dit. C'est intéressant que tout le monde se plaigne, tout le monde se plaigne des autres en disant qu’« ils sont de mauvaise foi, ça ne va pas marcher ». Mais en même temps, ils disent « mais on doit continuer parce qu'on n'a pas d'alternative ». Dans un rapport paru en juin, Human Rights Watch accuse le HCR d'avoir facilité le transfert forcé de civils par le M23 en mai dernier. Ça pourrait, selon cette ONG, constituer un crime de guerre. Qu'est-ce que vous répondez à ces accusations ? Le rapport n'est pas complètement exact. C'est-à-dire que ces personnes ont été identifiées par le M23 sans aucune implication du HCR. On a été contacté seulement à la fin, quand il y a eu des difficultés entre le M23 et le Rwanda concernant le retour de ces personnes. Donc, à ce point-là, il n'y avait pas d'autre choix, mais de s'assurer que ces personnes qui allaient au Rwanda puissent être suivies, et ce qu'on a fait après leur retour. Dès lors, on a eu d'autres mouvements. On en a eu un il y a une dizaine de jours. On en prépare un autre. Et là, on a pleinement accès aux personnes candidates au retour et on peut vérifier la volonté de ce retour. Je rappelle qu'en juin, le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) lui-même avait expliqué qu'en effet, toutes les garanties pour un retour volontaire n'avaient pas pu être vérifiées. On sait par ailleurs qu'une partie de ces réfugiés, de ces personnes, avait été amenée à la frontière manu militari par le M23. Ça veut dire que le HCR n'a pas d'autre choix que de se plier à ces pratiques, dans un tel contexte ? Non, je le répète, ceci se réfère au mouvement qui s'est passé avant. Là, on a fait un mouvement il y a quelques jours, de 533 personnes. Ce mouvement, on a vérifié que c'était volontaire pour tout le monde. Et j'ai l'engagement du M23 qu'on va continuer à opérer de cette façon et non pas comme la première fois. Vous lancez également un appel à plus de solidarité internationale vis-à-vis de la situation des déplacés et des réfugiés dans le monde. Les appels de fonds du HCR sont financés à moins de 30 %. Certains pourraient être tentés de dire que l'ONU alerte mais que rien ne change. Qu'est ce qui pourrait donner espoir aujourd’hui ? Qu'est-ce que vous voudriez dire à ce sujet ? Que je suis très inquiet… Je ne sais pas si je peux donner de l'espoir. Parce que s'il y a une fenêtre d'opportunité et qu'on peut faire plus à l'est du Congo. Supposons, car j'ai eu quand même des garanties du M23 qu'on aura accès aux populations en détresse. J'ai eu des discussions à fond avec les autorités à Kinshasa pour que l'aide puisse être acheminée. Mais, si on arrive à tout ça et puis on n'a pas de fonds, c'est l'ironie tragique de cette situation financière désespérée de toute la communauté humanitaire internationale. On n'a pas débloqué ça encore. Les fonds des États-Unis restent largement bloqués et beaucoup de grands donateurs européens, dont la France, sont en train de réduire l'aide humanitaire.
En République démocratique du Congo, la rentrée scolaire, c'est ce lundi 1er septembre. La mesure-phare de Félix Tshisekedi quand il est arrivé au pouvoir en 2019, c'était l'école primaire gratuite. Quel est le bilan aujourd'hui ? Et comment va se passer cette rentrée dans les territoires de l'est qui sont occupés par les rebelles du M23 et leur allié rwandais ? Jolino Malukisa est le directeur du pilier gouvernance à l'institut congolais de recherches Ebuteli. Il répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Jolino Malukisa, quel est le principal défi de cette rentrée scolaire ? Jolino Malukisa : Le principal défi, c'est d'abord la rémunération des fonctionnaires. Il y a beaucoup de fonctionnaires qui ne sont pas encore payés jusqu'à présent. C'est donc un souci pour les préparatifs. Il y a aussi des enseignants qui revendiquent l'augmentation de leurs salaires. Ils ont pu négocier avec le gouvernement pour qu'il y ait une augmentation de 100 000 francs congolais, ce qui représente plus ou moins 35 dollars américains. C'est encore peu, parce que pour les enseignants, au minimum, ils devraient avoir au moins 500 dollars le mois. Alors, ça bloque aussi à ce niveau-là, dans la plupart des cas. Depuis l'arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi en 2019, l'école primaire est gratuite. Alors, de fait, est-ce que beaucoup d'enfants qui traînaient dans les rues vont aujourd'hui à l'école ? Oui, tout à fait. La gratuité a eu un effet important, parce que beaucoup de parents qui n'étaient pas en mesure d'assurer la scolarité des enfants, ils ont trouvé vraiment une opportunité pour les envoyer à l'école. Alors, c'est un progrès qu'on doit mettre à l'actif de Félix Tshisekedi. Mais, attention, parce que c'est un progrès qui, en même temps, présente une très grande faiblesse parce que la qualité de l'enseignement laisse à désirer davantage. Aujourd'hui, le nombre d'enfants a augmenté dans les classes ? Le nombre d'enfants a spectaculairement augmenté et vous vous retrouvez avec un effectif qui a doublé. Vous avez des salles où vous pouvez vous retrouver avec 80 ou 90 élèves. C'est énorme pour un enseignant. Alors, officiellement, l'école primaire est donc gratuite. Mais en réalité, un certain nombre d'écoles primaires publiques continuent d'imposer des frais d'inscription : jusqu'à 300 dollars par enfant, avant la rentrée. Comment cela s'explique-t-il ? Oui, ça peut s'expliquer d'abord, pour les écoles où vous avez un effectif important, des enseignants non-payés par l'État. Donc, les parents comprennent que dans ces conditions-là, il faudra négocier avec l'école, essayer de donner quelque chose, sinon leurs enfants ne vont pas étudier. Donc, dans ce cas-là, ça peut justifier qu'il y ait encore aujourd'hui des écoles publiques de l'État qui continuent à percevoir des frais. Depuis le début de l'année, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu sont contrôlés par les rebelles du M23 et leurs alliés rwandais. Alors est-ce que les écoles de ces deux provinces vont pouvoir ouvrir ce 1ᵉʳ septembre ? Oui ! Selon les informations qu'on a recueillies, c'est possible qu'il y ait cette rentrée. D'ailleurs, les rebelles du M23 et de l'AFC, ils ont intérêt à démontrer que les secteurs sociaux fonctionnent bien. D'ailleurs, quand ils avaient conquis ces territoires, ces villes, leur priorité était également de relancer le fonctionnement des services sociaux, des services publics. Mais, concrètement, qui paye les instituteurs des écoles primaires du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ? Alors, d'abord, le M23 et ses alliés rwandais ont aussi des soucis sur le plan budgétaire. Donc, ils ne sont pas en mesure de satisfaire les fonctionnaires. Jusqu'à présent, c'est l'État congolais, y compris pour les enseignants, qui continue à les payer. Mais le plus grand souci, c'est lorsque les enseignants doivent disposer de liquidités, tout comme les autres fonctionnaires, parce que les banques sont coupées de Kinshasa. Kinshasa ne veut pas qu'il y ait des transactions avec les territoires sous contrôle des rebelles soutenus par le Rwanda. Par conséquent, donc, la situation devient un peu difficile. Alors, la crainte qu'on a aujourd'hui, c'est que même s'il y a rentrée scolaire, il n'y aura pas beaucoup d'enfants dans les écoles, étant donné que les parents n'ont pas pu réunir les moyens nécessaires pour acheter les uniformes, acheter les objets classiques dont les enfants ont besoin. Pour cette rentrée scolaire au Nord et au Sud Kivu, le M23 oblige les parents d'élèves à acheter pour 1 000 francs congolais un bulletin scolaire par enfant. Est-ce que ce n'est pas un impôt déguisé ? Absolument. C'est une pratique courante avec le M23. Même dans d'autres secteurs, même dans le secteur de l'assainissement, ils n'ont pas suffisamment de ressources. Ils imposent des taxes informelles, des impôts informels aux pauvres citoyens congolais, sans résoudre fondamentalement leurs problèmes. Depuis le début de la guerre dans l'Est de votre pays, il y a des centaines de milliers de Congolais qui vivent dans des camps de déplacés. Est-ce que leurs enfants sont scolarisés ? C'est un grand souci. Vous avez des déplacés, même dans des écoles. Et quand les déplacés arrivent dans ces écoles-là, ils vont détruire les bancs pour s'en servir comme bois de chauffage. Vous avez des déplacés qui ne peuvent pas du tout fréquenter les écoles. À Rutshuru, à Masisi, on a des situations assez sévères. Donc, c'est ainsi que beaucoup de Congolais souhaitent vraiment que les négociations puissent mieux fonctionner, mieux marcher à Washington et à Doha pour que la vie normale puisse vraiment retrouver son droit. À lire aussiRDC: une rentrée des classes marquée par la crise économique et l’insécurité dans l’est du pays
La cinquième édition du plus grand festival culinaire de la République Démocratique du Congo se tient à Kinshasa. Le Congo Food Festival, qui ferme ses portes ce dimanche 31 août, a pour but de concilier art, plaisir et solidarité avec les déplacés du pays. Quelque 21,8 millions Congolais vivent aujourd’hui dans une insécurité alimentaire extrême à l'est de la RDC. Notre invité, Don Divin Fosh, l'un des organisateurs de cet événement, nous explique comment on célèbre la gastronomie tout en luttant contre la faim. À lire aussiLa RDC confrontée à l'effondrement des financements humanitaires À lire aussiRDC: l'aide humanitaire en péril face au manque de financements internationaux
En Ouganda, après 40 ans de règne, Yoweri Museveni sera à nouveau candidat à la présidentielle de janvier prochain. À l'âge de 80 ans, il briguera donc un 7° mandat. Ainsi en a décidé mercredi 27 août le parti au pouvoir, NRM, lors d'un congrès à Kampala. Jusqu'où le président ougandais va-t-il durcir la répression contre ses opposants ? Pourquoi vient-il de signer un accord avec Donald Trump pour accueillir les migrants des pays tiers dont les Américains ne veulent plus ? Kristof Titeca est professeur de sciences politiques à l'université d'Anvers, en Belgique. Il répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : En janvier prochain, est-ce qu’on va assister à un remake de janvier 2021, c'est-à-dire un duel entre Yoweri Museveni et Bobi Wine ? Kristof Titeca : Oui et non. Oui parce que, encore une fois, c'est une confrontation entre le président Museveni et Bobi Wine. Mais aussi non, parce que beaucoup de choses ont changé sur le terrain. Lors des dernières élections de 2021, il y avait un véritable élan en faveur de Bobi Wine. Il apportait quelque chose de nouveau à la scène électorale. Il était vu comme le représentant d'une large partie de la société ougandaise, les exclus du système. Mais aujourd'hui, ceci n'est plus le cas. Il a perdu son élan. Beaucoup considèrent que Bobi Wine et son parti sont devenus une partie intégrante de l'establishment. Il y a eu des exemples frappants. Par exemple, l'année passée, il y avait eu un scandale de corruption qui a éclaté au Parlement ougandais. La présidente du Parlement avait distribué des fortes sommes d'argent au chef de l'opposition. C'était Mathias Puga, qui était le leader du parti de Bobi Wine au Parlement. Mais aussi à la décharge de Bobi Wine, le gouvernement et le parti au pouvoir ont mené une campagne d'enlèvement qui était particulièrement brutale contre les membres du parti de Bobi Wine. Il y avait environ 1000 membres de son parti qui ont été enlevés. La plupart ont été torturés aussi. Et cette pression a lourdement pesé sur Bobi Wine et son parti. Est-ce que l'opposition a une petite chance de gagner au mois de janvier prochain ou pas ? Non, pas du tout. Tout indique qu'il y a eu une décision qui a été prise d'utiliser plus que jamais la force brutale pour réprimer l'opposition. À lire aussiOuganda: la police hausse le ton en vue de la campagne pour la présidentielle du 12 janvier Alors, il y a Bobi Wine, mais il y a aussi l'autre grand opposant, c'est Kizza Besigye, l'ancien médecin personnel de Yoweri Museveni. Au mois de novembre dernier, il a été enlevé au Kenya, transféré de force en Ouganda et placé en prison. Est-ce qu'il a une chance d'être libéré et de pouvoir se présenter en janvier prochain ? Je ne crois pas. Donc, l'arrestation de Kizza Besigye fait partie de cette stratégie de considérer les élections comme un exercice militaire. Je ne crois pas qu'il y a la moindre perspective de le voir libéré avant les élections, les autorités semblent avoir pris la décision de l'écarter définitivement de la scène politique en le maintenant en prison. Et ce que je peux dire, c'est que l'Ouganda, la Tanzanie et le Kenya semblent avoir formé une coalition pour externaliser, mutualiser la répression de leur opposition, de leurs activistes. Par exemple, récemment en Tanzanie, il y avait des activistes qui sont venus du Kenya et l'Ouganda, c'était Boniface Mwanga du Kenya, Agathe Atuhaire de l'Ouganda. Ils ont été torturés et maltraités en Tanzanie. La semaine dernière, l'Ouganda a signé avec les États-Unis un accord par lequel il accepte d'accueillir les migrants de pays tiers, dont les Américains ne veulent plus. Pourquoi ce cadeau à Donald Trump ? Oui. Depuis une dizaine d'années, ce sont les réfugiés qui sont devenus une ressource géopolitique importante. Et donc le gouvernement et Museveni ont bien compris ceci. Ils ont adopté une politique de la porte ouverte radicale vis-à-vis des réfugiés. Et ceci est bien sûr perçu comme très utile par la communauté internationale. Donc, l'Ouganda a été largement salué comme un pays accueillant vis à vis des réfugiés et comme un modèle de relocalisation des réfugiés dans leur propre région. Et c'est dans cette logique qu'il faut comprendre l'accord avec les États-Unis, ou même des négociations potentielles pour accueillir des personnes venant de Gaza. En faisant ceci, le gouvernement cherche à se rendre utile et même indispensable géopolitiquement, dans un contexte où ce gouvernement a perdu un peu de sa crédibilité, en raison de ses tendances autoritaires. Alors, vous parlez des réfugiés éventuels venus de Gaza. Selon certaines sources, les Américains tenteraient de convaincre l'Ouganda d'accueillir des Palestiniens de Gaza. Est-ce que vous avez des informations qui vont dans ce sens ? Non, je n'ai pas d'information sur ce dossier. La seule chose que je peux dire, ce n'est pas la première fois qu'il y a un deal. Il y a eu un accord sur les réfugiés et sur les migrants entre Israël et l'Ouganda. En 2018, il y avait un accord avec Israël pour accueillir des réfugiés qui étaient en Israël, venant du Soudan et de l'Érythrée.
Pour sortir de la crise actuelle entre la France et l'Algérie, « les gestes mémoriels d'Emmanuel Macron ne suffisent pas », disent en substance le cardinal-archevêque d'Alger et le recteur de la Grande Mosquée de Paris, qui signent, dans le journal Le Monde, un appel conjoint à la fraternité entre les deux pays. Et les deux chefs religieux, le chrétien et le musulman, pensent qu'il existe un chemin pour parvenir à cette fraternité entre les deux peuples de France et d'Algérie. En ligne d'Alger, le cardinal-archevêque Jean-Paul Vesco répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Monseigneur Jean-Paul Vesco, vous écrivez que la dégradation actuelle des relations franco-algériennes plonge ses racines dans un passé douloureux et que les paroles de réconciliation ont manqué. Mais la France n'a-t-elle pas reconnu, ces dernières années, sa responsabilité dans l'assassinat de plusieurs combattants et militants indépendantistes pendant la guerre d’Algérie ? Bien sûr qu'il y a eu des paroles qui sont allées dans ce sens. Et sans doute que le président Macron est l'un des présidents qui a le plus fait pour cela. Mais ce n'est pas de cela dont je veux parler. C'est en fait l'impossibilité pour les Français d'aujourd'hui de comprendre la blessure que peuvent laisser 130 années de colonisation dans l'âme d'un peuple et avec la violence qui l'a accompagnée, et au moment de la colonisation et au moment de la guerre d'indépendance. Et ça, nous, Français, moi, Français, je suis né en mars 1962, c'est-à-dire que j'ai exactement l'âge de l'Algérie indépendante. Je ne l'ai pas ressenti, on ne me l'a pas enseigné. Il m'a fallu ces 20 années de vie en amitié dans un pays pour comprendre, pour sentir que l'on ne peut pas simplement être parti en 1962 et considérer que c'est fini, qu'il ne s'est rien passé. Et donc je crois qu'effectivement, il ne manque pas simplement des paroles, il manque… Et ça, c’est beaucoup plus compliqué, il manque dans notre être la conscience des blessures que le fait d'être sur sa propre terre comptait pour rien pendant des générations. Et ça, ça laisse des traces profondes. Et il y aurait besoin effectivement d'une reconnaissance, mais simplement fraternelle, pas simplement des gestes politiques, mais d'avoir conscience de cela. Je ne sais pas si c'est encore possible. Alors c'est vrai que j'ai fait souvent le parallèle avec la question des abus sexuels dans l'Église. Il nous a fallu, nous évêques, à un moment, avoir entendu suffisamment de victimes, avoir été touchées pour comprendre dans notre chair ce que représentent les conséquences d'abus sexuels. Avant, nous avons dit des paroles, nous avons présenté des excuses au nom de l'Église. Elles ne valaient pas. Et ce qu'il manque aujourd'hui, c'est effectivement pour nous Français qui n'avons pas connu, qui n'avons pas dans notre mémoire collective ce qu’est la colonisation, ce qu’il manque, c’est que nous n'avons pas conscience des blessures qu'elle a laissées. Et il faudrait simplement qu'à un moment cela soit véritablement reconnu. Et je crois que ça a manqué. Et il y a besoin d'une réconciliation profonde, c'est-à-dire que l'Algérie a besoin de se réconcilier avec elle-même, a besoin à un moment de pardonner. Et évidemment, il est très difficile de pardonner quand la personne ou l'Etat n'a pas conscience de ce qu'a pu causer cette période-là. C'est une responsabilité collective. Vous écrivez que la tentation est grande d'instrumentaliser la mémoire pour en faire un champ de bataille. Est-ce que vous pensez, comme l'opposant algérien Saïd Sadi, que le système algérien invoque invariablement l'ordre colonial pour faire diversion sur ses échecs ? Je ne risque pas de rentrer sur ce terrain-là. Je dis simplement qu'on accuse effectivement facilement l'Algérie d'instrumentalisation de son histoire. Et ça a été dit. Mais la première instrumentalisation, c'est celle de la négation de cette histoire. L'origine de cette instrumentalisation, c'est que précisément, il n'y a pas eu de paroles de la part de celui qui a été le colonisateur sur ce qui s'est passé. Et donc après, ça permet évidemment toutes les instrumentalisations. Donc l'instrumentalisation, ce n'est pas seulement par la parole, c'est aussi par le silence. Mais celui qui décidera de passer à autre chose, c'est le colonisé, ce n'est pas le colonisateur. Et donc j'alerte sur le fait que chaque fois qu'effectivement on parle de l'Algérie comme un ennemi, ce sont des millions de Français qui se sentent touchés, qui se sentent insécurisés. Et ça, pour moi, c'est une vraie question. C'est un vrai problème. Et avec le recteur de la Grande mosquée, on a voulu dire que les Franco-Algériens, et ceux qui ont des relations entre les deux pays et qui sont extraordinairement nombreux, sont un facteur d'unité et de fraternité. Et aujourd'hui, ce sont ceux qui sont le plus insécurisés, montrés du doigt. Et c'est une réalité. L'une des causes de la crise actuelle, c'est la détention en Algérie de deux ressortissants français, l'écrivain Boualem Sansal et le journaliste Christophe Gleizes. Pour le premier, la Cour d'appel d'Alger a tranché, il est condamné à cinq ans de prison. C'est définitif. Le seul espoir qui lui reste, c'est une grâce du président Tebboune. Qu'est-ce que vous en pensez ? Alors d'abord, il convient de ne pas du tout faire l'amalgame entre ces deux personnes et ces deux procès qui n'ont strictement rien à voir. Pour ce qui concerne Christophe Gleizes, je ne m'exprimerai absolument pas. Et pour ce qui concerne Boualem Sansal, je ne m'exprimerai pas non plus, sinon que je pense qu'il lui a été rendu un bien mauvais service d'en faire un enjeu politique entre deux États. Évidemment qu'on espère tous qu'une solution puisse être trouvée, qu’une solution humaine puisse être trouvée, mais c'était lui rendre un bien mauvais service que d'en faire un enjeu politique entre deux États. Éminence, je vous remercie À lire aussiFrance-Algérie: Macron et Tebboune appelés dans une lettre ouverte à résoudre la crise diplomatique
« Il faut s'attaquer à la question du tribalisme et en finir avec la fixation contre les Bamilékés », affirme le philosophe et essayiste camerounais Achille Mbembe, avant la présidentielle du 12 octobre dans son pays. Achille Mbembe, qui vient de publier La communauté terrestre chez La Découverte et qui dirige la Fondation de l'innovation pour la démocratie, lancée par Emmanuel Macron il y a trois ans, s'exprime sur deux faits majeurs avant l'élection au Cameroun : l'éviction de l'opposant Maurice Kamto et la candidature du président Paul Biya à un huitième mandat. Il répond aux questions de Christophe Boisbouvier. RFI : Le mois dernier, sur RFI, deux ministres du gouvernement camerounais se sont contredits sur l'opportunité pour le président Biya d'être candidat à un huitième mandat. C'est un signe politique ou pas ? Achille Mbembe : Il ne faut sans doute pas négliger ces symptômes, mais il ne faut pas se perdre non plus dans le présentisme. Je crois que tout s'est arrêté au Cameroun depuis le début des années 1990. Depuis lors, c'est l'inertie qui prévaut. Je crois qu'il est temps de dresser tout de même un bilan des 43 années au pouvoir de Monsieur Paul Biya. Je crois que ce bilan est calamiteux parce que le gaspillage et la dissipation caractérisent ce demi-siècle de pouvoir personnel à la tête du pays. Les fissures qui apparaissent au sommet de l'Etat, est-ce que ce n'est pas lié à l'âge du capitaine ? Je ne veux pas manquer de respect à l'égard d'un vieillard. Dans un pays normal, il aurait été congédié depuis très longtemps. Mais le Cameroun n'est pas un pays normal. Parce qu’il me semble que la formidable capacité de résilience de ce peuple, cette extraordinaire énergie, tout cela a été investi dans de mauvais objets, comme on le voit bien dans cette espèce de fixation sur les origines tribales, les origines ethniques, cette espèce de péché originel, je dirais, de la politique au Cameroun. Le rejet de la candidature de Maurice Kamto par le Conseil constitutionnel, c'était au début de ce mois, est-ce que l'opposant n'aurait pas pu éviter cette mésaventure si son parti MRC avait concouru aux élections précédentes, afin qu'il ait le nombre d'élus nécessaires pour appuyer cette candidature ? Ils auraient trouvé sans doute d'autres motifs pour l'éliminer. Il faut s'attaquer à la question du tribalisme, en particulier la peur des Bamilékés. Il faut dire les choses comme elles sont. Je crois que l'obsession, la fixation anti Bamiléké instrumentalisée est devenue une technologie de pouvoir. Je crois qu’elle explique bien davantage l'éviction du professeur Kamto que toutes ces histoires, disons tactico-tactiques. Cabral Libii, Joshua Osih, Bello Bouba, Issa Tchiroma, Patricia Ndam Njoya, Akere Muna et bien d'autres… Les candidatures se multiplient dans l'opposition avant ce 12 octobre. Or, il n'y aura qu'un tour. Est-ce que l'opposition vit toujours dans la malédiction de la division ou pas ? Au fond, une élection libre et indépendante n'est pas possible en ce moment au Cameroun. Et donc il va falloir travailler sur le très long terme, en mettant au cœur de la démarche politique la formation des gens, parce que tout cela ne relève pas du spontané. On l'a vu au Sénégal, en Afrique du Sud, dans tous les pays où un mouvement d'émancipation a pu prendre corps. Et donc c'est vrai, je constate comme vous que c'est une opposition qui a de la peine à faire corps. Mais c'est tout le peuple camerounais qui peine à faire corps, qui peine à se mouvoir à l'unisson et qui peine à se transformer en un collectif, en une communauté de sécurité capable de s'auto-défendre. Et donc il manque ce terreau, ce matériau fondamental que constitue un peuple réveillé qui peut se mettre debout par-delà, justement, sa pluralité, sa multiplicité. Et la satrapie, pendant 43 ans, s'est efforcée justement de rendre impossible ce mouvement. Peut-être un jour ce peuple deviendra-t-il un collectif. Un collectif comparable au Pastef, au Sénégal ? Mais c'est justement ce type d'effort qu'il faut. Je ne dis pas qu'il faut aller copier au Sénégal. Chaque pays a ses particularités. Je parle de l'idée de la capacité de penser en commun. Le Cameroun est un pays aujourd'hui, après 43 ans d'un pouvoir personnel, qui est dans un état d'insécurité existentielle. La satrapie a infligé à ce peuple tant de coups, qu’il se trouve aujourd'hui dans une situation de profond handicap, à la fois cognitif et émotionnel. Et c'est la raison pour laquelle nous agissons tantôt comme des envoûtés, tantôt comme des bouffons. Comment peut-on imaginer qu'à 93 ans, on veuille se porter candidat pour un nouveau mandat de sept ans, qui portera donc le concerné, au cas où il survit à tout cela, à la centaine au bout du mandat ? C'est de la bouffonnerie. À lire et à écouter aussiCameroun: «L’élection présidentielle d’octobre sera sans doute un scrutin historique»
Et si les activistes guinéens Foniké Menguè et Mamadou Billo Bah étaient toujours en vie ? Plus d'un an après leur enlèvement par des militaires à Conakry - c'était le 9 juillet 2024 - un ancien député guinéen proche du régime du général Mamadi Doumbouya affirme qu'ils se portent bien, mais qu'ils restent gardés au secret. Réaction aujourd'hui d'un autre leader de la société civile guinéenne : Abdoul Sakho, Coordinateur national du Forum des Forces Sociales de Guinée, a été enlevé lui aussi par des militaires, a subi de terribles sévices, mais a eu la chance d'être relâché. Aujourd'hui, il vit en exil et témoigne au micro de Christophe Boisbouvier. RFI : Le 18 février dernier au soir, vous dites avoir été enlevé à votre domicile de Conakry par des hommes en treillis lourdement armés, venus à bord d'une dizaine de véhicules non immatriculés. Qu'est-ce qui s'est passé ensuite ? Abdoul Sakho : D'abord, ce n'est pas une question de dire, c'est une question de fait. Effectivement, j'ai été enlevé la nuit du mardi 18 février. Ça a été un moment de cauchemar, un moment de terrorisme, de traumatisme, aussi bien pour moi mais aussi pour ma famille. Ils n'ont pas pu passer par la porte, ils sont passés par le toit et ont menacé ma pauvre maman qui a été jetée d'ailleurs de la cuisine. Ils ont sommé ma fille, qui n'avait pas onze ans d'ailleurs, à se coucher sur le ventre, ma petite sœur également. Ils m’ont giflé, avec six personnes qui sont tombées du plafond, lourdement armées, qui m'ont molesté devant ma famille, m'ont sorti de la maison. Il faut noter qu'ils étaient cagoulés. Et de là, destination inconnue. Et quand vous avez été mis dans ce véhicule, vous avez été transporté jusqu'où ? Ils ont dit dès le départ qu'ils ont « le colis », ils communiquaient avec quelqu'un à distance. Et j'ai été conduit dans trois lieux différents. Je sais que c’est à Conakry, parce que de la maison à là où l’on me conduisait, ça n'était pas aussi loin que ça. Et dans les trois lieux différents, c'était les séances de torture, des séances d'interrogatoire, des séances d'évanouissement, des séances de réanimation. Avez-vous été violemment torturé ? C'est hors de l'imagination. C'est hors de description. De mon corps, tout, tout… Le dos, les mains, torturé avec la technique de l'eau. Quand on m'a attaché les mains au dos, totalement ligoté, on me faisait coucher sur le dos. Je me rappelle de cela à chaque fois, quand je m'étouffe, je m'évanouis. Et en cours de route, quelqu'un a dit « maintenant, c'est fini pour toi ». Et quelqu'un a dit « lui, il ne s'agit pas de le présenter à un juge ou de mettre à une prison. C'est fini pour lui ». Est-ce que vous pensez que des pressions internationales vous ont permis de rester en vie ? Absolument, absolument. Il faut saluer la promptitude des partenaires de façon générale, le courage aussi à ne pas parler avec des mots entre les lignes. Il faut le saluer, notamment celui de l'ambassade des Etats-Unis et tous les partenaires d'ailleurs. Et c'est cette chaîne de solidarité locale et internationale, avec la grâce de Dieu, qui m'a permis aujourd'hui d'avoir la vie sauve. Parce que mon cas est une illustration parfaite de cette conjugaison des efforts. Vous n'êtes pas le seul Guinéen à avoir été kidnappé ces quinze derniers mois à Conakry. Quels sont aujourd'hui vos camarades pour lesquels vous êtes le plus inquiet ? Honnêtement parlant, malgré la douleur dans ma chair, malgré le traumatisme que ma famille a vécu, quand je vois cet exemple sur mon cas, je me demande aujourd'hui… Ceux qui détiennent les camarades, je veux parler de Foniké Menguè, de Mamadou Billo Bah, de Habib Marouane Camara le journaliste, de Sadou Nimaga, un expert minier, je veux parler même d'un parolier, un simple parolier qu'on appelle Djéliman Kouyaté, et d'autres anonymes encore... Je me demande si ceux qui les détiennent, ceux qui nous enlèvent, ceux qui menacent, je me demande si ces gens-là sont des pères de famille. Est-ce que ces gens-là ont des mamans ? Est-ce qu'ils pensent à la douleur que les familles de ceux-ci vivent aujourd’hui ? C'est extraordinaire. Honnêtement parlant, l'illusion du coup d'Etat [du 5 septembre 2021] pour plus de liberté s'est transformée en prison à ciel ouvert pour tous les Guinéens aujourd'hui. C'est pour cela, pour les familles de nos collègues-là, sans parler de tout ce que moi j'ai subi en termes de techniques de tortures, en termes de menaces de mort… C’est pour cela que j'imagine aujourd'hui dans quelles conditions ces collègues sont. C'est pour cela qu’il faut davantage que le monde libre, le monde des libertés conjugue les efforts pour la dignité humaine dans le respect des lois. Alors, il y a quelques jours, un ancien député pro Alpha Condé, Taliby Dabo, qui est aujourd'hui rallié aux militaires du CNRD, a affirmé face caméra que vos camarades Foniké Menguè et Mamadou Billo Bah étaient toujours vivants, se portaient bien, mais restaient gardés au secret pour des raisons de sécurité nationale. Qu'est-ce que vous pensez de ce témoignage ? D'abord, c'est la bonne nouvelle, déjà. Je trouve cela comme un ouf de soulagement qu'on nous dise qu'ils vivent bien. Mais au-delà de cela, je pense que c'est une piste sérieuse qu'il ne faut pas négliger. Parce que ce n'est pas n'importe qui, c'est quelqu'un qui peut être dans le secret des autorités de la transition. Oui, mais cet ancien député Taliby Dabo, ce n'est pas un militaire du CNRD lui-même... Absolument. Il ne s'agit pas d'un militaire. Mais je me demande s’il peut s'évertuer de dire cela comme ça, sans pour autant avoir des raisons solides, sans pour autant avoir des informations assez soutenues. Donc il soutient ces allégations.
La démocratie sénégalaise pourrait-elle perdre l'un de ses piliers, sa presse, libre, qui est pourtant une référence dans toute l'Afrique de l'Ouest ? Les nouvelles préoccupantes sur la santé économique des médias sénégalais se multiplient. Dernière en date : un plan de restructuration dans le groupe Futurs médias de Youssou N’Dour, annoncé par la direction, à la suite de graves difficultés financières. D'où vient cette situation de fragilité ? Que faire ? Ibrahima Lissa Faye est responsable de la Coordination des associations de presse du Sénégal. Il est l’invité de Laurent Correau. RFI : Est-ce qu'il faut s'inquiéter de l'état du quatrième pouvoir, de l'état de la presse, au Sénégal, aujourd'hui ? Ibrahima Lissa Faye : Il y a de quoi s'inquiéter parce qu'il y a des menaces réelles sur la survie de la presse au Sénégal. Depuis plus de 17 mois, les entreprises de presse ont une trésorerie déficitaire parce qu'il y a eu un ensemble de mesures inappropriées prises par l'État qui fragilise la survie des entreprises de presse et qui les met dans une situation extrêmement compliquée. Et aujourd'hui, toutes les entreprises de presse privées vivent avec des arriérés de salaires, des arriérés de location et du matériel vétuste qui n'a pas pu suivre une maintenance correcte. Donc, il y a des risques d'extinction de certains médias. Un journal sénégalais titrait récemment « GFM, Walf et Sud, les géants de la presse sénégalaise s'effondrent ». Est-ce que ça va jusque-là ? Est-ce que vous diriez qu'effectivement ces trois groupes, qui sont des piliers de la démocratie sénégalaise autant que des éléments de son patrimoine intellectuel, sont menacés ? Ils sont bien menacés, que ce soit Sud, Wal Fadjri et GFM, les fleurons médiatiques du Sénégal sont menacés. Parce que si vous prenez par exemple Sud, les employés étaient sur le point d'aller en grève. Et si c'était le cas, c'est clair que le titre allait disparaître. Pour ce qui est de GFM, la direction a annoncé une mesure sociale pendant un licenciement technique de beaucoup de travailleurs, et le syndicat refuse et a sorti un communiqué pour dénoncer cela. Pour Wal Fadjri, ils sont dans les mêmes difficultés que tout le monde. Donc, pour vous dire que la situation est quasi pareille dans toute la presse privée. Qu'est-ce qui provoque ces difficultés financières des médias ? En réalité, c'est à cause du gel des contrats publicitaires venant des entreprises publiques et parapubliques, mais également aussi le blocage depuis 2024 du Fonds d'appui et de développement de la presse, le FADP, mais également aussi la situation économique extrêmement tendue du pays qui fait que, en fait, le privé, sa marge publicitaire, c'est juste autour de 15%/20 %. Et donc, avec 15%/20 %, on ne peut même pas gérer les charges courantes. Qu'est-ce qui peut être fait pour essayer de renverser cette situation ? Moi, je pense qu'en fait, le pouvoir et les acteurs des médias doivent discuter. Mais surtout que le ministre descende de son piédestal pour parler avec les acteurs des véritables problèmes et qu'au plus haut niveau qu'il y ait une volonté aussi de trouver des solutions. Les acteurs proposent, mais au niveau de l'État, on n'a pas de répondant. Nous sommes face à un mur qui est là et qui, malheureusement, ne nous offre aucune opportunité. Il y a tout de même des mesures positives qui ont été prises par les nouveaux pouvoirs publics : l'enregistrement des médias sur une plateforme pour plus de transparence ou l'actualisation de la loi sur la publicité. Oui, ça, ce sont des mesures importantes. Il faut les saluer. Nous ne sommes pas d'accord sur la démarche. Il aurait pu quand même le faire avec les acteurs. Les médias sénégalais sont considérés comme des références pour l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest. Comment est-ce que vous voyez les conséquences de ce risque d'effondrement de la presse privée sénégalaise pour la démocratie dans la région, de manière plus générale ? Ce que j'ai l'habitude de dire, c'est que si aujourd'hui on néglige les médias sénégalais jusqu'à ce que les fleurons mettent la clé sous le paillasson, il y a des forces obscures – nous sommes dans une région très menacée, avec une insécurité qui est là – qui pourraient en tout cas s'accaparer nos médias ou venir avec une autre offre qui peut ne pas nous arranger. Nous nous battons pour que ces fleurons de la presse sénégalaise demeurent, pour que, en fait, l'identité de la presse sénégalaise continue et perdure. On n'est pas là pour un pouvoir ou pour des lobbys. La presse est là pour l'information, elle est là pour les populations. Et donc, c'est important que cette presse-là garde cette indépendance pour qu'elle puisse servir tout le monde.
Fespaco : Par-delà les écrans, c’est le titre d’un livre qui vient de paraître en juillet 2025 aux éditions Baobab, au Sénégal. Son auteur, le journaliste et critique de cinéma Aboubacar Demba Cissokho, y raconte comment il a vécu le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou depuis qu’il a commencé à le couvrir en 2003, au Burkina Faso. Son récit est agrémenté de faits historiques, d'anecdotes, d'entretiens, et aussi d'interrogations sur l'identité de ce rendez-vous majeur du monde du cinéma africain. À lire aussiFespaco 2025: le réalisateur burkinabè Dani Kouyaté remporte l'Étalon d'or de Yennenga
La Cour pénale internationale encore visée par les États-Unis. Le département d'État américain a adopté mercredi 22 août de nouvelles sanctions contre la CPI, accusant quatre juges d'avoir lancé des poursuites contre des ressortissants des États-Unis et d'Israël. Parmi lesquelles le mandat d'arrêt contre le Premier ministre Benyamin Netanyahu pour la guerre contre la population de Gaza. La CPI qualifie la décision américaine d'« attaque flagrante contre l'indépendance d'une institution judiciaire impartiale ». La réaction du secrétaire général de la Fédération internationale de droits de l'Homme (FIDH) Maître Drissa Traoré, au micro de Sidy Yansané. À lire aussiWashington sanctionne de nouveau la CPI pour ses enquêtes impliquant États-Unis et Israël À lire aussiLe Sénégal demande aux États-Unis un retrait des sanctions contre quatre magistrats de la CPI
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