DiscoverLe regard d'Ahmed Newton Barry
Le regard d'Ahmed Newton Barry
Claim Ownership

Le regard d'Ahmed Newton Barry

Author: RFI

Subscribed: 1Played: 4
Share

Description

Le coup d’œil aiguisé sur l’actualité de la semaine d’un observateur aguerri des soubresauts du monde. Ancien présentateur du 20h de la RTB au Burkina Faso, Ahmed Newton Barry démissionne en 1998 pour protester contre l'assassinat du journaliste Norbert Zongo. Il est le co-fondateur en 2001 du journal d'investigation l'Événement où il s'applique à défendre son slogan : « l'information est un droit ». Chaque semaine, Ahmed Newton Barry analyse un fait marquant de l'actualité internationale et sa résonance avec le Continent. 

8 Episodes
Reverse
Alpha Newton Barry, cette semaine vous avez un regard plutôt éclectique. Du Venezuela au pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) en passant par la République démocratique du Congo (RDC), vous suivez Donald Trump dans quelques-unes de ses pérégrinations, dont beaucoup d’espoirs et quelques succès mitigés. Dans moins d’un mois, Donald Trump boucle sa première année à la Maison Blanche. Le temps du bilan ! Le Vénézuélien Nicolas Maduro, dont le pays est sous blocus total, est actuellement sous pression. Victime expiatoire du dossier Epstein ? Ou première victime d’une reconversion de Trump à la doctrine Woodrow Wilson ? Pour l’instant c’est un bien maigre bilan à l’image de tous ceux qui trop embrassent. La guerre en Ukraine, qui n’aurait pas eu lieu, ne cesse-t-il de rappeler, s’il avait été président en 2021, n’a pas été réglée dans les délais qu’il annonçait dans sa campagne électorale. Ce serait un miracle qu’elle le soit dans les jours qui nous séparent de 2026. Le Russe Vladimir Poutine n’a pas été le partenaire qu’il espérait et l'Ukrainien Volodymyr Zelensky, qu’il pensait contraindre, s’est révélé plus manœuvrier et plus résilient avec le soutien des Européens. Cette mobilisation des Européens ne leur a pas conféré pour l’instant le droit de s’asseoir autour de la table avec Poutine et Trump, mais elle a empêché que la paix russe ne soit imposée aux Ukrainiens. Il y a donc fort à parier qu’il n’y aura pas de cadeau « paix » sous le sapin de ce Noël à Pokrovsk, qui reste encore ukrainienne grâce au formidable courage de son armée. À peine signée, la pax Trump en RDC déjà mise à mal Beaucoup de parlottes sur l'accord de paix à l'est de la RDC négocié par Washington et pour l’instant, pas de réelles avancées. Chacun des signataires du texte a trouvé le bon superlatif qui a fait plaisir à Donald Trump. Le Rwandais Paul Kagame est sans doute celui que la diplomatie transactionnelle, à la Trump, arrange le mieux dans cette affaire. Il s’est fait fort de le rappeler en précisant que les précédents accords, depuis 30 ans, n’avaient pas connu de succès parce qu’ils « n’avaient pas été axés sur la prospérité et l’investissement ».  En face, le Congolais Félix Tshisekedi, vœux pieux et bons sentiments, expressions de la vieille diplomatie et de l’impuissance, le type même que Trump exècre. Pour l’instant, l’Américain se laisse attendrir, mais jusqu’à quand ? La conquête d’Uvira, quelques jours après la signature, en grande pompe, de l’accord dit de Washington, le 5 décembre, a vu l’administration américaine ruer sur Kigali, l’enjoignant d’ordonner le retrait de l’AFC/M23 d’Uvira. Depuis le 15 décembre, en trainant les pas et en posant des conditions, les rebelles ont amorcé un retrait difficile à évaluer. Mais Kinshasa ne peut que s’en contenter. Car les forces congolaises, les FARDC et leurs supplétifs burundais et miliciens Wazalendo sont plus craints, malgré leur piteuse défaite. Sans en avoir le monopole, on craint tant leurs exactions sur les populations que leur capacité à les protéger. Donald Trump, connu pour être fluctuant, pourrait, en fonction des réalités du terrain, tourner casaque. Félix Tshisekedi a intérêt à avoir toujours les cartes et les bonnes en main. Interdiction de séjour aux États-Unis visant cinq pays africains Enfin, la nouvelle interdiction de voyager aux États-Unis qui touche cinq pays africains, dont les trois pays de l’AES. Donald Trump a peut-être provoqué les frelons sahéliens : on s’attend à une sortie musclée, concertée et confédérale. La souveraineté sourcilleuse de l’AES ne peut être offensée impunément. En attendant la réciprocité, c’est quand même un coup dur, pour les jeunes, plutôt pour les « happy few », qui pouvaient espérer une possibilité d’études supérieures dans des universités de qualité. La rhétorique anticoloniale, panafricaniste des juntes ayant rendu radioactive la destination France autrefois prisée par les nouveaux bacheliers sahéliens qui en avaient les moyens. C’est l’horizon des possibles qui se rétrécit pour les citoyens de l’AES, dont la frange bruyante sur les réseaux sociaux avait curieusement souhaité et applaudi l’élection du président Trump.
Le regard de Newton Ahmed Barry porte sur les péripéties du coup d'État manqué au Bénin. Surprise et consternation. Surprise d’abord, les yeux étaient rivés sur Abidjan. Les cassandres y avaient prédit tellement de choses qu’une psychose s’installait à chaque veille d’échéance importante : et, voilà que le 7 décembre, la veille de l’investiture d'Alassane Ouattara, au petit matin, c’est à Cotonou que les armes tonnent. Stupeur totale ! Le putsch, surprise, semblait même consommé, quand les carillons des matines réveillent Cotonou. Le lieutenant-colonel Tigri et une dizaine de colistiers avaient pu préempter la télévision nationale et faisaient passer leur déclaration de prise de pouvoir. En général, à ce stade du pronunciamiento, sauf quelques rares exceptions, il est irréversible. Pas cette fois : le président béninois Patrice Talon a eu plus de bol. Sa garde, en premier, met en échec le commando lancé à l’assaut de sa résidence. Ensuite, et pour la première fois, la Cédéao n’a pas palabré. Elle a agi. La France n’a pas eu de scrupule. Elle n’a pas tourné talons à Patrice comme elle l’avait fait au pauvre Mohamed Bazoum qui s’était condamné en accueillant les troupes françaises, chassées du Mali. À lire aussiTentative de coup d’État au Bénin: comment l’intervention de la Cédéao a été décidée Recrudescence des attaques terroristes, mais tentative contrée Cette année 2025 a été éprouvante pour le Bénin à cause d’une série de violentes attaques terroristes dans son septentrion, à sa frontière avec le Burkina Faso et le Niger, appelé aussi le « Point Triple ». Deux attaques en moins d’un trimestre, dont celle du 17 avril 2025, avec 54 soldats tués, est la plus meurtrière à ce jour. Depuis 2021, le Bénin fait face aux groupes terroristes, du Jnim, spécifiquement, dont les attaques croissent à mesure que ses grands voisins, le Burkina et le Niger, perdent le contrôle de leurs territoires qui lui font frontière. C’est devenu quasiment itératif dans la région. Quand les armées sont défaites par les terroristes, elles s’en retournent braquer les institutions politiques, dans les capitales, pour faire payer aux élites politiques de n’être pas aussi bien armées que les terroristes. Armements inadaptés quand il s’agit des terroristes, mais jamais quand il s’agit de perpétrer des coups d'État. Puis, des douillets palais présidentiels, elles retrouvent l’inspiration pour faire la guerre avec d’autant plus d’allant que, hissées sur ce promontoire, elles n’ont pas une obligation de résultats et n'entendent pas qu’on leur dise. À lire aussiAttaque au Bénin: «Le Jnim n’a pas encore de base fixe au Bénin mais a des relais dans les communautés locales» Les unités d’élite contre le terrorisme sont paradoxalement les fauteurs de coup d'État Si le colonel Tigri avait réussi, il aurait été le quatrième officier des forces spéciales à renverser un gouvernement qui avait en lui une totale confiance. Les Forces spéciales africaines, mieux aguerries et mieux équipées que le reste de l’armée, ne paient pas bien en retour les présidents qui les chouchoutent. De Bamako, Ouagadougou à Conakry, elles font tomber les régimes démocratiques comme des quilles. Assimi Goita, des Forces spéciales, appelé à déjouer le complot ourdi dans le sillage de l’insurrection du M5-RFP, en aout 2020, va finalement renverser Ibrahim Boubakar Keïta, père de son ami Karim Keita. Le 24 janvier 2022 à Ouagadougou, le président Kaboré, aux abois, fait l’erreur d’appeler à sa rescousse, les Forces spéciales du commandant Aouba. Plutôt que de contrer les mutins, c’est lui qu’elles vont contraindre à la reddition. Enfin, Alpha Condé, de la Guinée, depuis son exil, continue de s’en vouloir d’avoir fait confiance au colosse Mamadi Doumbouya. Le patron des Forces spéciales était sa fierté d’autrefois. Le 7 décembre, le Béninois Tigri voulait faire comme ses prédécesseurs. La providence ne l’a pas servi. L’oracle réputé du Bénin, le Fâ, avait prévenu, début janvier 2025, qu’un violent coup d'État allait être tenté, sans succès. Tigri pensait, sans doute, faire mentir l’oracle. Il l’a appris à ses dépens.
Le regard de Newton Ahmed Barry porte sur la situation en Guinée-Bissau, après un scrutin couplé présidentiel et législatives interrompu par un coup d’État militaire. Tout avait mal commencé et tout s’est mal terminé ! Tout commence en effet avec la polémique sur la date de la fin du mandat de Umaro Sissoco Embalo. Le 27 février ou le 4 septembre 2025 ? Pour l’opposition, avec le PAIGC, en tête, le parti d'Amilcar Cabral, le héros de l’Indépendance, c’est le 27 février 2025. La Cour suprême, tranche pour le 4 septembre 2025. C’est le 4 septembre 2020, 5 ans auparavant, qu’elle avait effectivement proclamé l’élection de Embalo, après près de neuf mois de longues tractations. La Cédéao, pressent une possible crise politique dans ce pays fragile et constamment menacé par les narco. Mais sa médiation finit en queue de poisson. Embalo n’en a pas voulu. Puis, en solitaire et de façon autoritaire, il avait concocté un processus électoral sur mesure qui a donné le dénouement chaotique que l’on sait. Processus interrompu par les militaires avant la proclamation des résultats. Le coup d’État a-t-il été téléphoné ? Umaro Sissoco Embalo n’a pas que le profil du parfait coupable. Dans cette affaire, il est difficile de le dédouaner. Pas exactement pour les raisons qui sont avancées. Il a pu intriguer en appelant lui-même les médias pour les informer du coup d’État qui était en cours. Que le général Horta N’Tam, l’auteur du coup d’État, soit un ses très proches a pu intriguer ! Que le gouvernement composé par les putschistes soit constitué, pour l’essentiel d’anciens membres de son dernier gouvernement et de ses proches a également pu intriguer. Ces éléments, même accablants, ne sont pas inédits, cependant, il y a eu des précédents : Mohamed Bazoum, au Niger a continué à user de son téléphone, plusieurs mois, avant que Tiani, qui l’a renversé, ne le lui confisque. Et puis Doumbouya en Guinée et Oligui au Gabon n’ont-ils pas fait un coup d’État au président dont ils étaient très proches ? Il n’y a donc, a priori, rien de nouveau sous le soleil africain. Laurent Gbagbo, ancien président ivoirien, avec ses formules caustiques, disait qu’il fallait se méfier des galonnés africains, parce que « le militaire en charge de votre sécurité était capable de vous servir un garde-à-vous impeccable. Retourner les talons et vous faire un coup d’État ». En Afrique, nous avons des armées ataviquement putschistes. Embalo instigateur de ce coup d’État ou pas ? Il y a deux versions qui circulent à Bissau. Une qui incrimine directement Embalo. On l’aurait entendu dire, la veille du coup d’État : « Je ne laisserai pas le pays à ces salauds ». Allusion, dit-on, à son principal rival, Fernando Dias et le PAIGC qui le soutient. La deuxième version incrimine les militaires. Ils auraient agi, par eux-mêmes pour prévenir un affrontement communautaire, conséquence d’une campagne électorale houleuse. Un risque d’affrontement, dit-on, entre les balantes (la communauté de Fernando Dias) et les fula, (la communauté de Embalo). Si ce risque a existé, il n’avait pas cependant, perturbé le vote qui s’est déroulé dans le calme, de l’avis des observateurs.  À quel moment, ce risque est-il donc apparu ? Est-ce avec les premiers résultats ? Pourquoi l’armée a-t-elle décidé d’interrompre le processus, plutôt que de protéger le suffrage ? Entre l’armée et le PAIGC, il y a un vieux contentieux. En 2020 c’est son ralliement à Embalo qui lui avait permis de remporter la présidentielle face à Domingos Pereira. Comme en 2012, l’armée se serait-elle, une fois encore dressée pour contrer une victoire de la coalition Dias-PAIGC ? On ne le saura sans doute jamais. La Cédéao est trop faible pour faire pression sur les putschistes.
Ahmed Newton Barry, votre regard cette semaine porte sur l’ordre de Trump. Le business, ses favoris et ceux qui ne trouvent pas grâce à ses yeux, quoiqu’il fasse.  Quand Trump boude le sommet du G20 en Afrique du Sud, qu’est-ce qu’il met en avant ? Une susceptibilité personnelle blessée par des propos « désobligeants » de Cyril Ramaphosa ? Officiellement, oui ! Mais en arrière-plan, il accuse le pouvoir Sud-Africain de couvrir « un génocide des Afrikaners ». Des accusations portées par Elon Musk, originaire du même pays, que l’épreuve des faits ne valide pas pourtant. À propos de l’Ukraine, Trump a presque inversé la culpabilité. Est-ce innocent quand il humilie Zelensky à la face du monde, à la Maison Blanche, et réserve un accueil d’État à Poutine à Anchorage, pour n’en récolter qu’une déconvenue ? À Poutine, il excuse tout. À Zelensky, il ne laisse rien passer. Les Ukrainiens sont extraordinaires de courage, contraignant l’ogre russe à de petites victoires aux coûts humains exorbitants. Mais Trump n’a d’yeux que pour Poutine.    Il en va pareillement de son action au Proche-Orient, sa vraie réussite à ce stade. Que pense-t-il des Palestiniens ? Arrive-t-il à les voir autrement qu’à travers les œillères de Netanyahu, de Bezalel Smotrich et de Itamar Ben Gvir ? Voilà donc Trump, difficile à cerner. Mais en application d’une vieille sagesse africaine qui dit que le pied ne va pas où le cœur ne veut pas, on peut dresser le profil de ceux avec qui il aimerait échouer sur une ile ! Admiration pour Poutine Il a une admiration pour Poutine, spécifiquement, qui ne cesse d’alimenter des suspicions. Les Ukrainiens en pâtissent sans que Trump soit payé en retour. L’annulation du sommet de Budapest en Hongrie sur la paix en Ukraine, courant octobre 2025, a été un choc. Trump croyait s’être mis d’accord avec Poutine, après un appel téléphonique de deux heures. Sergueï Lavrov lui répond qu’ « un cessez-le-feu immédiat en Ukraine ne signifierait qu’une seule chose : la majeure partie du pays resterait sous domination nazie ». Et Dimitri Peskov lui assène qu’il s’était emballé un peu trop vite. Qu’à la vérité, rien « n’avait été convenu ».   À lire aussiUkraine: Kiev soutient «les principes» du plan de paix américain révisé, la pression russe continue sur le front Déconfit, Trump avait dégainé un train de sanctions contre la Russie. Mais c’est plus fort que lui. Il n’attendra pas les premiers effets desdites sanctions pour revenir à la charge. Un nouveau plan de paix, presque aux conditions de Moscou. Dictées même par Moscou, insinuent les mauvaises langues. À Kiev, les Ukrainiens sont saisis d’effroi d’entendre Zelensky leur dire qu’ils pourraient être contraints de choisir entre  « perdre leur dignité ou perdre leur allié clé ». Les Européens une fois de plus obligés à aller à l’abordage  L’Europe, en pompier, au secours de l’Ukraine. À Genève, elle a fait des « améliorations » au plan, formule choisie pour ne pas heurter le susceptible Trump et l’a aussi aguiché en lui faisant miroiter que 50% des bénéfices de l’entreprise de reconstruction de l’Ukraine reviennent aux États-Unis. De l’extorsion de fonds, qui ne scandalise plus personne. Pour obtenir le rabattement de 15% aux négociations des droits de douane, l’Europe, par exemple, avait dû payer 1 300 milliards d’investissements et d’achat d’hydrocarbures aux États-Unis. Avec Trump, c’est le business, d’abord. En Ukraine, avec la part du lion dans la reconstruction, les États-Unis ont changé de bouche pour reprendre un argot africain. Ils (re)admettent que le « futur accord de paix (…) devra pleinement respecter (la) souveraineté » de l’Ukraine. À Moscou, on s’en amuse presque. Pour mélanger la tête de Trump, Poutine sait quoi lui dire.
Votre regard porte aujourd’hui, Newton Ahmed Barry, sur la récente visite de Zelensky à Paris. Une belle cérémonie à Villacoublay, qui aurait eu les allures d’une revanche de Anchorage, si Trump n’avait pas douché tout ça, avec un nouvel accord de paix, qui remet la pression sur Kiev.   Villacoublay, ce lundi 17 novembre, pour Zelensky, il y avait comme un parfum de revanche. Un aéroport militaire, une estrade sur le Tarmac, en arrière de la scène le bel oiseau, objet de la convoitise, le Rafale pour une signature d’un accord d’intention d’achat (qualifié d’historique). À Villacoublay l’Ukraine et son président ont réaffirmé la plénitude de leur souveraineté pour parler de leur destin immédiat et à plus long terme. Même si toutes les cartes ne sont toujours pas en leur possession, comme se plait, Trump à le leur rappeler.     Macron et Zelensky, affaibli chacun chez soi, pouvaient-ils espérer autre chose que le symbole ? Macron, un président bien en peine. Chaque jour, il a droit à une aménité de ses désormais ex-alliés. Manuel Valls, le dernier en date, a qualifié son dernier quinquennat de « naufrage ». Zelensky arrive avec des casseroles ; scandales de corruption qui impliquent son proche Timur Mindich et des revers militaires limités, mais inquiétants comme à Pokrovsk, par exemple où on pourrait assister à une victoire à la Pyrrhus de Moscou. Malgré tout, Macron, obstinément, croit que l’Europe et la France (principalement) doivent structurer une présence au côté de l’Ukraine. Eviter à Zelensky d’être pris en sandwich entre l’ogre Poutine et le transactionnel Trump. Dans l’éventualité d’un nouveau Yalta, imposer l’Europe sur la photo finale. Pour l’instant, ce que l’on voit, ressemble à un remake de l’histoire, à la veille de Yalta de 1945. La Russie en position de force avec des territoires ukrainiens conquis qu’elle veut annexer, mais pas que ! L’Europe en position de faiblesse, même si elle est le « tiroir-caisse » de l’Ukraine. La France « libre », que traverse une turbulence politique intérieure et un rayonnement diplomatique amoindri, entre autres, par son éviction brutale d’une partie de ce qui fut son pré carré africain, par la même Russie. Et pour compléter le tableau, les États-Unis avec un Trump dont il faut modérer continuellement les illusions sur Poutine, comme il fallait le faire avec Roosevelt et ses illusions sur Staline.  À lire aussiLe plan américain suscite l'inquiétude en Ukraine, confrontée à un «choix très difficile»    Faut-il désespérer de voir l’Europe sur la photo finale d’un éventuel accord de paix sur l’Ukraine ?     L’activisme de Macron a le don d’agacer Moscou, mais n’a pas pour l’instant infléchi Trump, qui ne peut l’entendre, tant il est fasciné par les dirigeants autoritaires. Le 47ᵉ président états-unien est l’exact contraire de Barack Obama, un de ses prédécesseurs, il ne croit pas aux institutions fortes, il est fasciné par les « hommes forts ». Que Poutine le mène régulièrement en bateau l'exaspère, mais ne le décourage pas. Il reste convaincu, qu’il peut faire la paix avec lui. D’où ce nouveau plan de paix américain, remis en selle contre toute attente, à la veille de l’entrée en vigueur de sanctions qui auraient affecté durement la Russie. Un plan de paix, « à des conditions très favorables au Kremlin » ou encore « une capitulation imposée » à l’Ukraine, les indignations en Europe, n’en finissent plus depuis que les 28 points du nouveau plan américain ont été dévoilés. Les espoirs de Villacoublay, n’auront tenu que le temps de la rosée. Et nous voilà reparties pour un tour, jusqu’à la prochaine désillusion de Trump !
Le regard de Newton Ahmed Barry porte sur le coup de colère de Donald Trump contre le Nigeria qu’il a menacé, le 2 novembre, d’une action militaire, pour protéger les chrétiens en danger. Ce qui amène à se poser la question : Trump, croisé ou d’Artagnan, des minorités persécutées en Afrique ?  Il n'est probablement ni l’un ni l’autre. Quand Trump tance le Sud-Africain, Cyril Ramaphosa à propos des Afrikaners persécutés au pays de Mandela ou quand il éructe contre Bola Tinubu pour « le meurtre des chrétiens », il surréagit aux opinions de proches et des lobbies, sans prendre garde à « la complexité du réel », pour reprendre l’expression de Vincent Foucher, spécialiste des questions de conflits en Afrique.   Une réelle persécution des chrétiens au Nigeria ?   Les chrétiens sont persécutés dans les régions nord est, une persécution donc localisée dont le ciblage n'est pas forcément délibéré, et qui n’est pas non plus imputable à la seule violence des groupes terroristes. C’est une situation plus complexe qu’il n’y paraît. Si on s'attarde sur les griefs mis en avant dans les propos de Donald Trump, sur la qualification des crimes, le président américain n’a pas repris le terme de « génocide », à juste titre.  En revanche, il corrobore les estimations de l’ONG protestante « Portes ouvertes », qui a estimé qu’en 2024, 3 100 chrétiens ont été assassinés au Nigeria contre 4 476 pour le reste du monde.  Donald Trump a pu aussi être influencé par le sénateur Texan, Ted Cruz, lobbyiste pro évangélistes nigérians, pour qui depuis 2009, 50 000 chrétiens auraient été, c’est son expression, « massacrés » au Nigeria. Ces allégations sont problématiques.  Le gouvernement Tinubu, contre qui, un procès « en indifférence » est instruit à tort, a estimé que ces chiffres constituaient « de graves déformations de la réalité ». Une réalité complexe, que les protagonistes ne prennent pas toujours en compte. L’hostilité des groupes terroristes envers les chrétiens est réelle, mais elle n’explique pas tout. Les conflits communautaires et les conflits sur les ressources naturelles engendrent des morts, sans lien avec la religion.  Les conséquences des propos de Donald Trump  Ses allégations ont eu pour effet immédiat la réinscription du Nigeria sur la liste des « Countries of Particular Concern ». Le CPC, qui dresse la liste noire, annuelle, des pays qui persécutent les chrétiens. Le Nigeria en était sorti en 2021.  Le président Tinubu, en difficulté après une tentative de coup d'État déjoué en octobre dernier et des inquiétudes d’un retour aux années de braises de Boko Haram qui refont surface, accueillerait avec soulagement un soutien américain.  À condition qu’il ne soit pas dans le format de l'opération « restore hope » en Somalie. Bola Tinubu a besoin de terminer ce mandat laborieux.  Le gouvernement Trump I : un mauvais souvenir pour les Africains  Donald Trump semble avoir évolué, malgré tout. De l’Afrique des « Shit hole countries » « les pays de merde », de son premier mandat aux « immigrants africains (…) les pires du monde qui viennent pour empoisonner le sang de l’Amérique », pendant sa dernière campagne, il y a eu une transmutation. Un retour en grâce de l’Afrique.  Le 27 juin, il a imposé la signature, en l’absence du M23, d’un traité de paix au Congo Démocratique. Cette paix de « papier », ou « d’autosatifecit » de Donald Trump », comme certains ont pu la qualifier, n’est pas encore entrée en gare à Kivu, à Bukavu et à Goma. 
Le regard de Newton Ahmed Barry porte sur les développements récents des crises au Soudan et au Mali. L’une est oubliée et l’autre vit en autarcie. La tragédie d’El-Fasher, de ce mois d’octobre, ramène brutalement le Soudan au-devant de l’actualité, même s’il ne l’a jamais vraiment quittée. La communauté internationale, aux prises avec de nouvelles crises, en Ukraine et celle tentaculaire du Proche-Orient, aurait aimé oublier un tant soit peu le Soudan. Hélas ça n’est pas possible ! Car au Soudan les massacres des populations sont toujours perpétrés dans des proportions qui révulsent. L’ampleur des exactions qui se déroulent, depuis le 26 octobre à El-Fasher n’est pas encore totalement établie, mais le procureur de la CPI prévient que « les atrocités commises par les FSR du général Hemedti, pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ». Cette prompte réaction de la CPI a eu un effet, dont il est difficile, c’est vrai, de mesurer l’effectivité. Dans la journée du 6 octobre, cependant, les FSR annonçaient avoir procédé à « l’arrestation de plusieurs combattants soupçonnés d’exactions lors de la prise d’El-Fasher ». Le Soudan, avec El-Fasher, est redevenu, une urgence internationale, les irruptions de violences, dans ce Soudan, perpétuellement incandescent, embrasent trop vite. D’où, la préoccupation de l’ONU de protéger, le Kordofan, la province voisine, sur la route entre le Darfour et Khartoum ». Au Mali, une crise « entre soi » Au mali, la Communauté internationale, à commencer par les organisations sous-régionales africaines ne savent pas par quel bout aborder le problème du « blocus du carburant sur Bamako ». Or la crise entame depuis le 3 novembre dernier son troisième mois. Pour la première fois depuis sa création, en septembre 2023, l’AES (l’Alliance des États du Sahel) est prise au dépourvu. Elle ne semble pas avoir prévu un mécanisme pour ce type de situation. La Cédéao, l’organisation sous-régionale que le Mali, a quitté avec « effet immédiat », en janvier 2024, avait volé à son secours, avec la France en premier, en 2013, quand les hordes jihadistes déferlaient sur Bamako. La France n’est plus la bienvenue au Mali. La Cédéao non plus. Et puis officiellement, il n’y a pas de crise au Mali. Abdoulaye Maïga, le Premier ministre, est sibyllin. S’il le faut, dit-il, il ira « à pied et avec des cuillères » ramener le carburant. Il n’admet pas pour autant la crise. Les militaires, finalement, problèmes ou solutions ? Le constat est là : au Soudan, Hemedti et al-Burhan ont réinstallé leur pays dans les atrocités d’une guerre civile, dont on le croyait sorti, avec la fin, de la mission ONU/Union Africaine en 2020 au Darfour. Au Mali, sous l’égide des cinq généraux, les victoires annoncées sur les groupes terroristes du Jnim, ne sont pas au rendez-vous, que les Maliens, doivent à présent obéir aux fatwas de Bina Diarra, le nouvel émir de la katiba du Sud du même Jnim, qui a porté la crise aux portes de Bamako. Ajoutant à la précarité de l’électricité rationnée depuis deux ans, l’approvisionnement difficile en carburant et l’imposition d’un nouveau code vestimentaire, le hijab, aux femmes, dans les transports en commun. Mais les Maliens plus résignés que résilients, se consolent, tout de même, de vivre dans un Mali que l’impérialisme, assurent les idéologues de la junte, fait souffrir à cause de ses immenses richesses.
Newton Ahmed Barry inaugure sa chronique hebdomadaire par les deux récentes présidentielles au Cameroun et en Côte d’Ivoire. Toutes les deux ont eu lieu en ce mois d’octobre, respectivement les 12 et les 25. Dans les deux cas, c’est une continuité qui n’a pas surpris. J’aurais bien aimé commencer ce premier numéro de ma chronique en validant la fiction de mon illustre prédécesseur Jean-Baptiste Placca, d’un ancien président (le dernier des Mohicans, s’il en est) qui, à l’issue d’un scrutin présidentiel, aurait proclamé la victoire de son challenger, son ancien ministre. Pari perdu, hélas ! La proclamation des résultats a bien été faite dans la nuit du 26 au 27 octobre, mais pas avec la solennité imaginée dans la fiction de Jean-Baptiste Placca. Dans le « Contineng », comme les camerounais appellent affectueusement leur pays, le « Soleil Biya » ne s’est pas couché, même si ses blêmes rayons ne dardent plus suffisamment pour réveiller l’espoir endormi des camerounais. À lire aussiPrésidentielle au Cameroun: Paul Biya déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel « Un désir d'Alassane Ouattara » ? Les ivoiriens ont, eux aussi, choisi la continuité. Si Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam avaient pu participer, il y aurait eu incontestablement plus d’enjeu, le taux de participation aurait pu avoisiner celui de la présidentielle 2010. Le résultat aurait-il été pour autant différent ? Malgré tout, on peut dire que les 89,77 % correspondent à « un désir d’Alassane Ouattara ». Son bon bilan a pu certainement arbitrer en sa faveur. Mais Quatre mandats consécutifs, c’est quand même un plafond de verre. À cette hauteur, le meilleur service que Alassane Ouattara pourrait se rendre à lui-même et à sa Côte d'Ivoire qu’il aime énormément, c'est de savoir « quitter le pouvoir, avant que le pouvoir ne le quitte ». Des prétentions démocratiques revues à la baisse En d’autres circonstances, beaucoup de critiques auraient pu fuser au sujet de ces deux élections présidentielles en Afrique francophone. Dans cet automne de la démocratie en Afrique, les démocrates africains ont revu à la baisse leurs prétentions. Le cas tanzanien montre que la crise n’épargne pas non plus les anglophones. Les démocrates acceptent se contenter des aspects formels de la démocratie, là où hier, ils exigeaient d’élever les standards : inclusivité, universalité et surtout alternance - autrefois tenue comme l’oxygène de la démocratie - sont aujourd'hui passés à la trappe. On est redescendu au stade du « désir de démocratie », en espérant contrer la réinstauration de l’ordre Kaki, qui menace partout. Des souverainistes militaires aux antipodes des idéaux de Sekou Touré Les rares « moines soldats de la démocratie africaine » affrontent, en positions de David, les Goliath « néo-panafricains », VRP des juntes souverainistes qui ne regardent pas à la dépense quand il s’agit de propager « l’ordre souverainiste/ panafricain ». Ils n’ont pas inventé cette dernière à la vérité et dont ils se servent plutôt bien.  Un certain Sekou Touré, ancien président de la Guinée avant eux, avait élevé en idéal indépassable, pour tout vrai souverainiste africain, de préférer : « la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage ». À ce jour, le constat est plutôt aux antipodes de l’idéal proclamé : les souverainistes militaires, comme leur ancêtre guinéen, se sont réservés « les richesses et les libertés » en laissant « la pauvreté et l’esclavage » aux peuples. Au moins, sur ce plan, les néo-panafricains souverainistes et les colons occidentaux ont en commun d’avoir lu pareillement et d’appliquer pareillement le Psaume 40-17 des saintes écritures. Wolé Soyinka en tant qu'ambassadeur de la démocratie africaine Pour la démocratie africaine, le Nigerian Wolé Soyinka reste son meilleur ambassadeur. À la Cassandre de Jacques Chirac, il avait répliqué : si « l’Afrique n’est pas mûre pour la démocratie, l’a-t-elle jamais été pour la dictature ? » À lire aussiÀ la Une: le verrouillage électoral au Cameroun et en Côte d’Ivoire
Comments