Reportage France

<p>Du lundi au vendredi, un reportage pour mieux connaître la société française et comprendre ses débats.</p>

L'intelligence artificielle dans l'enseignement: seuls 20% des enseignants l'utilisent

Dernier jour pour Educ@tech Expo, le salon de l'innovation pédagogique et du numérique éducatif. C'était sa 29ᵉ édition à Paris. Les thématiques retenues cette année sont les intelligences humaines, collectives, territoriales, artificielles. L'IA, qui imprègne toute la société et évidemment l’école. D’après le ministère de l'Éducation nationale, la quasi-totalité des élèves utilise ChatGPT, alors que 20% des enseignants auraient recours à l'IA. Face à cette technologie qui va se déployer de manière inéluctable dans le système éducatif français, certains professeurs font part de leurs craintes sur l’apprentissage ou le développement de l’esprit critique des élèves. Quand d'autres enseignants pensent qu'il faut se saisir de l'IA plutôt que de la subir. 

11-20
05:18

Comment l'université d'Angers traite les témoignages de la Commission sur les violences faites aux enfants

Depuis sa création en janvier 2021, la Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants (Ciivise) a récolté plus de 30 000 témoignages. Si elle en a tiré des recommandations transmises au gouvernement, les récits bouleversants qu'elle a recueillis ne vont pas finir au placard. C'est dans l'ouest de la France, à l'Université d'Angers, que les chercheurs du laboratoire Temos ont pour mission de les archiver. Comment traiter ces paroles délicates en respectant l'anonymat de la victime ? Comment mettre en avant ces expériences traumatisantes pour qu'elles ne se reproduisent plus ? Sur son ordinateur, Bénédicte Graille, fait défiler un tableur dans lequel elle a commencé à ranger les données qui ressortent des témoignages. « On a 212 témoignages. Les témoignages sont analysés pour le moment par catégorie », précise-t-elle. Depuis 2021, des milliers de personnes ont contacté la Ciivise pour raconter des violences sexuelles vécues pendant l'enfance. Des paroles fortes qu'il ne faut pas laisser dans une armoire poussiéreuse. « L'idée, c'est d'avoir un instrument de recherche qui soit suffisamment détaillé et précis pour que des chercheurs puissent l'utiliser de manière anonyme, sans avoir à demander à avoir accès au témoignage directement », ajoute-t-elle. Des récits arrivés par mail ou dans la boite aux lettres de la Ciivise, via un questionnaire en ligne, une ligne d'écoute téléphonique dédiée, ou des réunions de paroles publiques. La première étape de ce travail d'archives, d'après son collègue Patrice Marcilloux, c'est donc de les localiser.  « S'assurer qu'on a tout ou que l'on sait où se trouve tout. Bref, qu'il n'y a pas de déperdition. On vise une connaissance exhaustive de ces témoignages. Évidemment, il ne faut pas que quelqu'un puisse se trouver en situation de dire "j'ai témoigné et mon témoignage est perdu" », explique-t-il. « Ce n'est pas humainement supportable » Vient ensuite le temps de l'indexation, une étape encore une fois délicate. « On va essayer de donner la zone géographique, mais pas trop précise, parce qu'il ne faut pas que les personnes puissent être identifiées. On va indiquer dans quel cadre les agressions ont pu se produire, à quel(s) moment(s) cela a pu se passer dans leur vie, puis aussi les conséquences à long terme sur leur vie ou sur la vie de leurs proches », détaille Bénédicte Graille. Quatre chercheurs travaillent au quotidien sur ce projet depuis l'année dernière, et ont dû apprendre à se préserver face à des témoignages souvent bouleversants. « Il y a beaucoup de choses extrêmement émouvantes. Et qui rendent triste quand on les lit. On ne peut pas traiter du lundi matin au vendredi après-midi, ces témoignages-là. Ce n'est pas humainement supportable. Il a fallu aussi qu'on réfléchisse en termes d'organisation du travail pour que ce soit limité dans la semaine. Et on a également une réflexion en termes d'accompagnement parce que ça ne me paraissait pas possible d'affronter en permanence ce type de récit », raconte Bénédicte Graille. Un projet citoyen qui doit aussi permettre d'en finir avec le déni qui entoure les violences sexuelles sur les mineurs. D'après le rapport d'étape de la Ciivise, dont l'agrément a été prolongé jusqu'à octobre 2026, 160 000 enfants en sont victimes chaque année, soit un viol ou une agression sexuelle toutes les trois minutes.  À lire aussiInceste en France: les préconisations de la Ciivise pour protéger les enfants

11-19
02:35

Accusé d'être un passeur, reconnu victime: le destin d'Ibrahim Aboubakar, rescapé d'un naufrage

C'est l'histoire d'un jeune soudanais accusé d'être un passeur, et finalement reconnu victime par la justice en France. Ibrahim Aboubakar a passé plus de deux ans en détention préventive, avant d'être relaxé par le tribunal correctionnel de Paris, où il était jugé pour le naufrage entre la France et le Royaume-Uni d'une embarcation, en août 2023 ; sept migrants avaient perdu la vie. Huit hommes, afghans et kurdes irakiens, ont été condamnés à des peines de trois à 15 ans de prison. Ibrahim Aboubakar, lui, a enfin retrouvé la liberté. Dans le box, Ibrahim Aboubakar est le seul Africain. Mais aussi le seul rescapé de cette nuit d'horreur. Les autres accusés, eux, étaient restés à terre, après avoir organisé la traversée tragique en août 2023. Si le trentenaire soudanais est poursuivi, comme les autres, pour des activités supposées de passeurs, et sa responsabilité présumée dans la mort de sept exilés, c'est parce qu'il est accusé, depuis le début de l'enquête, d'avoir piloté le bateau pneumatique. « Le premier regard porté par les policiers sur les rescapés du naufrage, c'est de rechercher les pilotes du bateau. Parce que les policiers considèrent que les pilotes sont coupables, en gros, d'aider au trafic illicite de migrants. Et donc, plutôt que de venir en aide à des gens qui sont en train de cracher de l'eau de mer, leur seule préoccupation est d'interpeller des personnes considérées comme des barreurs ou les pilotes des navires », dénonce Me Raphaël Kempf, l'avocat Ibrahim Aboubakar. Les rescapés, tous Afghans, à l'exception d'Ibrahim et d'un jeune Sud-Soudanais, désignent les deux Africains, comme les pilotes. Peut-être sur ordre des passeurs, suggère l'avocat. Ibrahim Aboubakar a toujours nié. Pour MeKempf, le trentenaire est une victime dans cette affaire. « Lui-même aurait pu perdre la vie dans ce naufrage. C'est absolument terrible de l'accuser d'avoir une part de responsabilité. Les lois qui punissent les passeurs exigent qu'il y ait une forme d'enrichissement, ce qui n'est absolument pas le cas. On en vient à punir quelqu'un et à l'enfermer en prison pendant plus de deux ans. Quelqu'un qui n'a souhaité que fuir la situation génocidaire et trouver un pays d'accueil où il puisse construire une existence un peu digne », explique-t-il. Du Soudan aux côtes du nord de la France Contrairement aux autres accusés, Ibrahim Aboubakar a longuement été interrogé sur son parcours, du Soudan aux côtes du nord de la France. Bruno Bourgin, bénévole pour l'association La Cimade, est allé à sa rencontre en prison. Il décrit une longue série de fuites. « Son village a été détruit en 2003. Sa famille s'est réfugiée dans un camp à côté d'El-Geneina. Quand les choses se sont complètement dégradées en 2022-2023, ce fut la fuite au Tchad. Et c'est là qu'il a laissé sa famille. Fuite suivante, il est parti en Libye en pensant y trouver du travail. Et puis là, il s'est fait ramasser par une milice, torturé. Ce qui le tient, c'est vraiment cette volonté farouche de trouver une solution pour pouvoir venir en aide à sa famille », raconte Bruno Bourgin. La traversée de la Méditerranée, l'Italie, puis la France... Le sort d'Ibrahim Aboubakar doit être distingué de celui des autres prévenus, a tranché la procureure. « Il est temps que vous sortiez de prison », lui a-t-elle lancé, même si elle reste persuadée que le trentenaire était bien à la barre du bateau. Pour cette raison, elle a réclamé à son encontre deux ans de prison avec sursis. Le tribunal l'a finalement relaxé. Ibrahim Aboubakar peut enfin cesser de fuir. À lire aussiNaufrage dans la Manche en 2023: 3 à 15 ans de prison requis contre huit passeurs présumés

11-18
02:31

Le mois sans tabac en France: les bienfaits de l'arrêt

En France, le mois de novembre est le mois sans tabac. Une campagne nationale d'aide à l'arrêt de la cigarette est menée. Objectif : inciter les fumeurs à arrêter pendant 30 jours, en leur proposant un accompagnement. Notre reporter s'est penché pour nous sur les bienfaits de l'arrêt du tabac. Arrêter de fumer une bonne fois pour toutes, change radicalement la vie. Quelques heures à peine après avoir écrasé sa dernière cigarette, les bienfaits se font sentir. Alice Deschenaux, psychiatre est présidente de la société francophone de tabacologie. Elle détaille : « On peut sentir des choses au niveau du souffle, on peut sentir des choses au niveau du goût. On peut aussi se sentir plus en forme, et être également fier de la démarche qu'on est en train de mener. C'est important. Savoir qu'au fil des semaines, on va aussi être mieux au niveau par exemple de l'anxiété et de l'humeur. On montre que ça s'améliore. Il y a plus d'émotions et d'affects positifs quand on arrête de fumer dans les semaines qui suivent, après un arrêt. Donc pour la santé mentale, c'est tout bénéfique. Puis, petit à petit, c'est vraiment la santé au global qui est améliorée. On va se sentir plus en forme. Si on a des maladies, on aura moins de décompensations de sa maladie, plus d'efficacité des traitements et de la prise en charge. Et puis, petit à petit, on va diminuer les risques cardiovasculaires, les risques oncologiques, donc de cancer, que va amener le tabac », explique la psychiatre. Malgré tous les bienfaits pour la santé de l'arrêt du tabac, de nombreux fumeurs peinent à franchir le pas. Comme Martine, qui a fumé 35 ans avant d'arrêter. « Avant d'arrêter, j'imaginais que c'était comme l'ascension de l'Everest. Je ne pensais pas que je pouvais arrêter de fumer », précise-t-elle. À lire aussiMois sans tabac : comment arrêter de fumer ? Et pourtant, ce défi, Martine a décidé de le relever. Accompagnée par un spécialiste, aidée par les patchs et les gommettes de nicotine, elle y est parvenue plus facilement qu'elle ne l'imaginait, avec à la clé une surprise : « J'ai découvert le bonheur de ne pas connaître tous les horaires de tous les tabacs de Paris, s'amuse-t-elle. Au cas où j'aurais manqué d'une cigarette en pleine nuit ou un dimanche, ou je ne sais quoi. Je me suis rendue compte très vite – et ça, c'était très plaisant – que j'étais beaucoup moins stressée que quand je fumais. Et là, je me suis rendue compte qu'en fait, fumer, ça me stressait encore plus que je ne l'étais. Ça ne me décontractait pas du tout alors que j'étais persuadée du contraire. C'était incroyable à quel point j'étais beaucoup moins stressée qu'avant. » La consommation de tabac en France est en baisse. En dix ans, le nombre de fumeurs quotidiens âgés de 18 à 75 ans a diminué de 4 millions. La proportion de fumeurs quotidiens parmi les 18-75 ans est passée de moins de 30% en 2014 à moins de 20% en 2024. À lire aussiLe mois sans tabac

11-17
02:33

Le coliving, une nouvelle forme de logement qui fait débat

Quelles solutions face à la crise du logement que traverse la France ? Alors que de nombreux jeunes en particulier ne parviennent plus à se loger dans les grandes villes, une nouvelle forme d'habitat partagé se développe de plus en plus ces dernières années : le coliving. Il s'agit, comme la colocation, d'un même appartement dont plusieurs personnes louent les chambres. Sauf que chacun a ici son propre bail, pour une chambre, et un accès partagé à des services. Face à ce que les détracteurs de ce système qualifient de « machine à cash », la ville de Paris a agi : en octobre, elle a adopté une délibération pour refuser tout nouveau projet immobilier de coliving. Nous sommes dans un coliving. Ici, chacun loue sa chambre meublée, et les 600m² de cuisine, salon et salle de sport communes. Ce n'est pas vraiment une colocation traditionnelle, car les baux sont individuels et gérés par une société qui vend un logement clé en main. Victor Augais, le gérant, défend son modèle : « Le modèle habituel de la Casa, c'est de racheter des grandes maisons qui logeaient quatre, six personnes, et puis en fin de vie, deux personnes âgées. Nous, après réaménagement, on va faire une douzaine de chambres. Ça me semble plutôt positif, dans un cadre de pénurie de logements, que négatif. »  Le loyer est de 675 euros, auxquels s'ajoutent 275 euros de charges et services, dont un petit-déjeuner quotidien. « On loue chambre et une partie des parties communes. Une douzaine de m² pour la chambre et la salle de bain, et à peu 11m² de part de partie commune », poursuit-il. Payer 950 euros par mois, n'est-ce pas un peu cher pour 10m² de partie individuelle ? Il répond : « Les pratiques de loyer sont conformes au marché. Si vous voulez avoir juste une partie privative et rien d'autres, louez un studio. » Vers une régulation du marché du coliving ?  Un discours trompeur selon Ian Brossat, sénateur communiste de Paris et membre du conseil municipal. Son groupe a rédigé la délibération du 8 octobre 2025 pour rejeter tout nouveau projet de coliving dans la capitale. « Non, ça ne se justifie que le prix d'une chambre de 9m² s'élève à 950 euros de loyer, même si on a la possibilité de fréquenter des espaces communs. Comme nous avons encadré Airbnb, eh bien, les mêmes acteurs se tournent vers un nouveau produit qui doit leur permettre d'atteindre les mêmes niveaux de rentabilité qu'ils n'atteignent plus aujourd'hui sur Airbnb. C'est ça, la réalité », analyse Ian Brossat.  Une expérience qu'a vécue Julia, étudiante argentine arrivée à Paris il y a deux ans. Elle a loué pendant un an une chambre dans un coliving du 15e arrondissement de Paris : 10m² meublés pour 990 euros par mois. « C'est hyper cher », précise-t-elle. Les garants argentins de Julia étaient presque systématiquement refusés par les bailleurs. « À ce moment-là, c'est la seule solution que j'avais trouvée pour pouvoir vivre ici à Paris. Ils profitent de la situation des étrangers désespérés. J'avais surtout de l'argent de côté. J'ai payé le loyer pendant six mois, et après, j'ai trouvé un travail ici en France. C'est devenu un peu plus facile. » Ian Brossat et le groupe communiste au Sénat ont déposé une proposition de loi pour réguler le marché du coliving à l'échelle nationale. D'autres villes, comme Lyon ou Montreuil, envisagent aussi d'encadrer ce type d'habitat. À lire aussiPourquoi les prix des logements s'envolent ?

11-16
02:26

Raid de l'immeuble à Saint-Denis, une habitante raconte son calvaire: «Une fois relogés, on s'est débrouillés seuls»

Dix ans après les attaques du 13 novembre 2015 qui ont fait plus de 130 morts et des centaines de blessés, les souvenirs s'estompent, mais demeurent toujours présents chez les victimes. Eux aussi ont été reconnus comme des victimes du terrorisme : les habitants d'un immeuble de la rue du Corbillon, à Saint-Denis. C'est dans cette ville du nord de Paris où s'étaient retranchés deux terroristes. L'immeuble a été détruit lors de l'assaut du Raid, le 18 novembre 2015, cinq jours après les attentats. Mais avant cette reconnaissance arrachée après avoir lutté devant la justice, leur parcours n'a pas été facile pendant des années, et ce, dès le lendemain, dès l'assaut des forces de police. Rencontre avec une ancienne habitante de la rue du Corbillon.   À lire aussiAttentats: retour sur l'opération antiterroriste à Saint-Denis

11-13
02:31

13-Novembre: dix ans après les attentats, l’association Coexister s’efforce d’entretenir le vivre-ensemble

Nous commémorons aujourd'hui le dixième anniversaire des attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Ce soir-là, une série de fusillades et d’attaques-suicide revendiquées par le groupe État islamique fait 130 morts dans plusieurs bars parisiens, aux abords du Stade de France et dans la salle de concert du Bataclan. Dans les jours qui ont suivi, plusieurs actes islamophobes et antisémites étaient recensés en France. Ils demeurent à des niveaux élevés dix ans après. Mais en France, une association s'efforce d’entretenir le vivre-ensemble. Son nom : Coexister. Son but : faire dialoguer des jeunes d'horizons et de convictions religieuses différentes pour déconstruire les préjugés et les unir dans la différence. Trois d’entre eux expliquent ce que le 13 novembre 2015 a changé dans leurs vies et les raisons de leur engagement au sein de cette association. Atouma avait à peine dix ans au soir des attentats. Mais le 13 novembre 2015 s’imposait déjà comme un tournant dans sa vie : « Sur le moment, je n’avais pas encore le recul pour me dire : "Je suis musulmane et ce sont des musulmans qui ont commis cet attentat" », se remémore-t-elle. La prise de conscience est venue progressivement, « par ma mère », précise Atouma. « Je l’entendais dire à mes sœurs : "Évitez de dire que vous êtes musulmans, cachez cela". Elle avait peur qu’on nous rattache à ces attentats », ajoute-t-elle. « Il y a un avant et un après 13 novembre 2015 », confie à son tour Alexandra, trentenaire et agnostique. L’attentat a constitué chez elle un électrochoc au point que le déclic a été immédiat. « Dès le 14 novembre, je me suis engagée à Coexister avec la volonté d’être tout de suite dans l’action, de participer à une société plus ouverte avec moins d’amalgames », explique-t-elle. Les trois jeunes femmes rejoignent l’association Coexister avec un même objectif en tête : trouver un espace de rencontre et de dialogue apaisé. Megan et Atouma ont sauté le pas il y a seulement quelques mois. « Mon engagement chez Coexister s’ancre aussi dans le fait de questionner cette peur de l’autre, comment cette peur nous atteint, comment nous pouvons la dépasser. Ces questionnements permettent de défaire les idées reçues que nous avons les uns sur les autres », développe Megan, de confession juive. « C’est seulement maintenant que je me dis que je peux en parler » De son côté, Atouma explique avoir trouvé au sein de l’association « le dialogue [qu’elle] cherchait ». Et précise : « Comme ma mère nous a dit dès le départ de ne pas parler de ces attentats, j’ai tout de suite été freinée dans la façon dont je pouvais exprimer mon ressenti. Et c’est seulement maintenant que je me dis que je peux en parler. » Dix ans après l’attentat, Atouma veut croire que certaines fractures se sont refermées et que certains amalgames appartiennent au passé. « Je pense que certaines personnes ont compris que les musulmans n’étaient pas tous liés à cet attentat », affirme-t-elle. « Je pense en effet que certaines personnes ont compris que la communauté musulmane n’avait pas à se justifier », abonde Alexandra qui dit percevoir les premiers effets de son engagement au sein de l’association Coexister. « Je sais qu'aujourd’hui mes parents ne diraient absolument pas la même chose au sujet des personnes musulmanes et juives, car ils ont appris des choses grâce aux dialogues que j’ai eus avec eux », ajoute-t-elle. Megan, en revanche, se montre plus mesurée. « Malheureusement, de nouvelles fractures se sont ajoutées aux fractures initiales. D’un autre côté, je trouve qu’il y a une grosse représentation des actes de haine et sans doute pas autant de visibilité des actes de solidarité. Elles mériteraient d’être davantage mises en lumière », juge-t-elle. Pour visibiliser davantage ses missions et répandre encore la coexistence, l'association Coexister entend ouvrir huit nouvelles antennes en France d'ici à 2027.   À lire aussi13 novembre 2015: 10 ans après, le sens du souvenir

11-12
02:29

La vie nocturne dans le quartier des attentats du 13-Novembre: «Ça m'a ruiné, mais il faut continuer à sortir»

En 2015, la France vivait les attentats terroristes les plus meurtriers perpétrés sur son sol : aux abords du Stade de France, de la salle de concert du Bataclan et devant les terrasses animées des bars de la capitale, au total, 132 personnes ont perdu la vie. Retour dans l'un des quartiers touchés : le 11ᵉ arrondissement de Paris, connu pour sa vie nocturne. Dix ans après, l'ombre des attentats plane-t-elle encore sur la fête ? Marius Laffont a rencontré les noctambules du quartier. À lire aussiAttentats de Paris: les leçons tirées par la Croix-Rouge pour mieux organiser les secours          

11-11
02:27

L'Institut Pasteur face au défi du financement de la recherche

Il y a six mois, l'Union européenne et la France lançaient l'initiative « Choose Europe for Science », en réponse à la dégradation des conditions de travail des chercheurs américains. La France avait alors annoncé débloquer 100 millions d'euros pour accueillir ces scientifiques. Une annonce qui avait fait bondir une partie du monde de la recherche en France, qui dénonce le manque d'investissement de l'Etat. Pour équilibrer leur budget, certains centres de recherches biomédicaux s'appuient de plus en plus sur d'autres sources de revenus. C'est le cas notamment de l'Institut Pasteur, un centre de référence internationale dans la lutte contre les maladies infectieuses, qui a vu son budget augmenter de 38% en sept ans - atteignant aujourd'hui presque 400 millions d'euros. Reportage dans l'un des laboratoires de l'Institut Pasteur.  « Là, c'est le sas où on va se préparer. On va juste mettre une paire de gants, des petits chaussons pour pas salir le laboratoire. » Pendant qu'il enfile une blouse en coton jetable, le Dr Olivier Schwarz, directeur de l'unité de virologie, indique une ligne rouge scotchée au sol. Au-delà, interdiction de marcher sans équipement de protection. C'est ici que sont manipulés des cellules humaines infectées par des virus. « On peut rentrer là si… j'arrive à ouvrir cette porte… Oui, là c'est une hotte à flux laminaire. Donc on peut cultiver des cellules à l'abri. Ici, on a des étuves, donc ce sont des incubateurs à 37 degrés, comme la température du corps. Et quand on ouvre la porte, on peut voir toutes nos cultures cellulaires. On partage tout cet équipement, tout ce laboratoire avec deux autres unités de recherche. On a beaucoup d'équipements mutualisés. » À écouter aussiPourquoi l’Institut Pasteur? Des équipements coûteux et qu'il faut renouveler tous les cinq ans, voir tous les ans. Pour absorber ces coûts, les centres de recherches nationaux sont financés grâces à des dons, des contrats privés et des subventions publics. Notamment les appels d'offres qui mettent les laboratoires en concurrence. « Je pense que c'est sain qu'il y ait une partie de la recherche qui soit faite sous forme d'appel d'offres compétitif, mais c'est important également qu'il y ait des financements suffisamment importants. Il faut laisser le temps à chaque unité de générer des résultats, de faire des découvertes, et ça ne se fait pas en quelques semaines ou quelques mois. C'est pour ça qu'il faut que les financements soient sur trois ans ou cinq ans, pour laisser le temps justement de produire de la recherche de qualité. » À lire aussiAvec «Choose France for Science», Emmanuel Macron veut attirer les chercheurs étrangers L'arrivée au pouvoir de Donald Trump et ses attaques répétées contre le monde scientifique, ont fragilisé les centres de recherches internationaux comme l'Institut Pasteur. « Les conséquences directes, c'est que même à l'Institut Pasteur, il y a des grands programmes de recherche internationaux qui impliquent les États-Unis qui ne sont plus financés. D'un point de vue indirect, on va pouvoir accueillir certains chercheurs qui travaillent aux États-Unis, à l'Institut Pasteur, mais nos capacités sont quand même modestes par rapport à l'ampleur des chercheurs qui risquent d'être démobilisés. » Aujourd'hui, la France investit 0,3% de son PIB dans la recherche. C'est moins que la moyenne européenne qui s'élève à 0,9%. À lire aussiÉtats-Unis: face à Donald Trump, les scientifiques font de la résistance

11-11
02:30

Attentats de Paris: les leçons tirées par la Croix-Rouge pour mieux organiser les secours

Près de 700 secouristes ont été déployés lors des attentats de Paris et du Stade de France, le 13 novembre 2015, et lors de la prise d'assaut des forces de l'ordre qui a suivi, le 18 novembre 2015, à Saint-Denis. Jamais encore la Croix-Rouge française n'était intervenue dans une telle configuration. Quelles leçons tirer de ces événements sur l'organisation des secours ? À La Croix-Rouge française, une vaste réflexion a été menée avec les principaux acteurs concernés, sur le plan « Aramis », le dispositif spécial attentat. Les objectifs sont de rendre plus efficaces encore les secours et renforcer la sécurité des intervenants sur le terrain. Rémi, un jeune bénévole, faisait partie des 700 secouristes déployés lors des attentats de novembre 2015. Il était à bord d'un véhicule de la Croix-Rouge et se souvient : « Avec une autre bénévole, on a sauté les deux pieds joints dans une flaque de sang. C'était la première fois, dans ma vie de membre de la Croix-Rouge. On voyait l'ampleur des événements avec une désorganisation... je ne vais pas dire ''totale'', mais j'ai vu des policiers égarés. » Mieux se coordonner avec les forces de l'ordre et les pompiers pour une meilleure intervention, voilà une première leçon de ces événements. Florent Vallée, responsable des opérations d'urgence, explique aussi qu'au lendemain du 13 novembre 2015, la Croix-Rouge a mis en place un outil informatique pour mieux géolocaliser les équipes : « C'est un outil qui fonctionne toujours aujourd'hui, qui a été déployé partout en France, qui nous permet de suivre nos interventions, suivre nos volontaires, suivre nos véhicules en intervention, mais aussi ce qu'ils font. Ça, ce sont de très grandes avancées qui nous permettent d'être plus efficaces et de mieux comprendre ce qui se passe. »  Anna était dans le quartier où une partie des attentats s'est déroulée. Elle raconte que les gens ne savaient pas où se réfugier : « On nous a d'abord évacués chez la propriétaire du bar qui était juste au-dessus. Finalement, vu que c'était un peu trop risqué – parce qu'on a vu une personne se faire abattre juste en dessous, au rez-de-chaussée –, on a préféré aller dans la cour. » Des mairies ont finalement été ouvertes pour servir d'abris. Là encore, la Croix-Rouge en a tiré des enseignements. Florent Vallée précise qu'il faut mieux identifier et sécuriser les abris : « Ça a été fait très vite, dans des mairies d'arrondissement, sans aucune protection. Il y avait danger, d'abord parce qu'il aurait pu y avoir potentiellement un terroriste au milieu. Il faut prévoir à l'avance quels pourraient être ces lieux. Typiquement, à Paris, il y a plusieurs lieux qui seraient sécurisés, et qui pourraient être prévus pour accueillir les impliqués. Ça, c'est l'amélioration qui a été faite par la suite, pour permettre la sécurité des uns et des autres. »  Autre grande avancée : la santé mentale des volontaires de la Croix-Rouge a été également prise en charge. Car eux aussi ont été très éprouvés. « Les images qui remontent, chaque fois que j'y pense, sont à peu près les mêmes. Comme parler avec des personnes qui sont peut-être habillées comme moi aujourd'hui, mais qui étaient rouges de sang, et qui me disaient ''on est rentrés à cinq dans le bar, je suis sorti tout seul'' », confie Rémi, le bénévole. Les 700 volontaires mobilisés ont été reçus, un par un, par des professionnels de la santé mentale. Pour Florent Vallée, c'est une priorité : « Il va y avoir systématiquement ce type de dispositif. Pour les JO de Paris, nous avions intégré cette problématique, et nous avions des médecins et des psychologues à disposition en permanence pour nos équipes. » Dix ans plus tard, la Croix-Rouge réfléchit toujours à comment améliorer la préparation et la sécurité des volontaires en situation de crise. À lire aussiFrance: dix ans après les attentats de Paris, comment a évolué le métier des forces de l'ordre?

11-11
02:35

France: dix ans après les attentats de Paris, comment a évolué le métier des forces de l'ordre?

Il y a dix ans, la France vivait les attentats terroristes les plus meurtriers jamais commis sur son sol. Le 13 novembre 2015, trois commandos du groupe État islamique s'élançaient, ceintures explosives et armes à la main, aux abords du Stade de France, dans la salle de concert du Bataclan et devant les terrasses animées des bars de la capitale. Au total, 132 personnes ont perdu la vie. Des attaques qui ont marqué l'ensemble de la société française, à commencer par ses forces de sécurité. En première ligne ce soir-là, policiers et gendarmes ont dû, en dix ans, intégrer la menace terroriste à leur métier. Retour sur l'évolution de la profession et ses conséquences sur le quotidien de la population. Un gilet renforcé pour arrêter les balles de plus gros calibres, des armes qui peuvent atteindre des cibles plus éloignées... La première conséquence des attentats de novembre 2015, les agents la portent sur le dos au quotidien. Symbole d'une doctrine policière qui met le risque terroriste au cœur de son action.  Agathe Foucault, commissaire de police et porte-parole de la police nationale, détaille d'autres évolutions en dix ans : « La mise en place de dispositifs Silt [Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme, Ndlr], qui sont des zones, où toutes les personnes qui vont rentrer vont être contrôlées ; les policiers dédiés à la direction nationale du renseignement territorial à la lutte contre le terrorisme ont été doublés ».  La formation des policiers a aussi évolué, avec les formations « tueries de masse », où les policiers vont « apprendre à prendre en compte un individu au milieu d'une foule, à intervenir de manière tactique et également à apporter des premiers secours », précise Agathe Foucault. Nette augmentation des tirs policiers Le cadre législatif lui aussi a évolué sur l'arme de service. Les agents peuvent désormais la garder sur eux en dehors de leur temps de travail et les règles qui encadrent son usage se sont élargies. « Lorsqu'un individu vient de commettre un meurtre ou une tentative de meurtre et que le policier dispose d'éléments qui lui permettent de penser qu'il va en commettre d'autres : dans ce cas-là, ce n'est pas le cas de la légitime défense au sens de l'article 122-5 du Code pénal, mais l'article 435-1 du Code de la sécurité intérieure, qui permet aux policiers de faire usage de son arme en cas de périple meurtrier », explique la porte-parole de la police nationale. Un texte qui introduit également l'usage de l'arme dans les cas de refus d'obtempérer, dès sa promulgation. L'inspection générale de la police fait état d'une nette augmentation des tirs policiers. Selon Fabien Jobard, directeur de recherche au CNRS, ces tirs ont augmenté « en flèche, + 40 % l'année 2017. L'essentiel de cette augmentation est due au tir sur des véhicules en mouvement ». Aujourd'hui, le nombre de tirs baisse à nouveau, mais leur létalité, elle, a augmenté, note Fabien Jobard : « Les tirs mortels sont à un niveau qu'on n'a pas connu depuis 50 ans. En 2017, les policiers tirent, mais tuent peu. En 2022, ils ont tué 13 personnes au volant de leur véhicule. Toutes morts confondues, on est à plus de 20 par an ». Il juge ces chiffres « préoccupants ». Cette évolution des pratiques policières est à replacer dans un contexte de tensions dans la police, visée par des attaques terroristes comme celles de Magnanville en 2016 où un couple d'agents est assassiné à son domicile, ou encore celle de 2017 sur les Champs-Élysées qui a couté la vie au capitaine Xavier Jugelé. Vendredi 13 novembre 2015, Jean-Baptiste, aujourd'hui Major dans la Police nationale, est appelé en renfort avec ses collègues sur ce qu'ils pensent être une fusillade entre bandes rivales, dans le 10ᵉ arrondissement de Paris. Il est loin d'imaginer l'horreur qu'il va découvrir quelques minutes plus tard. Dix ans après, il se souvient des nombreux blessés, de la crainte que les terroristes reviennent, alors qu'ils ne sont que quatre agents des forces de l'ordre sur place, dans l'attente interminable des secours. Il garde de cette soirée effroyable un sentiment douloureux d'impuissance qui a transformé le policier qu'il est aujourd'hui. 

11-09
02:29

Santé: le don de plasma, un enjeu de souveraineté sanitaire en France

Avec 1,6 million de donneurs chaque année, le don du sang est un acte de solidarité bien connu des Français. Moins connu, le don de plasma, un dérivé du sang, progresse toutefois en France, avec une augmentation de 16% en 2024 par rapport à 2023. Une croissance que l'Établissement français du sang (EFS) veut accélérer dans le cadre de son programme baptisé « Ambition plasma ». Il vise à mobiliser plusieurs centaines de milliers de nouveaux donneurs chaque année, d'ici à 2028. Arame Mbengue s'est rendue à Bobigny, en région parisienne, dans l'une des Maisons du don de l'EFS. Le plasma, c'est le liquide dans lequel circulent les cellules sanguines telles que les globules rouges et blancs, entre autres. Il est très riche en protéines. Son utilisation sous forme de médicaments dérivés du sang ou par transfusion permet de soigner des milliers de patients. Dans la salle de prélèvement de la Maison du don de Bobigny, située à l'hôpital Avicenne, une donneuse effectue pour la deuxième fois un don de plasma. Elle raconte ce qui l'a poussé à donner : « La première fois, c'est tout simplement parce que j'ai réalisé que j'étais en bonne santé, et je me suis dit ''pourquoi pas''. Puisque je suis donneuse universelle, donc autant donner. Et la deuxième fois, on m'a recontactée, parce qu'il y avait un manque. On m'a demandé si je voulais bien venir, et j'ai dit ''OK, pas de problème''. »  Pendant le prélèvement, seul le plasma de cette donneuse est extrait par la machine. Le reste du sang est immédiatement réinjecté dans son organisme, comme l'explique Alice, infirmière de l'EFS : « La machine récupère le sang et vient filtrer le plasma grâce à un retors qui vient utiliser la force centrifuge pour pouvoir filtrer les globules rouges et le plasma. On récupère le plasma et on réinjecte les globules rouges au donneur. » Mais avant d'arriver à la salle de prélèvement du plasma, les donneurs passent d'abord par différentes étapes. D'abord un passage à l'accueil, puis un entretien médical. Une étape essentielle, pour le docteur Bayazid Belhadj-Kacem, responsable des prélèvements : « C'est pour déterminer l'éligibilité, voir si la personne prend des médicaments, si elle se fait soigner pour x maladies, si elle est rentrée d'un pays à risques, ou si elle a un comportement à risques... Si tous les voyants sont au vert, la personne est éligible au don, et elle est invitée bien sûr à donner son plasma. »  Avec son programme « Ambition plasma », l'Établissement français du sang vise à prélever un 1 400 000 litres de plasma en 2028 contre 870 000 litres en 2024. Un enjeu de souveraineté sanitaire pour la France, qui importe des médicaments dérivés du sang. Laure Bouguignat, directrice de l'EFS Île-de-France, nous dit l'importance des dons français : « On a besoin de plasma pour fabriquer des médicaments issus de ce plasma. Pour l'instant, la France est loin d'être autosuffisante, et elle dépend, en fait, de ce qui est collecté au niveau des États-Unis pour la fabrication des médicaments dérivés du sang. »   Le don de plasma est réalisé uniquement dans les maisons du don de l'EFS et sur rendez-vous, partout en France métropolitaine. Toute personne âgée de 18 à 65 ans peut faire un don de plasma tous les 15 jours. À lire aussiSanté: je vous raconte comment j'ai donné mon plasma

11-06
02:28

La «fabrique de sans-papiers»: quand l’administration plonge les étrangers dans l’illégalité

À l'appel de la Cimade, une association qui défend les droits et la dignité des personnes réfugiées et migrantes, plusieurs dizaines de personnes se sont mobilisées le 16 octobre dernier devant des préfectures et des sous-préfectures. Objectifs de cette action qui s'inscrit dans une campagne de sensibilisation du public lancée dès le 13 octobre sur les réseaux sociaux : dénoncer les obstacles, notamment administratifs que rencontrent les étrangers dans leurs démarches de régularisation ou de renouvellement de leur titre de séjour. Bénévoles, salariés et partenaires de la Cimade ont mené une action médiatique dans plusieurs grandes villes comme Paris, Marseille, Lyon, Lille, Toulouse ou Montpellier entre autres. Dans la capitale française, plusieurs dizaines de militants ont manifesté à la Place du Châtelet, en plein cœur de Paris, pour dénoncer ce qu'ils appellent la fabrique de sans-papiers. Depuis la dématérialisation des procédures des titres de séjour, étudiants comme travailleurs étrangers font face à des difficultés administratives qui les plongent dans l'illégalité, avec parfois à la clé une OQTF, une Obligation de quitter le territoire français.   À lire aussiÀ Rennes, des migrants sans-papiers cultivent la solidarité

11-04
02:30

Discrimination à Marseille: «Cette ville qui se rêvait multiculturelle est devenue une ville multi-discriminatoire»

« Mort aux arabes ». Il y a quelques semaines, à Marseille, ces mots ont été tagués sur la porte du bureau d’Audrey Garino, une adjointe au maire. Dans un contexte électoral tendu autour des questions d’identité, un collectif d’une vingtaine d’associations s’est monté dans la ville. Stop Stigmatisation dénonce dans un manifeste « un climat nauséabond » et la libération d’une parole raciste dans une ville connue pour être multiculturelle. À Marseille, entre 50 000 et 100 000 personnes sont issues de la diaspora comorienne, environ 300 000 de la diaspora algérienne. Par le biais d’une pétition, le collectif Stop Stigmatisation exige la fin de la banalisation du racisme. Mais, surtout, des améliorations pour les générations à venir. Reportage de notre correspondante à Marseille Zoé Cottin.   À lire aussiFrance: des dizaines de milliers de personnes dans la rue contre le racisme

11-03
02:31

La démoustication par épandage: un danger pour l'environnement et la population?

Face à la recrudescence du moustique tigre et des maladies tropicales, favorisées par le changement climatique, les régions mettent en place des opérations de démoustications en zone humide et urbaine. Quels sont les risques des épandages d’antimoustique pour la population et l'écosystème ? Reportage dans le sud de la France, près de Marseille.    À lire aussiMoustique : l’animal le plus dangereux au monde À lire aussiComment le moustique de la dengue a envahi le monde et va continuer à le faire  

11-02
02:31

Les coopératives funéraires, une autre idée des funérailles

À l'opposé des pratiques de certaines entreprises de pompes funèbres où la rentabilité semble prime sur l'accompagnement des familles, les coopératives funéraires misent sur le social et l'éthique pour permettre aux familles de se réapproprier le moment des obsèques. Il en existe une dizaine en France, comme ici à Rennes. Reportage.   De sa maman Odette, Natalie garde en mémoire le souvenir d’une femme rêveuse et engagée. « Il n’y a pas si longtemps, elle me disait : "Je ne comprends pas, les gens dans la rue passent à côté d’un chant d’oiseaux ou d’un très beau coucher de soleil, mais personne ne s’arrête, personne ne regarde." Elle pouvait s'émerveiller pour ce genre de choses et elle était très fâchée contre le manque d'attention à l'égard de l’environnement », se remémore-t-elle. Lorsque Odette décède en août dernier, Natalie se tourne vers une coopérative funéraire plutôt que vers les pompes funèbres, toujours marquée par l’inhumation de sa belle-mère. « On n'avait pas du tout eu le temps de préparer la cérémonie. C’était un au revoir raté et cela m’avait traumatisée », regrette-t-elle. À la coopérative funéraire, on lui propose une inhumation à l’image d’Odette et conforme à ses volontés : des obsèques en pleine nature, dans une petite ferme, de la musique et un cercueil personnalisé. « C’est un cercueil sur lequel nous avons peint. J’ai trouvé ça chouette, car ça a réuni les enfants, les petits-enfants, les arrière-petits-enfants. On s’est tous retrouvés dans le jardin et on a fait une après-midi peinture », raconte Natalie. Des arbres, des vagues et un petit bateau colorent le cercueil d’Odette. « Ce sont des couleurs très douces. J’ai l’impression que nous n’aurions pas pu faire mieux ». Le social plutôt que le commercial À la coopérative funéraire de Rennes, ni tombes, ni cercueils, mais un piano, une guitare et un petit salon chaleureux où l’on prend le temps avec les familles endeuillées et parfois en manque de repères. « L’objectif des coopératives, c’est de faire en sorte que les familles fassent des choix éclairés, explique Isabelle Georges, qui a fondé l’antenne rennaise. On prend le temps d’expliquer ce que dit la loi. Il y a toujours deux rencontres avec les familles. Une première sur les aspects logistiques et formels et une seconde sur la préparation des rituels. » Ici, ce sont les familles qui ont le dernier mot et le libre choix d’organiser les obsèques qu’elles souhaitent. Si tout cela se fait sans précipitation, c’est en bonne partie en raison du modèle économique de ces entreprises. Elles appartiennent à leurs sociétaires. Les profits ne sont pas générés pour satisfaire quelques actionnaires. Ils sont au contraire réinvestis – en partie ou intégralement – dans l’entreprise. Miser sur le social plutôt que le commercial, c’est la bonne formule pour des obsèques apaisées, explique Natalie : « Ça m'a vraiment permis de faire mon deuil de façon plus sereine, d’accompagner ma mère jusqu’au bout. J’ai ressenti de la fierté à réussir ce moment. » Un moment que Natalie dit s’être totalement réapproprié. À lire aussiLa mort est-elle écologique?

10-30
02:32

«C'était de la psychiatrie de guerre»: Un psychiatre gazaoui réfugié en France raconte

Il exerçait sous les bombes, dans des hôpitaux en ruine. Fadel Afana était psychiatre à Gaza. Il a vu l'impact de la guerre et de la violence extrême sur la santé mentale de ses compatriotes. Exilé en France depuis décembre 2024, il travaille désormais dans un institut de recherche à Paris. Notre correspondant l'a rencontré dans son petit appartement de Corbeil-Essonnes, au sud de la capitale, où il habite avec sa femme et ses deux filles. À lire aussiÀ Gaza, un psychologue en première ligne face aux traumatismes

10-29
02:32

«Mon objectif ne changera jamais»: à Calais, un accord migratoire sans effet

Entré en vigueur le 6 août dernier, l'accord migratoire conclu entre Londres et Paris permet au Royaume-Uni de renvoyer des exilés en France et, en échange, d'en accueillir autant. Mais la mesure peine à se mettre en place et n'a aucun effet sur les traversées. Reportage à Calais, l'un des principaux points de départs des migrants.   Une partie de football s'improvise dans la cour du Secours catholique à Calais. L'association offre, en plein centre-ville, un lieu de répit aux exilés. Ici, beaucoup ont déjà entendu parler de l'accord migratoire entre la France et la Grande-Bretagne, sans toujours en connaître les détails. « J'ai entendu parler de cet accord, c'est un peu comme si on était des animaux. Mais je ne peux pas faire demi-tour et je ne peux pas rester ici. Je n'ai pas d'autre choix », affirme Abdo, originaire du Yémen et arrivée à Calais il y a un mois. À l'intérieur du bâtiment, des dizaines d'hommes, souvent jeunes, discutent autour des multiprises si précieuses pour recharger leur portable. La fréquentation du centre n'a pas baissé, malgré la nouvelle menace qui pèse sur les candidats à la traversée. « Je pense qu'au début, il y avait des questions qui se posaient. Quand l'information est sortie, les gens, par pragmatisme, continuaient de passer en petits bateaux. Nous, on a tout de suite pensé que c'était inefficace. Tant que les personnes sont coincées dans ces politiques européennes, elles continueront d'aller en Angleterre », estime Léa Biteau, qui coordonne l'antenne du Secours catholique à Calais. De fait, depuis le 1e janvier, près de 37 000 personnes sont arrivées au Royaume-Uni à bord de petites embarcations, au départ des côtes françaises. Ce chiffre dépasse celui de l'ensemble de l'année 2024. Et depuis l'entrée en vigueur de l'accord entre Londres et Paris, seulement 42 personnes ont été expulsées de Grande-Bretagne et 23 ont obtenu un visa.  À lire aussiFlux migratoire en hausse vers le Royaume-Uni malgré l'accord avec la France Pour bénéficier de ce principe du « un pour un », un expulsé de Grande-Bretagne pour un accueilli, le candidat doit s'inscrire de son propre chef sur une plateforme du ministère de l'Intérieur britannique, via un smartphone. Faut-il encore le savoir. Une ONG britannique a dû se déplacer à Calais ces dernières semaines pour aider les exilés dans leurs démarches. « Parmi les visiteurs réguliers de l'accueil de jour, il y en a pas mal qui ont fait des demandes, raconte Sakina, médiatrice au Secours catholique. Pour l'instant, je ne connais qu'une seule personne qui a eu un rendez-vous à Paris. Le problème, c'est qu'ils lui ont demandé l'original de son passeport. Sauf que c'est complètement déconnecté de sa réalité à lui et de la réalité de pas mal de personnes exilées d'ici. Il s'agit de beaucoup de personnes qui ont fui des situations de guerre, de conflit et qui n'ont donc pas les originaux de leurs papiers. » À lire aussiRoyaume-Uni: des milliards «gaspillés» pour héberger des migrants en hôtels pointe un rapport parlementaire CJ a la chance d'avoir pu conserver son passeport. Ce Soudanais de 28 ans, qui a plusieurs fois échoué à traverser la Manche, a tenté cette fois la voie légale. « Oui, j'ai déposé une demande sur cette nouvelle appli britannique, pour obtenir un visa. Mais elle n'a pas été acceptée », regrette-t-il. Alors est-ce que cela change ses projets ? Sa réponse n'est pas celle qu'espèrent les autorités britanniques. « En fait, oui, j'ai changé d'avis. Pas pour rester ici en France. Je vais essayer par camion. Mon objectif ne changera pas, jamais », affirme-t-il. En 2024, moins de 2 500 personnes ont choisi de tenter la traversée par camion, une voie extrêmement dangereuse et abandonnée depuis quelques années au profit des canots pneumatiques.

10-28
02:35

Un camp scientifique à l’ESPCI pour susciter des vocations chez les lycéennes

Il y a 30% de femmes dans les écoles d'ingénieurs françaises. À peine 15% dans les filières de mathématiques. Ces chiffres, issus d'une enquête de la Conférence des grandes écoles (CGE), révèlent le manque de femmes dans les études de sciences fondamentales. À l'ESPCI (École supérieure de physique et de chimie industrielles de la ville de Paris), c'est une première : cette grande école d'ingénieurs à Paris accueillait tout au long de la semaine dernière un camp scientifique dédié aux lycéennes. Cinq jours de travaux pratiques, conférences et visites pour leur montrer que les filles ont toute leur place dans les métiers scientifiques. Marius Laffont les a rencontrés lors d'une matinée dans les laboratoires de l'école. À écouter aussiPourquoi les filles doivent oser devenir ingénieures À écouter aussiJusqu'où nous entraineront les femmes de sciences au Sénégal ?

10-27
02:31

Clichy-sous-Bois: la délicate reconstruction 20 ans après la mort de Zyed et Bouna

C’était il y a 20 ans à Clichy-sous-Bois en banlieue parisienne. Le 27 octobre 2005, Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, mouraient électrocutés après avoir été pourchassés par la police. Les adolescents s’étaient réfugiés dans un transformateur EDF pour tenter d’échapper à un contrôle d'identité. Le drame avait déclenché 21 nuits d'affrontements entre jeunes et forces de l'ordre en banlieue parisienne d'abord, puis partout en France. Des révoltes qui ont permis aux habitants de ces quartiers populaires de montrer les discriminations qu'ils vivaient au quotidien, sur le plan social, mais aussi géographique. 20 ans plus tard, RFI est retourné à Clichy-sous-Bois. Si les infrastructures de la ville se développent (le métro y fera d'ailleurs son arrivée en 2027), le poids de l'histoire tragique de Zyed et Bouna pèse toujours sur les Clichois. Depuis 2019, c'est un peu plus facile d'aller et venir à Clichy-sous-Bois, même si, à 15 kilomètres seulement de Paris, la ville reste mal desservie par les transports en commun. C'est ici que Mehdi Bigaderne a grandi. Il avait 23 ans en 2005 : « J'étais à l'université de Saint-Denis, je mettais trois heures, alors peut-être qu'on met un peu moins, je ne sais pas, aujourd'hui, mais on met quand même beaucoup de temps et, effectivement, on ne part pas de la même ligne de départ, ça, c'est certain. Et cette question des discriminations, elle n’est pas vraiment prise au sérieux. » Ce tramway, le T4, avait pourtant été annoncé en personne par le président Jacques Chirac dès 2006, au lendemain des violences urbaines, nées ici, dans un quartier fragile, mais tranquille, qui s'est brutalement retrouvé sous le feu des projecteurs : « Je m'en souviens comme si c'était hier, parce que c'est tellement marquant. Je suis un enfant de la ville et c’est la première fois que je voyais la ville dans cet état-là, avec des brigades de CRS pratiquement dans chaque immeuble. Et puis, après, on a vu arriver un hélicoptère – moi, j'avais l'impression d'être à Bagdad, à un moment donné – qui tournait autour des immeubles avec un projecteur, qui était pénétrant dans les appartements, déjà qu’ils n’étaient pas très grands… » À écouter aussiBanlieues 2005 : retour à Clichy-sous-Bois La mort de Zyed et Bouna a laissé des cicatrices profondes dans le quartier À l'époque, l'ampleur de la réponse sécuritaire choque les habitants qui pleuraient deux enfants du quartier : Zyed Benna, 17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans. Ce qui n'arrange rien au rapport fragile entre police et population… Olivier Klein, maire actuel, était adjoint à la jeunesse et à la ville il y a 20 ans : « Quand les maires de l'époque ont vu le président de la République, il a demandé quelles seraient les urgences. Les deux maires, ensemble, ont dit : "Il nous faut un tramway – une des raisons de la popularisation, c'est l'enclavement, le temps pour aller bosser, le temps pour aller étudier, etcetera –, et on a besoin d'avoir un commissariat de plein exercice – pour que la police puisse être comme un poisson dans l'eau dans nos quartiers". » À lire aussiFrance: il y a 20 ans, la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré à Clichy-sous-Bois Les discriminations, un enjeu majeur En 2012, un commissariat sort de terre à Clichy. Les cicatrices sont encore bien visibles, mais d'après Mehdi Bigaderne, qui a cofondé l'association ACLEFEU pour faire remonter la parole des quartiers populaires auprès des institutions, constate que les choses changent petit à petit : « Les commissaires qui ont dirigé ce commissariat étaient ouverts à travailler avec les associations, donc on voyait qu’il y avait une volonté de se dire, s'il y a des incidents, on peut s’en parler… En revanche, je pense qu'ils sont limités parce que, je ne crois pas me tromper en disant ça, c'est qu’on a aussi un problème qui est plutôt général. Moi, je suis content de pas avoir revécu un tel drame sur la ville, mais il y en a eu d'autres malheureusement, et il faut que l'État prenne à bras-le-corps ce sujet-là qui, aujourd'hui, peut être un fonds de commerce pour certains politiques. » En 20 ans, les visages enfantins de Zyed et Bouna ont été rejoints par des dizaines de sourires similaires dans les marches blanches. D'après le média Basta!, le nombre de décès annuels imputables aux forces de l'ordre françaises a doublé depuis les années 2000. À lire aussiIl y a dix ans, les banlieues s’embrasaient dans toute la France

10-26
02:38

Recommend Channels