Certains peuvent être fiers d'avoir inventé des produits révolutionnaires, mais combien peuvent se vanter d'avoir inventé une profession et changé la société? C'est le cas de Florence Nightingale. Elle a inventé la profession d'infirmière. Avant elle, il y avait bien sûr un accompagnement des malades, mais, selon le mot charitable d'un commentateur, il était plus question d'œuvrer pour le salut de l'âme du patient que de mobiliser les connaissances de la médecine pour le sauver. Nightingale va tout revoir de fond en comble et changer l'hôpital pour toujours. Elle offre en cela une véritable leçon de management.
La France vit depuis quelques mois un psychodrame politique dont plus personne ne voit vraiment comment sortir. Celui-ci résulte en grande partie d’une volonté de maintenir la stabilité à tout prix. De condition pour appliquer une politique, celle-ci devient étrangement un objectif en soi. Comme souvent dans les systèmes complexes, toute action produit des effets pervers qui peuvent être plus importants que l’action elle-même. Si en effet les avantages de la stabilité sont évidents – le pays a besoin d’un gouvernement qui fonctionne -, le prix à payer est moins visible. Il est pourtant très important et devient rapidement insupportable.
Les multiples ruptures que connaît le monde remettent en cause les grands modèles sur lesquels nous nous sommes appuyés parfois depuis des décennies. Cette remise en cause nous fragilise et crée une incertitude profonde qui nous incite, pour nous réinventer, à nous tourner vers des réponses présentées comme des évidences. C’est un danger car il n’est plus guère d’évidences aujourd’hui et la plupart sont fausses. Ce danger n’existe pas seulement pour les entreprises; il existe aujourd’hui aussi pour nombre de professions particulièrement exposées, comme par exemple les experts comptables.
La littérature nous en apprend parfois beaucoup plus sur l’âme humaine et sur la gestion des situations difficiles que les meilleurs livres de management. C’est notamment le cas du célèbre monologue « être ou ne pas être » de Hamlet, qui explore le défi de l’incertitude qui peut conduire à la paralysie.
Apparu récemment dans le débat public, le terme “techno-solutionnisme” désigne la tendance à vouloir résoudre les grands problèmes contemporains, notamment environnementaux, par la technologie. L’expression se veut descriptive, mais elle porte en elle une critique implicite : celle d’une confiance jugée excessive dans le progrès technique. En réalité, ce mot soulève lui-même question. En assimilant toute approche technologique à une forme d’illusion ou de fuite en avant, ses utilisateurs dénaturent la technologie et instrumentalisent la crise écologique pour promouvoir une transformation sociale, plutôt que de s’ouvrir à toutes les solutions disponibles.
Dans un monde où les repères habituels vacillent, le leadership traverse une crise profonde. Nous ne sommes plus face à des risques calculables, mais face à une véritable incertitude : une situation où nos modèles mentaux individuels, collectifs et sociétaux sont remis en question. Cette rupture impose de repenser notre conception du leadership. Mais sur quelles bases?
Je suis heureux de vous présenter aujourd’hui mon nouveau livre, Tracer sa voie dans l’incertitude. Après plusieurs mois de travail, c’est avec une certaine émotion que je le partage avec vous. Ce livre est né d’une question qui me poursuit depuis longtemps : comment agir dans un monde où les certitudes s’effondrent ? Un tel monde est anxiogène. La perte de repères nous fragilise, et nous nous tournons vers l’extérieur pour en trouver de nouveaux. Et si la solution était ailleurs ? Et si, face à l’incertitude, la seule voie solide était celle que nous traçons nous-mêmes, à partir de qui nous sommes vraiment ? C’est l’idée que je défends dans le livre, et que j’essaie de traduire en règles d’action concrètes.
La facilité avec laquelle des cambrioleurs ont pu, en plein jour et en plein centre de Paris, voler pour plus de 80 millions de bijoux au musée du Louvre, a choqué le monde entier. Mais le plus choquant est le refus généralisé des autorités d’assumer la responsabilité de ce cambriolage. Ce refus offre une vraie leçon, en creux, de leadership.
Dans un monde de plus en plus complexe, la collaboration est devenue un objectif incontournable. Dirigeants et consultants vantent ses bénéfices : innovation accrue, partage des connaissances, agilité organisationnelle et performance collective optimisée. Pourtant, les efforts parfois très importants pour la développer donnent des résultats décevants. L’impératif de collaborer reste souvent lettre morte : chacun retourne dans son silo. Pourquoi la collaboration, dont l’intérêt est a priori si évident, est-elle si difficile ? Parce qu’elle a un coût important.
L’existence de biais cognitifs, définis comme une déviation involontaire dans la pensée logique, est un des résultats les plus ancrés de la psychologie moderne. Elle en a recensé des dizaines. Ces résultats ont contribué à instiller l’idée, désormais communément acceptée, que notre cerveau ne peut pas penser correctement sans être dévié, et que nous ne sommes donc pas des acteurs rationnels. Mais est-ce si sûr? Et si ces « déviations » n’en étaient pas vraiment? Si elles servaient un objectif important pour nous, celui d’agir en incertitude?
Dans une vidéo récente, l’économiste LFI Thomas Porcher déclarait que les entrepreneurs n’inventent rien, prétendant qu’Internet et la téléphonie mobile avaient été inventés par l’État. C’est une affirmation fréquente qui traduit une profonde méconnaissance de l’innovation et de son histoire.
Le procès de nos institutions d’enseignement supérieur est désormais ouvert depuis plusieurs années, aussi bien au titre de leur fonctionnement, de leur contribution sociétale décroissante et de leurs dérives éthiques, mais elles ne semblent pas disposées à l’entendre, et encore moins à entreprendre les changements nécessaires. Ce refus de changer, et la poursuite de pratiques désastreuses, ont conduit certains acteurs à conclure qu’elles n’étaient plus réformables, et que le salut résidait désormais dans la création de nouvelles institutions. La plus intéressante d’entre elles est sans doute l’Université d’Austin au Texas, ou UATX. Le récent discours de bienvenue à la nouvelle promotion par son président rappelait les raisons de sa création et les principes sur lesquels elle entendait s’appuyer.
Qu’est-ce qu’on intègre? Qu’est-ce qu’on sous-traite? La question est aussi ancienne que l’entreprise. Comme souvent, il n’y a jamais de réponse dans l’absolu, seulement des choix avec leurs avantages et leurs inconvénients. Mais le contexte compte aussi. Alors que depuis quarante ans, la réponse à la question était « Intégrons le moins possible et sous-traitons le plus possible », l’incertitude massive qui caractérise désormais le monde rebat les cartes et remet l’intégration verticale au premier plan des priorités.
Qui se souvient du rapport Draghi? Il y a exactement un an, il sonnait l’alarme sur le déclin dangereux de la compétitivité européenne. Il avait fait beaucoup de bruit à l’époque. Mais depuis? Rien! Il a été rapidement oublié, les politiques étant passé à autre chose. Pourtant, il reste d’actualité et résonne particulièrement dans la France de 2025 confrontée à la crise de la dette. Car si celle-ci résulte d’une dépense excessive, elle s’explique aussi par une capacité déclinante à créer de la richesse.
Un collectif ne peut pas survivre lorsqu’il est rongé par le mensonge. Cette observation, faite par le dissident Alexandre Soljenitsyne à propos de l’Union Soviétique des années 70, résonne dans la France de 2025. Car si notre démocratie n’a rien à voir avec les régimes totalitaires, elle partage avec eux une faille inquiétante : l’incapacité collective à regarder en face ses propres difficultés. Depuis des décennies, la France entretient avec sa situation économique un rapport fait de promesses impossibles et de diagnostics complaisants. Ce mensonge, qui traverse tout l’échiquier politique, constitue la véritable raison de la crise de la dette. Plus encore que ses déficits, c’est cette allergie à la vérité qui risque de transformer cette crise en déclin durable.
L’ascenseur social est en panne, tout le monde en convient. Mais si le vrai problème était plus profond ? Et si c’était la croyance elle-même en cet ascenseur — ce modèle mental fondateur de notre pacte collectif — qui était en train de disparaître ? Quand une société cesse de croire que l’effort peut payer, ce n’est pas seulement une promesse qui n’est plus tenue. C’est tout notre système qui vacille.
Parmi les nombreuses ruptures profondes que vit notre époque, l’un des plus importantes est celle de l’enseignement supérieur. Car un monde qui change, c’est aussi un monde de compétences changeantes. Et cela suppose que le monde de l’éducation change aussi, aussi bien dans ce qu’il offre que dans ce que les étudiants demandent. Et c’est là que le bât blesse.
Dans un monde gagné par l’envie de décroissance, la performance a mauvaise presse. Elle est suspecte du point de vue moral. On lui préfère la robustesse, synonyme de sobriété et de sécurité dans un monde très incertain et dangereux. Pourtant, comme toutes les dichotomies, elle masque une réalité complexe qui est que l'une ne peut aller sans l'autre.
Comment enseigner à l’heure où l’IA est déjà massivement utilisée par les étudiants… et souvent par les enseignants eux-mêmes ? Dans cet épisode, j’essaie de poser quelques repères face à un constat désormais clair : l’intelligence artificielle a déjà transformé l’enseignement supérieur, mais les institutions peinent encore à s’adapter. Je propose une piste inspirée d’une allégorie de l'historien Niall Ferguson : penser l’université comme un lieu articulant deux espaces – un cloître, sans IA, pour préserver les fondamentaux de la formation intellectuelle ; et un vaisseau, avec IA, pour explorer de nouvelles façons d’apprendre, de créer et de transmettre.
Pourquoi des dirigeants intelligents prennent des décisions aux conséquences catastrophiques? Les exemples dans l’histoire sont légion et le plus marquant d’entre eux est celui de la guerre du Vietnam. Il a été magistralement étudié par le journaliste David Halberstam. La réponse d’Halberstam? Ces dirigeants étaient plus intelligents que sages.