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Un jour, un poème
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Un jour, un poème

Author: Prisma Media

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Description

Le premier podcast quotidien de poésie. Du classique au moderne, du connu au méconnu, un poème chaque jour pour commencer la journée.

62 Episodes
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Corentin lit le poème de Charles Baudelaire, "A une passante""La rue assourdissante autour de moi hurlait.Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,Une femme passa, d'une main fastueuseSoulevant, balançant le feston et l'ourlet ;Agile et noble, avec sa jambe de statue.Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beautéDont le regard m'a fait soudainement renaître,Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !"
Anne lit le poème de Renée Vivien, "Absence""Ô Femme au cœur de qui mon triste cœur a cru,Je te convoite, ainsi qu’un trésor disparu.Je te maudis, mais en t’aimant… Mon cœur bizarreTe recherche, Émeraude admirablement rare !Que je suis exilée ! Et que pèse le temps,Malgré le beau soleil des midis éclatants !Retombant chaque soir dans un amer silence,Je pleure sur le plus grand des maux : sur l’absence !…"Renée Vivien, Dans un coin de violettes, 1910
Alexiane lit le poème de Louise Labé, "Luisant Soleil""Luisant Soleil, que tu es bienheureuxDe voir toujours de t'Amie la face !Et toi, sa soeur, qu'Endymion embrasse,Tant te repais de miel amoureux !Mars voit Vénus ; Mercure aventureuxDe Ciel en Ciel, de lieu en lieu se glace ;Et Jupiter remarque en mainte placeSes premiers ans plus gais et chaleureux.Voilà du Ciel la puissante harmonie,Qui les esprits divins ensemble lie ;Mais, s'ils avaient ce qu'ils aiment lointain,Leur harmonie et ordre irrévocableSe tournerait en erreur variable,Et comme moi travailleraient en vain."
Sabri récite le poème de Victor Hugo, Demain dès l'aube.Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombeUn bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.Victor Hugo, extrait du recueil «Les Contemplations» (1856)
Manon lit le poème de Louise Labé, "Je vis, je meurs""Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;J’ai chaud extrême en endurant froidure :La vie m’est et trop molle et trop dure.J’ai grands ennuis entremêlés de joie.Tout à un coup je ris et je larmoie,Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;Tout en un coup je sèche et je verdoie.Ainsi Amour inconstamment me mène ;Et, quand je pense avoir plus de douleur,Sans y penser je me trouve hors de peine.Puis, quand je crois ma joie être certaine,Et être au haut de mon désiré heur,Il me remet en mon premier malheur."Louise Labé, Sonnets
Thomas lit le poème de Paul Eluard, "L'Egalité des sexes""Tes yeux sont revenus d’un pays arbitraireOù nul n’a jamais su ce que c’est qu’un regardNi connu la beauté des yeux, beauté des pierres,Celle des gouttes d’eau, des perles en placards,Des pierres nues et sans squelette, ô ma statue.Le soleil aveuglant te tient lieu de miroirEt s’il semble obéir aux puissance du soirC’est que ma tête est close, ô statue abattuePar mon amour et par mes ruses de sauvage.Mon désir immobile est ton dernier soutienEt je t’emporte sans bataille, ô mon image,Rompue à ma faiblesse et prise dans mes liens."Mourir de ne pas mourir
Manon lit le poème d'Apollinaire, "Ispahan""Pour tes rosesJ'aurais faitUn voyage plus long encoreTon soleil n'est pas celuiQui luitPartout ailleursEt tes musiques qui s'accordent avec l'aubeSont désormais pour moiLa mesure de l'artD'après leur souvenirJe jugeraiMes vers les artsPlastiques et toi-mêmeVisage adoréIspahan aux musiques du matinRéveille l'odeur des roses de ses jardinsJ'ai parfumé mon âmeA la rosePour ma vie entièreIspahan grise et aux faïences bleuesComme si l'on t'avaitFaite avecDes morceaux de ciel et de terreEn laissant au milieuUn grand trou de lumièreCettePlace carrée MeïdanSchah tropGrande pour le trop petit nombreDe petits ânes trottinantEt qui savent si jolimentBraire en regardantLa barbe rougie au hennéDu Soleil qui ressembleA ces jeunes marchands barbusAbrités sous leur ombrelle blancheJe suis ici le frère des peupliersReconnaissez beaux peupliers aux fils d'EuropeÔ mes frères tremblants qui priez en AsieUn passant arqué comme une corne d'antilopePhonographePatarafesLa petite échoppe"
Thomas lit le poème de Paul Eluard, "Le plus jeune""Au plafond de la libelluleUn enfant fou s’est pendu,Fixement regarde l’herbe,Confiant lève les yeux :Le brouillard léger se lèche comme un chatQui se dépouille de ses rêves.L’enfant sait que le monde commence à peine :Tout est transparent,C’est la lune qui est au centre de la terre,C’est la verdure qui couvre le cielEt c’est dans les yeux de l’enfant,Dans ses yeux sombres et profondsComme les nuits blanchesQue naît la lumière."Capitale de la douleur (Gallimard, 1926)
Philipp lit le poème de François Coppée, "Décembre""Le hibou parmi les décombresHurle, et Décembre va finir ;Et le douloureux souvenirSur ton coeur jette encor ses ombres.Le vol de ces jours que tu nombres,L’aurais-tu voulu retenir ?Combien seront, dans l’avenir,Brillants et purs ; et combien, sombres ?Laisse donc les ans s’épuiser.Que de larmes pour un baiser,Que d’épines pour une rose !Le temps qui s’écoule fait bien ;Et mourir ne doit être rien,Puisque vivre est si peu de chose."
Margaux lit le poème de Paul Eluard, "Liberté""Sur mes cahiers d’écolierSur mon pupitre et les arbresSur le sable sur la neigeJ’écris ton nomSur toutes les pages luesSur toutes les pages blanchesPierre sang papier ou cendreJ’écris ton nomSur les images doréesSur les armes des guerriersSur la couronne des roisJ’écris ton nomSur la jungle et le désertSur les nids sur les genêtsSur l’écho de mon enfanceJ’écris ton nomSur les merveilles des nuitsSur le pain blanc des journéesSur les saisons fiancéesJ’écris ton nomSur tous mes chiffons d’azurSur l’étang soleil moisiSur le lac lune vivanteJ’écris ton nomSur les champs sur l’horizonSur les ailes des oiseauxEt sur le moulin des ombresJ’écris ton nomSur chaque bouffée d’auroreSur la mer sur les bateauxSur la montagne démenteJ’écris ton nomSur la mousse des nuagesSur les sueurs de l’orageSur la pluie épaisse et fadeJ’écris ton nomSur les formes scintillantesSur les cloches des couleursSur la vérité physiqueJ’écris ton nomSur les sentiers éveillésSur les routes déployéesSur les places qui débordentJ’écris ton nomSur la lampe qui s’allumeSur la lampe qui s’éteintSur mes maisons réuniesJ’écris ton nomSur le fruit coupé en deuxDu miroir et de ma chambreSur mon lit coquille videJ’écris ton nomSur mon chien gourmand et tendreSur ses oreilles dresséesSur sa patte maladroiteJ’écris ton nomSur le tremplin de ma porteSur les objets familiersSur le flot du feu béniJ’écris ton nomSur toute chair accordéeSur le front de mes amisSur chaque main qui se tendJ’écris ton nomSur la vitre des surprisesSur les lèvres attentivesBien au-dessus du silenceJ’écris ton nomSur mes refuges détruitsSur mes phares écroulésSur les murs de mon ennuiJ’écris ton nomSur l’absence sans désirSur la solitude nueSur les marches de la mortJ’écris ton nomSur la santé revenueSur le risque disparuSur l’espoir sans souvenirJ’écris ton nomEt par le pouvoir d’un motJe recommence ma vieJe suis né pour te connaîtrePour te nommerLiberté."Poésie et vérité 1942 (recueil clandestin)
Thomas lit le poème de Paul Verlaine, "Chanson d'automne""Les sanglots longsDes violonsDe l’automneBlessent mon coeurD’une langueurMonotone.Tout suffocantEt blême, quandSonne l’heure,Je me souviensDes jours anciensEt je pleureEt je m’en vaisAu vent mauvaisQui m’emporteDeçà, delà,Pareil à laFeuille morte."Paul Verlaine, Poèmes saturniens
Mélanie lit le poème de Mallarmé, "Brise marine""La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivresD’être parmi l’écume inconnue et les cieux !Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeuxNe retiendra ce coeur qui dans la mer se trempeÔ nuits ! ni la clarté déserte de ma lampeSur le vide papier que la blancheur défendEt ni la jeune femme allaitant son enfant.Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,Lève l’ancre pour une exotique nature !Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufragesPerdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots …Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !"Stéphane Mallarmé, Vers et Prose, 1893
Lucie et Isabelle lisent "Chant d'automne", le poème de Charles Baudelaire."IBientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !J’entends déjà tomber avec des chocs funèbresLe bois retentissant sur le pavé des cours.Tout l’hiver va rentrer dans mon être : colère,Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,Et, comme le soleil dans son enfer polaire,Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé.J’écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;L’échafaud qu’on bâtit n’a pas d’écho plus sourd.Mon esprit est pareil à la tour qui succombeSous les coups du bélier infatigable et lourd.Il me semble, bercé par ce choc monotone,Qu’on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.Pour qui ? – C’était hier l’été ; voici l’automne !Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.IIJ’aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,Douce beauté, mais tout aujourd’hui m’est amer,Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l’âtre,Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.Et pourtant aimez-moi, tendre coeur ! soyez mère,Même pour un ingrat, même pour un méchant ;Amante ou soeur, soyez la douceur éphémèreD’un glorieux automne ou d’un soleil couchant.Courte tâche ! La tombe attend ; elle est avide !Ah ! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,Goûter, en regrettant l’été blanc et torride,De l’arrière-saison le rayon jaune et doux !"Charles Baudelaire, Les fleurs du mal
Alexiane lit "La Terre est bleue", le poème de Paul Eluard"La terre est bleue comme une orangeJamais une erreur les mots ne mentent pasIls ne vous donnent plus à chanterAu tour des baisers de s’entendreLes fous et les amoursElle sa bouche d’allianceTous les secrets tous les souriresEt quels vêtements d’indulgenceÀ la croire toute nue.Les guêpes fleurissent vertL’aube se passe autour du couUn collier de fenêtresDes ailes couvrent les feuillesTu as toutes les joies solairesTout le soleil sur la terreSur les chemins de ta beauté."Paul Eluard, L'Amour la poésie
Margaux lit "Quantique des colonnes", de Paul ValéryDouces colonnes, aux Chapeaux garnis de jour, Ornés de vrais oiseaux Qui marchent sur le tour, Douces colonnes, ô L’orchestre de fuseaux ! Chacun immole son Silence à l’unisson. — Que portez-vous si haut, Égales radieuses ? — Au désir sans défaut Nos grâces studieuses !Nous chantons à la fois Que nous portons les cieux ! Ô seule et sage voix Qui chantes pour les yeux ! Vois quels hymnes candides ! Quelle sonorité Nos éléments limpides Tirent de la clarté ! Si froides et dorées Nous fûmes de nos lits Par le ciseau tirées, Pour devenir ces lys ! De nos lits de cristal Nous fûmes éveillées, Des griffes de métal Nous ont appareillées. Pour affronter la lune, La lune et le soleil, On nous polit chacune Comme ongle de l’orteil !Servantes sans genoux, Sourires sans figures, La belle devant nous Se sent les jambes pures. Pieusement pareilles, Le nez sous le bandeau Et nos riches oreilles Sourdes au blanc fardeau, Un temple sur les yeux Noirs pour l’éternité, Nous allons sans les dieux À la divinité ! Nos antiques jeunesses, Chair mate et belles ombres, Sont fières des finesses Qui naissent par les nombres ! Filles des nombres d’or, Fortes des lois du ciel, Sur nous tombe et s’endort Un dieu couleur de miel.Il dort content, le Jour, Que chaque jour offrons Sur la table d’amour Étale sur nos fronts. Incorruptibles sœurs, Mi-brûlantes, mi-fraîches, Nous prîmes pour danseurs Brises et feuilles sèches, Et les siècles par dix, Et les peuples passés, C’est un profond jadis, Jadis jamais assez ! Sous nos mêmes amours Plus lourdes que le monde Nous traversons les jours Comme une pierre l’onde ! Nous marchons dans le temps Et nos corps éclatants Ont des pas ineffables Qui marquent dans les fables…Paul Valéry, Œuvres de Paul Valéry, 1933
Thomas lit "L’aveu de Phèdre à Hippolyte", de RacineAh, cruel ! tu m’as trop entendue !Je t’en ai dit assez pour te tirer d’erreur.Eh bien ! connais donc Phèdre et toute sa fureur :J’aime ! Ne pense pas qu’au moment que je t’aime,Innocente à mes yeux, je m’approuve moi-même ;Ni que du fol amour qui trouble ma raisonMa lâche complaisance ait nourri le poison ;Objet infortuné des vengeances célestes,Je m’abhorre encor plus que tu ne me détestes.Les dieux m’en sont témoins, ces dieux qui dans mon flancOnt allumé le feu fatal à tout mon sang ;Ces dieux qui se sont fait une gloire cruelleDe séduire le cœur d’une faible mortelle.Toi-même en ton esprit rappelle le passé :C’est peu de t’avoir fui, cruel, je t’ai chassé ;J’ai voulu te paraître odieuse, inhumaine ;Pour mieux te résister, j’ai recherché ta haine.De quoi m’ont profité mes inutiles soins ?Tu me haïssais plus, je ne t’aimais pas moins ;Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes.J’ai langui, j’ai séché dans les feux, dans les larmes :Il suffit de tes yeux pour t’en persuader,Si tes yeux un moment pouvaient me regarder…Que dis-je ? Cet aveu que je te viens de faire,Cet aveu si honteux, le crois-tu volontaire ?Tremblante pour un fils que je n’osais trahir,Je te venais prier de ne le point haïr :Faibles projets d’un cœur trop plein de ce qu’il aime !Hélas ! je ne t’ai pu parler que de toi-même !Venge-toi, punis-moi d’un odieux amour :Digne fils du héros qui t’a donné le jour,Délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.La veuve de Thésée ose aimer Hippolyte !Crois-moi, ce monstre affreux ne doit point t’échapper ;Voilà mon cœur : c’est là que ta main doit frapper.Impatient déjà d’expier son offense,Au-devant de ton bras je le sens qui s’avance.Frappe : ou si tu le crois indigne de tes coups,Si ta haine m’envie un supplice si doux,Ou si d’un sang trop vil ta main serait trempée,Au défaut de ton bras prête-moi ton épée ;Donne.Racine, L’aveu de Phèdre à Hippolyte, Phèdre de Racine
Nastasia lit "Ce que dis la bouche d'ombre", de Victor HugoCrois-tu que l’eau du fleuve et les arbres des bois, S’ils n’avaient rien à dire, élèveraient la voix ? Prends-tu le vent des mers pour un joueur de flûte ? Crois-tu que l’océan, qui se gonfle et qui lutte, Serait content d’ouvrir sa gueule jour et nuit Pour souffler dans le vide une vapeur de bruit, Et qu’il voudrait rugir, sous l’ouragan qui vole, Si son rugissement n’était une parole ? Crois-tu que le tombeau, d’herbe et de nuit vêtu, Ne soit rien qu’un silence ? et te figures-tu Que la création profonde, qui compose Sa rumeur des frissons du lys et de la rose, De la foudre, des flots, des souffles du ciel bleu, Ne sait ce qu’elle dit quand elle parle à Dieu ? Crois-tu qu’elle ne soit qu’une langue épaissie ? Crois-tu que la nature énorme balbutie, Et que Dieu se serait, dans son immensité, Donné pour tout plaisir, pendant l’éternité, D’entendre bégayer une sourde-muette ? Non, l’abîme est un prêtre et l’ombre est un poëte ; Non, tout est une voix et tout est un parfum ; Tout dit dans l’infini quelque chose à quelqu’un ; Une pensée emplit le tumulte superbe. Dieu n’a pas fait un bruit sans y mêler le verbe. Tout, comme toi, gémit ou chante comme moi ; Tout parle. Et maintenant, homme, sais-tu pourquoi Tout parle ? Écoute bien. C’est que vents, ondes, flammes Arbres, roseaux, rochers, tout vit !Tout est plein d’âmes.Victor Hugo, Les contemplations, 1911
André lit "A travers l'Europe (Calligrammes)" de Guillaume ApollinaireRotsogeTon visage écarlate ton biplan transformable en hydroplanTa maison ronde où il nage un hareng saur Il me faut la clef des paupières Heureusement que nous avons vu M. Panado Et nous sommes tranquilles de ce côté-là Qu’est-ce que tu vois mon vieux M. D…90 ou 324 un homme en l’air un veau qui regarde à travers le ventre de sa mère J’ai cherché longtemps sur les routes Tant d’yeux sont clos au bord des routes Le vent fait pleurer les saussaies Ouvre ouvre ouvre ouvre ouvre Regarde mais regarde doncLe vieux se lave les pieds dans la cuvette Una volta ho inteso dire Chè vuoi Je me mis à pleurer en me souvenant de vos enfances Et toi tu me montres un violet épouvantable Ce petit tableau où il y a une voiture m’a rappelé le jourUn jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rouges Où je m’en allais à la campagne avec une charmante cheminée tenant sa chienne en laisseIl n’y en a plus tu n’as plus ton petit mirliton La cheminée fume loin de moi des cigarettes russes La chienne aboie contre les lilas La veilleuse est consumée Sur la robe ont chu des pétales Deux anneaux d’or près des sandales Au soleil se sont allumés Mais tes cheveux sont le trolley À travers l’Europe vêtue de petits feux multicoloresGuillaume Apollinaire, Poèmes de la paix et de la guerre, 1918
Timothee lit "L'albatros" de Charles BaudelaireSouvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers.A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à côté d’eux.Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule ! Lui, naguère si beau, qu’il est comique et laid ! L’un agace son bec avec un brûle-gueule, L’autre mime, en boitant, l’infirme qui volait !Le Poète est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l’archer ; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, 1861
Lucas lit "L'abeille", de Paul ValéryQuelle, et si fine, et si mortelle,Que soit ta pointe, blonde abeille,Je n’ai, sur ma tendre corbeille,Jeté qu’un songe de dentelle.Pique du sein la gourde belleSur qui l’Amour meurt ou sommeille,Qu’un peu de moi même vermeilleVienne à la chair ronde et rebelle !J’ai grand besoin d’un prompt tourment :Un mal vif et bien terminéVaut mieux qu’un supplice dormant !Soit donc mon sens illuminéPar cette infime alerte d’orSans qui l’Amour meurt ou s’endort !Paul Valéry, Œuvres de Paul Valéry, 1933
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