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Livres audio par Audiolude

Author: Audiolude

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Audiolude vous propose une sélection de livres audio classiques.

Narrateur : Alain Couchot.

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122 Episodes
Reverse
Première partie - chapitre 17 : Une forêt sous-marineProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotNous étions enfin arrivés à la lisière de cette forêt, sans doute l’une des plus belles de l’immense domaine du capitaine Nemo. Il la considérait comme étant sienne, et s’attribuait sur elle les mêmes droits qu’avaient les premiers hommes aux premiers jours du monde. D’ailleurs, qui lui eût disputé la possession de cette propriété sous-marine ? Quel autre pionnier plus hardi serait venu, la hache à la main, en défricher les sombres taillis ?Cette forêt se composait de grandes plantes arborescentes, et, dès que nous eûmes pénétré sous ses vastes arceaux, mes regards furent tout d’abord frappés d’une singulière disposition de leurs ramures, — disposition que je n’avais pas encore observée jusqu’alors.Aucune des herbes qui tapissaient le sol, aucune des branches qui hérissaient les arbrisseaux, ne rampait, ni ne se courbait, ni ne s’étendait dans un plan horizontal. Toutes montaient vers la surface de l’Océan. Pas de filaments, pas de rubans, si minces qu’ils fussent, qui ne se tinssent droit comme des tiges de fer. Les fucus et les lianes se développaient suivant une ligne rigide et perpendiculaire, commandée par la densité de l’élément qui les avait produits. Immobiles, d’ailleurs, lorsque je les écartais de la main, ces plantes reprenaient aussitôt leur position première. C’était ici le règne de la verticalité.Bientôt, je m’habituai à cette disposition bizarre, ainsi qu’à l’obscurité relative qui nous enveloppait. Le sol de la forêt était semé de blocs aigus, difficiles à éviter. La flore sous-marine m’y parut être assez complète, plus riche même qu’elle ne l’eût été sous les zones arctiques ou tropicales, où ses produits sont moins nombreux. Mais, pendant quelques minutes, je confondis involontairement les règnes entre eux, prenant des zoophytes pour des hydrophytes, des animaux pour des plantes. Et qui ne s’y fût pas trompé ? La faune et la flore se touchent de si près dans ce monde sous-marin !J’observai que toutes ces productions du règne végétal ne tenaient au sol que par un empâtement superficiel. Dépourvues de racines, indifférentes au corps solide, sable, coquillage, test ou galet, qui les supporte, elles ne lui demandent qu’un point d’appui, non la vitalité. Ces plantes ne procèdent que d’elles-mêmes, et le principe de leur existence est dans cette eau qui les soutient, qui les nourrit. La plupart, au lieu de feuilles, poussaient des lamelles de formes capricieuses, circonscrites dans une gamme restreinte de couleurs, qui ne comprenait que le rose, le carmin, le vert, l’olivâtre, le fauve et le brun. Je revis là, mais non plus desséchées comme les échantillons du Nautilus, des padines-paons, déployées en éventails qui semblaient solliciter la brise, des céramies écarlates, des laminaires allongeant leurs jeunes pousses comestibles, des néréocystées filiformes et fluxueuses, qui s’épanouissaient à une hauteur de quinze mètres, des bouquets d’acétabules, dont les tiges grandissent par le sommet, et nombre d’autres plantes pélagiennes, toutes dépourvues de fleurs. « Curieuse anomalie, bizarre élément, a dit un spirituel naturaliste, où le règne animal fleurit, et où le règne végétal ne fleurit pas ! »Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 16 : Promenade en plaineProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotCette cellule était, à proprement parler, l’arsenal et le vestiaire du Nautilus. Une douzaine d’appareils de scaphandres, suspendus à la paroi, attendaient les promeneurs.Ned Land, en les voyant, manifesta une répugnance évidente à s’en revêtir.« Mais, mon brave Ned, lui dis-je, les forêts de l’île de Crespo ne sont que des forêts sous-marines !— Bon ! fit le harponneur désappointé, qui voyait s’évanouir ses rêves de viande fraîche. Et vous, monsieur Aronnax, vous allez vous introduire dans ces habits-là ?— Il le faut bien, maître Ned.— Libre à vous, monsieur, répondit le harponneur, haussant les épaules, mais quant à moi, à moins qu’on ne m’y force, je n’entrerai jamais là-dedans.— On ne vous forcera pas, maître Ned, dit le capitaine Nemo.— Et Conseil va se risquer ? demanda Ned.— Je suis monsieur partout où va monsieur, » répondit Conseil.Sur un appel du capitaine, deux hommes de l’équipage vinrent nous aider à revêtir ces lourds vêtements imperméables, faits en caoutchouc sans couture, et préparés de manière à supporter des pressions considérables. On eût dit une armure à la fois souple et résistante. Ces vêtements formaient pantalon et veste. Le pantalon se terminait par d’épaisses chaussures, garnies de lourdes semelles de plomb. Le tissu de la veste était maintenu par des lamelles de cuivre qui cuirassaient la poitrine, la défendaient contre la poussée des eaux, et laissaient les poumons fonctionner librement ; ses manches finissaient en forme de gants assouplis, qui ne contrariaient aucunement les mouvements de la main.Il y avait loin, on le voit, de ces scaphandres perfectionnés aux vêtements informes, tels que les cuirasses de liège, les soubrevestes, les habits de mer, les coffres, etc., qui furent inventés et prônés dans le xviiie siècle.Le capitaine Nemo, un de ses compagnons, — sorte d’Hercule, qui devait être d’une force prodigieuse, — Conseil et moi, nous eûmes bientôt revêtu ces habits de scaphandres. Il ne s’agissait plus que d’emboîter notre tête dans sa sphère métallique. Mais, avant de procéder à cette opération, je demandai au capitaine la permission d’examiner les fusils qui nous étaient destinés.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 15 : Une invitation par lettreProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotLe lendemain, 9 novembre, je ne me réveillai qu’après un long sommeil de douze heures. Conseil vint, suivant son habitude, savoir « comment monsieur avait passé la nuit, » et lui offrir ses services. Il avait laissé son ami le Canadien dormant comme un homme qui n’aurait fait que cela toute sa vie.Je laissai le brave garçon babiller à sa fantaisie, sans trop lui répondre. J’étais préoccupé de l’absence du capitaine Nemo pendant notre séance de la veille, et j’espérais le revoir aujourd’hui.Bientôt j’eus revêtu mes vêtements de byssus. Leur nature provoqua plus d’une fois les réflexions de Conseil. Je lui appris qu’ils étaient fabriqués avec les filaments lustrés et soyeux qui rattachent aux rochers les « jambonneaux, » sortes de coquilles très abondantes sur les rivages de la Méditerranée. Autrefois, on en faisait de belles étoffes, des bas, des gants, car ils étaient à la fois très moelleux et très chauds. L’équipage du Nautilus pouvait donc se vêtir à bon compte, sans rien demander ni aux cotonniers, ni aux moutons, ni aux vers à soie de la terre.Lorsque je fus habillé, je me rendis au grand salon. Il était désert.Je me plongeai dans l’étude de ces trésors de conchyliologie, entassés sous les vitrines. Je fouillai aussi de vastes herbiers, emplis des plantes marines les plus rares, et qui, quoique desséchées, conservaient leurs admirables couleurs. Parmi ces précieuses hydrophytes, je remarquai des cladostèphes verticillées, des padines-paon, des caulerpes à feuilles de vigne, des callithamnes granifères, de délicates céramies à teintes écarlates, des agares disposées en éventails, des acétabules, semblables à des chapeaux de champignons très-déprimés, et qui furent longtemps classées parmi les zoophytes, enfin toute une série de varechs.La journée entière se passa, sans que je fusse honoré de la visite du capitaine Nemo. Les panneaux du salon ne s’ouvrirent pas. Peut-être ne voulait-on pas nous blaser sur ces belles choses.La direction du Nautilus se maintint à l’est-nord-est, sa vitesse à douze milles, sa profondeur entre cinquante et soixante mètres.Le lendemain, 10 novembre, même abandon, même solitude. Je ne vis personne de l’équipage. Ned et Conseil passèrent la plus grande partie de la journée avec moi. Ils s’étonnèrent de l’inexplicable absence du capitaine. Cet homme singulier était-il malade ? Voulait-il modifier ses projets à notre égard ?Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 14 : Le Fleuve noirProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotLa portion du globe terrestre occupée par les eaux est évaluée à trois millions huit cent trente-deux milles cinq cent cinquante-huit myriamètres carrés, soit plus de trente-huit millions d’hectares. Cette masse liquide comprend deux milliards deux cent cinquante millions de milles cubes, et formerait une sphère d’un diamètre de soixante lieues dont le poids serait de trois quintillions de tonneaux. Et, pour comprendre ce nombre, il faut se dire que le quintillion est au milliard ce que le milliard est à l’unité, c’est-à-dire qu’il y a autant de milliards dans un quintillion que d’unités dans un milliard. Or, cette masse liquide, c’est à peu près la quantité d’eau que verseraient tous les fleuves de la terre pendant quarante mille ans.Durant les époques géologiques, à la période du feu succéda la période de l’eau. L’Océan fut d’abord universel. Puis, peu à peu, dans les temps siluriens, des sommets de montagnes apparurent, des îles émergèrent, disparurent sous des déluges partiels, se montrèrent à nouveau, se soudèrent, formèrent des continents et enfin les terres se fixèrent géographiquement telles que nous les voyons. Le solide avait conquis sur le liquide trente-sept millions six cent cinquante-sept milles carrés, soit douze mille neuf cent seize millions d’hectares.La configuration des continents permet de diviser les eaux en cinq grandes parties : l’Océan glacial arctique, l’Océan glacial antarctique, l’Océan indien, l’Océan atlantique, l’Océan pacifique.L’Océan pacifique s’étend du nord au sud entre les deux cercles polaires, et de l’ouest à l’est entre l’Asie et l’Amérique sur une étendue de cent quarante-cinq degrés en longitude. C’est la plus tranquille des mers ; ses courants sont larges et lents, ses marées médiocres, ses pluies abondantes. Tel était l’Océan que ma destinée m’appelait d’abord à parcourir dans les plus étranges conditions.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Une nouvelle de Guy de MaupassantProposée par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"M. Panard était un homme prudent qui avait peur de tout dans la vie. Il avait peur des tuiles, des chutes, des fiacres, des chemins de fer, de tous les accidents possibles, mais surtout des maladies.Il avait compris, avec une extrême prévoyance, combien notre existence est menacée sans cesse par tout ce qui nous entoure. La vue d’une marche le faisait penser aux entorses, aux bras et aux jambes cassés, la vue d’une vitre aux affreuses blessures par le verre, la vue d’un chat, aux yeux crevés ; et il vivait avec une prudence méticuleuse, une prudence réfléchie, patiente, complète.Il disait à sa femme, une brave femme qui se prêtait à ses manies : « Songe, ma bonne, comme il faut peu de chose pour estropier ou pour détruire un homme. C’est effrayant d’y penser. On sort bien portant ; on traverse une rue, une voiture arrive et vous passe dessus ; ou bien on s’arrête cinq minutes sous une porte cochère à causer avec un ami ; et on ne sent pas un petit courant d’air qui vous glisse le long du dos et vous flanque une fluxion de poitrine. Et cela suffit. C’en est fait de vous. »Il s’intéressait d’une façon particulière à l’article Santé publique, dans les journaux ; connaissait le chiffre normal des morts en temps ordinaire, suivant les saisons, la marche et les caprices des épidémies, leurs symptômes, leur durée probable, la manière de les prévenir, de les arrêter, de les soigner. Il possédait une bibliothèque médicale de tous les ouvrages relatifs aux traitements mis à la portée du public par les médecins vulgarisateurs et pratiques.Il avait cru à Raspail, à l’homéopathie, à la médecine dosimétrique, à la métallothérapie, à l’électricité, au massage, à tous les systèmes qu’on suppose infaillibles, pendant six mois, contre tous les maux. Aujourd’hui, il était un peu revenu de sa confiance, et il pensait avec sagesse que le meilleur moyen d’éviter les maladies consiste à les fuir."Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Une nouvelle de Guy de MaupassantProposée par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotDans cette nouvelle, un Allemand atteint de tuberculose attend la mort sur un banc, en lisant son maître Schopenhauer. Il se lie d'amitié avec le narrateur, un Français. Le narrateur admire Schopenhauer, qu'il considère comme "le plus grand saccageur de rêves" de l'humanité, mais il est aussi touché par la solitude et le désespoir du malade. Il assiste à ses derniers moments, où il exprime sa haine de la vie et son mépris des illusions. Cette nouvelle est un chef-d'œuvre de réalisme et de pessimisme, qui montre l'influence de Schopenhauer sur la pensée de Maupassant. Elle nous fait réfléchir sur le sens de l'existence, la souffrance, la mort et le bonheur.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Une nouvelle de Guy de MaupassantProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotLa Chambre 11 est une nouvelle publiée en 1884 dans le journal Gil Blas, puis reprise dans le recueil Toine. Elle raconte l’histoire de Madame Amandon, une femme mariée à un haut fonctionnaire de province, qui mène une double vie sous le nom de Mademoiselle Clarisse. Elle choisit ses amants parmi les officiers de la garnison locale, qu’elle reçoit discrètement dans la chambre 11 de l’auberge du Cheval d’Or. Mais un jour, son stratagème va se retourner contre elle, lorsqu’un drame se produit dans la chambre où elle a rendez-vous avec son amant. La nouvelle met en scène le thème de l’adultère, cher à Maupassant, avec un ton ironique et cruel. L’auteur dépeint le caractère ardent, décidé et organisé de Madame Amandon, qui contraste avec son apparence modeste et chaste. Il montre aussi les risques et les conséquences de la tromperie, qui peut conduire au scandale et à la mort. La Chambre 11 est une œuvre qui mêle réalisme et suspense, et qui révèle la maîtrise narrative de Maupassant.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Une nouvelle de Guy de MaupassantProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotCette nouvelle, publiée en 1884 dans la revue Gil Blas, raconte la rencontre fortuite du narrateur avec un ancien camarade de collège, le comte Jean des Barrets, dans une brasserie parisienne. Le narrateur est surpris de voir à quel point son ami a changé : il est devenu un bockeur, un habitué de brasserie qui passe ses journées à boire des bocks de bière et à fumer une pipe. Il apprend que des Barrets a sombré dans cette déchéance volontaire à cause d’un traumatisme d’enfance : il a assisté à une scène violente entre ses parents, où son père, ruiné par ses frasques, a battu sa mère pour obtenir sa fortune. Depuis, des Barrets n’a plus goût à la vie et se laisse mourir à petit feu.La nouvelle est une peinture réaliste et pessimiste de la société du XIXe siècle, où l’argent, le vice et la violence dominent. Maupassant montre la misère morale et physique d’un homme qui a renoncé à son rang, à son honneur et à son avenir, et qui s’enferme dans une routine monotone et dégradante. Le contraste entre le passé brillant et le présent sordide de des Barrets est accentué par le souvenir du narrateur, qui se rappelle de lui comme d’un élève doué et joyeux. Le style de Maupassant est sobre et efficace, il utilise des dialogues vifs et des descriptions précises pour faire vivre les personnages et les lieux. Il crée une atmosphère sombre et oppressante, où le rire se mêle à la tristesse et à l’horreur.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 13 : Quelques chiffresProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotUn instant après, nous étions assis sur un divan du salon, le cigare aux lèvres. Le capitaine mit sous mes yeux une épure qui donnait les plan, coupe et élévation du Nautilus. Puis il commença sa description en ces termes :« Voici, monsieur Aronnax, les diverses dimensions du bateau qui vous porte. C’est un cylindre très-allongé, à bouts coniques. Il affecte sensiblement la forme d’un cigare, forme déjà adoptée à Londres dans plusieurs constructions du même genre. La longueur de ce cylindre, de tête en tête, est exactement de soixante-dix mètres, et son bau, à sa plus grande largeur, est de huit mètres. Il n’est donc pas construit tout à fait au dixième comme vos steamers de grande marche, mais ses lignes sont suffisamment longues et sa coulée assez prolongée, pour que l’eau déplacée s’échappe aisément et n’oppose aucun obstacle a sa marche.« Ces deux dimensions vous permettent d’obtenir par un simple calcul la surface et le volume du Nautilus. Sa surface comprend mille onze mètres carrés et quarante-cinq centièmes ; son volume, quinze cents mètres cubes et deux dixièmes, — ce qui revient à dire qu’entièrement immergé, il déplace ou pèse quinze cents mètres cubes ou tonneaux.« Lorsque j’ai fait les plans de ce navire destiné à une navigation sous-marine, j’ai voulu, qu’en équilibre dans l’eau il plongeât des neuf dixièmes, et qu’il émergeât d’un dixième seulement. Par conséquent, il ne devait déplacer dans ces conditions que les neuf dixièmes de son volume, soit treize cent cinquante-six mètres cubes et quarante-huit centièmes, c’est-à-dire ne peser que ce même nombre de tonneaux. J’ai donc dû ne pas dépasser ce poids en le construisant suivant les dimensions sus-dites.« Le Nautilus se compose de deux coques, l’une intérieure, l’autre extérieure, réunies entre elles par des fers en T qui lui donnent une rigidité extrême. En effet, grâce à cette disposition cellulaire, il résiste comme un bloc, comme s’il était plein. Son bordé ne peut céder ; il adhère par lui-même et non par le serrage des rivets, et l’homogénéité de sa construction, due au parfait assemblage des matériaux, lui permet de défier les mers les plus violentes.« Ces deux coques sont fabriquées en tôle d’acier dont la densité par rapport à l’eau est de sept, huit dixièmes. La première n’a pas moins de cinq centimètres d’épaisseur, et pèse trois cent quatre-vingt-quatorze tonneaux quatre-vingt-seize centièmes. La seconde enveloppe, la quille, haute de cinquante centimètres et large de vingt-cinq, pesant, à elle seule, soixante-deux tonneaux, la machine, le lest, les divers accessoires et aménagements, les cloisons et les étrésillons intérieurs, ont un poids de neuf cent soixante et un tonneaux soixante-deux centièmes, qui, ajoutés aux trois cent quatre-vingt-quatorze tonneaux et quatre-vingt-seize centièmes, forment le total exigé de treize cent cinquante-six tonneaux et quarante-huit centièmes. Est-ce entendu ?Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 12 : Tout par l'électricitéProposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot« Monsieur, dit le capitaine Nemo, me montrant les instruments suspendus aux parois de sa chambre, voici les appareils exigés par la navigation du Nautilus. Ici comme dans le salon, je les ai toujours sous les yeux, et ils m’indiquent ma situation et ma direction exacte au milieu de l’Océan. Les uns vous sont connus, tels que le thermomètre qui donne la température intérieure du Nautilus ; le baromètre, qui pèse le poids de l’air et prédit les changements de temps ; l’hygromètre, qui marque le degré de sécheresse de l’atmosphère ; le storm-glass, dont le mélange, en se décomposant, annonce l’arrivée des tempêtes ; la boussole, qui dirige ma route ; le sextant, qui par la hauteur du soleil m’apprend ma latitude ; les chronomètres, qui me permettent de calculer ma longitude ; et enfin des lunettes de jour et de nuit, qui me servent à scruter tous les points de l’horizon, quand le Nautilus est remonté à la surface des flots.— Ce sont les instruments habituels au navigateur, répondis-je, et j’en connais l’usage. Mais en voici d’autres qui répondent sans doute aux exigences particulières du Nautilus. Ce cadran que j’aperçois et que parcourt une aiguille mobile, n’est-ce pas un manomètre ?— C’est un manomètre, en effet. Mis en communication avec l’eau dont il indique la pression extérieure, il me donne par là même la profondeur à laquelle se maintient mon appareil.— Et ces sondes d’une nouvelle espèce ?— Ce sont des sondes thermométriques qui rapportent la température des diverses couches d’eau.— Et ces autres instruments dont je ne devine pas l’emploi ?— Ici, monsieur le professeur, je dois vous donner quelques explications, dit le capitaine Nemo. Veuillez donc m’écouter. »Il garda le silence pendant quelques instants, puis il dit :« Il est un agent puissant, obéissant, rapide, facile, qui se plie à tous les usages et qui règne en maître à mon bord. Tout se fait par lui. Il m’éclaire, il m’échauffe, il est l’âme de mes appareils mécaniques. Cet agent, c’est l’électricité.— L’électricité ! m’écriai-je assez surpris.— Oui, monsieur.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 11 : Le NautilusProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotLe capitaine Nemo se leva. Je le suivis. Une double porte, ménagée à l’arrière de la salle, s’ouvrit, et j’entrai dans une chambre de dimension égale à celle que je venais de quitter.C’était une bibliothèque.C’était une bibliothèque. De hauts meubles en palissandre noir, incrustés de cuivres, supportaient sur leurs larges rayons un grand nombre de livres uniformément reliés. Ils suivaient le contour de la salle et se terminaient à leur partie inférieure par de vastes divans, capitonnés de cuir marron, qui offraient les courbes les plus confortables. De légers pupitres mobiles, en s’écartant ou se rapprochant à volonté, permettaient d’y poser le livre en lecture. Au centre se dressait une vaste table, couverte de brochures, entre lesquelles apparaissaient quelques journaux déjà vieux. La lumière électrique inondait tout cet harmonieux ensemble, et tombait de quatre globes dépolis à demi engagés dans les volutes du plafond. Je regardais avec une admiration réelle cette salle si ingénieusement aménagée, et je ne pouvais en croire mes yeux.« Capitaine Nemo, dis-je à mon hôte, qui venait de s’étendre sur un divan, voilà une bibliothèque qui ferait honneur à plus d’un palais des continents, et je suis vraiment émerveillé, quand je songe qu’elle peut vous suivre au plus profond des mers.— Où trouverait-on plus de solitude, plus de silence, monsieur le professeur ? répondit le capitaine Nemo. Votre cabinet du Muséum vous offre-t-il un repos aussi complet ?— Non, monsieur, et je dois ajouter qu’il est bien pauvre auprès du vôtre. Vous possédez là six ou sept mille volumes…— Douze mille, monsieur Aronnax. Ce sont les seuls liens qui me rattachent à la terre. Mais le monde a fini pour moi le jour où mon Nautilus s’est plongé pour la première fois sous les eaux. Ce jour-là, j’ai acheté mes derniers volumes, mes dernières brochures, mes derniers journaux, et depuis lors, je veux croire que l’humanité n’a plus ni pensé, ni écrit. Ces livres, monsieur le professeur, sont d’ailleurs à votre disposition, et vous pourrez en user librement. »Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 10 : L'homme des eauxProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotC’était le commandant du bord qui parlait ainsi.À ces mots, Ned Land se releva subitement. Le stewart, presque étranglé sortit en chancelant sur un signe de son maître ; mais tel était l’empire du commandant à son bord, que pas un geste ne trahit le ressentiment dont cet homme devait être animé contre le Canadien. Conseil, intéressé malgré lui, moi stupéfait, nous attendions en silence le dénouement de cette scène.Le commandant, appuyé sur l’angle de la table, les bras croisés, nous observait avec une profonde attention. Hésitait-il à parler ? Regrettait-il ces mots qu’il venait de prononcer en français ? On pouvait le croire.Après quelques instants d’un silence qu’aucun de nous ne songea à interrompre :« Messieurs, dit-il d’une voix calme et pénétrante, je parle également le français, l’anglais, l’allemand et le latin. J’aurais donc pu vous répondre dès notre première entrevue, mais je voulais vous connaître d’abord, réfléchir ensuite. Votre quadruple récit, absolument semblable au fond, m’a affirmé l’identité de vos personnes. Je sais maintenant que le hasard a mis en ma présence monsieur Pierre Aronnax, professeur d’histoire naturelle au Muséum de Paris, chargé d’une mission scientifique à l’étranger, Conseil son domestique, et Ned Land, d’origine canadienne, harponneur à bord de la frégate l’Abraham-Lincoln, de la marine nationale des États-Unis d’Amérique. »Je m’inclinai d’un air d’assentiment. Ce n’était pas une question que me posait le commandant. Donc, pas de réponse à faire. Cet homme s’exprimait avec une aisance parfaite, sans aucun accent. Sa phrase était nette, ses mots justes, sa facilité d’élocution remarquable. Et cependant, je ne « sentais » pas en lui un compatriote.Il reprit la conversation en ces termes :« Vous avez trouvé sans doute, monsieur, que j’ai longtemps tardé à vous rendre cette seconde visite. C’est que, votre identité reconnue, je voulais peser mûrement le parti à prendre envers vous. J’ai beaucoup hésité. Les plus fâcheuses circonstances vous ont mis en présence d’un homme qui a rompu avec l’humanité. Vous êtes venu troubler mon existence…— Involontairement, dis-je.— Involontairement ? répondit l’inconnu, en forçant un peu sa voix. Est-ce involontairement que l’Abraham-Lincoln me chasse sur toutes les mers ? Est-ce involontairement que vous avez pris passage à bord de cette frégate ? Est-ce involontairement que vos boulets ont rebondi sur la coque de mon navire ? Est-ce involontairement que maître Ned Land m’a frappé de son harpon ? »Je surpris dans ces paroles une irritation contenue. Mais, à ces récriminations j’avais une réponse toute naturelle à faire, et je la fis.« Monsieur, dis-je, vous ignorez sans doute les discussions qui ont eu lieu à votre sujet en Amérique et en Europe. Vous ne savez pas que divers accidents, provoqués par le choc de votre appareil sous-marin, ont ému l’opinion publique dans les deux continents. Je vous fais grâce des hypothèses sans nombre par lesquelles on cherchait à expliquer l’inexplicable phénomène dont seul vous aviez le secret. Mais sachez qu’en vous poursuivant jusque sur les hautes mers du Pacifique, l’Abraham-Lincoln croyait chasser quelque puissant monstre marin dont il fallait à tout prix délivrer l’Océan. »Un demi-sourire détendit les lèvres du commandant, puis, d’un ton plus calme :« Monsieur Aronnax, répondit-il, oseriez-vous affirmer que votre frégate n’aurait pas poursuivi et canonné un bateau sous-marin aussi bien qu’un monstre ? »Cette question m’embarrassa, car certainement le commandant Farragut n’eût pas hésité. Il eût cru de son devoir de détruire un appareil de ce genre tout comme un narwal gigantesque.« Vous comprenez donc, monsieur, reprit l’inconnu, que j’ai le droit de vous traiter en ennemis. »Je ne répondis rien, et pour cause. À quoi bon discuter une proposition semblable, quand la force peut détruire les meilleurs arguments.« J’ai longtemps hésité, reprit le commandant. Rien ne m’obligeait à vous donner l’hospitalité. Si je devais me séparer de vous, je n’avais aucun intérêt à vous revoir. Je vous remettais sur la plate-forme de ce navire qui vous avait servi de refuge. Je m’enfonçais sous les mers, et j’oubliais que vous aviez jamais existé. N’était-ce pas mon droit ?— C’était peut-être le droit d’un sauvage, répondis-je, ce n’était pas celui d’un homme civilisé.— Monsieur le professeur, répliqua vivement le commandant, je ne suis pas ce que vous appelez un homme civilisé ! J’ai rompu avec la société toute entière pour des raisons que moi seul j’ai le droit d’apprécier. Je n’obéis donc point à ses règles, et je vous engage à ne jamais les invoquer devant moi ! »Ceci fut dit nettement. Un éclair de colère et de dédain avait allumé les yeux de l’inconnu, et dans la vie de cet homme, j’entrevis un passé formidable. Non-seulement il s’était mis en-dehors des lois humaines, mais il s’était fait indépendant, libre dans la plus rigoureuse acception du mot, hors de toute atteinte ! Qui donc oserait le poursuivre au fond des mers, puisque, à leur surface, il déjouait les efforts tentés contre lui ? Quel navire résisterait au choc de son monitor sous-marin ? Quelle cuirasse, si épaisse qu’elle fût, supporterait les coups de son éperon ? Nul, entre les hommes, ne pouvait lui demander compte de ses œuvres. Dieu, s’il y croyait, sa conscience, s’il en avait une, étaient les seuls juges dont il put dépendre.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 9 : Les colères de Ned landProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotQuelle fut la durée de ce sommeil, je l’ignore ; mais il dut être long, car il nous reposa complètement de nos fatigues. Je me réveillai le premier. Mes compagnons n’avaient pas encore bougé, et demeuraient étendus dans leur coin comme des masses inertes.À peine relevé de cette couche passablement dure, je sentis mon cerveau dégagé, mon esprit net. Je recommençai alors un examen attentif de notre cellule.Rien n’était changé à ses dispositions intérieures. La prison était restée prison, et les prisonniers, prisonniers. Cependant le stewart, profitant de notre sommeil, avait desservi la table. Rien n’indiquait donc une modification prochaine dans cette situation, et je me demandai sérieusement si nous étions destinés à vivre indéfiniment dans cette cage.Cette perspective me sembla d’autant plus pénible que, si mon cerveau était libre de ses obsessions de la veille, je me sentais la poitrine singulièrement oppressée. Ma respiration se faisait difficilement. L’air lourd ne suffisait plus au jeu de mes poumons. Bien que la cellule fût vaste, il était évident que nous avions consommé en grande partie l’oxygène qu’elle contenait. En effet, chaque homme dépense en une heure, l’oxygène renfermé dans cent litres d’air et cet air, chargé alors d’une quantité presque égale d’acide carbonique, devient irrespirable.Il était donc urgent de renouveler l’atmosphère de notre prison, et, sans doute aussi, l’atmosphère du bateau sous-marin.Là se posait une question à mon esprit. Comment procédait le commandant de cette demeure flottante ? Obtenait-il de l’air par des moyens chimiques, en dégageant par la chaleur l’oxygène contenu dans du chlorate de potasse, et en absorbant l’acide carbonique par la potasse caustique ? Dans ce cas, il devait avoir conservé quelques relations avec les continents, afin de se procurer les matières nécessaires à cette opération. Se bornait-il seulement à emmagasiner l’air sous de hautes pressions dans des réservoirs, puis à le répandre suivant les besoins de son équipage ? Peut-être. Ou, procédé plus commode, plus économique, et par conséquent plus probable, se contentait-il de revenir respirer à la surface des eaux, comme un cétacé, et de renouveler pour vingt-quatre heures sa provision d’atmosphère ? Quoi qu’il en soit, et quelle que fût la méthode, il me paraissait prudent de l’employer sans retard.En effet, j’étais déjà réduit à multiplier mes inspirations pour extraire de cette cellule le peu d’oxygène qu’elle renfermait, quand, soudain, je fus rafraîchi par un courant d’air pur et tout parfumé d’émanations salines. C’était bien la brise de mer, vivifiante et chargée d’iode ! J’ouvris largement la bouche, et mes poumons se saturèrent de fraîches molécules. En même temps, je sentis un balancement, un roulis de médiocre amplitude, mais parfaitement déterminable. Le bateau, le monstre de tôle venait évidemment de remonter à la surface de l’Océan pour y respirer à la façon des baleines. Le mode de ventilation du navire était donc parfaitement reconnu.Lorsque j’eus absorbé cet air pur à pleine poitrine, je cherchai le conduit, « l’aérifère », si l’on veut, qui laissait arriver jusqu’à nous cette bienfaisante effluve, et je ne tardai pas à le trouver. Au-dessus de la porte s’ouvrait un trou d’aérage laissant passer une fraîche colonne d’air, qui renouvelait ainsi l’atmosphère appauvrie de la cellule.J’en étais là de mes observations, quand Ned et Conseil s’éveillèrent presque en même temps, sous l’influence de cette aération revivifiante. Ils se frottèrent les yeux, se détirèrent les bras et furent sur pied en un instant.« Monsieur a bien dormi ? me demanda Conseil avec sa politesse quotidienne.Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 8 : Mobilis in MobileProposé par audiolude.frNarrateur : Alain CouchotCet enlèvement, si brutalement exécuté, s’était accompli avec la rapidité de l’éclair. Mes compagnons et moi, nous n’avions pas eu le temps de nous reconnaître. Je ne sais ce qu’ils éprouvèrent en se sentant introduits dans cette prison flottante ; mais, pour mon compte, un rapide frisson me glaça l’épiderme. À qui avions-nous affaire ? Sans doute à quelques pirates d’une nouvelle espèce qui exploitaient la mer à leur façon.À peine l’étroit panneau fut-il refermé sur moi, qu’une obscurité profonde m’enveloppa. Mes yeux, imprégnés de la lumière extérieure, ne purent rien percevoir. Je sentis mes pieds nus se cramponner aux échelons d’une échelle de fer. Ned Land et Conseil, vigoureusement saisis, me suivaient. Au bas de l’échelle, une porte s’ouvrit et se referma immédiatement sur nous avec un retentissement sonore.Nous étions seuls. Où ? Je ne pouvais le dire, à peine l’imaginer. Tout était noir, mais d’un noir si absolu, qu’après quelques minutes, mes yeux n’avaient encore pu saisir une de ces lueurs indéterminées qui flottent dans les plus profondes nuits.Cependant, Ned Land, furieux de ces façons de procéder, donnait un libre cours à son indignation.« Mille diables ! s’écriait-il, voilà des gens qui en remontreraient aux Calédoniens pour l’hospitalité ! Il ne leur manque plus que d’être anthropophages ! Je n’en serais pas surpris, mais je déclare que l’on ne me mangera pas sans que je proteste !— Calmez-vous, ami Ned, calmez-vous, répondit tranquillement Conseil. Ne vous emportez pas avant l’heure. Nous ne sommes pas encore dans la rôtissoire !Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 7 : Une baleine d'espèce inconnueProposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"Bien que j’eusse été surpris par cette chute inattendue, je n’en conservai pas moins une impression très-nette de mes sensations.Je fus d’abord entraîné à une profondeur de vingt pieds environ. Je suis bon nageur, sans prétendre égaler Byron et Edgar Poe, qui sont des maîtres, et ce plongeon ne me fit point perdre la tête. Deux vigoureux coups de talons me ramenèrent à la surface de la mer.Mon premier soin fut de chercher des yeux la frégate. L’équipage s’était-il aperçu de ma disparition ? L’Abraham-Lincoln avait-il viré de bord ? Le commandant Farragut mettait-il une embarcation à la mer ? Devais-je espérer d’être sauvé ?Les ténèbres étaient profondes. J’entrevis une masse noire qui disparaissait vers l’est, et dont les feux de position s’éteignirent dans l’éloignement. C’était la frégate. Je me sentis perdu.« À moi ! à moi ! » criai-je, en nageant vers l’Abraham-Lincoln d’un bras désespéré.Mes vêtements m’embarrassaient. L’eau les collait à mon corps, ils paralysaient mes mouvements. Je coulais ! je suffoquais !…« À moi ! »Ce fut le dernier cri que je jetai. Ma bouche s’emplit d’eau. Je me débattis, entraîné dans l’abîme…Soudain, mes habits furent saisis par une main vigoureuse, je me sentis violemment ramené à la surface de la mer, et j’entendis, oui, j’entendis ces paroles prononcées à mon oreille :« Si monsieur veut avoir l’extrême obligeance de s’appuyer sur mon épaule, monsieur nagera beaucoup plus à son aise. »Je saisis d’une main le bras de mon fidèle Conseil.« Toi ! dis-je, toi !— Moi-même, répondit Conseil, et aux ordres de monsieur.— Et ce choc t’a précipité en même temps que moi à la mer ?— Nullement. Mais étant au service de monsieur, j’ai suivi monsieur ! »Le digne garçon trouvait cela tout naturel !« Et la frégate ? demandai-je.— La frégate ! répondit Conseil en se retournant sur le dos, je crois que monsieur fera bien de ne pas trop compter sur elle !— Tu dis ?— Je dis qu’au moment où je me précipitai à la mer, j’entendis les hommes de barre s’écrier : « L’hélice et le gouvernail sont brisés… »— Brisés ?— Oui ! brisés par la dent du monstre. C’est la seule avarie, je pense, que l’Abraham-Lincoln ait éprouvée. Mais, circonstance fâcheuse pour nous, il ne gouverne plus.— Alors, nous sommes perdus !"Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 6 : A toute vapeur !Proposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"À ce cri, l’équipage entier se précipita vers le harponneur, commandant, officiers, maîtres, matelots, mousses, jusqu’aux ingénieurs qui quittèrent leur machine, jusqu’aux chauffeurs qui abandonnèrent leurs fourneaux.L’ordre de stopper avait été donné, et la frégate ne courait plus que sur son erre.L’obscurité était profonde alors, et quelques bons que fussent les yeux du Canadien, je me demandais comment il avait vu et ce qu’il avait pu voir. Mon cœur battait à se rompre.Mais Ned Land ne s’était pas trompé, et tous, nous aperçûmes l’objet qu’il indiquait de la main.À deux encablures de l’Abraham-Lincoln et de sa hanche de tribord, la mer semblait être illuminée par dessus. Ce n’était point un simple phénomène de phosphorescence, et l’on ne pouvait s’y tromper. Le monstre, immergé à quelques toises de la surface des eaux, projetait cet éclat très-intense, mais inexplicable, que mentionnaient les rapports de plusieurs capitaines. Cette magnifique irradiation devait être produite par un agent d’une grande puissance éclairante. La partie lumineuse décrivait sur la mer un immense ovale très-allongé, au centre duquel se condensait un foyer ardent dont l’insoutenable éclat s’éteignait par dégradations successives.« Ce n’est qu’une agglomération de molécules phosphorescentes, s’écria l’un des officiers.— Non, monsieur, répliquai-je avec conviction. Jamais les pholades ou les salpes ne produisent une si puissante lumière. Cet éclat est de nature essentiellement électrique… D’ailleurs, voyez, voyez ! il se déplace ! il se meut en avant, en arrière ! il s’élance sur nous ! »Un cri général s’éleva de la frégate.« Silence ! dit le commandant Farragut. La barre au vent, toute ! Machine en arrière ! »Les matelots se précipitèrent à la barre, les ingénieurs à leur machine. La vapeur fut immédiatement renversée et l’Abraham-Lincoln, abattant sur bâbord, décrivit un demi-cercle.« La barre droite ! Machine en avant ! » cria le commandant Farragut.Ces ordres furent exécutés, et la frégate s’éloigna rapidement du foyer lumineux.Je me trompe. Elle voulut s’éloigner, mais le surnaturel animal se rapprocha avec une vitesse double de la sienne.Nous étions haletants. La stupéfaction, bien plus que la crainte nous tenait muets et immobiles. L’animal nous gagnait en se jouant. Il fit le tour de la frégate qui filait alors quatorze nœuds, et l’enveloppa de ses nappes électriques comme d’une poussière lumineuse. Puis il s’éloigna de deux ou trois milles, laissant une traînée phosphorescente comparable aux tourbillons de vapeur que jette en arrière la locomotive d’un express. Tout d’un coup, des obscures limites de l’horizon, où il alla prendre son élan, le monstre fonça subitement vers l’Abraham-Lincoln avec une effrayante rapidité, s’arrêta brusquement à vingt pieds de ses précintes, s’éteignit, — non pas en s’abîmant sous les eaux, puisque son éclat ne subit aucune dégradation, — mais soudainement et comme si la source de ce brillant effluve se fût subitement tarie ! Puis, il reparut de l’autre côté du navire, soit qu’il l’eût tourné, soit qu’il eût glissé sous sa coque. À chaque instant une collision pouvait se produire, qui nous eût été fatale."Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 5 : A l'aventure !Proposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"Le voyage de l’Abraham-Lincoln, pendant quelque temps, ne fut marqué par aucun incident. Cependant une circonstance se présenta, qui mit en relief la merveilleuse habileté de Ned Land, et montra quelle confiance on devait avoir en lui.Au large des Malouines, le 30 juin, la frégate communiqua avec des baleiniers américains, et nous apprîmes qu’ils n’avaient eu aucune connaissance du narwal. Mais l’un d’eux, le capitaine du Monroe, sachant que Ned Land était embarqué à bord de l’Abraham-Lincoln, demanda son aide pour chasser une baleine qui était en vue. Le commandant Farragut, désireux de voir Ned Land à l’œuvre, l’autorisa à se rendre à bord du Monroe. Et le hasard servit si bien notre Canadien, qu’au lieu d’une baleine, il en harponna deux d’un coup double, frappant l’une droit au cœur, et s’emparant de l’autre après une poursuite de quelques minutes !Décidément, si le monstre a jamais affaire au harpon de Ned Land, je ne parierai pas pour le monstre.La frégate prolongea la côte sud-est de l’Amérique avec une rapidité prodigieuse. Le 3 juillet, nous étions à l’ouvert du détroit de Magellan, à la hauteur du cap des Vierges. Mais le commandant Farragut ne voulut pas prendre ce sinueux passage, et manœuvra de manière à doubler le cap Horn.L’équipage lui donna raison à l’unanimité. Et en effet, était-il probable que l’on pût rencontrer le narwal dans ce détroit resserré ? Bon nombre de matelots affirmaient que le monstre n’y pouvait passer, « qu’il était trop gros pour cela ! »Le 6 juillet, vers trois heures du soir, I’Abraham Lincoln, à quinze milles dans le sud, doubla cet îlot solitaire, ce roc perdu à l’extrémité du continent américain, auquel des marins hollandais imposèrent le nom de leur villa natale, le cap Horn. La route fut donnée vers le nord-ouest, et le lendemain, l’hélice de la frégate battit enfin les eaux du Pacifique.« Ouvre l’œil ! ouvre l’œil ! » répétaient les matelots de l’Abraham Lincoln.Et ils l’ouvraient démesurément. Les yeux et les lunettes, un peu éblouis, il est vrai, par la perspective de deux mille dollars, ne restèrent pas un instant au repos. Jour et nuit, on observait la surface de l’Océan, et les nyctalopes, dont la faculté de voir dans l’obscurité accroissait les chances de cinquante pour cent, avaient beau jeu pour gagner la prime."Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre 4 : Ned LandProposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"Le commandant Farragut était un bon marin, digne de la frégate qu’il commandait. Son navire et lui ne faisaient qu’un. Il en était l’âme. Sur la question du cétacé, aucun doute ne s’élevait dans son esprit, et il ne permettait pas que l’existence de l’animal fût discutée à son bord. Il y croyait comme certaines bonnes femmes croient au Léviathan, — par foi, non par raison. Le monstre existait, il en délivrerait les mers, il l’avait juré. C’était une sorte de chevalier de Rhodes, un Dieudonné de Gozon, marchant à la rencontre du serpent qui désolait son île. Ou le commandant Farragut tuerait le narwal, ou le narwal tuerait le commandant Farragut. Pas de milieu.Les officiers du bord partageaient l’opinion de leur chef. Il fallait les entendre causer, discuter, disputer, calculer les diverses chances d’une rencontre, et observer la vaste étendue de l’Océan. Plus d’un s’imposait un quart volontaire dans les barres de perroquet, qui eût maudit une telle corvée en toute autre circonstance. Tant que le soleil décrivait son arc diurne, la mâture était peuplée de matelots auxquels les planches du pont brûlaient les pieds, et qui n’y pouvaient tenir en place ! Et cependant, l’Abraham-Lincoln ne tranchait pas encore de son étrave les eaux suspectes du Pacifique.Quant à l’équipage, il ne demandait qu’à rencontrer la licorne, à la harponner, à la hisser à bord, à la dépecer. Il surveillait la mer avec une scrupuleuse attention. D’ailleurs, le commandant Farragut parlait d’une certaine somme de deux mille dollars, réservée à quiconque, mousse ou matelot, maître ou officier, signalerait l’animal. Je laisse à penser si les yeux s’exerçaient à bord de l’Abraham-Lincoln.Pour mon compte, je n’étais pas en reste avec les autres, et je ne laissais à personne ma part d’observations quotidiennes. La frégate aurait eu cent fois raison de s’appeler l’Argus. Seul entre tous, Conseil protestait par son indifférence touchant la question qui nous passionnait, et détonait sur l’enthousiasme général du bord.J’ai dit que le commandant Farragut avait soigneusement pourvu son navire d’appareils propres à pêcher le gigantesque cétacé. Un baleinier n’eût pas été mieux armé. Nous possédions tous les engins connus, depuis le harpon qui se lance à la main, jusqu’aux flèches barbelées des espingoles et aux balles explosibles des canardières. Sur le gaillard d’avant s’allongeait un canon perfectionné, se chargeant par la culasse, très-épais de parois, très-étroit d’âme, et dont le modèle doit figurer à l’Exposition universelle de 1867. Ce précieux instrument, d’origine américaine, envoyait sans se gêner, un projectile conique de quatre kilogrammes à une distance moyenne de seize kilomètres.Donc, l’Abraham-Lincoln ne manquait d’aucun moyen de destruction. Mais il avait mieux encore. Il avait Ned Land, le roi des harponneurs.Ned Land était un Canadien, d’une habileté de main peu commune, et qui ne connaissait pas d’égal dans son périlleux métier. Adresse et sang-froid, audace et ruse, il possédait ces qualités à un degré supérieur, et il fallait être une baleine bien maligne, ou un cachalot singulièrement astucieux pour échapper à son coup de harpon.Ned Land avait environ quarante ans. C’était un homme de grande taille — plus de six pieds anglais — vigoureusement bâti, l’air grave, peu communicatif, violent parfois, et très-rageur quand on le contrariait. Sa personne provoquait l’attention, et surtout la puissance de son regard qui accentuait singulièrement sa physionomie."Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Première partie - chapitre trois : Comme il plaira à MonsieurProposé par audiolude.frNarrateur : Alain Couchot"Trois secondes avant l’arrivée de la lettre de J.-B. Hobson, je ne songeais pas plus à poursuivre la Licorne qu’à tenter le passage du Nord-Ouest. Trois secondes après avoir lu la lettre de l’honorable secrétaire de la marine, je comprenais enfin que ma véritable vocation, l’unique but de ma vie, était de chasser ce monstre inquiétant et d’en purger le monde.Cependant, je revenais d’un pénible voyage, fatigué, avide de repos. Je n’aspirais plus qu’à revoir mon pays, mes amis, mon petit logement du Jardin des Plantes, mes chères et précieuses collections ! Mais rien ne put me retenir. J’oubliai tout, fatigues, amis, collections, et j’acceptai sans plus de réflexions l’offre du gouvernement américain.« D’ailleurs, pensai-je, tout chemin ramène en Europe, et la Licorne sera assez aimable pour m’entraîner vers les côtes de France ! Ce digne animal se laissera prendre dans les mers d’Europe, — pour mon agrément personnel, — et je ne veux pas rapporter moins d’un demi mètre de sa hallebarde d’ivoire au Muséum d’histoire naturelle. »Mais, en attendant, il me fallait chercher ce narwal dans le nord de l’océan Pacifique ; ce qui, pour revenir en France, était prendre le chemin des antipodes.« Conseil ! » criai-je d’une voix impatiente.Conseil était mon domestique. Un garçon dévoué qui m’accompagnait dans tous mes voyages ; un brave Flamand que j’aimais et qui me le rendait bien, un être phlegmatique par nature, régulier par principe, zélé par habitude, s’étonnant peu des surprises de la vie, très-adroit de ses mains, apte à tout service, et, en dépit de son nom, ne donnant jamais de conseils, — même quand on ne lui en demandait pas.À se frotter aux savants de notre petit monde du Jardin des Plantes, Conseil en était venu à savoir quelque chose. J’avais en lui un spécialiste, très-ferré sur la classification en histoire naturelle, parcourant avec une agilité d’acrobate toute l’échelle des embranchements, des groupes, des classes, des sous-classes, des ordres, des familles, des genres, des sous-genres, des espèces et des variétés. Mais sa science s’arrêtait là. Classer, c’était sa vie, et il n’en savait pas davantage. Très versé dans la théorie de la classification, peu dans la pratique, il n’eût pas distingué, je crois, un cachalot d’une baleine ! Et cependant, quel brave et digne garçon !Conseil, jusqu’ici et depuis dix ans, m’avait suivi partout où m’entraînait la science. Jamais une réflexion de lui sur la longueur ou la fatigue d’un voyage. Nulle objection à boucler sa valise pour un pays quelconque, Chine ou Congo, si éloigné qu’il fût. Il allait là comme ici, sans en demander davantage. D’ailleurs d’une belle santé qui défiait toutes les maladies ; des muscles solides, mais pas de nerfs, pas l’apparence de nerfs, — au moral, s’entend.Ce garçon avait trente ans, et son âge était à celui de son maître comme quinze est à vingt. Qu’on m’excuse de dire ainsi que j’avais quarante ans.Seulement, Conseil avait un défaut. Formaliste enragé, il ne me parlait jamais qu’à la troisième personne — au point d’en être agaçant.« Conseil ! » répétai-je, tout en commençant d’une main fébrile mes préparatifs de départ."Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
Nouvelle de Guy de Maupassant proposée par audiolude.fr , narrateur : Alain Couchot"Je n’étais point revenu à Virelogne depuis quinze ans. J’y retournai chasser, à l’automne, chez mon ami Serval, qui avait enfin fait reconstruire son château, détruit par les Prussiens.J’aimais ce pays infiniment. Il est des coins du monde délicieux qui ont pour les yeux un charme sensuel. On les aime d’un amour physique. Nous gardons, nous autres que séduit la terre, des souvenirs tendres pour certaines sources, certains bois, certains étangs, certaines collines, vus souvent et qui nous ont attendris à la façon des événements heureux. Quelquefois même la pensée retourne vers un coin de forêt, ou un bout de berge, ou un verger poudré de fleurs, aperçus une seule fois, par un jour gai, et restés en notre cœur comme ces images de femmes rencontrées dans la rue, un matin de printemps, avec une toilette claire et transparente, et qui nous laissent dans l’âme et dans la chair un désir inapaisé, inoubliable, la sensation du bonheur coudoyé.À Virelogne, j’aimais toute la campagne, semée de petits bois et traversée par des ruisseaux qui couraient dans le sol comme des veines, portant le sang à la terre. On pêchait là-dedans des écrevisses, des truites et des anguilles ! Bonheur divin ! On pouvait se baigner par places, et on trouvait souvent des bécassines dans les hautes herbes qui poussaient sur les bords de ces minces cours d’eau.J’allais, léger comme une chèvre, regardant mes deux chiens fourrager devant moi. Serval, à cent mètres sur ma droite, battait un champ de luzerne. Je tournai les buissons qui forment la limite du bois des Saudres, et j’aperçus une chaumière en ruines.Tout à coup, je me la rappelai telle que je l’avais vue pour la dernière fois, en 1869, propre, vêtue de vignes, avec des poules devant la porte. Quoi de plus triste qu’une maison morte, avec son squelette debout, délabré, sinistre ?Je me rappelai aussi qu’une bonne femme m’avait fait boire un verre de vin là-dedans, un jour de grande fatigue, et que Serval m’avait dit alors l’histoire des habitants. Le père, vieux braconnier, avait été tué par les gendarmes. Le fils, que j’avais vu autrefois, était un grand garçon sec qui passait également pour un féroce destructeur de gibier. On les appelait les Sauvage.Était-ce un nom ou un sobriquet ?"Become a supporter of this podcast: https://www.spreaker.com/podcast/livres-audio-par-audiolude--4151072/support.
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