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Author: Zéro Virgule

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Description

Penser le travail. C’est la promesse de ce podcast.
La justice sociale et la démocratie peuvent-elles être instaurées en entreprise ? Comment sortir de la spirale du désengagement des salariés ? Peut-on s’accomplir dans son emploi ? Comment agir, comment réagir face aux dérives managériales ?…
Autant de questions, et bien d’autres, que le podcast Zéro Virgule se propose de poser à celles et ceux qui pensent le travail.
29 Episodes
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Le dernier épisode de la première saison de Zéro Virgule est consacré à l’impact des nouvelles technologies sur l’emploi. Quelle réalité se cache derrière les discours apocalyptiques ou utopistes du remplacement des emplois par des machines ? C’est à cette question et bien d’autres que nous allons répondre avec Juan Sebastian Carbonell, sociologue et auteur du livre Le futur du travail, paru en 2022 aux éditions Amsterdam. Extraits : 🗣️ “Ce n’est pas la première fois que l’on parle des menaces des changements technologiques et de la disparition de l’emploi. Que se cache-t-il derrière ce message ? Il faut se rendre compte qu’il y a des acteurs qui portent ce discours là et qui ont un intérêt à porter ce discours là. Je les décompose en 3 ces acteurs là.  Les journalistes, qui s’attachent à susciter de l’intérêt autour des dernières modes. Les futurologues, dont le métier est de formuler ce que sera l’avenir du travail dans les prochaines années. C’est un métier intéressant mais qui se heurte à une limite très concrète : il est très difficile de savoir ce que sera le monde du travail d’ici 2 ou 3 ans. Troisième acteur, qui n’est pas des moindres car il est à l’origine de ces discours sur la fin du travail, c’est les entreprises et les entrepreneurs du secteur du numérique décrivant quelque chose qu’ils veulent faire advenir.” 🗣️ “Les nouvelles technologies ont cet effet paradoxal de pouvoir dégrader les conditions de travail. Il y a par exemple le cas des micro travailleurs qui sont ces travailleurs en ligne auxquels on attribue des tâches extrêmement parcellaires - contourner des images sur internet, retranscrire des bouts de textes…- payés quelques centimes d’euros par tâche. Dans ce cas là, les nouvelles technologies ne permettent pas un travail moins pénible, un travail davantage épanouissant. D’un autre côté, l’intelligence artificielle favorise ce que l’on appelle le management algorithmique, c’est-à-dire ce management impersonnel qui se charge de dicter la façon d’accomplir le travail et à quel rythme. Donc, on voit que les nouvelles technologies ne rendent pas le travail moins pénible. D’ailleurs si autant de gens sont descendus dans la rue c’est car le travail est devenu plus pénible qu’auparavant.” Ressources : [Livre] Le futur du travail [Livre] Les désordres du travail [Livre] Le nouvel esprit du salariat [Article] Intelligence artificielle : « A chaque révolution industrielle a été proclamée la disparition du travail » [Article] Juan Sebastian Carbonell : « Les ouvriers n’ont pas disparu ; mais au lieu de fabriquer des objets, ils les déplacent » [Article] Faire son salaire Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Quelle réalité se cache derrière le mythe de l’entrepreneur visionnaire ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Anthony Galluzzo, maître de conférences à l’université de Saint-Étienne et auteur du livre Le mythe de l'entrepreneur Défaire l'imaginaire de la Silicon Valley paru aux éditions La Découverte. Extraits : “Avec le mythe du génie de l’entrepreneur visionnaire, les employés deviennent secondaires, ils ne sont plus que des instruments” “En mon sens on ne peut qualifier personne de génie. Le génie est une représentation romantique de l’existence. Quand on parle de génie on parle d’un phénomène spontané, de quelqu’un immensément talentueux et dont l’origine du talent ne pourrait s’expliquer par des facteurs objectifs, par tout un ensemble de détermination. On ne dit pas d’un génie que c’est quelqu’un qui est né au bon endroit au bon moment, qui a bénéficié de tout un ensemble d’éléments favorables à son apprentissage, à son éclosion et à sa prospérité. Le génie est quelqu’un devant lequel on est admiratif et dont on ne cherche pas à comprendre l’origine de la position dans le jeu social, l’origine de ce que l’on appelle son talent. On s’émerveille de quelqu’un qui doit tout à une mystérieuse force intérieure. On touche à quelque chose de très religieux.” Ressources : [Livre] Le mythe de l'entrepreneur Défaire l'imaginaire de la Silicon Valley [Livre] La fabrique du consommateur Une histoire de la société marchande Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Quel rôle joue l’emploi dans l’entrée et la sortie de la délinquance ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Valerian Benazeth, enseignant-chercheur à l’Université de Paris-Saclay et chercheur associé au Cesdip. Extrait :  🗣️ “Pour sortir de la délinquance, le travail est un formidable opérateur de changement mais tout dépend de sa qualité. Est-ce que l’on s’y sent épanoui ? Envisage-t-on une carrière ? A-t-on des relations positives ? Le revenu est-il suffisant au moins pour ses besoins primaires ?” Ressources : [Vidéo] Désistance, par Valérian Benazet [Article] Itinéraire des processus de désistance [Thèse] Comment s'épuise le crime : contextes, parcours et représentations des processus de désistance sur le territoire parisien [Site internet] www.desistance.fr Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Le management moderne est-il devenu un management totalitaire vouant un culte à la performance individuelle ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd'hui avec Violaine des Courières, journaliste et autrice du livre Le management totalitaire paru en 2023 chez Albin Michel. Extraits :  🗣️ “Tout est fait en entreprise pour que le salarié pense qu’il est le problème ou le seul responsable de sa réussite et de l’atteinte des objectifs qu’on lui assigne sans prise en compte des éléments de contexte, de conjecture ou de secteur.” 🗣️ “La base du terrorisme des actionnaires est de ne rien connaître des entreprises dans lesquelles ils investissent. Ensuite, ce terrorisme se manifeste par une présence de plus en plus grande, par une pression toujours plus importante qui brouille la vue du dirigeant et le réduit au statut de salarié.” 🗣️ “L’idéologie de la performance que véhiculent les fonds d’investissement n’est plus basée uniquement sur des critères financiers mais aussi sur des critères extra financiers. Cela se traduit sur le terrain par des objectifs comportementaux demandés aux salariés. Le salarié doit incarner des valeurs lui permettant d’être plus performant.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Comment se matérialise la domination masculine au travail ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Haude Rivoal, sociologue et autrice du livre La fabrique des masculinités au travail paru chez La Dispute en 2021. Extraits :  🗣️ “Il y a une différence (et une hiérarchie) qui se rejoue entre les sexes, où les qualités dites « masculines » sont plus valorisées que les qualités dites « féminines ». En tout cas dans le monde du travail, c’est plus valorisé d’être ferme et autoritaire que d’être empathique. Et les clichés de genre sur cette question ont la vie dure. Même quand une femme est dans une position de pouvoir, les hommes vont chercher à la tester. Aucune femme n’y échappe quelle que soit sa fonction. C’est ce qu’explique notamment Sheryl Sandberg, actuelle numéro deux de Facebook, dans son livre En avant toutes. Elle y décrit les obstacles franchis durant sa carrière et montre que ce n’est pas tant l’idée de performance en elle-même qui est à interroger, que l’effort pour y parvenir qui est différent selon les sexes. On va souvent tester les femmes, pas nécessairement sur leurs capacités professionnelles mais pour voir si elles supportent la pression que nécessitent les positions de pouvoir.” 🗣️ “On a une forme d’obsession contemporaine pour « l’empowerment » des femmes.  Nombre de femmes s’organisent en réseaux, dans leurs entreprises et en dehors. On ne peut que s’en réjouir. Mais dans ces groupes d’empowerment se dessine souvent un système qui tend à vouloir s’aligner sur un modèle masculin posé comme neutre. Souvent sur un modèle très viriliste où les qualités de pouvoir, de combativité, de compétitivité et d’autorité sont valorisées. Mais est-ce une bonne nouvelle de faire des femmes des hommes « comme les autres », violentes et avides de pouvoir, alors qu’un certain nombre d’hommes eux-mêmes aspirent à une autre société – moins violente et déjouant les logiques de pouvoir ? On a besoin de contre-modèle, comme l’ancienne 1ère ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern qui dans son discours nous dit : « j’espère que j’ai pu vous montrer que vous pouvez être anxieuse, sensible, gentille et avoir le cœur sur la main, vous pouvez être une mère ou non, vous pouvez être une intello, une pleurnicharde, vous pouvez être toutes ces choses, et être un leader, comme moi ». Il est possible de faire autrement.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Le télétravail favorise t-il vraiment l’autonomie des travailleurs ? Et, si oui, cela se fait-il au détriment du collectif de l'entreprise ? C’est à ces questions, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Caroline Diard, Professeure en management des Ressources Humaines et Droit de l'ESC Amiens. Extraits : 🗣️ “Le télétravail a fait apparaître de nouvelles formes de contrôles qui ne sont pas liées au télétravail en lui-même mais aux relations managériales. Il y a ainsi des gens qui se sont mis dans des situations d’auto-contrôle, c’est-à-dire qu’ils ont d’eux-mêmes, par exemple, fait du reporting. L’individu se place alors dans une situation telle qu’il se sent obligé de prouver qu’il travaille.” 🗣️“Dans les formes de contrôle, il y a le contrôle par le comportement. Lorsque l’on est à distance, on ne peut plus l’exercer et on va le compenser par une sorte de contrôle par le résultat, on va demander aux salariés de faire des reportings, on va contrôler les livrables, on va négocier des objectifs concertés.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
A une époque où les entreprises ont de plus en plus d’emprise sur les salariés, à une époque où la loyauté envers son entreprise est gage de promotion interne… Peut-on réellement se dresser face à elles ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec notre invité Thibaud Brière, auteur du livre Toxic Management sorti en 2021 aux éditions Robert Laffont. Extrait : 🗣️ “La transparence des entreprises permettrait d’apporter une vie politique plus saine, moins corrompue. La transparence de la vie politique est directement liée au degré de transparence de la vie économique. La moralisation de la vie politique ne peut que s’accompagner d’une protection accrue de l’effort de mise à jour de la réalité du fonctionnement des grandes entreprises, de leurs pratiques commerciales, de leurs méthodes managériales. Il y a un intérêt public direct à renforcer l’exigence de transparence des entreprises. Plus de transparence dans nos entreprises permettrait une vie politique plus saine, moins corrompue”. Ressources : [Site] toxicmanagement.fr [Site] mlalerte.org [Article] Affaire UBS: Nicolas Forissier, le "chemin de croix" d'un lanceur d'alerte [Article] Trois lanceurs d’alerte licenciés à la SNCF Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Qu’est-ce que le coaching individuel vient-il faire dans nos entreprises ? Quels sont ses limites et paradoxes ? C’est à ces questions, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Scarlett Salman, sociologue et autrice du livre Aux bons soins du capitalisme Le coaching en entreprise paru en 2021 aux Presses de Science Po. Extrait : 🗣️ “Si l’on se place à un niveau collectif, le coaching individuel en entreprise exerce une fonction palliative, c’est-à-dire qu’il traite les symptômes et non les causes. C’est une forme de soutien à court terme et à l'échelle de l’individu mais, par exemple, l’organisation du travail n’est pas discutée en coaching individuel. La focale est uniquement mise sur les capacités personnelles à s’adapter voire sur la personnalité du coaché. La fonction palliative du coaching c'est ce qui va amener l’organisation à se défausser d’une réflexion et d’une discussion collective sur ses modes de fonctionnement. “ Ressources : [Livre] Aux bons soins du capitalisme [Livre] Les managers de l’âme [Livre] Contre le développement personnel Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Quelles sont les répercussions pour les facteurs et les factrices des multiples réorganisations de La Poste ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Nicolas Jounin, sociologue et auteur du livre Le caché de La Poste paru en 2021 aux éditions La Découverte. Extraits : 🗣️ “Je ne connais pas beaucoup de facteurs ou de factrices qui se réjouissent des réorganisations de La Poste car elles contribuent toujours à un allongement de la durée de la tournée et donc à un allongement de la journée de travail.” 🗣️ “Il y a un décalage croissant entre le travail prescrit et le travail réel, entre les procédures prévues pour la distribution du courrier et ce que font effectivement les facteurs car ceux-ci essaient malgré tout de rentrer dans les durées prévues par la Poste pour les tournées et font ce qui est nécessaire pour y arriver c’est-à-dire qu’ils cessent de respecter un certain nombre de prescriptions.” 🗣️ “Il y a des transformations très fortes à La Poste depuis une quinzaine d’années qui rejouent une partition assez ancienne qui de mon point de vue est une partition taylorienne.”
Comment se manifeste un burn-out ? Et comment ne plus en être victime ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Corinne Le Bars autrice du livre Réussir son burn-out sorti en 2022 aux éditions Eres relatant le récit de 7 personnes ayant transformé l’épreuve du burn-out professionnel en ressource pour les autres. Extraits : 🗣️ “Le burn-out est un enchaînement de ruptures.  Une rupture avec ce que l’on espérait de son poste, de l’idéal de sa profession.  Une rupture avec un manager ou des collègues, car dans tous les cas il y a des personnes impliquées directement ou indirectement dans un burn-out, soit par incompétence soit par maladresse. On ne fait pas un burn-out car on aime trop son travail et on ne sait pas s’arrêter, il y a toute une organisation qui génère cet épuisement, une organisation portée par des hommes et des femmes. Il y a aussi une rupture physique, physiologique car à un moment donné le corps lâche et il lâche avec une grande brutalité mais sans doute pour nous sauver car on ne l’a pas écouté pendant des mois voire des années. On va avoir un infarctus, un AVC, un cancer, une phlébite… Autant de choses graves qui peuvent nous conduire à la mort et qui nous obligent à rompre avec le travail. Il y a enfin une rupture relationnelle, sociale car le burnout va conduire à un arrêt de travail long. On ne va plus sortir de chez nous, on ne va plus avoir aucune énergie pour faire quoi que ce soit, on va se désocialiser. La dépression n’est pas la cause du burn-out mais elle est la conséquence.” 🗣️“Le burn-out est une longue maladie, voire même une maladie chronique de l’estime de soi. L’estime, la confiance, l’amour de soi sont tombés tellement bas que l’on a ensuite pour une durée longue voire pour toujours une très grande difficulté à les voir remonter. On a le sentiment de n’être plus rien.” 🗣️“Edgar Morin nous dit que lorsqu’il y a une crise, il y a un révélateur, une révélation de quelque chose. Le burn-out est une crise qui touche une personne qui va révéler un dysfonctionnement au sein de l’organisation de travail. Mais la crise peut-être aussi un effecteur c’est-à-dire qu’elle va changer les choses.”
La politique du chiffre nuit-elle au service public ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Marion Guenot, chargée de recherche au CNRS et autrice de l’article Des chiffres en bataille. Évaluer la lutte contre « l’économie souterraine » - étude s’intéressant à la gouvernance par les nombres des Groupes d’intervention régionaux de la police judiciaire. Extraits : 🗣️ “La politique du chiffre est sans nul doute la première source de perte de sens du métier. Cela donne l’impression aux agents de travailler pour un institut de statistiques. On demande aux agents de tordre leur activité sur le terrain. Un exemple caricatural est celui d’un individu qui casse 10 voitures dans une rue. On demande alors de faire une affaire par voiture pour augmenter les taux. On demande aussi aux agents de compter différemment leur activité. Ce qui avait été dénoncé par un syndicat policier c’est que, dans un commissariat, toutes les opérations de contrôle sur la voie publique, quel que soit le motif, devaient être enregistrées comme des opérations de contrôle pour les rodéos urbains. Cela a permis à l’arrivée d’avoir de gros chiffres pour la nouvelle effraction à la mode. Ce sont des logiques diamétralement contraires à celles pour lesquelles les agents sont entrés dans la police. La fabrication et la communication par le Ministère de l’intérieur des chiffres se fait au détriment de la qualité du service public car ces chiffres ne sont pas neutres. Ils portent la marque de la managérialisation des services publics et d’un gouvernement très vertical par les indicateurs.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
L’intensification du travail que nous constatons et mesurons depuis les années 1980 est-elle compatible avec le travail bien fait ? L’est-elle également avec l’allongement de la durée du temps de travail ? C’est à ces questions, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Corinne Gaudart, directrice de recherche au CNRS, ergonome et co-autrice avec Serge Volkoff du livre Le Travail pressé paru en 2022 aux éditions Les Petits Matins. Extrait : 🗣️ “Est-ce que le travail bien fait est compatible avec l’intensification du travail ? On peut y arriver grâce aux ressources individuelles et collectives mais est-ce que l’on y arrive durablement ? Est-ce que l’on arrive à tenir ce rythme de faire vite et bien sur le long terme ? Je ne le pense pas. A mon sens le travail bien fait est un travail soutenable. Le travail bien fait c’est aussi prendre en compte la faisabilité et les conditions de réalisation du travail et pas seulement s’assurer qu’un produit soit de bonne qualité.  Un travail soutenable est un travail biocompatible, c’est-à-dire adapté aux propriétés fonctionnelles de notre organisme et à l’évolution de ces propriétés au fil du temps. C’est aussi un travail socio compatible, c’est-à-dire favorable à l’épanouissement dans les sphères familiales et sociales et à la maîtrise d’un projet de vie. C’est enfin un travail qui est ergo compatible, c’est-à-dire qui permet un libre jeu de l’activité humaine propice à l’élaboration de stratégies de travail efficientes.”
Qu’est-ce que le travail nous apprend sur l’état de notre société ? Et d’ailleurs, qu’est-ce que signifie le mot travail ? C’est à ces questions, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Marie-Anne Dujarier, professeure de sociologie à l’Université Paris Cité dont le dernier ouvrage intitulé Troubles dans le travail, paru en 2021 aux éditions des Presses Universitaires de France, pointe les équivoques sur le sens du mot « travail ». Extrait : 🗣️ “L’usage du mot travail le plus problématique politiquement c’est lorsque le mot travail est associé à une morale ou une valeur, c’est lorsque l’on fait du travail une valeur. Là je reste perplexe car si le mot travail est polysémique c’est car il charrie presque autant de valeurs que de significations. [...] C’est là dessus que la manipulation est possible. C’est à dire qu’au nom de la valeur travail, lorsque par exemple cette expression est prononcée du point de vue des politiques publiques plutôt néolibérales, on peut obtenir des hommes et des femmes qu’ils acceptent des conditions de travail extrêmement dégradées ou de faire des choses qu’ils ou elles réprouvent.”
Chaque année 50 000 à 80 000 nouveaux cas de cancer en France seraient d’origine professionnelle. Le cancer est même la première cause de décès par le travail en Europe. Mais pourquoi en parle-t-on si peu ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Anne Marchand, sociologue, historienne, codirectrice du groupement d’intérêt scientifique sur les cancers d’origine professionnelle en Seine-Saint-Denis, chercheuse associée au Centre d’histoire sociale des mondes contemporains et autrice du livre Mourir de son travail aujourd'hui paru en 2022 aux éditions de l’Atelier. Extrait : 🗣️ “Dans un contexte concurrentiel ou de recherche de dividende, la santé au travail n’est pas toujours prioritaire. Il faut pourtant rappeler qu’en France aujourd’hui 11% des salariés sont exposés à des cancérogènes dans le cadre de leur travail. [...] Il serait bon de se poser la question du type de production et du type de travail que l’on veut. Faut-il par exemple poursuivre la production de plastique quand on sait qu’il est impossible d’en débarrasser l’environnement ? Produire du plastique c’est soumettre des salariés à des expositions toxiques mais aussi des consommateurs. Produire du plastique c’est empoisonner la faune, la flore, nos cours d’eau, nos mers.”
Qu’est-ce qui explique le rejet massif de la réforme des retraites ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Danièle Linhart, sociologue et directrice de recherches émérite au CNRS. Extrait : 🗣️ “Tenir au travail est devenu quelque chose qui dévore, qui submerge, qui dépasse complètement les salariés qui ont besoin de trouver des ressources exceptionnelles pour y arriver. Donc, dans ce cadre là, l’idée que l’on va unilatéralement prolonger de 2 à 3 ans la peine vécue est inacceptable car c’est redoubler le sentiment d’impuissance, c’est montrer que l’on ne tient aucunement compte de ce que les travailleurs peuvent vivre et qu’ils n’ont le droit de rien partager, de ne rien dire. C’est une injustice phénoménale.”
Quel regard porter sur les vagues successives de réformes touchant l’assurance-chômage ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Rémy Giemza, juriste et ancien salarié de Pôle emploi. Extraits : 🗣️ “Les dernières réformes de l’assurance chômage n’améliorent ni le marché du travail ni la situation des chômeurs. La plupart des chômeurs de longue durée sont des personnes n’ayant pas eu accès à un niveau d’étude suffisant. Ce sont ces personnes qui ont le plus besoin de chômage dans la durée pour retrouver un emploi. Il n’y a pas d’amélioration pour ces personnes.” 🗣️ “Nous sommes aux alentours de 4 à 5 millions de personnes soit sans activité, soit dans une situation de grande précarité. Il n’y a pas malheureusement, et c’est une déception très grande, de vrai net retour à l’emploi ou d’amélioration de l’emploi en France.” 🗣️ “Pour moi ces réformes sur l’assurance-chômage ont une seule utilité. Ce n’est pas de sauver le système de protection sociale mais c’est de faire du marketing politique. En ce sens, c'est une grande déception.” 🗣️  “Le gouvernement a pu s'engouffrer dans la brèche des réformes du chômage car le chômage n’intéresse personne. Le gouvernement n’aime pas les chômeurs et les Français non plus n’aiment pas les chômeurs. On a une opinion qui est totalement fausse en France du statut du chômage. On est rempli de clichés sur le chômage. […] Le chômage en France n’est jamais choisi. Il est subi.”
Comment sortir de l’ennui au travail ?  C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Thomas Simon, enseignant-chercheur et auteur d’une étude sur l’ambivalence de l’ennui en réunion. Extraits : 🗣️ “Le sujet de l’ennui au travail est un problème qui est contourné car il est identifié comme ne pouvant pas avoir lieu dans le temps de l’entreprise. C’est difficile d’en parler, c’est difficile de mettre des mots sur cet état affectif.” 🗣️ “Parmi les stratégies pour masquer son ennui au travail, on va tenter de jouer le rôle de la personne affairée, il y a alors une mise en scène de soi en entreprise. C’est ce que le sociologue Erving Goffman a théorisé comme le “semblant de travail”, c’est-à-dire que l’on fait semblant d’être occupé en multipliant des activités superflues, dérisoires, pour combler un manque d’activité.[..] La mise en scène de soi est la conséquence du regard d’autrui.” 🗣️ “L’ennui court est salvateur, normal, lié à une sorte d’humanité. Il y a un moment où tout bascule et où l’ennui devient pernicieux. Cette bascule est liée à la longueur et la répétition de l’ennui qui crée l’agacement et la colère.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Faut-il craindre l’usage de pratiques de développement personnel par des managers ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Thierry Jobard, auteur de l’ouvrage “Contre le développement personnel” paru en 2021 aux éditions Rue de l’échiquier. Extraits :  🗣️ “En lisant les livres de développement personnel, j’ai été stupéfait. D’une forme de mépris et d’indifférence je suis passé à une forme de colère car j’ai eu l’impression que l’on prenait les gens pour des cons et ça ne me plaît pas du tout.” 🗣️ “On en est venu à une vision du travail dans laquelle l’individu n’est pas seulement là pour accomplir une tâche et ensuite rentrer chez lui mais pour s’investir, s’investir totalement, corps et âme. On va lui demander non pas seulement d’avoir des compétences mais d’avoir tel ou tel type de qualité personnelle, il va falloir être réactif, résilient, agile. On va lui demander aussi de disposer d’un certain nombre de savoir-être. Tout devient non plus une simple affaire de travail à accomplir mais d’investissement de soi dans le travail. C’est la subjectivité de l’individu qui est mise à contribution. S’il arrive un problème, l'individu va se retourner contre lui-même et le monde du travail va se retourner contre lui.”
Comment redonner du sens au travail ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Thomas Coutrot, statisticien, économiste et co-auteur avec Coralie Perez du livre Redonner du sens au travail Une aspiration révolutionnaire paru en 2022 aux éditions du Seuil. Extrait : 🗣️ “La probabilité de tomber en dépression si l’on continue de travailler malgré une perte de sens au travail est multipliée par 2 et ce que l’on soit cadre ou ouvrier. Ce n’est pas un privilège de riche cette question du sens du travail, elle est importante à tous les niveaux de la hiérarchie sociale. Travailler alors que l’on ne trouve pas de sens à son travail est un facteur de dépression, un facteur d’absentéisme maladie. L’effondrement du sens au travail peut amener un effondrement de la santé.” Crédits : Musique : Lobo Loco - Free Canjon Guitar Illustration : Nicolas Oules
Lean, approche agile, entreprise libérée, holacratie, organisations opales, sociétés à mission… Il existe aujourd’hui quantité de nouveaux modes de management présentés comme particulièrement innovants. Mais le sont-ils vraiment ? C’est à cette question, et bien d’autres, que nous allons répondre aujourd’hui avec Suzy Canivenc, enseignante-chercheuse en Communication et Management à la chaire Futurs de l’Industrie et du travail de Mines Paris et également autrice du livre Les nouveaux modes de management et d’organisation - Innovation ou effet de mode ? paru en 2022 aux Presses des Mines. Extraits : 🗣️ “Les nouveaux modèles de management et d’organisation n’ont au final rien de nouveau. Ils renvoient à une suite de courants organisationnels dont les premières conceptions théoriques remontent aux années 1920 avec l’école des relations humaines.” 🗣️ “L’innovation managériale et organisationnelle tient moins aux modèles utilisés qu’à la façon dont on les met en œuvre et qu’à la finalité que l’on poursuit. Un même courant organisationnel, que ce soit le lean, l’agilité ou l’holacratie, peut autant engendrer des pratiques innovantes qu’être l’objet d’un simple effet de mode. J’encourage les entreprises à s’en emparer pleinement pour faire bouger l’organisation au travers d’une démarche résolument participative qui seule va permettre de tenir compte de leurs spécificités propres mais également des difficultés individuelles et organisationnelles qu’elles ne manqueront pas de rencontrer dans leurs aventures.”
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