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À la Une en Asie

Author: RFI

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Du lundi au vendredi, retrouvez ce qui fait la Une de l'actualité en Asie aujourd'hui, avec les journalistes du service international et les correspondants de RFI ainsi que nos correspondants sur le continent.

Diffusion du lundi au vendredi à 5h16 TU.

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En Birmanie, la question des terres rares exploitées par la Chine est devenue hyper sensible à l'approche des élections législatives, que la junte a prévu d'organiser d'ici deux mois. La tension est particulièrement forte dans la région de Kachin, frontalière avec la Chine. La Chine a progressivement transféré depuis une dizaine d’années ses activités d'extraction très polluantes des terres rares, vers la Birmanie. Selon un rapport publié au mois de mai par l’ONG basée à Washington, EarthRights International, les terres rares lourdes de la région Kachin contiennent deux éléments indispensables à la production d'éoliennes et de batteries de véhicules électriques : le dysprosium et le terbium. Le rapport souligne que depuis 2021, avec la croissance accélérée de la demande mondiale en énergie verte, l'extraction de terres rares lourdes dans l'État Kachin a fortement augmenté, de sorte qu'il est aujourd'hui presque impossible de trouver des aimants dans le monde qui ne contiennent pas des terres rares en provenance de Kachin.  Cette exploitation n’est pas sans conséquences Oui, l’exploitation sauvage des mines a généré une grave contamination des cours d’eau par des métaux lourds et des éléments radioactifs. Des analyses d’échantillons prélevés par EarthRights International et l'ONG locale Bridge ont révélé que les sols et rivières étaient contaminés et la pollution se propage rapidement en dehors des frontières et a provoqué la protestation des autorités et de la population thaïlandaise. Selon le directeur juridique d'EarthRights International, Ben Hardman : « Les trois rivières transfrontalières du nord de la Thaïlande sont polluées. Et des analyses menées par l'Université Naresuan en Thaïlande démontrent que 70 % de la pollution aux métaux lourds présente dans l'eau des rivières provient de la même source que les polluants des rivières de Kachin ». Pour Ben Hardman, les entreprises importatrices des terres rares Birmanes telles que Tesla et Volkswagen doivent renforcer le contrôle de leur chaine d’approvisionnement et surtout ne pas financer la guerre des terres rares. Une instabilité politique persistante depuis le coup d’État de 2021 Mais le contrôle réel de la junte dans le pays est très limité. Fin 2024, l'Organisation pour l'indépendance Kachin et sa branche armée, ont pris le contrôle total de toutes les zones d'extraction de terres rares lourdes en Birmanie. Pour Kim Ji-min, militante Birmane vivant en France, il ne fait aucun doute que le contrôle de ces mines est l’une des raisons pour lesquelles la junte tient à organiser ces élection. « La Chine a toujours exploité de cette manière, ils n’interviennent pas directement mais en faisant des pressions. Comme ils veulent exploiter les mines, ils vont demander à la junte d’organiser les élections pour avoir tous les contrats et les pouvoirs d’exploitation ».  Le Rapporteur spécial des Nations unies Tom Andrews dans son rapport publié il y a un an, a décrété que toute élection gérée par la junte manquerait de crédibilité, (et que si la junte poursuit ses plans électoraux, elle ne fera que diviser et envenimer davantage le pays). Le rapporteur a également exhorté les organisations internationales, dont l'ONU, à refuser de reconnaître la junte militaire et à ne pas inviter ses représentants aux forums et événements internationaux. Mais ce qui n’a pas empêché à la Russie d’inviter le dirigeant de la junte militaire Birmane d’assister à la cérémonie pour les 80 ans de la victoire face à l'Allemagne nazie et au président Chinois de rencontrer le chef de la junte Birmane à Moscou au mois de mai dernier.
Le meurtre d'un jeune étudiant sud-coréen en août dernier, au Cambodge, enlevé et battu à mort par des Chinois impliqués dans des opérations cybercriminelles, a causé un scandale en Corée du Sud. L’affaire a relancé le débat sur ces centres d'arnaques en ligne qui prolifèrent en Birmanie, au Laos ou au Cambodge. Ce lundi 20 octobre, dix nouveaux Sud-Coréens ont été arrêtés au Cambodge, a indiqué un ministre de Séoul. De notre correspondante à Phnom Penh, L'ampleur prise en Corée du Sud de la mort de cet étudiant, enlevé et torturé par un réseau criminel local, a conduit Séoul à relever le niveau d’alerte pour les voyages de ses ressortissants dans plusieurs régions cambodgiennes. Elle a aussi contraint les autorités des deux pays à annoncer le renforcement de leur coopération sur la question des centres d’arnaque en ligne. 64 Sud-Coréens détenus pour avoir pris part, volontairement ou non, à ces opérations criminelles au Cambodge, ont été expulsés samedi 18 octobre sur un vol spécial vers Séoul après l'envoi d’une délégation sud-coréenne. Mais quand on évoque ces réseaux de cybercriminalité en Asie du Sud-Est, on parle d'une industrie absolument tentaculaire dont découlent bien d’autres récits de kidnappings, de violences, de disparitions ou de morts suspectes. Ces réseaux abusent deux types de victimes. D'un côté, les victimes visées virtuellement dans le monde entier, piégées par des arnaques sentimentales ou de faux investissements en cryptomonnaies. De l’autre, des personnes attirées sous de faux prétextes, le plus souvent de fausses promesses d'emploi. Elles voient leurs passeports confisqués, leurs déplacements contrôlés et sont contraintes de remplir leur quota d’arnaques en ligne. À lire aussiSéoul envoie des enquêteurs au Cambodge après des enlèvements en série de Sud-Coréens Un conglomérat cambodgien impliqué dans ces arnaques Dans l'actualité, c'est une autre affaire qui donne une idée de l’ampleur des opérations. Le 14 octobre, les États-Unis et la Grande-Bretagne ont annoncé des sanctions contre un conglomérat cambodgien impliqué dans ces arnaques ainsi que la saisie de 15 milliards de dollars en bitcoin. C'est l’équivalent d’un tiers du PIB du Cambodge. Il s’agirait aussi de l’une des plus importantes saisies de l'histoire du FBI. Elle vise Chen Zhi, 37 ans, fondateur et président du conglomérat cambodgien, Prince Group. L’homme d’affaire d’origine chinoise qui détient la nationalité cambodgienne est inculpé pour fraude électronique et blanchiment d’argent. Le dossier de mise en accusation indique que Chen Zhi serait personnellement impliqué dans la gestion d’opérations d’arnaques en ligne massives et conscient des pratiques brutales en usage dans les différents centres de son réseau. Prince Group et 146 entités affiliées sont désormais désignées comme organisation criminelle transnationale par le Trésor américain. Au Cambodge, Chen Zhi est un homme d’affaires particulièrement influent. Il a été conseiller de l’ancien Premier ministre, Hun Sen, puis de son fils, Hun Manet, actuel Premier Ministre du Cambodge. Ces affaires suscitent-elles une réponse d’ampleur en Asie du Sud-Est ?  Les actions et sanctions contre des rouages influents de ces réseaux en Asie du Sud-Est se multiplient, mais elles ne semblent pas pour l’instant empêcher la prolifération de ces entreprises criminelles dans la région. Au Cambodge, sur ces quatre derniers mois, les forces de police seraient ainsi intervenues sur 92 sites suspectés d’être des centres d’arnaques conduisant à l’interpellation de plus de 3 400 personnes de 20 nationalités différentes. Si ces descentes s’intensifient, plusieurs sites connus des autorités et des observateurs semblaient avoir repris leurs activités quelque temps plus tard. D’autres cellules déménagent régulièrement leurs bureaux. En l’absence de stratégie ambitieuse, certains rapports comme celui d’Amnesty International en juin dernier vont jusqu’à dénoncer une défaillance de l’État cambodgien qui auraient permis à la criminalité de prospérer. Ces réseaux criminels opèrent dans toute la région, mais rien qu’au Cambodge, on estime que 100 à 150 000 personnes seraient impliquées, volontairement ou non, dans les centres d’arnaques en ligne. À lire aussiSéoul envoie des enquêteurs au Cambodge après des enlèvements en série de Sud-Coréens
Aux Philippines, la cote de popularité du président Ferdinand Marcos Jr est au plus bas. En cause, un vaste scandale de corruption qui n’en finit pas de secouer l’archipel. Après les manifestations monstres en septembre, deux nouveaux rassemblements sont prévus vendredi 17 octobre et mardi 21 octobre, avec le mot d’ordre : « punir les responsables et restituer les fonds volés ». Révélée fin juillet par le président lui-même, lors d’un discours sur l’état de la Nation, l’affaire implique de faux projets de contrôle des inondations, dans un pays parmi les plus exposés aux typhons. Coût estimé pour le contribuable : environ 2 milliards d’euros, plutôt 18 milliards, selon Greenpeace. Des témoignages accablants Le président Ferdinand Marcos Jr avait promis d’agir contre ces malversations présumées, et que personne ne serait épargné. Pourtant, il dégringole dans les sondages. Les Philippins sont exaspérés par la corruption qui ronge le pays et n’ont pas confiance dans leurs institutions : 79 % des sondés désapprouvent la gestion de la corruption, un record historique. Pourtant, dès la mi-septembre une commission d’enquête indépendante a été créée, enquête lancée également par la Chambre des représentants et le Sénat sur ces détournements de fonds et énormes pots de vins versés à des législateurs, des fonctionnaires ou des entrepreneurs pour des infrastructures inexistantes ou de piètre qualité. Des auditions sont en cours, relayées en direct par les médias philippins et le moins que l’on puisse dire c’est que les langues se délient. Comme pour les témoignages accablants d’anciens ingénieurs du département des travaux publics et des autoroutes qui accusent nommément des figures politiques d’avoir perçu des rétrocommissions massives pour des projets fantômes.  Un ancien soldat a récemment révélé devant la commission sénatoriale avoir régulièrement livré des valises bourrées d’argent liquide à la résidence de l’ancien président de la Chambre basse, Martin Romualdez. Ni plus ni moins que le cousin du chef de l’État, il a d’ailleurs présenté sa démission mi-septembre moins de deux semaines après celle du président du Sénat, Francis Escudero, un allié proche de Marcos. À lire aussiPhilippines: des milliers de manifestants dans les rues de Manille pour protester contre la corruption Opacité et impunité Au total, entre 50 et 100 personnes, fonctionnaires ou sénateurs et dont les noms n’ont pas été rendus public, seraient impliqués dans ce scandale. Jusqu’à 70 % des fonds alloués à ces projets anti-inondations auraient été détournés, une somme colossale. Par ailleurs, un site web lancé par le président Marcos pour encourager les citoyens à signaler les anomalies dans les projets d'infrastructure a enregistré jusqu’ici plus de 20 000 plaintes, un véritable raz de marée. Le mécontentement grandit notamment en raison de la répression des forces de police durant la grande mobilisation anti-corruption le 21 septembre et l’arrestation de plus de 200 personnes. Les Philippins reprochent aussi l’opacité de la commission indépendante dont les sessions se tiennent à huis clos. Ils attendent justice, sans trop y croire en réalité, en raison de l’impunité historique dont jouissent leurs élites. Pour maintenir la pression sur les autorités, deux autres manifestations sont prévues à Manille vendredi 17 octobre et mardi 21 octobre … avant un grand rassemblement national fixé au 30 novembre.
En Thaïlande, une exposition qui se clôt dimanche 19 octobre a été victime de la pression diplomatique de Pékin. Intimidé, l'artiste birman exposé a dû quitter le pays et ses œuvres ont été retirées. Un nouvel épisode d’intervention chinoise visant à influencer ou censurer des institutions culturelles à l’étranger. Depuis Londres, Sai, artiste birman et curateur, se remémore les moments qui ont précédé son départ de Bangkok : « Quarante-huit heures après l’ouverture de l’exposition, on a reçu l’information de la part de la conservatrice que le ministère des Affaires étrangères demandait qui était "Myanmar Peace Museum", l’organisation que nous avons fondée avec ma conjointe ». Soit un deuxième déracinement. Le père de Sai est un politicien de l’État Shan, en Birmanie, et est dans les geôles de la junte depuis le coup d’État en 2021. « Depuis son arrestation, je plaide pour sa libération et celle de plus de 30 000 prisonniers politiques détenus en Birmanie », lance l'artiste. Il considère « l’art comme une plate-forme » pour « donner de la visibilité » à sa nation et sa cause. Mais cet été, il a vu sa démarche entravée alors qu’il participait à « Constellation de complicité », une exposition représentant des artistes de différents pays victimes d’oppression afin de montrer comment les régimes autoritaires collaborent pour appliquer leur répression. « Alors qu’on était dans les embouteillages, nous avons reçu un appel de la part de la direction de l’exposition qui nous a dit : la police est là et elle vous demande. Tout de suite, on a su qu’il fallait partir, tout comme on a fui la Birmanie en 2021. J’ai eu cet instinct immédiatement. » Le lendemain, des représentants de l’ambassade de Chine escortés par des autorités locales auraient demandé la fermeture de l’exposition. Dans leurs viseurs, des œuvres d’artistes tibétains, ouïghours ou hong-kongais. Autant d'habitants de régions qui ont été soit envahies par Pékin, comme le Tibet en 1950, soit dont la population est sévèrement réprimée, comme les Ouïghours au Xinjiang, soit une ancienne colonie britannique où tout discours opposé à Pékin est puni par de la prison, dans le cas de Hong-Kong. À lire aussiLa Thaïlande expulse 40 Ouïghours vers la Chine, malgré les persécutions et les critiques Finalement, après négociations, l’exposition a pu ouvrir à nouveau, avec des modifications. « Les noms de quatre artistes ont été effacés, comme les drapeaux tibétains ou ouïghours, les images ou les paroles du Dalaï Lama, énumère Sai. Pourtant, aucun n’était ressortissant chinois. » Les œuvres de Tenzin Mingyur Paldron, artiste transgenre tibétain, ont aussi été presque entièrement retirés. À distance, Sai continue à suivre la situation et assure que l’exposition est restée sous surveillance policière. « Tous les artistes de cette exposition se sont battus contre leur propre régime autoritaire. On ne peut pas laisser passer cela, on a l'obligation de se battre, non seulement pour nous, mais pour la liberté d’expression, assure-t-il. On doit dénoncer cette invasion sur la souveraineté culturelle thaïlandaise. » Pékin, premier partenaire économique de Bangkok, dispose d’importants moyens de pression sur le royaume thaïlandais. Un scénario qui se répète. En septembre, la représentation taïwanaise au Kazakhstan a accusé la Chine d’être intervenue pour empêcher avec succès l'exposition d’artistes taïwanais. En France, plusieurs associations tibétaines ont déposé une mise en demeure contre le musée Guimet pour avoir effacé le mot « Tibet » dans une exposition mettant en avant des œuvres de la région contrôlée par Pékin, après son invasion en 1950. Le musée a privilégié l’appellation « monde himalayen », ce qui, selon le courrier de mise en demeure, reviendrait à « tronquer la culture et l’histoire du Tibet ».
En Thaïlande, la saison des pluies devrait se terminer à la fin du mois. Ces deux dernières semaines, le typhon Matmo puis de fortes pluies ont entrainé des inondations meurtrières dans le nord, le centre et l’est de la Thaïlande. Lundi 13 octobre, 15 provinces étaient encore inondées. Le Royaume reste en alerte pour les prochains jours, un orage s'abattant encore sur la capitale Bangkok, mais également la ville historique d'Ayutthaya, l'une des zones les plus touchées.
À la Une en Asie vous emmène aujourd’hui au Pakistan, plus précisément à Pasni, une ville portuaire située dans la province instable du Baloutchistan. Islamabad envisage d’y construire un nouveau port en eau profonde qui offrirait aux États-Unis un accès logistique aux minéraux critiques. Problème, Pasni se trouve tout près de Gwadar, un port financé et exploité par la Chine, et de Chabahar, un autre port stratégique en Iran exploité par l’Inde. Un projet audacieux L'objectif principal d'Islamabad est de diversifier ses alliances face à une crise économique et une dépendance excessive vis-à-vis de la Chine, qui est son principal créancier. Le Pakistan cherche aussi à capitaliser sur le rapprochement opéré au printemps dernier avec Washington, qui avait réussi à désamorcer l’escalade militaire avec l’Inde autour du Cachemire. Une « bromance » s’était alors nouée entre Donald Trump et le chef de l’armée pakistanaise Asim Munir. Le contexte est important, car après deux décennies de rapprochement indo-américain, les relations se sont nettement tendues l’été dernier entre New Delhi et Washington avec l’imposition par l'administration Trump de tarifs douaniers massifs qui ont porté un coup sévère à l’économie indienne. Le projet pakistanais s’inscrit en partie dans cette dynamique. En développant ce port de pêche conjointement avec les Américains, pour un coût estimé à 1 milliard de dollars, Islamabad offre donc aux États-Unis un terminal stratégique d’exportation de minéraux critiques comme le cuivre, l’antimoine et d’autres terres rares, tout en attirant les investissements. Ce projet permettrait aux États-Unis de diversifier ses approvisionnements après l'interdiction de l'exportation des terres rares chinoises. Le hub serait relié par voies ferrées aux mines du Baloutchistan, dont les sols regorgent de minéraux, des réserves sous exploitées estimées à 6 000 milliards d'euros et qui pourrait aider le pays à alléger sa dette écrasante, notamment envers la Chine. Un pivot générateur de tensions avec Pékin ? Les avis sont partagés. Certains experts pointent la proximité géographique de Pasni avec Gwadar, un port stratégique financé par la Chine situé à un peu plus de 100 km à l’ouest de Pasni. Le projet pourrait être considéré par Pékin comme un acte de défiance vis-à-vis du corridor sino-pakistanais, un des piliers des « routes de la soie » et fragiliser les relations à long terme. La Chine a investi massivement dans Gwadar et pourrait considérer le projet pakistano-américain comme une concurrence directe qui menace son retour sur investissement, et la présence américaine comme une menace pour ses activités dans l'océan Indien. D’autres observateurs remarquent que le port sera un hub commercial et non une base militaire. Ces analystes restent cependant prudents quant à la viabilité du projet à court terme, notamment en raison des incertitudes sur l'implication des Américains sous Trump et des défis sécuritaires au Baloutchistan, en proie à l’insurrection.
Le film K-Pop Demon Hunters, diffusé sur Netflix, n'en finit pas de faire parler de lui. Il bat tous les records d'audience sur la plate-forme avec plus de 330 millions de visionnages. Le film, qui mêle des éléments de culture pop coréenne et d'autres plus traditionnels comme le tigre, animal totem de la Corée, relance malgré lui des tensions entre la Corée et le Japon. Avec notre correspondant à Séoul, Célio Fioretti Avec le film d'animation, les Coréens ont découvert l'existence de Derpy ou Duffy, le tigre coréen, et sa triste histoire. Le film est truffé de références culturelles. On y retrouve de nombreux symboles de la culture coréenne dont le tigre. De nombreux spectateurs ont découvert la véritable histoire de cet animal très célèbre ici en Corée. Une histoire qui fait florès sur les réseaux sociaux. « Il existait vraiment des tigres en Corée ! Mais où sont-ils passés ? », interroge un influenceur spécialisé sur la culture coréenne, qui accumule des millions de vues. « La chasse intensive pendant l'occupation japonaise au début des années 1900 a tué les derniers tigres coréens. Il n'est aujourd'hui possible que d'en voir dans les zoos ou au travers de votre écran dans "K-pop Demon Hunters". » À lire aussiCorée du Sud: le succès phénoménal du film d'animation «KPop Demon Hunters» sur Netflix Du maillot de l'équipe nationale de football aux peintures traditionnelles, sans oublier les mascottes des premiers Jeux olympiques en Corée du Sud en 1988, le tigre est pourtant très présent en Corée, mais plus physiquement. À lire aussiK-Pop, la fabrique d’un phénomène Pour de nombreux Coréens, la disparition du tigre marque l'effacement d'une partie de leur culture. Malgré lui, le film K-Pop Demon Hunters donne un coup de projecteur sur la violence de la colonisation japonaise de la Corée, toujours sujet de tensions entre les deux pays en dépit de la normalisation de leurs relations. Conservation plutôt que réintroduction La Corée du Sud est loin de réintroduire le tigre de Sibérie ou tigre de l'Amour, le vrai nom du tigre qui vivait jadis en Corée. Pour l'instant, quatre tigres ont fait leur retour dans les montagnes coréennes, les derniers, arrivés en 2017, étant originaires de Chine. Ils ne sont toutefois pas en totale liberté et vivent dans une zone de cinq hectares très contrôlée au sein d'une réserve. Un effort de conservation plus que de réintroduction donc, car il paraît encore difficile de faire cohabiter les tigres et les humains dans les montagnes coréennes.
La Chine et l'Inde, les deux pays les plus peuplés du monde, les deux plus grandes puissances rivales d’Asie reprennent leurs échanges après des années de rupture diplomatique. Décryptage Avec notre correspondant en Inde, Côme Bastin Depuis ce vendredi 3 octobre, les citoyens indiens et chinois peuvent à nouveau réserver des vols entre les deux pays. Il n'existe pas encore de vols directs entre les deux capitales Delhi et Pékin. Pour l’instant, il s’agit d’une unique liaison quotidienne entre Calcutta, la grande ville de l’est de l’Inde, et Canton, une ville industrielle très importante en Chine. Les vols débuteront le 26 octobre entre ces deux métropoles côtières, séparées de 2 500 kilomètres. Selon la compagnie aérienne Indigo qui les opère, d’autres liaisons devraient être validés prochainement. C’est donc une reprise prudente, et elle est très symbolique. Voilà cinq ans qu’aucun vol n’avait lieu alors que plus d’un million de passagers voyageaient entre l’Inde et la Chine en 2019. Pourquoi cette rupture si longue ? Les vols sont stoppés lors de la pandémie de Covid-19, mais c’est une escarmouche militaire entre les deux puissances nucléaires qui les a figés. L’Inde et la Chine contestent leur frontière dans l’Himalaya. En juin 2020, au moins 20 soldats indiens sont morts en affrontant une patrouille chinoise, menant à la rupture diplomatique. Depuis un an, des pourparlers ont fait redescendre la tension. Des deux côtés, on parle de passer de la confrontation à la coopération. Les menaces commerciales du président américain Donald Trump ont accéléré ce rapprochement. En septembre, le Premier ministre Indien Narendra Modi s’est affiché avec le président Chinois lors d’un sommet à Shanghai, c’était impensable il y a peu.  À lire aussiVisite diplomatique chinoise en Inde, une première depuis six ans Jusqu'où peut aller ce rapprochement ?   Il y a une part de mise en scène. Le président américain a infligé 50 % de droits de douanes à l'Inde et s’en prend désormais à sa diaspora. L’Inde menace en quelque sorte Donald Trump de se tourner vers la Chine, son ennemi numéro un. Cependant, la première destination des exportations indiennes, ce sont les États-Unis. À l’inverse, l’Inde importe énormément de Chine et n’a pas de marché à y trouver à court terme. Il y a aussi du pragmatisme. L’Inde a besoin des terres rares et de la technologie de son voisin. La semaine dernière, les industriels du charbon en Inde ont réclamé plus d'importations d’équipements chinois. Pékin a suggéré que New Delhi rejoigne le RCEP, un vaste accord de libre échange en Asie. L’Inde va naviguer prudemment en observant la réaction des États-Unis. À lire aussiInde-Chine: «La volonté de normalisation n’est pas née de l’humiliation infligée par Trump avec ses tarifs douaniers»
Le Parti libéral-démocrate, au pouvoir presque sans discontinuer au Japon depuis 1955, désigne, ce samedi 4 octobre, son nouveau président. La personne qui l’emportera aura la lourde tâche de prendre la tête d’un gouvernement minoritaire à l’Assemblée, dans un contexte difficile. RFI fait le tour des favoris. Rupture générationnelle, rupture de genre ou continuité. Les cinq candidats à la présidence du Parti libéral-démocrate proposent des directions différentes, et les deux favoris incarnent une forme de rupture. À 44 ans, Shinjiro Koizumi, actuel ministre de l’Agriculture et fils d’un ancien Premier ministre, pourrait devenir le plus jeune chef de gouvernement du Japon après-guerre. Il est particulièrement populaire auprès des militants du parti et appelle à des réformes. Face à lui, une femme d’expérience, la très droitière Sanae Takaichi. À 64 ans, celle qui pourrait devenir la Première femme à diriger le gouvernement du Japon défend une ligne conservatrice et nationaliste, plutôt populaire au sein du grand public. Un autre candidat pourrait créer la surprise : Yoshimasa Hayashi. Porte-parole du gouvernement, il prône la continuité. Surfeur télégénique Le fils de Junichiro Koizumi (Premier ministre du Japon de 2001 à 2006) fait figure de favori. Très médiatique, il a en partie abandonné certaines réformes, notamment sociétales, qui l’avaient mis sous les projecteurs. En tant que ministre, il a pris deux semaines de congé paternité, une rareté au Parlement. Sa gestion de la crise du riz, en tant que ministre de l’Agriculture, a en partie apaisé l’inquiétude de la population en libérant les réserves gouvernementales. Il affirme vouloir augmenter les salaires d’un million de yens (5700 euros) d’ici 2030, alors qu’ils stagnent depuis des années. Père de deux enfants, Shinjiro Koizumi se rend aussi régulièrement au très controversé sanctuaire de Yasukuni. Ce lieu rend hommage aux morts des guerres du Japon, mais aussi à des criminels de guerre. Des visites qui provoquent l’ire de Pékin et surtout de Séoul, deux pays largement victimes des crimes de l’empire japonais. Ultra-nationaliste Un sanctuaire que Sanae Takaichi connaît bien, elle qui s’y rend fréquemment. À 64 ans, la protégée de Shinzo Abe, son mentor en politique, dit aussi admirer Margaret Thatcher. Ultra-nationaliste, ouvertement anti-chinoise, elle espère séduire en passant par la droite. Une ligne qui gagne en popularité, à l’image de la montée du parti d’extrême droite Sanseito dans les sondages. Les messages anti-immigration de cette formation séduisent de nombreux Japonais. Takaichi joue sur le sentiment nationaliste de certains habitants, désabusés par les incivilités des touristes ou par l’arrivée de travailleurs étrangers, en hausse ces dernières années. Elle promet d’augmenter le nombre de fonctionnaires travaillant sur l’immigration pour vérifier qu’aucun migrant économique n’obtienne le statut de réfugié. En 2024, le Japon, pays de 124 millions d’habitants, n’a accordé le statut de réfugié qu’à 190 personnes. Yoshimasa Hayashi, troisième dans les enquêtes d’opinion, créerait la surprise s’il parvenait à doubler les deux favoris. À 64 ans, cet habitué des ministères, actuel porte-parole du gouvernement, veut s’inspirer du système britannique d’Universal Credit pour augmenter le pouvoir d’achat des ménages. Diplômé de Harvard, il fut le bras droit des deux derniers Premiers ministres et prône la continuité. Malgré une image de probité — précieuse dans un parti éclaboussé par les scandales — il ne déchaîne pas l’enthousiasme des électeurs à l’échelle nationale. Quel que soit le nom du nouveau dirigeant du Parti libéral-démocrate, il ou elle devra faire face à de nombreux défis : l’inquiétude de la population face à l’immigration, pourtant vitale pour l’économie japonaise dans un contexte de baisse de la natalité ; la flambée des prix du riz, dont la production est extrêmement régulée par le gouvernement ; un contexte géopolitique préoccupant en Asie avec la montée en puissance de la Russie et les bonnes relations apparentes entre Pyongyang, Pékin et Moscou. À cela s’ajoute une crise interne au sein d’un parti miné par les scandales de corruption à répétition. À lire aussiJapon: la course à la succession du Premier ministre démissionnaire Shigeru Ishiba est lancée
Après presque trois jours de coupure totale, internet et le réseau de téléphonie mobile ont été rétablis, mercredi 1er octobre, dans plusieurs provinces afghanes, dont Kaboul. Une réouverture qui a suscité des scènes de liesse dans la capitale, après une coupure nationale décidée par le gouvernement taliban. Ce n'est pas la première fois que le régime coupe les communications dans le pays. Mais c'est la première fois qu'une coupure dure aussi longtemps et qu'elle est générale.   Cette coupure marque un tournant dans le pays, quatre ans après la chute de Kaboul et le retour au pouvoir des talibans. Gohar Safi est journaliste dans une radio du nord-est du pays, dans la région de Kunar. Pendant plus de 48 heures, il a observé sa région à l’arrêt, et décrit ce qu’il qualifie de « retour dans les années 1980 ». « Le matin, dans ma ville, à Assadâbâd, il n'y avait personne, raconte-t-il. On aurait pu croire qu'il y avait eu quelque chose de très grave, vous savez. Un confinement ou une attaque à la bombe par exemple ». Il ajoute que le bazar de sa ville, en général très animé, était complètement vide.   La coupure n'a pas seulement empêché Gohar Safi de contacter ses proches pendant plus de 48 heures. Elle a également eu des conséquences sur son activité de journaliste. « Tout a été mis à l'arrêt, rappelle-t-il, les magasins, les médias, les écoles, tout était sur pause. Moi j'ai une émission radio. Pendant 48 heures, il n'y a pas eu de diffusion parce que je ne pouvais pas me connecter à mes auditeurs », regrette-t-il. Seuls les Afghans équipés de téléphones satellites étaient joignables pendant la coupure.   Des conséquences sur les populations vulnérables  Et au-delà des conséquences sur l’activité quotidienne, cette mise à l’arrêt générale a également des effets sur le travail des humanitaires, comme Vanessa Boley, la représentante adjointe de l’agence des Nations unies pour les réfugiés à Kaboul. « À plusieurs reprises, nous avons été déconnectés de nos sous-délégations à Jalalabad et Kandahar et nous avons dû suspendre tous nos mouvements sur le terrain », déplore-t-elle.   Elle ajoute que la coupure a paralysé le système bancaire dans le pays, un système dont dépendent les personnes accompagnées par l’agence onusienne. « Nous distribuons de l'argent aux Afghans qui reviennent d'Iran ou du Pakistan, soit volontairement soit de façon forcée. Des centaines de personnes n'ont pas pu être assistées ». Des personnes particulièrement vulnérables qui ont un besoin urgent du soutien de la communauté internationale, selon l’humanitaire. Les femmes aussi font partie des principales victimes de la coupure, elles à qui les talibans ont interdit d’aller à l'école, et qui dépendent complètement des cours en ligne pour s'éduquer. Une chape de plomb supplémentaire pour les femmes afghanes, dont les conditions d’existence ne cessent de se détériorer.   À lire aussiAfghanistan: les coupures d'Internet réduisent encore les perspectives d'avenir des femmes Une stratégie de la peur  Pour le journaliste Gohar Safi, cette coupure a créé de la colère chez les jeunes générations et chez les commerçants contre le gouvernement. Une colère que les Afghans ne peuvent pas exprimer. Le média TOLOnews cite tout de même des Kabouliens qui appellent le gouvernement à ne pas autoriser de coupure supplémentaire. Le gouvernement, qui parlait, lors des premières mises à l’arrêt, de lutte contre le vice, mais qui a changé de discours mercredi, lorsque les lignes ont été rétablies. Si le pays a été plongé dans le noir c’est à cause de la réparation de câbles à fibre optique dans le pays, a déclaré le porte-parole du gouvernement. Le militant en exil Muslim Shirzad, lui, y voit une stratégie des talibans. Pour lui, « la coupure a eu un impact psychologique important », constate-t-il. « Les gens sur place se sont dit : "Ça y est, on est coupé du monde". Pour eux, cette coupure c'est une façon pour les talibans de maintenir une pression psychologique dans un pays où les habitants sont habitués à utiliser les nouvelles technologies ». Maintenir la pression, pour faire taire toute velléité de dissidence et menacer les Afghans de fermeture totale du pays.  À lire aussiAfghanistan: deuxième jour de coupure des télécommunications à l'échelle nationale
Le Japon annule un projet d’échanges culturels et de formations professionnelles entre quatre villes de province japonaises et quatre pays d’Afrique (le Nigeria, le Ghana, le Mozambique et la Tanzanie) après une campagne de désinformation teintée de xénophobie sur les réseaux sociaux japonais évoquant l’arrivée massive de migrants africains. Cette annulation survient à l’heure où le sentiment anti-immigration grandit au Japon alors même que le pays doit s’ouvrir à la main-d'oeuvre étrangère pour compenser le vieillissement accéléré de sa population. L’Agence japonaise de coopération internationale (la JICA) reconnait que son projet d’échanges culturels et de formations professionnelles pour de jeunes Africains a été mal compris et a suscité de la confusion. Dévoilé fin août 2025 lors de la Conférence de Tokyo sur le développement de l’Afrique (la TICAD), le projet a été conçu pour offrir, durant un ou deux mois, à de jeunes Africains des cours de langues, les connaissances nécessaires pour exercer un métier, leur inculquer la discipline par le biais du baseball. Il ne s’agissait en rien d’un programme d’immigration. Pour recevoir ces jeunes Africains, l’agence avait choisi quatre villes qui avaient accueilli des athlètes du Ghana, du Nigeria, du Mozambique et de la Tanzanie lors des Jeux olympiques de Tokyo 2020. Ces quatre villes avaient été désignées sous l’expression anglaise de « Africa Hometown »( ou villes d’origine). « JICA Africa Hometown » crée malentendus chez quatre pays africains Le gouvernement et les médias du Nigeria ont cru comprendre que le Japon allait accorder à de jeunes Nigérians des visas spéciaux permanents pour vivre et travailler dans l’une des quatre villes japonaises désignées, en l’occurrence Kisarazu. Le programme de la BBC en pidgin Nigérian a commis la même erreur. Le journal Tanzania Times, lui n’a pas hésité à affirmer que le « Japon offrait la ville de Nagai a la Tanzanie ». Alors qu’il n’était pas question de délivrer des visas aux jeunes Africains. Les villes concernées au Japon inondées de plaintes des habitants Leurs craintes ont été amplifiées sur les réseaux sociaux japonais. Les migrants africains allaient s’installer en masse dans les villes désignées. Le gouvernement nigérian intensifia les réactions xénophobes sur les réseaux sociaux japonais en déclarant que le Japon « allait créer une catégorie spéciale de visas ». Rien de plus faux. L’immigration, thème central des candidats du PLD pour remplacer Shigeru Ishiba Le petit parti nationaliste Sanseito avec son slogan « Les Japonais d’abord » a enregistré une très nette avancée lors des récentes élections aux Senat appelant à des règles plus strictes sur l’immigration. Les étrangers représentent 3% de la population. 25 000 Africains seulement y vivent. Le Japon mine de rien s’ouvre à l’immigration. Mais la majorité des étrangers qui y travaillent sont des Asiatiques. À lire aussiJapon: vague de xénophobie en ligne après l'annonce d'une coopération renforcée avec l'Afrique
Selon le Wall Street Journal, le président chinois souhaiterait utiliser l’intérêt de l’administration Trump pour la conclusion d’un accord commercial afin de pousser les États-Unis à modifier leur position diplomatique sur l’indépendance de Taïwan. Une information qui provoque des inquiétudes à Taipei... De notre correspondant à Taïwan, Romain Ouertal L’article du Wall Street Journal publié ce samedi a été lu avec beaucoup d’attention à Taïwan. Le quotidien américain rapporte les propos de sources anonymes proches des négociations sino-américaines indiquant que Xi Jinping chercherait à conditionner un possible futur accord commercial avec les États-Unis à une opposition explicite à l’indépendance de Taïwan. Ceci, alors que le président chinois doit rencontrer son homologue américain Donald Trump à la fin du mois d’octobre en Corée du Sud, à l’occasion du sommet des pays de l’Apec. Si elle devait se concrétiser, cette évolution sémantique constituerait un changement majeur de la rhétorique américaine concernant l’île de 23 millions d’habitants. La position officielle constante des États-Unis est d’indiquer que ceux-ci « ne supportent pas » une indépendance de Taïwan, tout en s’abstenant de toute condamnation. Ce changement marquerait surtout le passage d’une position de neutralité des États-Unis à une forme d’alignement sur les positions chinoises. Pékin considérant Taïwan comme une province rebelle à reconquérir, elle dénie en effet à l’île toute possibilité d’autonomie politique.   Comment les autorités taïwanaises ont-elles réagi à ces informations ? Après la publication de l’article du Wall Street Journal, des officiels de sécurité taïwanais ont pris la parole dans la presse, sous couvert d’anonymat, indiquant que les efforts chinois visant à créer « un fossé stratégique » entre Taïwan et les États-Unis « ne réussiraient pas ». Ceux-ci mettent en avant que si les États-Unis semblent bien vouloir apaiser les relations avec Pékin, ils continuent dans le même temps à renforcer leur capacité militaire dans leurs bases du Pacifique autour de la Chine. Un engagement dont témoignent selon eux les exercices militaires organisés dans la région. Ce qu’il faut également rappeler, c’est que ce n’est pas la première fois que des informations font état de la volonté de Xi Jinping de faire pression sur les États-Unis pour modifier leur position diplomatique sur Taïwan. L’île constitue, en effet, l’aspect le plus sensible des relations entre les deux pays. Déjà en 2023, Reuters avaient fait état de demandes similaires de la part de Xi Jinping auprès de l’administration de Joe Biden, qui les avaient jugés « irréalisables ». On craint donc à Taiwan un changement de fond de la position américaine ? Les motifs d’inquiétudes existent depuis l’entrée en fonction de l’administration Trump. Pas plus tard que la semaine dernière, on a appris que le président américain avait suspendu l’envoi d’une aide militaire de 400 millions de dollars promise à Taïwan. Un geste interprété comme une tentative d’amadouer Pékin pour la conclusion d’un accord et qui renforce les inquiétudes de voir la situation de Taïwan instrumentalisée à des fins économiques. Au-delà, c’est surtout la question des négociations tarifaires imposées par l’administration américaine qui font peur, notamment sur les puces électroniques. Le secrétaire américain au commerce, Howard Lutnick, a déclaré ce dimanche souhaiter que les fabricants taïwanais produisent à termes directement aux États-Unis 50% des puces électroniques à destination du marché américain. Une mesure perçue à Taïwan comme une remise en cause directe du « bouclier de silicone », cette avance technologique d’exception dont l’île est porteuse sur les semiconducteurs, et garantissant donc, de fait, sa protection militaire.  À lire aussiDonald Trump bloque une aide militaire majeure à Taïwan, un tournant dans la politique de Washington
En Australie, la radio télévision publique ABC a été condamnée pour le licenciement abusif de l’une de ses journalistes Antoinette Lattouf, à qui il était reproché d’avoir tweeté à propos de la guerre que mène Israël dans la bande de Gaza. Éclairages Avec notre correspondant à Sydney, Gregory Plesse Antoinette Lattouf est une journaliste très expérimentée et bien connue du public australien. Fin 2023, elle travaille pour la matinale de la radio publique ABC, quand on lui reproche d’avoir retweeté un rapport de l’organisation Human Rights Watch, qui affirme qu'Israël utilise la famine comme arme de guerre. Ce rapport fait par ailleurs l’objet d’un article sur le site de ABC. Antoinette Lattouf donc, n’estime commettre aucun impair. Et pourtant, ABC va considérer que leur journaliste est allée trop loin et préciser, pour justifier son licenciement, que la direction avait demandé à Antoinette Lattouf de ne pas s’exprimer sur les réseaux sociaux à propos du conflit en cours au Proche Orient. Mais quelques semaines plus tard, on apprend que plusieurs organisations juives ont mené une intense campagne de pression sur la chaîne publique. Des conversations sur Whatsapp qui ont par la suite été rendues publiques montrent que plusieurs organisations ont mené une campagne coordonnée destinée à faire pression sur la chaîne, il a même été un temps envisagé d’en référer directement à la ministre des Communications, à travers un groupe baptisé “les avocats pour Israël”, le but clairement affiché étant de faire craindre à ABC le risque de poursuites judiciaires. Et visiblement, cela a fonctionné, puisqu’ABC, au lieu de défendre sa journaliste, l’a licenciée. Sauf que c'est Antoinette Lattouf qui a fini par poursuivre ABC en justice, et les a fait condamner. Elle a saisi l’équivalent australien du conseil des Prud’hommes, qui a considéré qu’Antoinette Lattouf avait subi un licenciement abusif, et condamné ABC à lui verser un peu plus de 100 000 euros de dommages et intérêts.  Au-delà de son cas personnel, cette affaire a déclenché d’immenses protestations au sein de la population, il faut dire que les Australiens sont très attachés à leurs chaînes publiques, et plus particulièrement, à leur indépendance. Ce qu’Antoinette Lattouf n’a en revanche pas réussi à obtenir de la cour fédérale, c’est qu’elle reconnaisse le caractère raciste de son licenciement. Elle voulait en effet faire valoir que d’autres journalistes, d’origine anglo-saxonne, alors qu’elle est d’origine libanaise, jouissaient d’une bien plus grande liberté de ton sans souffrir la moindre conséquence. Ces biais, elle les aborde désormais régulièrement dans son podcast, « We used to be journos », qui est en fait une critique hebdomadaire des médias australiens. À lire aussiÉtats-Unis: Jimmy Kimmel de retour à l'antenne après la suspension de son émission par la chaîne ABC
L’ex-première dame est de nouveau sous le feu des projecteurs. Kim Keon-hee, épouse de l'ancien président Yoon Suk-yeol, destitué après sa tentative ratée de coup d’État, comparaissait mercredi 24 septembre devant un tribunal de Séoul. Elle est accusée de manipulation boursière, mais aussi de corruption. Elle aurait accepté des cadeaux de la secte Moon en échange de faveurs politiques. La leader de l’Église de l’Unification a été arrêtée ce mardi. Deux sacs Chanel et un collier de diamants pour un total d’un peu moins de 50 000 euros. L’Église de l’Unification, ou secte Moon, n’aurait pas hésité à mettre la main à la poche pour s’attirer la sympathie du couple présidentiel entre février et mars 2022. En plus de ces cadeaux, un député proche du couple présidentiel aurait reçu 60 000 euros de la part de la Fédération des familles pour la paix mondiale (le nom officiel de l’Église). Tous sont désormais en détention. Cette affaire défraie la chronique en Corée du Sud. Alors que l’ex-couple présidentiel, visé par plusieurs chefs d’accusation (tentative de coup d’État, corruption, manipulation boursière), se trouve en détention, l’arrestation de la leader de l’Église de l’Unification vient ajouter une nouvelle page dans la longue histoire des liens ambigus entre culte et politique en Corée du Sud. Park Geun-hye (ancienne présidente conservatrice de 2013 à 2017) avait été condamnée à 32 ans de prison (avant d’être graciée) dans une gigantesque affaire de corruption où l’influence d’une chamane sur la cheffe d’État était centrale. Mais ce nouvel épisode est d’autant plus retentissant qu’il implique la secte Moon et sa leader, Hak Ja Han Moon, dite « la vraie mère ». À lire aussiCorée du Sud: le «mariage pour tous» version secte Moon « La vraie mère » « Libérez-la, libérez-la », ont hurlé les fidèles de l’Église, rassemblés le 23 septembre devant le centre de détention de Séoul où se trouvait l’épouse du messie autoproclamé Moon Sun-myung, fondateur de la secte. Depuis le décès de son mari, avec qui elle a eu quatorze enfants, Han Hak-ja incarne le culte pris dans un tourbillon judiciaire. À 82 ans, elle est soupçonnée d’être le cerveau derrière un scandale de corruption, de détournement de fonds, mais aussi d’ingérence électorale. Les procureurs soupçonnent l’Église, qui assure avoir 3 millions de fidèles dans le monde et jusqu’à 300 000 en Corée du Sud, un chiffre qui est probablement surestimé, d’avoir voulu influencer les élections internes du parti pour favoriser des personnalités en accord avec l’agenda puritain et viscéralement anticommuniste de la secte. En plus des multiples cadeaux au couple présidentiel, elle aurait poussé au moins 110 000 membres de son Église à rejoindre le Parti conservateur. L’ancien président Yoon est en détention entre autres pour sa tentative manquée de coup d’État. L’ex-première dame comparaît au pénal dans le cadre de cette affaire, mais également pour d’autres chefs d’accusation (elle a été filmée acceptant un sac Dior de la part d’un pasteur, NDLR). La leader de la secte, elle aussi, voit ses ennuis judiciaires se multiplier. Les procureurs la soupçonnent également d’avoir voulu détruire des preuves dans un dossier séparé de paris à l’étranger, une pratique illégale en Corée du Sud. L’Église et sa dirigeante nient en bloc toutes les accusations, « Je ne m'intéresse pas à la politique coréenne et je la connais très peu », aurait déclaré Han Hak-ja à la barre. Interdite au Japon Un nouveau scandale qui, en tout cas, n’arrange pas les affaires de l’Église de l’Unification, la Fédération des familles pour la paix mondiale et l’unification dans son nom complet. En mars dernier, la justice japonaise a dissous la secte dans le pays. Un manque à gagner important : l’archipel représentait la première manne financière du mouvement. Mais c’est encore une fois les liens de la secte avec le pouvoir qui ont causé ses déboires judiciaires. En 2022, Shinzo Abe, ancien Premier ministre, est assassiné. Le meurtrier assure avoir agi pour venger sa famille ruinée par ses importants dons à la secte et accuse l’homme politique de lui avoir permis de gagner une influence conséquente. De nombreuses enquêtes ont révélé les liens profonds entre l’Église de l’Unification et le Parti libéral-démocrate. La secte Moon avait tissé une influence politique considérable au sein de la formation politique qui gouverne le pays presque sans discontinuer depuis 1955. Déjà interdite à Singapour (en 1982), la secte multiplie les déconvenues, et l’empire fondé par Moon Sun-myung est désormais vacillant. En plus des scandales à répétition, la branche officielle de l’Église est divisée et a perdu le contrôle d’une partie de son immense manne financière. Les enfants du fondateur se sont longtemps disputé le trésor de guerre laissé par leur père : environ 500 millions de dollars d’actifs placés aux États-Unis puis en Suisse. Le 3 juillet dernier, la justice américaine a tranché et donné raison au fils aîné, qui a créé sa propre branche de la secte.
L'Inde et le Pakistan affichent leurs affrontements récents jusque dans un stade. Ce dimanche 21 septembre, les deux pays rivaux se sont affrontés sur leur pelouse préférée, celle des stades de cricket. Le match s’est déroulé dans une ambiance particulièrement tendue alors que les pays rivaux se sont affrontés militairement le long de leur frontière en mai 2025. De notre correspondant en Inde, Les matchs de cricket entre l’Inde et le Pakistan ont toujours été un terrain d’affrontement politique. Les deux pays sont nés de la partition des Indes britanniques en 1947. Ils en ont conservé un amour du sport légué par la puissance coloniale… et une haine tenace. Entre les deux, il y a des rivalités territoriales dans le Cachemire, et religieuses, le Pakistan s’étant constitué comme pays musulman, et l’Inde laïque, mais à majorité hindoue.  Un premier match sous haute tension En mai 2025, les deux pays se sont affrontés militairement. Depuis, les esprits se sont échauffés par les discours nationalistes. Dimanche, c’était le premier affrontement après ces escarmouches. L’équipe indienne a refusé de serrer la main à ses adversaires, dérogeant au fair-play du sport. Certains joueurs pakistanais ont mimé des fusils, important le conflit dans le stade. L’ambiance était glaciale alors que les deux équipes pourraient se rencontrer à nouveau lors de cette coupe d’Asie.  C’est le reflet de la politisation croissante du cricket dans les deux pays. Depuis des attentats attribués à Islamabad en 2008, les joueurs pakistanais ne sont plus les bienvenus en Inde et les équipes ne s’affrontent plus à domicile. En Inde, le parti nationaliste hindou de Narendra Modi a encore plus politisé ce sport. Le fils du ministre de l’Intérieur est passé à la tête du Comité national de cricket en Inde, puis président du Comité international. Dimanche, on a même vu des appels sur les réseaux sociaux de certains groupes nationalistes à ne pas regarder le match de dimanche.  Quand la politique efface l’esprit sportif Même d'autres sports sont touchés. Deux stars du lancer de javelot, Neeraj Chopra et Arshad Nadeem, étaient connus pour leur amitié au-delà des frontières. Durant les Jeux olympiques, ils ont affiché ce respect mutuel qui fait la beauté du sport. Mais depuis le conflit militaire, sous la pression des opinions publiques, ils font mine de se haïr.  Neeraj Chopra a déclaré que rien ne pourrait plus être comme avant après la guerre et annulé une rencontre avec Arshad Nadeem, affirmant qu’ils n’avaient jamais été amis. Le joueur pakistanais a affiché son soutien à l'armée pakistanaise. Certains regrettent que la politique envahisse ainsi le sport. Car la compétition était une des dernières occasions pour les Indiens et Pakistanais de vibrer ensemble. À lire aussiMondiaux d'athlétisme: un Indien et un Pakistanais, «frères» ennemis au javelot
En Corée du Sud, un Nord-Coréen devenu animateur radio au Sud s'est éteint vendredi 12 septembre. Kim Seongmin n'opérait pas dans n'importe quelle radio. Deux heures par jour, son émission d'actualité était diffusée directement en Corée du Nord pour informer ses anciens compatriotes sur la réalité du régime nord-coréen. De notre correspondant à Séoul, C'est une voix de liberté contre le régime nord-coréen qui vient de s'éteindre. Kim Seongmin est décédé des suites d'un cancer vendredi à 63 ans. Cet ancien officier de propagande du régime s'est enfui de Corée du Nord en 1995, avant de rejoindre le Sud, depuis lequel il animait Free North Korea Radio. Deux émissions par jour diffusées en ondes courtes à destination de ses anciens compatriotes. Débuté en 2014, ce projet avait pour but d'informer les Nord-Coréens, alors que Séoul démantelait petit à petit ses radios de propagande à destination du Nord. Si Kim Seongmin nous a quittés, ses collègues de radio ont décidé de poursuivre son travail et de continuer d'informer les Nord-Coréens. Tentative de calmer les tensions Séoul souhaite calmer les tensions sur la péninsule et, pour cela, le gouvernement a décidé de supprimer un à un les derniers canaux de diffusion radio vers le Nord. La dernière en date, La Voix de la Liberté, a été suspendue à la fin du mois d'août. Lancée en 1962, cette fréquence opérée par l'armée sud-coréenne émettait des informations critiques du régime, de la propagande sud-coréenne, mais aussi les dernières actualités de la pop culture du Sud.  Une manière, selon le gouvernement sud-coréen, de calmer les tensions avec le Nord, qui n'apprécie pas la propagande étrangère sur ses ondes. L'écoute de tels programmes venus du Sud peut d'ailleurs coûter très cher aux Nord-Coréens pris sur le fait, jusqu'à la peine capitale. Une mesure aux conséquences impossibles à mesurer Les conséquences de cette mesure restent difficiles à mesurer. Malgré l'arrêt de plusieurs diffusions de propagande et mains tendues de Séoul, le régime nord-coréen ne souhaite toujours pas communiquer avec son voisin qu'il considère comme un pays hostile. Les associations de réfugiés nord-coréens au Sud estiment que l'arrêt de diffusions vers le Nord est contre-productif, ne permettant pas aux Nord-Coréens de s'informer, alors qu'elles auraient pu les inciter à quitter, voire à provoquer un changement dans le régime. À lire aussiLa Corée du Sud arrête la diffusion de la propagande anti-Corée du Nord dans les zones frontalières
La Papouasie-Nouvelle-Guinée célèbre mardi 16 septembre le 50ème anniversaire de son indépendance, des cérémonies auxquelles les autorités ont notamment convié le Premier ministre australien Anthony Albanese, ainsi que plusieurs membres de son gouvernement. La Papouasie est une ancienne colonie du Royaume-Uni, de l’Allemagne, mais aussi de l’Australie. Mais les rapports entre ces deux pays, voisins géographiquement, ont bien évolué ces cinq dernières décennies : ils s’apprêtent même à signer un accord de défense, qualifié d’historique. De notre correspondant à Sydney, Ce traité « pukpuk », un terme qui signifie crocodile dans l’une des principales langues parlées en Papouasie-Nouvelle-Guinée, il va considérablement renforcer les liens militaires entre les deux pays, puisque tout d’abord, il va permettre aux citoyens de Papouasie-Nouvelle-Guinée d’entrer dans l’armée australienne, en échange de quoi ils pourront obtenir la nationalité australienne.  C’est aussi un accord qui vise à rendre totalement interopérables ces deux armées, c'est-à-dire qu’elles utiliseront le même matériel, les mêmes munitions, et qu’elles vont aussi organiser annuellement des exercices militaires conjoints pour vraiment apprendre à travailler ensemble.  Assistance mutuelle L'accord prévoit aussi une assistance mutuelle. C'est un point essentiel de cet accord. Cela signifie que si l’un de ces deux pays était la cible d’un ennemi, il engagerait automatiquement l’autre à intervenir, bref un accord militaire qui lie très fortement ces deux pays, autant que l’Australie l’est déjà avec le traité Anzus, avec la Nouvelle-Zélande et les États-Unis.   Ce qui a de quoi surprendre ici, c'est que depuis son indépendance, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, en matière de politique étrangère, applique une politique de stricte neutralité. Or là, avec cet accord, elle s’inscrit clairement dans le camp occidental, et cela pourrait avoir des conséquences économiques importantes pour ce pays dont le développement reste très dépendant des investissements étrangers. La Chine, la grande perdante ? Le pays à qui cet accord risque de déplaire le plus, c’est la Chine. Si l’Australie tient tant à cet accord, c’est justement parce qu’elle veut contenir l’influence grandissante de Pékin dans une région qu’elle considère comme son pré-carré. Canberra voit bien que la Chine est en train de monter en puissance dans cette région, à la fois en apportant une aide économique, en construisant des infrastructures dans certains de ces pays, des investissements qui ont permis de convaincre certains de ces petits pays du Pacifique, qui faisaient partie des rares dans le monde à avoir des relations diplomatiques avec Taïwan, à y renoncer, pour établir des liens officiels avec Pékin. C’est le cas de Nauru, des Kiribati, et aussi des îles Salomon, les îles Salomon qui sont même allés, en 2022, jusqu’à signer un accord sécuritaire avec la Chine, qui a vraiment sonné l’alerte en Australie. Des contacts entre voisins renoués depuis l'arrivée des travaillistes à Canberra Depuis, le gouvernement a changé à Canberra, et il s'est donné pour priorité de renouer des contacts étroits avec tous ses voisins du Pacifique. Cet accord avec la Papouasie-Nouvelle-Guinée, en est l’une des plus éclatantes illustrations, et Anthony Albanese a indiqué il y a quelques jours qu’il aimerait bien signer un accord similaire avec Fidji. Le succès n’est toutefois pas garanti partout pour l’Australie. La semaine dernière, Anthony Albanese devait se rendre à Vanuatu pour signer un accord du même type. Mais cette signature a finalement été repoussé aux calendes grecques, faute d’accord au sein du gouvernement Vanuatais, certains membres craignant en effet qu’en concluant un tel accord, cela pourrait mettre un coup d’arrêt aux investissements venus d’autres pays... notamment de la Chine. 
Le Népal dont la jeunesse, en une semaine, a fait fuir son gouvernement, au prix de 72 morts et plus de 2 000 blessés. Une séquence politique qui a conduit à la nomination de Sushila Karki, ancienne cheffe de la Cour Suprême, notre envoyé spécial Côme Bastin l’a suivi de près... Les Népalais sont-ils optimistes ?  Ils sont soulagés, car ces victimes et le saccage des institutions politiques lundi dernier ont choqué. Les Népalais sont plutôt calmes et n’ont pas l’habitude de telles insurrections. La précédente révolte, qui avait conduit à l’adoption d’une constitution parlementaire et la fin de la monarchie en 2015, s’était déroulée de façon pacifique. Jeudi, en plein couvre-feu, il n’était pas exclu que le pays s’enfonce dans le chaos. Les habitants de Katmandou se réjouissent que la nouvelle génération en colère et ce qu’il restait de l’État, c’est-à-dire le président et l’armée, soient tombés d’accord rapidement sur une transition politique.  Sushila Karki semble à même de rassembler et répondre aux exigences des jeunes contre la corruption, par son passé de magistrate. Cependant, il faut se méfier de l’unanimisme de façade, après de tels événements, car ceux qui n’y ont pas participé se font oublier mais ne disparaissent pas.  À lire aussiNépal: la nouvelle Première ministre s'engage à respecter les revendications des manifestants Peut-on parler d’une révolution ? C’est une question presque philosophique ! Certains Népalais utilisent le terme de révolution, j’ai choisi de ne pas le faire car je pense qu’une révolution s’accompagne d’un nouveau régime politique, porté par une nouvelle idéologie, comme la révolution française, la révolution soviétique, les indépendances après-guerre. Or ici, passé l’image du parlement en feu, rien de tout ça. La Constitution reste en place, on a l’arrivée des élections anticipées suite à la démission d’un gouvernement. Certains Népalais exigent de choisir leur dirigeant au suffrage direct, cela nécessiterait certes d’amender la constitution, mais pas de la chambouler.  En fait, il s’agit plutôt de défendre la Constitution existante. La jeunesse a le sentiment que le gouvernement précédent, éclaboussé par des scandales, ne respectait pas l’esprit de la démocratie. C’est similaire aux révoltes du Bangladesh, où la Première ministre Sheikh Hasina a été chassée et du Sri Lanka, où le président Rajapaksa a pris la fuite. À lire aussiBangladesh: un an après la fuite de Sheikh Hasina, le pays réforme sa Constitution Certains parlent désormais de « printemps d’Asie »... Trois régimes qui tombent en trois ans, ça commence à faire beaucoup. Et surtout parce qu’au Népal, au Bangladesh et au Sri Lanka, un même schéma semble se dessiner, même s’il y a bien sûr des différences également. Ce sont toutes des révoltes portées par la jeunesse et pas par les partis d’opposition, ce qui témoigne d’un discrédit général envers la classe politique. Ce sont des mouvements décentralisés, qui s’organisent souvent grâce à internet et se trouvent des porte-parole sur le tas une fois que les dirigeants ont été délogés. Ce ne sont pas des mouvements révolutionnaires, ni pour un régime économique très marqué à gauche, ni pour un régime très conservateur ou religieux. Il s’agit plutôt de rétablir l’ordre démocratique considéré comme volé par la corruption et le populisme autoritaire, fréquents en Asie du Sud.   À lire aussiSri Lanka: accusé de corruption, l’ex-président Ranil Wickremesinghe en détention provisoire
Fin août, les réseaux d’opposants à Pékin s’agitent sur la toile. Des messages contre « la tyrannie du Parti Communiste » se sont affichés durant près d’une heure sur des immeubles de Chongqing, mégalopole de 32 millions d’habitants. Une performance inédite, réalisée à distance par un dissident déjà au loin. RFI a pu s’entretenir avec lui. « Je voulais éveiller la conscience d’un maximum de personnes, raconte Qi Hong avec simplicité depuis le Royaume-Uni, où il est parti avec sa famille. J’ai encore des proches en Chine, donc l’objectif était de réaliser cela depuis un endroit sûr. C’est pour ça que j’ai opté pour la méthode des projecteurs ». La décision de quitter son pays prise, il décide de partir avec panache. Après avoir acheté les billets d’avion, il se procure le matériel nécessaire à son coup d’éclat. Dans une chambre d’hôtel du quartier universitaire de Chongqing, il projette des messages innocents sur les murs des gratte-ciels voisins, termine ses préparatifs et part avec sa famille. Neuf jours plus tard, le 29 août vers 22h, quatre messages s’affichent dans la nuit chinoise : « Sans le Parti Communiste Chinois une nouvelle Chine peut exister », « La liberté n’est pas un cadeau, elle doit être conquise », « Levez-vous, ceux qui refusent d’être des esclaves » ou encore « Pas de mensonges, seulement la vérité. Pas d’esclavage, la liberté. La tyrannie du Parti Communiste doit prendre fin ». Rapidement, la police cherche à trouver et arrêter la personne derrière ce rare acte de défiance. Cinquante minutes plus tard, ils débarquent dans une chambre d’hôtel. Vide. Ils trouvent simplement une webcam qui les filme, incrédules. « Je voulais enregistrer tout l’événement », se rappelle Qi Hong, amusé. « Tout était préparé et puis à la dernière minute, j’ai aussi laissé une lettre. Pour ne pas laisser en difficulté le personnel de l’hôtel, mais aussi pour expliquer les raisons derrière ma décision ». Dans ce texte, il choisit d’interpeller directement les fonctionnaires : « Vous êtes peut-être bénéficiaires (du système) aujourd’hui, mais un jour vous en serez les victimes. (…) Les crimes du Parti communiste dans ce pays sont innombrables. S’il te plaît, essaie de ne pas aider ni encourager leurs atrocités ». « Je ne pense pas être un guerrier ou mériter d’être mis sur un piédestal » L’arrivée des policiers dans la chambre vide, cette lettre, comme les messages projetés sur les immeubles ont été diffusés sur le compte X d’un dissident chinois, et ont été vus 20 millions de fois. Si certains critiquent un geste inconscient ou défendent la qualité de vie dont disposent les Chinois en comparaison à d’autres pays, les réactions restent majoritairement positives (NDLR : pas nécessairement représentatif de l’opinion publique chinoise X n’est pas autorisée en Chine) et saluent le courage de celui parfois qualifié de héros, ayant dénoncé par cet acte l’utilisation de la technologie comme bras armé du contrôle du Parti Communiste Chinois. « Je ne pense pas être un guerrier ou mériter d’être mis sur un piédestal, estime Qi Hong. Les gens m’ont surestimé, je suis quelqu’un d’ordinaire et je n’avais pas pensé à tout ça avant de me lancer », s’amuse-t-il. Il raconte s’être notamment inspiré de Peng Lifa, un homme ayant manifesté seul sur un pont de Pékin en affichant des banderoles contre le Parti et ses strictes mesures de confinement durant la pandémie de Covid. Victime de disparition forcée, il aurait été condamné à neuf ans de prison selon des organisations de dissidents chinois. Dans ses modèles, il cite aussi Mei Shilin, 27 ans, qui a déployé des banderoles dans le Sichuan en avril. « Je n’avais pas le courage de sacrifier ma vie, comme d’autres l’ont fait », souffle M. Qi. Son parcours raconte la désillusion d’un Chinois pas forcément destiné à devenir un opposant. Né pauvre, autour de Chongqing dans les années 1980, il est l’exemple de l’accession à la classe moyenne, destin commun de nombreux Chinois. « Avant 2006, je pensais juste à avoir un logement stable et manger à ma faim… ». Après de nombreux emplois dans des usines et diverses entreprises, il parvient à s’offrir une vie décente grâce au commerce en ligne et à acheter un appartement à Pékin. Graduellement, sa conscience politique commence à se forger. « J’ai toujours détesté la pratique du guanxi (piston), où il faut entretenir des relations avec les dirigeants pour réussir, donner des cadeaux. (…) Après les Jeux Olympiques en 2008 et notre adhésion à l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), nous avions plus de contact avec la communauté internationale et certaines valeurs comme les droits de l’homme ». Des critiques latentes, un agacement face à la propagande qu’il lit dans les manuels scolaires de sa fille commencent à poindre, sans pour autant s’exprimer au grand jour. Mais à partir de 2018, tout s’accélère. « Xi Jinping a voulu modifier la constitution pour rester au pouvoir et puis sa campagne anti-corruption m’a fait douter davantage à son sujet. Elle était particulièrement féroce, sans pour autant améliorer nos vies ». Alors, il exprime pour la première fois des critiques ouvertes envers « l’empereur » sur les réseaux sociaux, sans conséquence. La pandémie et l’éveil politique La pandémie achève sa mue politique. « Ils enfermaient des dizaines de milliers de personnes et quelques personnes contrôlaient tout, nous faisaient vivre comme des esclaves. Certains ne pouvaient pas travailler, il était impossible de faire un pas sans test PCR. J’ai commencé à ressentir davantage de colère ». Le mouvement des feuilles blanches contre la politique zéro Covid et la censure, plus grand mouvement de contestation en Chine depuis le massacre de la place Tiananmen en 1989, a été une révélation pour lui. « Je pense que cela nous a permis d’être déconfinés plus rapidement. Mais regardez, des jeunes qui ont participé au mouvement des feuilles blanches ont été arrêtés. À chaque fois que nous obtenons des droits, quelqu’un paie le prix en coulisse », estime Qi Hong. Désormais au Royaume-Uni, son avenir et celui de ses enfants est incertain. « Certains dissidents à l’étranger m’ont mis en garde, et je sais que le PCC (Parti Communiste Chinois) a une grande influence à l’étranger ». S’il se dit inquiet, c’est avant tout pour maintenir un niveau de vie suffisant et scolariser ses enfants. Ses comptes bancaires ont été gelés et son retour au pays est désormais impensable. « Si je rentre je pense que je suis condamné à une dizaine d’années de prison… ».
En Indonésie, la plus grande nation de l’Asie du Sud-Est, le calme précaire règne dans les rues, quadrillées par l’armée et la police déployées en force pour réprimer un mouvement de contestation. Au moins dix personnes ont été tuées, vingt sont toujours portées disparues, et au moins 3 000 manifestants ont été arrêtés. Chômage, emplois précaires, inégalités sociales, les causes pour ces troubles sont profondes. Mais à l’origine, ce sont des privilèges accordés aux députés qui ont déclenché la colère. Comment accepter qu’un député ait droit à cinquante millions de roupies soit 2 600 euros par mois pour se loger, alors que le salaire minimum à Jakarta est dix fois moindre ? C’est contre cette indemnité jugée excessive que des milliers d’étudiants ont manifesté devant le parlement à Jakarta le 25 août. Mais trois jours plus tard, le mouvement pacifique bascule dans la violence, lorsqu’un véhicule blindé de la police fauche un chauffeur de moto-taxi, lui roule dessus et le tue. « Tout acte violent déclenche la colère violente » La vidéo de cette mort brutale enflamme les réseaux sociaux et choque l’opinion publique. Le pays s’embrase. Jets de cocktails Molotov, des résidences d’élus, un parlement local et des commissariats incendiés, c’est le chaos qui s’installe dans plus de cinquante villes. Affan Kurniawan, le jeune conducteur tué, devient le symbole de cette contestation, et le vert fluo de son blouson, celui des trois millions de livreurs, est depuis la couleur du mouvement. « Il a été tué sous les yeux de la foule et des caméras, tout acte violent déclenche la colère violente », commente le chercheur français d’origine indonésienne Anda Djoehana Wiradikarta. Il comprend la colère des manifestants : « C’est révélateur de la manière dont on traite les petits gens, c’est la manière dont ça se passe pour les plus démunis, avec les coupes dans l’éducation et la santé, rien ne s’arrange pour les plus démunis ». Aanda Djoehana Wiradikarta prédit que la situation ne se calmera pas, tant que le président Prabowo Subianto n’a pas satisfait les revendications des manifestants, à moins qu’il n’instaure un climat de peur.  Même si dans un geste d’apaisement, Prabowo Subianto a annulé l’indemnité pour les députés, c’est par la peur qu’il tente de reprendre le contrôle. Il a qualifié les manifestants de « traîtres » et de « terroristes », en donnant l’ordre à la police d’agir avec fermeté. Résultat : au moins dix personnes sont tuées, vingt sont toujours portées disparues, et au moins 3 000 manifestants ont été arrêtés. « La goutte qui a fait déborder le vase » « La mort du chauffeur de moto-taxi, un métier proche des Indonésiens ordinaires, est juste la goutte qui a fait déborder le vase. Les gens sont déçus et furieux depuis longtemps, estime Wyria Adiwena, directeur adjoint de l’ONG Amnesty International basé à Jakarta, l’inégalité augmente, des emplois décents sont rares, les impôts sont en hausse. Et la population n’est pas dupe, elle voit comment la police est utilisée pour réprimer la contestation. Au lieu de chercher le dialogue, le gouvernement répond par le gaz lacrymogène et des canons à eau ».   Malgré les heurts, après avoir annulé son voyage dans un premier temps, le président a tenu à aller à Pékin pour assister à la parade militaire mercredi, 3 septembre. Une façon de montrer à son grand investisseur, la Chine, que le calme est revenu et qu’il contrôle la situation. Mais le président Prabowo marche sur une corde raide. L’ex-général est déjà très critiqué pour avoir autorisé les militaires à occuper des postes civils, alors que le chômage est en hausse. Là, le président s’enfonce dans sa pire crise depuis son arrivée au pouvoir en octobre 2024. À lire aussiIndonésie: une ONG fait état de dix morts à la suite des affrontements entre la police et les manifestants
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