La kora, de Victor Schœlcher à Ballaké Sissoko #SessionLive
Description
La kora est au centre de cette émission, avec le virtuose malien Ballaké Sissoko, en duo avec Lorenzo Bianchi Hoesch, puis entretien avec Alexandre Girard-Muscagorry.
La rencontre d’un instrument ancien et ancestral comme la Kora entre les mains d'un virtuose comme Ballaké Sissoko et d’une électronique consonante mais complexe, élargissant les possibilités de l'instrument même, comme celle proposées par Lorenzo Bianchi Hoesch, c’est ce qu’offre Radicants. Il s’agit d’une recherche de nouvelles voies qui ont à voir avec l'immersion, l'abandon, l’hypothèse de nouvelles racines, plutôt qu’avec leurs négations ou leur défense aveugle et faussement respectueuse.
Aujourd'hui, ces nouvelles racines sont à inventer : des racines dynamiques, en évolution et capables de soutenir l’autre. Respecter l’idée d’enracinement et justement savoir le projeter dans un monde kaléidoscopique et facetté. Ceci est le fil rouge, l’idée abstraite qui soutient ce projet et qu’on veut défendre.
La curiosité et l’ouverture de Ballaké Sissoko permet la construction d’un vrai territoire d’échange dans lequel l’électronique se veut accueillante des sonorités de la Kora. Il n’y a donc pas d’opposition entre deux mondes - acoustique et électronique, traditionnel et contemporain, africain et occidental - mais plutôt acceptation, collaboration et prise de risque. Lorenzo Bianchi Hoesch développe depuis longtemps un langage original d’improvisation avec l’ordinateur, en créant ses propres outils informatiques, et en utilisant de nombreuses interfaces. Il s'agit donc de bâtir un réel dialogue entre les deux musiciens dans lequel, si la Kora est la source de tout, l'électronique est le développement, la résonance, et la forme. L’interplay est donc un mot-clé pour ce projet, et la méthode de recherche même, le noyau du processus de création. Un dernier aspect fondamental est l’immersion sonore. Musiciens et public partagent le même espace acoustique et sont immergés dans un univers sonore spatialisé, métaphore de l'enracinement dans un nouveau monde.
Titres interprétés au grand studio
- Sené Live RFI
- Keneya avec Emile Parisien, extrait de l’album
- Berceuse Live RFI.
Vidéo
- Line Up : Ballaké Sissoko, kora, Lorenzo Bianchi Hoesch, machines.
Son : Mathias Taylor, Benoît Letirant, Camille Roch.
► Album Radicants (Ornithology 2024).
Site Ballaké Sissoko - Site Lorenzo Bianchi Hoesch.
Puis nous recevons l’historien d’art Alexandre Girard-Muscagorry pour la sortie du livre « La kora de Victor Schœlcher, L’empire d’un instrument ouest-africain ».
Victor Schœlcher (1804-1893), journaliste et homme politique élu député en Martinique puis en Guadeloupe, a marqué l’histoire en se faisant l’architecte du décret de l’abolition de l’esclavage en France, en 1848. Passionné par les arts, il établit une collection de nombreux objets, notamment acquis dans le cadre de voyages dans les îles de la Caraïbe, en Égypte ou en Sénégambie. Il y voit le signe de l’humanité de peuples, pourtant réduits en esclavage par la traite. Schœlcher est néanmoins un fervent défenseur de la colonisation.
C’est au cours de son voyage en Sénégambie en 1847 que Victor Schœlcher fait l’acquisition d’une kora, un instrument traditionnel joué depuis le XIIIè siècle dans la région. En métropole, l’objet intègre les collections privées de l’homme politique avant d’être exposé dans de prestigieux musées. En effet, Schœlcher œuvre largement à la réception d’objets non européens dans les musées français.
Au fil de la colonisation, puis des décolonisations, la kora est l’objet de multiples appropriations et transformations : après avoir servi la mise en scène du monde sénégambien lors des Expositions universelles françaises, elle devient un véritable emblème lors des indépendances ouest-africaines.
Cette kora compte parmi les premiers instruments non occidentaux exposés au Musée de la musique de Paris. Elle l’est encore aujourd’hui.
Alexandre Girard-Muscagorry est historien de l’art et conservateur eu Musée de la musique de Paris, chargé des collections d’Afrique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques. Il poursuit parallèlement une thèse de doctorat à l’EHESS consacrée au parcours de collecteur et collectionneur de Victor Schœlcher et aux usages des objets dans son projet abolitionniste et colonial. Co-commissaire en 2022 de l’exposition Fela Anikulapo-Kuti : rébellion afrobeat (20 octobre 2022-411 juin 2023), il prépare actuellement avec l’équipe du Musée de la musique, un réaménagement du parcours de musée vivant, visant à embrasser une approche plus globale du patrimoine instrumental.
Morceaux choisis par Alexandre Girard-Muscagorry
01_Sunjata par Foday Musa Suso
02_Cet enregistrement d’un joueur de kora à l’Exposition universelle de 1900 par Léon Azoulay et conservé aux Archives du Crem. Il s’agit du plus ancien enregistrement de kora connu !
03_Cet enregistrement d’un joueur de soron en 1952 en Guinée par Gilbert Rouget : le soron est un cousin guinéen de la kora. La particularité de cet enregistrement, c’est qu’on entend un instrument avec des cordes en peau et non en nylon, comme sur les anciens instruments
04_ Jali Nyama Suso
05_ konkoba par Toumani Diabaté, extrait de l’album Kaira.