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La Story Nostalgie
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La Story Nostalgie

Author: Nostalgie Belgique

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Depuis plus de 20 ans, Brice Depasse vous emmène dans les coulisses des légendes du rock, de la pop, et des années 70 et 80 dans. Ce podcast incontournable vous fait voyager à travers les époques, en vous dévoilant les anecdotes les plus croustillantes et les histoires fascinantes des plus grands artistes de notre temps.

Avec "La Story Nostalgie", plongez dans l'univers des icônes comme les Beatles, les Rolling Stones, Johnny Hallyday, Madonna, Queen, ou encore Michael Jackson. Brice Depasse vous raconte les récits inédits derrière les albums mythiques, les concerts légendaires comme Live Aid, et les moments de gloire des groupes qui ont marqué l’histoire de la musique. Découvrez comment Freddie Mercury a captivé le monde entier, comment ABBA a conquis les charts, ou encore les secrets de studio qui ont façonné des tubes intemporels.

Chaque épisode est une plongée passionnante dans le making-of des carrières de ces artistes exceptionnels, avec des histoires qui vous feront revivre les vibrations du rock des seventies, l'effervescence des eighties, et bien plus encore. Brice Depasse vous fait redécouvrir des albums cultes, des sessions d’enregistrement mémorables, et les concerts qui ont marqué toute une génération. Que vous soyez fan des ballades de Jean-Jacques Goldman, des envolées vocales de Céline Dion, ou des shows spectaculaires de Robbie Williams, "La Story Nostalgie" est votre passeport pour un voyage musical inoubliable.

Laissez-vous emporter par les récits fascinants sur des artistes comme Daniel Balavoine, Serge Gainsbourg, France Gall, Michel Sardou, et Blondie, tout en explorant les liens entre musique et cinéma, des bandes originales aux collaborations légendaires. Ce podcast vous fait revivre l’esprit de Woodstock, les folles tournées, et les sessions d'enregistrement qui ont donné naissance à des albums de légende.

Que vous soyez un nostalgique des seventies ou un amoureux des eighties, "La Story Nostalgie" est le rendez-vous incontournable pour tous les passionnés de musique. Branchez vos écouteurs et laissez Brice Depasse vous raconter ses histoires inédites.
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Si Sean Connery a voulu, assez vite, prendre ses distances avec le personnage de James Bond, c’est parce que les producteurs de cinéma ne voulaient pas lui donner de rôles importants dans de grosses productions car ils disaient que les gens ne verraient en lui que l'agent 007. Pourtant quand vous le voyez en vrai, à l’époque, avec ses moustaches et son cheveu rare, il faut beaucoup d’imagination. Ce n’est plus la même personne. Disons plutôt qu’ayant été le premier à l’incarner au cinéma, c’est son nom sur une affiche qui est devenu synonyme de James Bond.Alors, quand Daniel Craig est pressenti par Barbara Broccoli, la fille du producteur emblématique de la série qui compte déjà vingt films, la question ne se pose plus. Il est déjà le numéro 6, sans compter les anecdotiques. Il va d’ailleurs refuser la fameuse moumoute qu’avait acceptée Sean Connery pour ressembler au héros des romans de Ian Fleming. Au grand dam de certains fans de la série qui ne supportent pas ses cheveux blonds et vont monter un site pour appeler au boycott du film. Charmant ! Mais pour le reste Craig va offrir un réalisme aux situations vécues qu’aucun acteur n’avait pu jusque-là apporter en jouant lui-même une bonne partie des scènes d’action. Vous la voyez la poursuite et le combat sur une grue de travaux de plus de quarante mètres de haut ? Ça fout les foies rien que de l’imaginer, hein ? Et on se dit, c’est un truc de cascadeur professionnel. Et bien malgré sa peur du vide, Daniel Craig va y aller, là-haut, et permettre ainsi des gros plans réels dont aucun réalisateur de film d’action ne pourrait rêver. Dans une bagarre, il va même perdre une dent. Mais pas question de quitter le tournage, le dentiste se déplace pour réparer les dégâts et on reprend. Voilà qui explique le réalisme de l’engagement dans toutes ces terribles scènes qui nous ont scotchés. On les sent, les coups, et pour cause.Et bien sûr, comment ne pas évoquer la terrible scène de torture avec Mads Mikkelsen. Il y va tellement fort que la plaque protectrice sous le siège sur lequel Craig est attaché, va rompre sous le choc. Il ne sera heureusement pas blessé, imaginez le truc, mais la scène est tellement violente et réaliste que la production et le réalisateur vont un moment songer la couper au montage. Non vraiment, Daniel Craig fait tout ce qu’on lui demande et même au-delà pour être au plus près de la réalité de ce que le film raconte. Et c’est sans doute cela que vous avez ressenti dans votre fauteuil, et qui fait qu’aucun James Bond ne vous avait jamais autant touché. Et je ne parle pas de la scène où l’acteur hyper basé sort de l’eau en arrivant sur la plage aux Bahamas, vêtu d’un maillot de bain. Elle était moins physique, quoique, mais elle est restée gravée dans beaucoup de mémoires. Et à force d’y aller, jour après jour, comme un coureur de marathon, Daniel Craig finit par créer sa propre chance, au point de faire avaler les insultes blessantes de ceux qui n’y croyaient pas au vu de sa filmographie et de la couleur de ses cheveux. Un véritable coup de tonnerre qui ressuscite un James Bond ramené à ses débuts, et au-delà. Au point qu’on se demande aujourd’hui, qui pour faire mieux ?
A-t-on déjà vu ça ? Un James Bond dont l’action débute quelques minutes après la fin du précédent. Jamais. Avec Quantum of Solace, en 2008, Il y a véritablement une rupture dans la franchise et bien sûr, une adéquation avec l’air du temps qui inscrit de plus en plus le langage cinématographique dans le cadre des séries. Oui, Daniel Craig incarne le premier James Bond à évoluer dans une histoire qui se prolonge, de film en film. Un reboot, quand on reprend son histoire à ses débuts, premier roman de son créateur Ian Fleming, mais on la prolonge, tout en racontant le passé de l’agent 007 mais aussi sa fin. C’est culotté, il fallait y penser, oser surtout, et ça marche.On n’a jamais vu une incarnation plus brute, c’est-à-dire proche de l’homme qu’il faut être pour assumer une telle tâche. Et donc, en même temps, plus humaine. La vie de James Bond ne se résume pas aux 90 minutes sur papier d’un scénario hollywoodien, avec ses pirouettes, raccourcis et bons mots. Quand James Bond se bat, ça fait mal, il se blesse, il souffre dans sa chair. Et quand il perd quelqu’un, il balise jusqu’à tout foutre en l’air. Car si on vit dans une époque désormais lointaine du James Bond misogyne et brutal avec les femmes, il ne faut pas oublier l’ADN du personnage qui déteste les réceptions guindées, les vernissages et cocktails où on se pointe en smoking pour raconter des banalités à des gens qui ne sont là que pour se montrer. D’ailleurs son nom dit tout de lui, et quand il le dit, on a compris : c’est sec comme une détonation, c’est vrai, mais c’est surtout direct et franc !Alors c’est vrai qu’il habite Chelsea, qui n’est pas le plus déshérité des quartiers de Londres. Mais c’est un rez-de-chaussée qui donne sur un square où il vit comme un vieux garçon. Une pièce de séjour avec une bibliothèque remplie de livres, une chambre au papier peint blanc et or mais sous l’oreiller, un pistolet toujours chargé. La salle de bains est le théâtre de ses douches froides suivies de douche bouillante et bien sûr de ses pompes, tractions et abdominaux matinaux, ainsi que d’autres exercices de musculation. Bien sûr que son corps est usé avant l’heure, il lui en a trop demandé au cours de ses missions et entraînements, le médecin du MI6 lui a déjà fait savoir et l’a communiqué à la hiérarchie. Plus d’une fois. Et bien tout ça se lit dans l’attitude de Daniel Craig à l’écran. Dans le regard de cet Anglais pas comme les autres, mais Anglais quand même, qui débute sa journée avec des œufs brouillés et du bacon américain.C’est donc plus une véritable humanisation qu’une résurrection qui nous a été offerte par Daniel Craig pour le personnage de James Bond il y a maintenant vingt ans. Tellement incarné que même en vacances, au soleil, entre deux tournages, ce n’est pas l’acteur que montraient les photos des paparazzis mais James Bond lui-même, toujours en alerte, toujours prêt, car pour se planquer de tous ceux qui lui en veulent, le monde ne suffit pas. Pas étonnant qu’il ait voulu y mettre car jamais dans l’histoire du cinéma, un comédien n’a été rattrapé par un personnage, tant il est devenu crédible.
Mai 2006, le plus grand bateau à voiles qu’on y ait vu depuis 300 ans entre dans le grand Canal de Venise devant des caméras de cinéma, avec à son bord, James Bond. Le nouveau James Bond, je devrais dire, tellement nouveau que personne ne l’a encore vu à l’écran. Il se nomme Daniel Craig et doit à ce moment avoir un moral aussi inoxydable que celui qu’il incarne pour la première fois. Depuis quelques mois, en effet, on assiste à un bashing monumental sur internet, un site a même été créé pour tous ceux qui trouvent que, non, Daniel Craig, N’est PAS James Bond. Il ne l’est tellement pas que ces fans de la série proclament qu’ils boycotteront le film. Ils n’iront pas le voir ! Que lui reprochent-ils ? Déjà, il est trop petit : 1m78. C’est dix centimètres de moins que Sean Connery, qui reste le comédien emblématique de la franchise, celui qui l’a lancé, incarné en premier. Et s’il portait, déjà à l’époque, une prothèse capillaire, en clair, une moumoute, c’est parce que James Bond a une toison dense et sombre.Mais Daniel Craig ne veut rien entendre, il ne se fera pas teindre les cheveux pour incarner James Bond. Il a juste prévu de se les faire couper court pour avoir l’air plus brutal, plus brut de décoffrage. Car si, l’acteur a, au départ, décliné l’offre pourtant faramineuse qui lui a été faite, c’est justement parce qu’il trouve que ces films obéissent tous à la même formule. Mais quelques mois plus tard, lorsque la production lui fournit le scénario, il change d’avis car il est justement question de rompre avec la routine et surtout l’image d’un James Bond, personnage de film de divertissement. Et c’est ce que Daniel Craig pense. James Bond, même s’il est dans le bon camp, au service de sa majesté, c’est un tueur. Et un tueur quand il rentre dans une pièce, observe aussi bien les gens que les portes de sortie, ça doit se lire dans son regard, créer un charisme particulier. Et ça change tout au rôle, à l’attitude du personnage auquel il faut alors donner de la profondeur en lui créant une histoire, celle qui l’a amené à devenir l’homme sombre, tourmenté, mais décidé, qu’il est devenu.Et ce James Bond, là, né sous les traits de l'emblématique Sean Connery, on ne l’a encore jamais vu à l’écran. Car ce regard, cette attitude, Daniel Craig les connaît bien, il est né à Chester, dans le grand bassin ouvrier, le moteur de l’Empire britannique industriel, avec un père, gérant de pub. Les hommes rudes, les types qui cognent pour un oui ou un non gavé de pintes et de whisky, il connaît. Puis il a grandi à Liverpool, après le divorce de ses parents, un autre lieu où on vit à la dure dans des rues sombres fréquentées par des mecs relous qui ont vu les quatre coins de la Terre à fond de cale. Ses mauvais résultats à l’école ont conduit sa mère à l’inscrire dans une institution de charité, une école de théâtre réservée aux enfants de la classe ouvrière en décrochage scolaire. Alors, on ne s’étonnera pas de lire dans ce regard toute une histoire réellement vécue que le comédien a appris a exprimé dès son plus jeune âge et qui fait de lui, le plus crédible des agents double zéro, celui qui va battre le record d’entrées de la série.
Vous connaissez Michael Wilson et Barbara Broccoli ? Ce sont les producteurs de la série James Bond que leur beau-père et père, Albert Broccoli, a eu la bonne idée d’acheter à son créateur, Ian Fleming, dans les années 60. Et ben, ils sont pas sympas. C’est vrai, Pierce Brosnan, qui a succédé rapidement à Timothy Dalton dans le rôle de l’agent 007 au milieu des années 90, a plu au public dès sa première interprétation. Goldeneye, Demain ne meurt jamais, Le monde ne suffit pas, film après film, on continue à récolter plusieurs fois l’énorme mise de départ des coûts de production et de promotion. Tout va bien.Et pourtant, en 2003, un an après la sortie du quatrième film, Meurs un autre jour, alors qu’il est en train de tourner un autre film aux Bahamas, il reçoit un appel de son agent comme quoi les négociations pour le prochain Bond, prévu dans quelques mois, ont échoué. Au téléphone, il demande aux producteurs s’ils ont renoncé à leur projet de faire Casino Royale, quel n’est pas son étonnement d’entendre : “si, mais plus avec toi. Tu es trop âgé pour le rôle, on te remercie.” Clac ! C’est vrai qu’il y a de cela mais surtout, la franchise ronronne. Il faut la relancer avant qu’il ne soit trop tard, le cinéma a bien changé ces dernières années, il faut du sang neuf.Le croirez-vous ? Deux cents acteurs vont être considérés et approchés. Michael Fassbender, Rupert Friend, Sam Heughan, oui le bel Ecossais de Outlander, Henry Cavill qui va devenir Superman, Man of Steel et The Witcher, ou encore Ewan McGregor qui aura droit à plusieurs rencontres. Mais n’allez pas croire que tout le monde se met à genoux devant le Graal du Box Office. Il y a des Christian Bale, Hugh Jackman, Clive Owen et Ralph Fiennes qui disent non. Chacun a ses raisons. Par exemple, Owen ne se voit pas dans le rôle et Fiennes ne veut plus d’une franchise, il va déjà être Voldemort dans Harry Potter. Et oui, je sais, il va finalement rejoindre James Bond dans le rôle de “M”, à partir de Skyfall. Alors qui pour interpréter un James Bond de 29 ans, en début de carrière ? Le reboot idéal sur le papier ! En fait, dit alors la directrice de casting, le problème est que les acteurs dans la vingtaine n’ont pas le charisme et la stature pour incarner l’image d’homme mûr que nous avons de James Bond.Et que diriez-vous alors de Daniel Craig ?Il a quel âge ?35 ans.Ah il a la cote en Grande-Bretagne, c’est un acteur de théâtre célèbre qui a connu récemment un succès auprès du grand public avec une série et surtout, c’est une figure du cinéma britannique indépendant. Il a d’ailleurs bien regretté d’avoir accepté deux ans auparavant de jouer dans Tomb Raider aux côtés d’Angelina Jolie en Lara Croft. Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle, contacté, Daniel Craig va dire non au rôle de James Bond. Mais que ça reste entre nous, hein ?
C’est un 14 octobre 2005 que nous avons appris qu’un nouvel acteur incarnerait désormais James Bond dans la franchise entrée dans sa cinquième décennie de succès. Des succès divers et bien sûr, des incarnations variées.Le petit nouveau dénommé Daniel Craig sera le sixième acteur officiel entre guillemets, et franchement, sur le coup, on n’aurait pas misé un penny sur l’énorme phénomène qu’il allait devenir. Car oui, vous le savez, les temps avaient vraiment changé en ce début de XXI° siècle. Des temps qui ne convenaient plus très bien au matricule 007, à cet univers des prestigieux services secrets britanniques. La grande puissance de l’empire était désormais loin, plus encore que le Swinging London ; le bloc des méchants de l’est également (on ne doutait de rien) ; et que dire de Spectre, l’internationale du crime, rejoint par la réalité des cartels latino-américains. Et pourtant, le reboot moderne et le charisme de Daniel Craig vont accomplir le miracle de ressusciter le personnage. L’interminable attente pour connaître son successeur après son départ volontaire en sera la preuve. C’est vrai que pour le même prix, en 2005, ç'aurait très bien pu être le contraire : mauvais résultats au box office, désaffection du public par manque d’intérêt et méchante concurrence d’un tas d’autres franchises spectaculaires. Alors, que s’est-il passé ?Au début du siècle, on avait fini par faire le tour des romans et nouvelles écrits par Ian Fleming, disparu en 1964 à l’âge de 56 ans. Mais la saga continuait à faire recette, gentiment, on dira. Ca rapportait toujours plusieurs fois la mise de départ malgré une relance avec l’acteur Timothy Dalton remplacé rapidement par Pierce Brosnan. Alors au lieu de tourner un nouveau avec ce dernier, les producteurs prennent le risque de lever l’option avec Brosnan pour choisir un nouveau comédien. La raison ? Revenir aux débuts, Casino Royale, le seul roman qu’ils n’avaient pas encore adapté car le seul sur lequel ils n’avaient pas achetés les droits à l’époque. Et donc, il faut un Bond plus jeune. La vérité est surtout que le projet remonte au milieu des années 90 où, après Pulp Fiction, Quentin Tarantino leur avait proposé d’adapter Casino Royale, avec Pierce Brosnan. Ils avaient dit non, car ils venaient de lancer la production de Goldeneye, qui fut par ailleurs un gros succès. Tarantino était revenu deux fois à la charge, et la seconde, en 2003, avait été la bonne. Mais ce serait sans lui. Sans doute parce que Tarantino est trop … trop ! Si vous voyez ce que je veux dire.Alors qui pour remplacer l’Irlandais Pierce Brosnan ? Il a la cote avec le public et il a balancé son éviction à la presse alors que le successeur n’était pas encore choisi. Ça la fout mal. Mais bon, il y a eu pire : la longue mésentente et le départ de Sean Connery, une histoire qui a duré une paire d’années. Alors d’où sort ce Daniel Craig, bien anglais, celui-là, comme le héros des romans. Mais différent, très différent de ses prédécesseurs, un gars qui va sortir la licence de tuer de la légèreté de traitement de l’industrie hollywoodienne.
A Paris (Episode 5)

A Paris (Episode 5)

2025-10-0305:54

Qu’on vienne à Paris le temps d’un week-end ou qu’on y vive, la Seine, on ne peut pas l’oublier. On la longe sur les quais, on l'enjambe sur les ponts, on la franchit sous terre, en métro ou RER. Elle est là depuis toujours, coupant la ville en deux de son imposante masse d’eau. Tellement présente qu’il paraît que les gens sont différents Rive droite et Rive gauche. C’est vrai que c’est pas tout-à-fait la même ville. Qui s’est d’ailleurs longtemps résumée à l’île en son milieu, l’île-de-la cité, et bien sûr la ville romaine, rive gauche, quartier latin qui se terminait place d’Italie, début de la voie romaine menant à Rome. Bref, la Seine sur laquelle se reflètent le sommet de la Tour Eiffel et les tours de Notre-Dame, n’a pas inspiré que les amoureux et les peintres. Pour toute une classe populaire dont vont sortir beaucoup de chanteurs pour qui la mer est trop loin, elle est le seul endroit propice à l’évasion et à la rêverie.La Seine et ses quais, vous y êtes ? Peut-être, êtes-vous passés trop de fois en voiture pour vous lancer dans une promenade à pied, sans savoir que vu de là, en prenant le temps, vous ne voyez plus la même ville.Sous le ciel de Paris … ah elle les connaît, Edith Piaf, les quais de Seine, elle a, toute jeune, chanté sous le Pont-Neuf pour quelques pièces durant des années. Les Quais de la Seine Et Jacques Brel qui dans les années 50 cherche désespérément le succès, vivant dans une chambre de bonne, vient trouver la rêverie et la solitude sur les quais de Notre-Dame, dans l’espoir d’écrire la chanson qui va le rendre célèbre. Sous le soleil exactement Et oui, c’est sur le Pont des Arts, que Serge Gainsbourg a trouvé l’inspiration de cette chanson en regardant le soleil faire scintiller la Seine un soir d’été. Ce n’est pas un hasard, il longeait souvent le quai de l’Hôtel de ville, face à l’île Saint-Louis, quand il habitait sa chambre de la Cité des Arts. La Nuit avec moi, Johnny bien sûr, mais avec Johnny Hallyday, c’est la nuit, et la nuit, la Seine est noire … Mais elle reflète les lumières de la ville et des péniches qui naviguent. Alors Johnny y venait avec sa bande du Square de la Trinité et depuis le Pont Neuf, regardait ces bateaux partir vers un ailleurs où il avait envie d’être.Quai des Amours perdues Quelques années plus tard, c’est Julien Clerc et Etienne Roda-Gil qui y passent, en-dessous, longeant le quai, à la recherche d’inspiration, eux aussi, ils trouvent l’endroit propice à la mélancolie et ça les aide à vivre leur musique et leur texte.San Et si aujourd’hui la Seine émeut toujours des artistes comme Orelsan ou Christine and the Queens, c’est bien sûr Vanessa Paradis et M qui l’ont chantée avec succès, le clip a d’ailleurs été tourné sur une péniche, est-ce un hasard, près du Pont-Neuf.
A Paris (Episode 4)

A Paris (Episode 4)

2025-10-0206:34

Comme toutes les grandes capitales, Paris n’est pas seulement qu’une carte postale. Ce n’est pas une révélation. Tout le monde a vu Tchao Pantin, La Haine ou Entre les murs. Paris a eu et a encore ses quartiers oubliés par les promoteurs, et on est toujours partagés quand il s’agit de dire si c’est un bien ou un mal. Emile Zola racontait déjà au XIX° siècle comment les grands travaux de Paris sous le Baron Hausman avaient aussi été une vaste opération d’expropriation et de corruption. La grande fortune pour les uns et l’exil pour les autres.Car à ceux qui désignent du doigt la délinquance et les enfants dans les rues, je montre dans les mêmes bandes et logements très modestes des Johnny Hallyday, Edith Piaf ou Françoise Hardy. Il ne faut jamais jeter le bébé avec l’eau du bain. C’est ce que se dit probablement le personnage incarné par Coluche dans Tchao Pantin. Lambert, le pompiste, qui se prend de sympathie pour le jeune Ben Soussan dans le sombre quartier de la place de la Chapelle, dans le 19ème arrondissement.Est-ce un hasard si pas loin de là, à Belleville, l’ancien quartier de Piaf, justement, dans le XX° a vu la naissance du groupe Téléphone. C’est l’époque des squats, des apparts partagés par des jeunes en pleine rébellion contre leurs parents comme Jean-Louis Aubert dont le père est un haut fonctionnaire. Le Lycée, ça n’a pas été son truc. A-t-il laissé un mauvais souvenir à l’un des pions, Gérard Jugnot, qui est là pour nouer les deux bouts de sa vie d’artiste, allez savoir. En tout cas, le groupe rock sans nom au départ qu’il forme avec Louis puis Richard et Corinne est tombé comme un sacré pavé dans la mare de la chanson française des années 70.C’est l’époque où le rock français fait rire et sourire. Personne ne trouve, non sans raison, que ça vaille la peine d’investir de l’argent sur des gars qui imitent les Anglais et les Américains. Mais ces jeunes ont des histoires à raconter : des histoires d’ados, des galères de jeunes citadins, des désespoirs face à une société à laquelle ils refusent d’appartenir. Alors oui, Téléphone trouve très rapidement un public de lycéens qui reprend Quelque chose en toi ou La bombe humaine. Et tout ça est sorti du quartier de Belleville, un de ceux que les touristes évitent, qu’iraient-ils y faire ?C’est pourtant de ces quartiers que sortent la musique de Téléphone, de Trust aussi, des comiques comme Coluche, qui aurait voulu être un rocker, vous le saviez ? Il n'avait pas le physique. Et puis des films comme Marche à l’ombre ou Viens chez moi j’habite chez une copine. On y découvre un autre Paris dont on ne parle pas à l’époque, celui des immigrés et des oubliés, et qui va donner une nouvelle génération de musiciens, de rappeurs en français. Ca aussi personne n’y a cru pendant plus de dix ans. Le rap, c’est américain, ça doit être scandé en anglais, pas en français. Et puis il y a eu MC Solaar, qui en a des choses à raconter sur ce Paris, bien loin de la ville romantique à laquelle rêvent les Américains durant toute leur vie.
A Paris (Episode 3)

A Paris (Episode 3)

2025-10-0106:58

Paris vaut bien une Story. Elle valait bien une messe pour Henri IV et encore, pour lui, ce n’était pas un cadeau. Tandis que pour nous, qu’on ait été en voyage de tourisme ou de travail, c’est un souvenir éclairant avec ses monuments célèbres, ses musées, le jour, et ses restaurants et spectacles la nuit. Paris ne dort jamais, c’est vrai, comme si les gens se passaient le relais sur les trottoirs et les places pour ne pas trop se marcher dessus. Ce ne sont pas les mêmes gens qu’on croise non plus, comme Jacques Dutronc le chantait déjà il y a près de soixante ans.Oui, le matin, après les boulangers, les livreurs et les marchands de journaux, ce sont les écoliers qui succèdent aux gens de la nuit qui ont hanté les rues. Serge Gainsbourg essaie de ne pas réveiller ses voisins artistes du cinquième étage de la Cité des arts, dans le Marais. Il en tient une bonne et pourtant, il a une sacrée descente, probablement la plus redoutable de la rive droite. Il a une raison qui est son un problème, il n’a pas envie de retrouver son logement vide. Ce n’est pas qu’il soit grand, le piano prend presque toute la place, il y a surtout qu’il y vit seul, il n’a pas trouvé l’amour, celui qui le retient au port chaque soir. Et alors qu’il s’est enfin couché, les mômes et les ados arpentent les trottoirs sur le chemin de l’école et des lycées. Ainsi du jeune Renaud Séchan qui porte alors très bien son nom puisque les bancs du Lycée Montaigne à Montparnasse, il ne les voit plus trop souvent, séchant les cours pour traîner dans les rues et jouer de la guitare. Tout comme Jean-Louis Aubert, deux arrondissements plus loin, dans le XVI°, il est un peu plus jeune que lui, mais tout aussi passionné par la guitare et le rock’n’roll.En parlant du Lycée Montaigne, celui du sixième arrondissement, Quartier latin, accueille la bande de Paul-Alain Leclerc. Il va obtenir son bac, comme Jean-Louis d’ailleurs, et puis, voisinage de la Sorbonne oblige, s’inscrire en Sciences-Po. Son point de chute est dans son quartier, le bistrot L'Écritoire, Place de la Sorbonne, vue offerte sur un des bâtiments de l’Université, depuis la terrasse où, avec ses amis Maurice Vallet et Etienne Roda-Gil, il refait le monde. C’est d’ailleurs là que vont être écrits plusieurs des premiers tubes de celui qui ne s’appelle pas encore Julien Clerc.Et si vous désirez encore une adresse dans le coin, histoire de montrer que la légende s’écrit parfois dès le plus jeune âge, nous sommes aussi tout près du Panthéon et de sa vaste place emblématique. C’est là que dans vingt ans, Patrick Bruel imaginera les retrouvailles de copains de classe. Il s’y étaient donnés rendez-vous dix ans après s’être quittés, histoire de voir ce qu’ils étaient devenus. Mais on sait que c’est plutôt histoire de se rappeler les grands rêves qu’on avait et dont la plupart n’ont pas été réalisés : on n’en a même pas pris le chemin, sans le vouloir, sans le savoir. Julien Clerc a gardé le cap de ses rêves depuis l’époque de la place de la Sorbonne, Patrick Bruel, lui, a créé un mythe. Vous êtes-vous déjà retrouvé dix ou vingt ans plus tard ? En tout cas, les murs et les rues de Paris gardent toujours l’écho de telles histoires devenues légendaires. D’autres gens les habitent, d’autres y bâtissent leur propre histoire mais quoi de mieux pour les imprimer que d’en faire une chanson que tout le monde chante.
A Paris (Episode 2)

A Paris (Episode 2)

2025-09-3007:47

Si aujourd'hui les Américains débarquent par colonies à Paris, on peut pointer du doigt les responsables : ça a commencé avec Le bossu de Notre-Dame, puis Midnight in Paris et Le Da Vinci Code, et puis ça ne s’est plus arrêté, j’en veux pour preuve Ratatouille ou la série Emily in Paris, puisque ça marche !, et c’est parti en vrille. Mais bon, les touristes américains ne datent pas des années 90. Il y a en Amérique, depuis plus d’un siècle, un véritable mythe du voyage à Paris avec tous ces couples de riches que montre si bien Woody Allen dans son film mais aussi tous ces couples aux revenus modestes qui économisent toute leur vie pour s’y rendre un jour. Voir la Tour Eiffel en vrai, et la vue depuis le troisième étage. Faire les grands magasins, les premiers de l’Histoire, avec leur architecture folle et leurs boutiques de luxe. Descendre les Champs Elysées. Ah ce n’est pas un hasard si la première chose que les Beatles vont faire en 1964, c’est de les descendre en compagnie d’une horde de photographes. On est en plein hiver, il fait glacial mais on va la prendre, cette photo, à la table d’une improbable terrasse ! Bon, il faut dire aussi qu’ils logent pas loin, à l’hôtel Georges V, sur la célèbre avenue du même nom qui converge, comme les Champs Elysées, vers l’Arc de Triomphe. Est-ce un hasard si la clientèle de cet hôtel était au départ essentiellement américaine, elle débarquait en masse des paquebots arrivant de New York. Les Beatles sont les premiers rockers à y descendre et à y loger longtemps, trois semaines, ils seront suivis par les Rolling Stones et tant d’autres comme les Doors. Et c’est ainsi que leur chanteur Jim Morrison débarque seul à Paris en 1970. Il songe en finir avec les Doors mais surtout se plonger dans cette ville qui le fascine. Et donc, ce n’est pas au George V qu’il va se retrouver en immersion : au bout d’une semaine il quitte ce qu’il appelle un bordel à tapis rouge, que je vous conseille quand même de visiter, c’est une merveille, pour un petit hôtel discret en plein quartier du Marais. C’est à la terrasse du Vin des Pyrénées, dans la rue Beautreillis, entre la Place des Vosges, la Bastille et la Seine, que Jim, un verre ou une tasse de café à la main, peut observer les gens passer, parler, vivre. Peu d’entre les passants reconnaissent sa grande carcasse avec sa barbe hirsute. Et quand il n’est pas là, il déjeune un peu plus loin dans la même rue, au Dindon en laisse. Les deux établissements existent toujours mais qui parmi ces milliers de touristes, sait la présence singulière que le lieu garde encore dans sa mémoire. On voudrait être une souris, une mouche sur le mur comme disent les anglo-saxons pour avoir pu entendre ce qui s’est dit à table, ces jours-là, entre Jim, sa petite amie, et ses potes.Car ils sont des millions d’Américains et d’Anglais à y venir encore, dans cette ville qu’ils qualifient de plus romantique au monde. Ils ne connaissent pas les chanteurs français, à part peut-être Edith Piaf, et encore, Jacques Brel, qui ne l’est même pas. Mais faut-il être Français pour être Parisien de coeur, la meilleure preuve est la chanson de Gary Moore, qui en dit tellement sur le fait que Paris est une fête, une ville où l’Amour se grave dans les pierres de ses façades et le pavé de ses ruelles.
A Paris (Episode 1)

A Paris (Episode 1)

2025-09-3006:48

Ce n’est pas un hasard si le film Midnight in Paris a été le plus grand succès de Woody Allen. On y retrouve sa narration particulière, un zeste de Fantastique, beaucoup d’humour, évidemment, mais surtout PARIS.Car Paris n’est pas seulement une ville à visiter pour ses bâtiments, ses restaurants et bistrots et ses spectacles. C’est surtout une ville marquée par la légende. Je vous le demande, y a-t-il un quartier dans cette ville où vous ne pouvez pas vous arrêter sans y entendre l’écho d’un souvenir fabuleux ? Oh oui bien sûr, celui de l’Olympia sur le boulevard des Capucines. On les voit, les monumentales lettres rouges former le nom de Johnny Hallyday, Michel Sardou ou Michel Fugain et le Big Bazar sur la grande enseigne de la façade et y rester des mois et des mois, car la salle ne désemplit pas. On les connaît, les photos en noir et blanc des coulisses débordant de monde avec les Beatles et Sylvie Vartan, de la scène noire éclairée par un unique projecteur sur une Edith Piaf droite derrière un micro, ou Madonna sur une chaise avec les 4 lettres MDNA en fond. L’entrée des artistes en a vu passer dans la rue Caumartin … et puis quand vous revenez sur le boulevard, à droite, l’image d’un Johnny arrivant en décapotable avec une équipe de télé nous ramène dans le Paris en noir et blanc de 1961. La nouvelle idole des Copains va tourner devant l’église de la Madeleine, toute proche, un lieu qui résonne différemment dans notre mémoire désormais.Mais si l’Olympia, la Madeleine, c’est une évidence, alors filons jusqu’à cet endroit comme il y en a mille autres à Paris, une rue étroite où les bâtiments de cinq étages laissent voir peu de ciel bleu. L’immeuble du N°13 ne paie vraiment pas de mine ; une certaine Hélène Mar y vivait après-guerre, elle y a élevé son neveu Jean-Philippe. Alors on l’imagine, l’ado, futur Johnny Hallyday, faire le mur et rejoindre ses copains. Au carrefour tout proche, se dresse en effet l’église de la Trinité avec, de l’autre côté, devant le parvis, le petit square avec ses arbres.Alors qu’est-ce qui nous empêche de nous asseoir sur un banc ? Et de nous demander, qui parmi tous ces passants du Square de la Trinité, ces habitants pour prendre le temps de regarder, d’imaginer, ce qui était à l’époque le repaire de la bande des blousons noirs du quartier. Je dis du quartier car il arrive à la bande à Johnny de se promener en espérant croiser celle du Sacré-Coeur et de pouvoir se friter avec elle. Ah il est loin le bébé Jean-Phi qui s’est fait baptiser dans cette église. C’est aujourd’hui un grand gamin de la bande qui tourne à moto comme Marlon Brando dans L'équipée sauvage. Enfin bon, pas en Harley Davidson, hein, mais en Vespa qu’il emprunte sans le consentement de son propriétaire, le plus souvent. Et qui cherche la bagarre aussi, comme dans La fureur de vivre avec James Dean. Sauf que James Dean ne veut pas se battre dans ce film, ils ont pas bien capté, les titis parisiens, trop fascinés par cet univers de l’adolescence américaine qu’ils découvrent pour la première fois au cinéma. Et c’est vrai que transposé dans ce Paris toujours ancré dans le début du siècle, ça ne le fait pas. Son pote du square Claude Moine, qui ne s’appelle pas encore Eddy, est bien de cet avis. Et puis il y aussi Slip, enfin celui qu’ils ont surnommé comme ça, celui qui se trimballe avec une guitare dans le dos comme Johnny et qui se nomme Jacques Dutronc.
Michel Berger, ce bourreau de travail qui ne savait pas s’arrêter de peur d’être rattrapé par ses angoisses d’homme abandonné, oui, ce Michel Berger avait-il des rêves ? En tout cas, au début des années 80, un immense bonheur lui tombe dessus. Lui qui quinze ans plus tôt avait arrêté de chanter car, disait-il, les Français ne pouvaient pas suivre les Américains et les Anglais sur leur propre terrain, enregistre désormais à Hollywood, Los Angeles. Auteur, compositeur, producteur et mari de France Gall, Berger s’est non seulement remis à la chanson mais en est déjà à son sixième album. 1980 a d’ailleurs été l’année de France et Michel : 5 tubes à eux d’eux et leurs albums respectifs au sommet des ventes, ils ont même séduit Elton John qui souhaite travailler avec France Gall, et lui, bien sûr.Fin août, Michel est donc en studio à Hollywood avec la déjà légendaire équipe d’Elton John pour l’enregistrement des trois premiers titres d’un album à venir. Michel a écrit et composé le premier titre, et écrit le texte du second sur une musique d’Elton qui lui demande des conseils de prononciation en français. Le courant passe très bien entre les deux hommes : Michel tente de s’adapter à son style, Elton lui laisse le champ libre à la production. Précisons qu’il en profite aussi pour essayer les costumes de la prochaine tournée dans le studio juste à côté. Le troisième titre sur lequel ils travaillent ne sera jamais terminé, comme le reste de l’album du duo France Gall – Elton John. Il n’y aura pas de tournée non plus mais un nouvel album pour France Gall qui atteindra pour la première fois le million d‘exemplaires. L’adolescente star des sixties devient alors la favorite des nouvelles radios libres ouvrant le robinet des années Berger qui assoit son influence jusqu’à l’improbable mais très réussi nouvel album de Johnny Hallyday en 1985.Pourtant, la fortune et la gloire ne parviennent pas à tuer cette mélancolie qui pèse sur la vie de Michel Berger. La série noire des proches qui partent trop tôt ne semble pas vouloir cesser : Joe Dassin en 1980, Bernard Hamburger, son frère aîné deux ans plus tard, Daniel Balavoine et Coluche (le parrain de son fils) en 1986. De plus, Michel souffre de ne pas être reconnu par le vrai bizness, celui des anglophones. Son album en anglais n’a pas trouvé preneur en 1982. Quatre ans plus tard, il doit produire Diana Ross mais sa maison de disques ne veut pas d’un inconnu, ce seront finalement les Bee Gees. Enfin, affront suprême, la même année Les Misérables de son vieux copain Claude-Michel Schoenberg triomphent sans partage au box-office américain et anglais. Et puis, coup de pouce d’un fan haut placé en 1988, François Mitterrand fait jouer Starmania à l’Elysée pour Lady Di et le Prince Charles. Et neuf mois plus tard, Michel entame une production de Starmania rebaptisé Tycoon en anglais pour lequel il va réunir une brochette de stars dont le chanteur de Cock Robin qui lui offre son premier hit britannique. Malheureusement Tycoon ne sera jamais joué ni à Londres, ni à Broadway, emporté au paradis par la disparition brutale de son compositeur.
“Il n’y a pas de hasard”. Une phrase qu’on entend régulièrement aujourd’hui dans la conversation. Et qui convient admirablement à propos de l’union artistique et amoureuse de Michel Berger et Véronique Sanson. Est-ce un hasard si leurs deux pères se sont rencontrés, avant leur naissance, dans la résistance, sans pour autant nouer de liens. L’affaire aurait dû rester sans suite mais voilà que les deux mamans aussi se connaissent, et se fréquentent. Mais alors qu’on pourrait croire qu’à l’occasion des dîners qu’elles organisent ou des goûters d’anniversaire de leurs enfants, les deux jeunes ont commencé à se fréquenter, et bien, non, à nouveau pas du tout. Il ne se passe rien durant leur enfance ni adolescence.Ce n’est que, alors qu’il fréquente les bancs de l’université, Michel Berger se retrouve dans un pool de directeurs artistiques chez Pathé Marconi qui entre parenthèses deviendront tous riches et célèbres comme Gérard Manset (et oui, c’est lui), ou Claude Michel Schönberg, le compositeur de la fameuse comédie musicale Misérables, que Michel Berger est convié par Madame Colette Sanson à un goûter où elle a demandé à ses deux filles d’interpréter leur répertoire. Violaine et Véronique forment en effet avec un certain François Bernheim un trio qu’elles ont nommé les Roche Martin.Oui, il a fallu attendre ce jour-là, pour que Michel Berger accompagné de Schönberg, semble enfin voir Véronique Sanson et sa sœur pour la première fois. Il n’a d’yeux désormais que pour elles, l’affaire est entendue : Schönberg et lui vont s’occuper d’elles. La suite on la connaît. Le travail en commun débouche sur une histoire commune. Puis vient la révélation de la chanteuse Véronique Sanson mais aussi du style Berger. Ainsi quand France Gall entend pour la première fois à la radio un extrait du premier album de Michel Berger et file l’acheter chez un disquaire pour l’écouter. Elle est tellement frappée par la ressemblance avec Véronique Sanson qu’elle en vient à croire qu’il imite, et imagine même casser le 33 Tours, avant d’apprendre que Michel est à la base de sa carrière. Un Michel Berger n’est plus le garçon réservé qu’il a été. C’est un homme meurtri par un amour malheureux et le terrible choc d’un abandon brutal. Partie acheter des cigarettes et jamais revenue. Véronique s’envole pour les Etats-Unis, suivant une rockstar américaine, sans crier gare, sans une explication. Michel est dévasté, il se retrouve une fois de plus, une fois de trop dans la situation de l’abandonné, comme quand son père a déclaré ne plus le reconnaître et a coupé les ponts pour refaire sa vie ailleurs.Michel se révèle inflexible, il ne veut pas travailler avec France Gall et le lui dit sans ménagement. Mais France ne lâche rien, fait le siège de la forteresse, jusqu’à ce que l’opportunité de faire une voix sur l’album de Michel se présente. Berger est alors frappé par ce qu’il entend, loin du souvenir qu’il avait gardé de celle qu’il avait bien évidemment croisée du temps des yéyés et qui n’est plus une ado à présent, comme lui après tout, même si elle en a toujours le physique et les traits. Alors, à l’heure où Berger remet la carrière de Françoise Hardy en selle, il reprend aussi celle de France Gall, qui a dit “à corps perdu”.
Juin 1963, si les Britanniques commencent à se méconduire quand elles voient leurs nouvelles idoles, les Beatles ne sont pas encore arrivés en France. La jeunesse parisienne vit encore à l’heure américaine grâce à Johnny Hallyday, Eddy Mitchell et Dick Rivers. On les appelle les Yéyés et il en pousse quinze nouveaux par mois dont presque tous disparaissent aussitôt qu’ils sont arrivés. Il faut dire que les firmes de disques signent tout ce qui passe, enregistrent et abandonnent aussi sec si le premier single, pressé à 200 exemplaires, ne marche pas.Heureusement pour Michel Berger, 16 ans, son disque est le « Chouchou de la semaine » de l’émission Salut les Copains sur Europe 1. Michel a donc droit à un passage au début et à la fin de l’émission, écoutée par un million de paires d’oreilles, au moins, et article dans le magazine pour lequel Jean-Marie Périer fait le déplacement jusqu’à la maison de vacances de la nouvelle vedette. Pour l’occasion, la jeune Première Marlène Jobert pose avec lui sur les photos du reportage. Elle n’est pas là par hasard : Marlène est une amie de sa sœur aînée, Franka, et elle est aussi courtisée par son frère Bernard.Contrairement à Eddy, Johnny et Dick, Michel ne change rien à son quotidien qui se résume en dehors de la promotion et des galas, aux cours et aux devoirs. L’argent ne change rien puisqu’il n’en a jamais manqué à la maison. Bien sûr qu’il a le trac lors de sa première télé. Il ne remarque d’ailleurs pas une débutante comme lui qui vient y chanter son premier tube. Oui, à part quelques mauvaises expériences comme la huée du public de l’Olympia alors qu’il assure la première partie des Kinks (c’était pas vraiment une bonne idée, pas le même public), Michel Berger est un Yéyé à succès. Les sept disques qu’il publie ont plutôt bien marché, sans casser la baraque, hein, et même si pour s’en défendre, Michel dira plus tard : ça ne veut rien dire, tout marchait à l’époque. Une politesse de plus car cela est faux, bien évidemment.Et pourtant, alors que le 12 avril 1966, il pose avec tous les Copains yéyés pour ce qu’on appellera un jour la photo du siècle, devant l’objectif de Jean-Marie Périer, Michel Berger décide d’arrêter les frais. En effet, en cette année où les Américains et surtout les Anglais comme les Beatles, Rolling Stones et Bob Dylan publient chef d’œuvre sur chef d’œuvre, Michel dit qu’ils ont pris trop d’avance : les Français ne peuvent plus les suivre sur leur terrain. Michel arrête la chanson, passe son bac et rentre à la Fac. Oui, après un bac philo, il entame une maîtrise de Philosophie, dit-il, parce son voisin est un passionné, ce dont Jacques Attali, le voisin, c’était lui, a eu l’occasion depuis de démentir : Michel était modeste, il avait de solides bases en philo, et pas que. D’ailleurs les examinateurs de sa maîtrise ne sont pas près d’en oublier le thème : L’esthétique de la musique pop, dans laquelle il se lance dans l’exégèse de deux albums de Jimi Hendrix.Car si Michel a quitté le monde de la chanson en tant qu’interprète, il a accepté de sa maison de disques un rôle de directeur artistique. Alors qu’il est toujours étudiant, vous le croyez ça. Bon, on est dans les années 60, alors c’est vrai, pour tous ces gars qui gèrent la carrière d’Edith Piaf ou des Compagnons de la Chanson, qui mieux qu’un Yéyé de bonne famille pour dénicher et s’occuper d’autres yéyés.
Ce n’est un secret pour personne, il y a dans la musique de Michel Berger et les histoires qu’il raconte, une infinie mélancolie. Et tous ceux de sa génération qui l’ont vu évoluer et parler à la télé ont ressenti que malgré la réussite artistique et la vie du couple idéalisé qu’il formait avec France Gall, cet homme n’a pas été heureux. Il a connu des joies, nombreuses, mais il n’a pas réussi à se construire un monde achevé, encore moins parfait dans sa tête. Sans doute est-ce ce qui nous a touché le plus dans sa musique.Bien sûr, je vous ai parlé du drame de sa vie avec un père célèbre qui prétexte l’amnésie pour abandonner sa famille. Mais il y a bien plus encore. Regardez Michel jouer du piano : il a tout du concertiste, n’est-ce pas ? Il a sûrement fait le conservatoire. Et bien pas du tout. Non, Michel, quand il suit les cours de piano, à domicile, a bien du mal à se concentrer sur Chopin et Beethoven. Il faut dire que les professeurs ennuyeux ont du mal à rivaliser en cette fin des années cinquante avec cette musique qui vient des Etats-Unis, le rock’n’roll.Pour Michel, comme pour la plupart des jeunes de sa génération, cette musique occupe toute la place dans sa vie. Il passe ainsi des heures à écouter le single  What’d I Say de Ray Charles. Et que dire du grand Jerry Lee Lewis qui, lui, a trouvé comment jouer du piano d’une manière intéressante. Mais voilà, jamais dans sa famille qui vit dans un hôtel particulier avec personnel de maison, où on doit toujours bien se tenir y compris le dimanche, il ne pourrait pas ôter sa cravate, ni monter sur son piano et encore moins, en jouer debout. Non, lui, le seul truc rythmé qu’on l’autorise à jouer, c’est du Gershwin. Mais Michel ne se révolte pas : pas assez de force ni de soutien pour briser la couche formée par les convenances de la haute société et le drame qui pèse sur le noyau familial, autant qu’il ne l’a soudé.Même quand Michel commence à jouer du rock avec deux copains de lycée, aussi guindés que lui, il demeure un Hamburger ou un Haas-Guggenheim selon qu’on lui trouve une ressemblance avec son père ou sa mère.Alors quand avec ses comparses, il se rend à l’audition des disques Pathé-Marconi annoncée par le journal France Soir, Michel a du mal de jouer à être un autre que lui-même. Difficile. Impossible, coincé dans l’uniforme de son école, de faire comme Dick Rivers des Chats Sauvages, ce Niçois de 16 ans, un an de plus que lui, devenu une star et découvert par Jacques Scingland, l’homme devant lequel Michel se tient. Et quand il entend dire cet homme à qui il faut plaire lors de cette audition des idoles de demain : C’est bien, ça, Petit, ce que vous venez de jouer. Tu t’appelles comment ?, Michel n’en croit pas ses oreilles. Comment a-t-il pu déceler dans le jeune bourge qu’il est, qui est loin d’avoir l’insolence d’Eddy Mitchell ni le charisme de Johnny Hallyday, l'attraction qu’il va exercer sur le public et le métier de la chanson ? C’est vrai, quand on vous dit ça, c’est qu’on va vous engager. Mais quelle était sa question déjà ? Ah oui, tu t'appelles comment.Et là, Michel, qui en a assez qu’on lui parle de pommes frites à cause du nom de ce père qu’il ne connaît pas, répond : Berger, Monsieur, je m’appelle Michel Berger.
On garde de Michel Berger, de très nombreuses mélodies et un son, celui du piano, son compagnon depuis la tendre enfance. Une enfance qui entre un père, héritier d’une dynastie d’antiquaires d’Amsterdam et une mère, fille de bijoutiers et amie de Francis Poulenc, l’immense compositeur du Paris de l’âge d’or, une enfance donc qui aurait dû être heureuse. Mais il n’en a rien été.Car quand est né Michel Berger ? En 1947, sous le nom de Michel-Jean Hamburger ? Ou plutôt ce terrible jour de 1954 quand il rend visite à son père qui a subi une terrible opération chirurgicale où il a failli rester. Que faites-vous là ? Qui êtes-vous ?, s’exclame-t-il depuis son lit en le désignant avec sa mère, son frère et sa sœur. Infirmière, pouvez-vous demander à ces gens de partir ? Je ne les connais pas et ils me fatiguent. Votre papa est devenu amnésique. Il ne nous reconnaît plus mais ne vous inquiétez pas, la mémoire lui reviendra.Annette, la maman, écrit donc une lettre à son mari chaque lundi pour lui donner des nouvelles, espérant l’aider à retrouver la mémoire. Elle va le faire durant près de quarante ans sans jamais obtenir de réponse. Amnésie étrange car Jean Hamburger, brillant académicien, philosophe et médecin, n’a par contre rien oublié de ses immenses connaissances et va continuer à faire progresser la médecine à l’échelle planétaire. Avec les années, il reverra son fils, lors de déjeuners occasionnels, extrêmement froids et distants. Le personnage public qu’il est, admet admirer ce que son fils est devenu lors d’interviews à la télé et la radio. Mais il se montre irrité quand on lui demande s’il est le père de Michel Berger ? Michel, comme sa sœur cadette Franka, pas dupes, ont abandonné la première syllabe du nom de cet homme qui les a, lui, abandonnés pour vivre libre entre guillemets, de la manière la plus lâche qui soit. Alors oui, la musique de Michel, d’une éternelle mélancolie, sa façon singulière de jouer du piano et de composer trouvent sûrement, aux côtés d’une passion pour le rock anglo-saxon, son origine dans ce drame de l’abandon précoce et de l’absence de réponse.Car pour le reste, Michel et sa famille ne sont heureusement pas dans le besoin. Michel a grandi dans un monde aisé marqué par la culture française de l’entre-deux-guerres, le paradis blanc du grand salon familial où brillent un Steinway et un Pleyel. Signe du destin ? Son père Jean Hamburger est parti quelques mois avant lui, en février 1992. Présents à la lecture du testament, Michel et sa sœur découvrent que leur père ne les y cite même pas : il les a déshérités sachant pertinemment que la loi le lui interdisait. Et pourtant, en vidant l’appartement paternel, découvrant enfin son univers, Franka découvre une grande valise contenant toutes les lettres que sa mère a écrites à son père. Le plus étrange est qu’elles ont toutes été ouvertes, lues et relues. Un nouveau mystère qui restera sans réponse. On ne s’étonnera donc pas que Michel se soit si jeune créé un univers dans lequel il a trouvé refuge toute sa vie : la musique. Mais écoutez bien les paroles de Quelques mots d'amour ...
Ces quelques notes de piano sur lesquelles viennent se poser un harmonica, ce n’est pas banal. C’est vrai, dans notre inconscient collectif, la guitare et l’harmonica sont inséparables pour un chanteur folk. Si le chanteur Billy Joël voulait se faire remarquer, il a mis dans le mille. Mais bon, c’est surtout de sa propre histoire dont il est question dans cette chanson, qui est en tout point singulière et rappelle que le succès est parfois, souvent, le résultat de nos échecs. Je vous raconte.En 1973, lorsque les Américains et les Européens découvrent ce qui est le premier tube de Billy Joël, qui pour se douter que ce musicien de 34 ans a déjà plusieurs vies derrière lui. Tout a commencé dans son New Jersey natal, à un saut de puce de New York où jeune pianiste et organiste surdoué, Billy, dopé par la musique des Beatles connaît dans les années 60 son premier hit local avec un groupe de bal. Et ça change tout dans leur existence : les voilà qui passent des salles de fêtes à la télé, locale aussi, mais enfin New York et le New Jersey, c’est déjà pas mal ! Ils ne gagnent pas des fortunes, alors Billy loge dans la maison du batteur du groupe qui est aussi son meilleur ami, et de sa famille. Ils en profitent pour y installer le local de répétition et l’ont surnommé logiquement The rock house. Mais voilà catastrophe, Billy tombe amoureux de la femme de son logeur et meilleur pote, une femme qui répond à ses sentiments. Vous imaginez le drame, la séparation du couple et du groupe, tout le monde finit par se retrouver seul et Billy, rongé par la culpabilité, lâche prise, fait une tentative de suicide, se retrouve SDF, avant de remonter la pente car, coup de bol, un producteur de Los Angeles a entendu ses chansons et veut le signer.Billy qui s’est finalement mis en ménage avec la femme de son pote, qui lui a entretemps pardonné, fait le grand saut avec elle jusqu’à L.A. et enregistre un album en 1971 qui ne le mène nulle part. La firme de disques ne suit pas, le groupe en tournée n’est pas payé, bref, il se retrouve à nouveau sans le sou mais avec cette fois, une famille à nourrir et une maison à payer. Alors, pour gagner sa vie, il se fait engager comme pianiste du bar d’un hôtel, sous le nom de Bill Martin, au cas où quelqu’un le reconnaîtrait. Évidemment, avec un talent pareil, pas une semaine sans qu’un gars ne lui dise, je suis agent, je suis producteur, je pourrais produire votre disque. Billy se garde bien de dire qu’il a déjà un contrat, et dont il voudrait sortir. Mais voilà, il tire de la faune qu’il fréquente dans ce bar tous les samedis soirs une histoire qui devient une chanson bouleversante, un premier tube qui lui permet de revenir dans sa ville, New York, à la Columbia, la firme qui édite déjà d’autres grandes incarnations de cette ville : Bob Dylan, Simon & Garfunkel et à présent, Bruce Springsteen.Alors, il va la raconter, la vie et la faune new yorkaise, avec ses gens simples, ses bars et restaurants italiens. Et parmi tout cet extraordinaire répertoire, une chanson montre à quel point il est fier et heureux d’être revenu dans sa ville. C’est celle qu’il a écrite dès son retour, dans un bus, le long de l’East River. A peine le temps de rentrer à la maison, la chanson était écrite, sa vie pouvait enfin commencer, à New York, de jour, comme de nuit, et où il retrouve les habitués de bars qui écoutent le pianiste pour oublier, le temps d’un morceau, tous les rêves qu’ils ont laissé s’échapper avec leur jeunesse.
New York est la ville la plus photographiée et la plus filmée au monde. La plus racontée aussi. Tellement que nous en avons tous une image. Là je suis sûr qu’en m’écoutant, vous en avez une en tête. Je ne sais plus qui a dit que c’est la seule ville à être mieux en vrai que sur les cartes postales mais que dire alors de New York, la nuit. C’est vrai qu’à l’heure où le soleil se couche, où des centaines de milliers de fenêtres et enseignes s’éclairent à l’électricité, cette ville étonnante change de visage, devient féérique. Sans doute parce que chaque lumière nous dit : hé, il y a quelqu'un, là-dedans, une histoire se déroule à l’intérieur, et peut-être, sans doute que cette histoire est passionnante.Regardez la porte de cet immeuble s’ouvrir, à deux pas de l’East River, vous voyez le type qui en sort ? Oui, il est deux heures du matin, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce Londonien est venu vivre ici, en 1980, dans cette ville qui ne dort jamais. Il est vrai que pour un gars qui souffre d’insomnie, Londres et l’Angleterre en général, ne sont pas réputés pour la densité de leur vie nocturne. Par contre, ici, quelle que soit l’heure, Freddie sait qu’il peut appeler un taxi pour se faire conduire en boîte et rencontrer des gens. En plus, les Américains n’ont pas encore imprimé son nouveau look cheveux courts et moustaches, on ne le reconnaît pas d’emblée. Le temps de descendre les 33 étages en ascenseur, le taxi l’attend en bas de son immeuble, le Sovereign, qui possède une vue imprenable sur Manhattan depuis l’East River. Et c’est vrai que c’est superbe depuis le balcon de son appart. Mais vu de si haut, la solitude, la nuit, n’en est que plus grande, elle vous donne autant l’impression de survoler la ville que d’en être exclu. Alors souvent, Freddie Mercury craque et sort. Un regard vers l’ombre du pont devenu célèbre depuis peu grâce à l’affiche du film de Woody Allen, Manhattan. Freddie est allé voir jusque-là, c’est tout près, mais le banc où le héros passe la fin de nuit avec sa maîtresse en attendant le moment où sa myriade de lumières s’éteint au lever du jour, n’existe pas. Il paraît qu’il a été placé juste pour le film.Freddie donne une adresse au taximan qui démarre, comme la conversation. Arrivés à un grand carrefour, le chauffeur lui demande de regarder à droite, par la vitre, un immeuble qu’il désigne. Ça ne vous dit rien ?Freddie scrute une façade franchement décrépie mais non, rien.Et ça ?Il lui tend alors une cassette préenregistrée que Freddie reconnaît, c’est l’album le plus vendu du moment, celui de Billy Joël, et de son tube, Honesty. Tout le monde l’a acheté à New York, dit-il. Et pas qu’ici. Freddie écoute le chauffeur lui raconter fièrement avoir assisté par hasard à la séance photo il y a quelques mois. Il avait ralenti en voyant un coin de façade éclairé par des parapluies de photographe au milieu de quelques badauds, et il avait reconnu Billy Joël. Il était, bien sûr, déjà fan ; comment ne pas l’être du type qui a chanté Piano Man, cette chanson qui raconte si justement l’Amérique la nuit, celle des bars. Il était descendu de son taxi mais avait été tenu à l’écart. Quelle aventure, ironise Freddie. C’est fou les rencontres qu’on peut faire quand on est à New York. Bon, chéri, on y va ? Tu m'emmènes en boîte ?
Octobre 1987, Sting publie ce qui est déjà son troisième album solo en deux ans et une fois de plus, il s’agit d’un disque radicalement différent. Si le fait d’avoir l’année précédente perdu sa mère mais aussi participé à la tournée d’Amnesty International a assombri sa vision du monde, c’est surtout son séjour à New York qui est à l’origine de cette nouvelle métamorphose qui le place désormais très loin de ce qu’il faisait avec The Police. Un séjour que l’artiste a voulu en mode terre brûlée. Il loue un appartement simplement meublé, juste un lit et un piano, avec le téléphone débranché, il ne veut aucune distraction qui puisse nuire à une inspiration nouvelle. Pas de femmes, ni enfants, ni maîtresse, dit-il en plaisantant. OK, j’irai parfois en boîte, pour me bourrer la gueule, c’est lui qui le dit, hein. Mais la cause est entendue, l’objectif clair : une vie monacale, exclusivement consacrée à la composition et l’écriture. Sting veut ouvrir de nouveaux horizons pour sa musique. C’est vrai, en 1985, lorsqu’il a sorti son premier album solo, un énorme succès, il a trop entendu, trop lu, que c’était la suite logique de Synchronicity, le dernier album de Police.Alors, pourquoi New York ? Sans doute a-t-il été justement inspiré par ce qu’a déclaré Robert de Niro : « Je vais à Paris, je vais à Londres, je vais à Rome, et je dis toujours : « il n’y a pas d’autre endroit comme New York ». C’est la ville la plus excitante au monde aujourd’hui. C’est comme ça. C’est tout. ». Et donc chaque matin, Sting se lève, prépare lui-même sa bouffe, se rend à la salle de sport, ah oui, les années 80, c’est le grand boom du culturisme avec Schwarzie et Stallone. Il prend même des cours de piano, car ne plus composer à la guitare va l’aider à tout changer. Et dès midi, il bosse jusqu’à pas d’heure. Et puis quand au milieu de la nuit, il sent la solitude le gagner, et bien il sort. New York, la nuit. Et sa faune. Ainsi quand un gars l’arrête et lui demande Quelle est la beauté de la lune ?, au lieu de passer son chemin, Sting s’arrête et lui répond avec une citation de Shakespeare : My mistress’ eyes are nothing like the sun, le regard de ma maîtresse est un rayon de soleil. Et il repart avec ce qui va devenir la chanson Sister Moon, et en même temps, le titre du nouvel album.Étonnant que, Sting trouve l’inspiration d’une chanson grâce à un type bourré dans la rue, comme les Clash, sept ans plus tôt, pour une chanson de leur célèbre album Sandinista. C’est vrai qu’à Manhattan, il y a toujours quelqu’un pour vous adresser la parole dans la rue. Les Américains doivent tenir ça des Britanniques, c’est logique que les gens se parlent, mais enfin, à Londres, on dort plus la nuit qu’on ne vit, aime dire Sting. Et puis, au fil de ses promenades nocturnes, il rencontre aussi une grande figure de la contre-culture britannique, l’écrivain Quentin Crisp, qui est venu chercher dans cette ville un regard plus bienveillant, à tout le moins tolérant, vis-à-vis de son homosexualité. Mais voilà, l’accent et l'attitude font que même à New York, un Anglais reste un étranger, voire, un extraterrestre.
Certains d’entre vous ont déjà vu durant leurs vacances, New York la nuit. Comment résister à une balade qui nous met inévitablement dans les pas de tant de cinéastes, photographes, chanteurs, compositeurs, écrivains et acteurs qui ont marqué notre imagination. Et vous vous y êtes cru, hein ? Vous vous êtes revu dans votre fauteuil à regarder Breakfast at Tiffany’s, Vous avez un message ou encore Mad Men. Tant de films, tant de séries, impossible de les citer tous. Et puis il y a les chansons, de Bob Dylan à Lady Gaga, en passant par Simon & Garfunkel, Bruce Springsteen et Taylor Swift.New York, la nuit. La ville qui ne dort jamais, comme dit la chanson. Tout le monde connaît New York New York. Les néons de Times Square qui éclaboussent Broadway de leurs couleurs, les sirènes de police qui déchirent l’air, les taxis jaunes qui filent vers le pont de Brooklyn, les patineurs en décembre sur Rockfeller Plaza, chaque quartier ou coin de rue a déjà été filmé, chanté, raconté, bref, a été immortalisé. Robert De Niro, en Taxi Driver, fou de solitude, Al Pacino dans la peau de Serpico, le flic désabusé, Woody Allen qui regarde l’aube se lever sur Manhattan, et John Travolta dansant dans une discothèque de Brooklyn sur un titre des Bee Gees ; la nuit new-yorkaise, c’est cette promesse de fiction qui se transforme en réalité.Car la nuit à New York, c’est le grand écart : les paillettes et la misère, les comédies musicales de Broadway et le jazz enfumé dans les clubs de Harlem, la réussite et la ruine à Wall Street et bien sûr l’Empire State Building et les façades sombres du Bronx. Les rêves s’y font et s’y brisent, mais toujours sur fond de musique et d’histoires, comme si la ville refusait le silence.Et la chanson ne dément pas. Frank Sinatra, je vous l’ai dit. Mais aussi Madonna, dansant sur un taxi, Lou Reed qui erre poétiquement dans l’underground, les bas-fonds, et à l’opposé Jay-Z et Alicia Keys érigeant New York en cathédrale pop avec Empire State of Mind. Alors chaque soir, le rideau se lève. Vous le savez, vous y avez assisté. Les projecteurs éclairent Manhattan, un réalisateur invisible crie « Action ! ». Et vous, simple passant, devenez pour quelques heures l’acteur d’un film plus grand que vous. Parce qu’à New York, la nuit, la légende ne s’arrête jamais. Comme disait Simone de Beauvoir : “Il y a quelque chose dans l’air de New York qui rend le sommeil inutile.”
On a tous en nous une image de New York, la nuit, qui nous marquée : les lumières de Manhattan qui se reflètent sur un East River tellement vaste qu’on ne sait plus si c’est encore un fleuve ou déjà la mer. Et le plus fascinant dans cette histoire, c’est que cette ville est tellement peuplée qu’elle ne dort jamais, qu’il s’y passe des choses folles, autant le jour que la nuit. Regardez cette jeune femme, très belle d’ailleurs, qui entre dans un immeuble du West Side à la fin du jour. Elle n’y habite pas, non, elle vient juste dire bonjour au concierge avec qui elle a sympathisé. Oh, elle a une idée en tête, oui, elle rêve d’y vivre. Il faut dire qu’avec son compagnon, elle déménage en moyenne une fois par an mais en cet automne 1978, même si Debbie Harry est loin d’être riche, son couple ne tire plus le diable par la queue comme cela a été le cas pendant des années. Dix ans qu’elle s’est installée à New York avec un petit boulot de secrétaire mais là, le troisième album de son groupe Blondie est bien parti pour être celui qui va faire d’eux des stars du rock. Et Debbie a eu raison de lui laisser régulièrement un pourboire pour l’avertir au cas où, elle va l’avoir son appart au dernier étage, qui était au départ, d’après le concierge, la buanderie de l’immeuble. La peinture des murs est out, il y a des fuites et des courants d’air, un toit en goudron qui va les faire cuire en été mais il y a une terrasse sur trois côtés et pour Debbie, ça veut dire tout. Imaginez la vue, de jour, comme de nuit.Enfin, la nuit, je veux dire, très tard, le point du jour quand ils rentrent de leur émission de télé. Car oui, Chris et Debbie font de la télé. Avec des artistes qui ont décidé de faire une émission barge et expérimentale tous les jeudis soirs. L’émission s’appelle TV Party et est dirigée par un réalisateur indépendant que Debbie et Chris connaissent bien, Amos Poe, sur une chaîne de télé locale qui loue son antenne à l’heure, à tous ceux qui veulent faire passer un message.Dans l’équipe, un artiste bien barré, qui compose des morceaux à l’image de ses graffitis, un certain Jean-Michel Basquiat. Jean-Michel est SDF, en galère, alors il demande à Debbie qui vient de présenter une séquence dans laquelle elle montre comment pogoter avec une béquille, de lui acheter un tableau. Et comme dans un film de Woody Allen, Chris et elle, viennent voir son œuvre monumentale et effrayante et la lui achètent pour 300 dollars. Une vraie fortune pour lui ! Le jeudi suivant, il dira aux autres de l’émission qu’il les a arnaqués. Oui, le Basquiat dont certaines toiles quittent aujourd’hui les salles de vente pour 100 millions de dollars. Quand on pense que le patron de la chaîne a refusé qu’il tague un mur du studio.Quant au type derrière la caméra, Freddy, dit Fab Five Freddy, c’est aussi un artiste hip hop. C’est quoi le Hip Hop ? Freddy emmène Debbie et Chris à leur premier concert de rap, on n’a pas encore entendu le Rapper’s Delight des Sugarhill Gang que les deux artistes punks sont sous le charme, voilà pourquoi Debbie lui adressera un clin d’oeil dans le single qui fera d’elle la première rappeuse blanche.
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