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Update: 2021-08-27
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Le terme de « chaos » n’est pas un vain mot pour définir la situation qui règne autour de l’aéroport de Kaboul, dernière enclave contrôlée par des forces étrangères en Afghanistan, alors que des milliers d’Afghans tentent d’y pénétrer pour fuir le nouveau régime taliban.
Qualifiée, vendredi 20 août, par le président américain, Joe Biden, de « l’une des opérations les plus difficiles » de l’histoire des Etats-Unis, elle met à rude épreuve les caractères les plus solides et l’issue de vingt ans de présence occidentale dans le pays.
Le Monde a pu contacter des sources militaires et policières présentes dans l’enceinte même de l’aéroport de Kaboul assiégé par des dizaines de milliers d’Afghanes, d’Afghans, souvent venus avec leurs enfants, dans l’espoir de franchir les hauts murs de protection et les deux ou trois rangées de barbelés.
Chargés de sécuriser l’enceinte de l’aéroport, les 6 000 marines américains et les centaines de SAS britanniques et de soldats français du commandement des opérations spéciales (COS) ne veillent pas seulement à ce que les avions puissent atterrir et décoller. Des blindés anglo-saxons ont été postés contre les portes des trois principaux accès à l’aéroport afin qu’elles ne soient pas enfoncées par la foule. Par ailleurs, ils sont, chaque jour, missionnés par leur gouvernement respectif et les ambassadeurs encore sur place, pour tenter d’aller chercher des aspirants au départ bloqués de l’autre côté des murs d’enceinte.
« Un défi épineux »
Les scènes les plus dramatiques se déroulent souvent lors de ces tentatives de récupération. Car les soldats ne peuvent pas sortir de l’aéroport, zone sous contrôle taliban. Ils aperçoivent souvent, derrière la foule agglutinée, à quelques dizaines de mètres, les personnes qu’ils sont supposés récupérer.
Ce fut le cas, vendredi, pour le groupe de vingt-cinq Afghans, recommandés par Benoît Hamon, l’ancien candidat à l’élection présidentielle française, que les membres du COS et les policiers français du RAID n’ont pas pu atteindre alors qu’ils se trouvaient à « vingt-cinq mètres », selon le récit d’un témoin direct. Au même moment, ils pouvaient voir une femme lancer son bébé sur les barbelés dans l’espoir qu’il soit sauvé par les soldats et qu’elle soit admise à le rejoindre.
C’est l’un des paradoxes de cette opération, a insisté, vendredi, le chef de l’Alliance atlantique (OTAN), Jens Stoltenberg : « Nous avons davantage d’avions que de passagers, car c’est un défi de plus en plus épineux de permettre à ces personnes d’arriver jusque dans l’aéroport. »
D’où la solution provisoire et ponctuelle trouvée, samedi, de rassembler les gens dans d’autres points de la capitale et d’aller les chercher en hélicoptère. D’après une source américaine issue de la communauté du renseignement, les talibans ne quadrillent pas les abords de l’aéroport conformément à leur engagement auprès de Washington afin de ne pas interférer dans l’opération en cours.
Néanmoins, les nouveaux maîtres du pays apprécient peu la prolongation de ces évacuations. Vendredi, en déplacement à Khost (est), l’un des poids lourds du régime, Anas Haqqani, a ainsi déclaré que « les personnes qui se pressent à l’aéroport de Kaboul pour fuir sont une insulte faite au pays ».
Des combattants talibans patrouillent et ont installé des checkpoints à certains endroits clés. Ils vérifient, de manière aléatoire, les identités des hommes. Selon le renseignement américain, ils privent beaucoup d’entre eux de leur passeport, même étrangers, à l’exception des Occidentaux, ils en enrôlent de force d’autres et passent à tabac les plus récalcitrants.
Des rafales d’armes automatiques sont entendues à l’extérieur et à l’intérieur de l’aéroport ; il s’agit souvent de tirs de sommation, mesures expéditives contre des personnes jugées incontrôlables ou dangereuses, situées de part et d’autre de l’enceinte.
« Kill lists »......

Alors que la situation chaotique autour de l’aéroport focalise l’attention, le même renseignement américain a transmis à ses alliés sur place des notes révélant que les talibans traquent, dans le même temps, dans la ville, des Afghans ayant travaillé pour l’OTAN. De nombreuses perquisitions auraient déjà eu lieu sous couvert de collecte d’armes dans les domiciles privés dans la capitale. Mais ils disposeraient également de kill lists (« liste de personnes à éliminer »), sur lesquelles certains noms auraient déjà été rayés.
Enfin, plus surprenant, ces éléments d’information indiquent que des combats auraient eu lieu entre des groupes talibans au sein même de Kaboul. « Il pourrait s’agir, explique un diplomate occidental, présent dans l’aéroport et joint par Le Monde, d’affrontements liés à des pillages, mais aussi à des rivalités internes laissant penser que la course au pouvoir a déjà débuté au sein du mouvement taliban. »
Le nouveau régime est aujourd’hui concentré sur la formation d’un gouvernement transitoire et la mise en place d’institutions pour remettre le pays en marche. Quand ce travail sera accompli, dans les prochains jours, ont-ils annoncé, l’opération d’évacuation risque de devoir prendre fin.
En prévision de cette issue, le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, sans doute plus inquiet qu’il ne l’avait laissé paraître depuis la chute de Kaboul, le 15 août, a demandé, vendredi, à l’OTAN, selon nos informations, des créneaux de vols pour que la Russie mène ses propres évacuations.
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