Ouganda: le retour des reliques des premiers martyrs chrétiens [2/3]
Description
C’est un retour à forte portée symbolique et historique : celui des restes de deux « martyrs ougandais », des jeunes convertis exécutés, il y a plus d’un siècle, pour avoir refusé de renoncer au catholicisme. Canonisés en 1960 et conservés depuis au Vatican, ils ont été rapatriés à Kampala cet automne pour y être exposés.
De notre envoyée spéciale à Kampala,
« Ici, vous avez la mâchoire de Mathias Mulumba. Et là, le fémur de Charles Lwanga » : Muhido Brian Kihemu est le guide de l’exposition.« Ils travaillaient comme serviteurs à la cour du roi du Buganda. Et sont parmi les premiers Ougandais convertis au christianisme à l’arrivée des pères blancs en 1879. Ils ont contribué à diffuser le catholicisme. »
Samson, un séminariste, entre dans la pièce et s’agenouille devant les reliques. Il a traversé l’Ouganda pour se recueillir devant les restes de ces deux martyrs exécutés en 1885, sur ordre du roi du Buganda et sans lesquels il ne serait peut-être pas catholique.« Ils ont dû souffrir, ils ont été tués pour avoir refusé de se plier aux injonctions du roi. Quel courage, alors qu’ils étaient jeunes et catholiques depuis peu. C’est vraiment inspirant. Et émouvant ! »
Les premiers pères blancs sont plutôt bien reçus. Le roi d’alors, Mutesa les autorise même à établir une mission, non loin de son palais. Mais les conversions s’accélèrent et le roi meurt. Son fils qui lui succède au trône subit des pressions. David Tshimba, chercheur et l’un des commissaires de l’exposition. « Le nouveau roi n'a que 18 ans et il est entouré d’hommes politiques très ambitieux qui ont perçu sa sympathie pour ces jeunes convertis. Ils ont peur d’être remplacés et sont déterminés à les écarter. »
Le roi se laisse convaincre par son entourage que les jeunes convertis préparent un complot pour le renverser. Il ordonne l’exécution de ses serviteurs qui refusent d’abjurer. « Cette histoire est éminemment politique. Rien à voir avec les évangiles ou la lecture de Matthieu, Marc, Jean et Luc. Il s'agissait de décider que faire pour préserver un pouvoir qui était et qui est extrêmement menacé. »
Les deux martyrs sont alors tués, leurs corps brûlés et démembrés. Les missionnaires enterrent leurs restes dans une boîte en métal, perdue dans l’incendie de leur église. Elle est miraculeusement retrouvée en 1964 à Rome. Ils sont les premiers martyrs d’Afrique Noire à être canonisés.