Tanzanie: la montée des eaux du lac Victoria menace l'île d'Ukerewe [1/3]
Description
D'après de nouvelles observations satellites révélées cette année, la montée du niveau des eaux des grands lacs d'Afrique de l'Est est alarmante. Sur le lac Victoria, Ukerewe en Tanzanie constitue la plus grande île lacustre d'Afrique. Sa population vit essentiellement de la pêche et les habitants de l'île sont de plus en plus nombreux à voir leurs vies bouleversées par la montée des eaux du lac.
Depuis la plage de Nansio, sur l'île d'Ukerewe, la vue matinale du lac Victoria semble idyllique. Il suffit pourtant d'un simple regard pour observer plusieurs arbres engloutis par les eaux ici et là. Paschal est guide touristique et originaire de l'île. Il a vu le lac changer ces cinq dernières années : « Je me souviens, par là-bas, il y avait un grand arbre où on avait l'habitude de s'asseoir et manger. Mais ça, c'est de l'histoire ancienne, car il n'y a plus d'arbres, plus d'ombre à cause de la montée des eaux. »
Un peu plus loin, Faustine pointe du doigt un large morceau de plage où des vaches paissent, le corps à moitié submergé dans l'eau. C'est ici que se trouvait la rizière de son père quand il était enfant : « Il y a peut-être d'autres raisons, mais de ce que je vois. Tout ça, c'est à cause de la pluie. Les gens ne peuvent plus cultiver, car il n'y a pas assez de pluie, et quand il pleut, toute la zone est inondée. »
Des populations déplacées
La pluie fait effectivement partie des raisons expliquant la montée des eaux du lac. Même s'ils sont moins fréquents qu'avant, les épisodes pluvieux directs, ainsi que ceux qui alimentent la vingtaine de cours d'eau qui se jettent dans le lac, sont désormais plus intenses. Des changements climatiques qui, au-delà de transformer les paysages, affectent de plus en plus les populations les plus vulnérables de l'île. C'est ce qu'explique Joyce Komanya de l'organisation Centre Juridique et des droits de l'homme à Dar es Salam :
« Les hommes ont beaucoup émigré vers d'autres endroits, donc les femmes sont abandonnées avec les enfants sans ressources. Nous avons aussi noté beaucoup d'abus sur les enfants, une baisse du taux de présence dans les écoles, car même les enfants sont forcés de travailler pour soutenir la famille. »
Le long de la plage, John Ngaile marche sur des pierres englouties. Ce sont les restes de sa maison : « J'ai vécu 15 ans ici et j'ai essayé de construire un mur pour éviter que l'eau ne rentre, mais elle a finalement tout emporté. Ça m'a complètement changé. Je suis désormais très pauvre. »
Avec sa maison, il a aussi perdu ses revenus, puisqu'il louait des chambres. Aujourd'hui, plus de 40 millions de personnes vivent dans le bassin du lac Victoria et sont menacées par la montée des eaux.
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