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Trois semaines de bruit pour un quart de point

Trois semaines de bruit pour un quart de point

Update: 2025-09-18
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L’Audio du 18 septembre 2025



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Mono-produit


Oui, hier la seule chose qui comptait, ce n’était pas les résultats des boîtes, ni les cours du pétrole, ni même la météo économique. Non, hier, il n’y avait qu’un seul sujet : la Fed, ce qu’a dit la Fed, ce que pense la Fed et ce que va faire la Fed. On a brassé de l’air pendant trois semaines pour savoir si Powell allait couper de 25 points de base, de 50 points, ou de rien du tout. Et encore, pour être franc, statistiquement PERSONNE ne croyait qu’il allait aller pour les 50 bp et l’immobilisme aurait déclenché une guerre civile entre la Maison Blanche et la FED. Pour faire simple hier la surprise était INEXISTANTE tant nous étions convaincus de savoir ce qui allait se passer.


Et aussi fou que ça puisse paraître, la FED a fait ce que l’on attendait d’elle. Elle a baissé les taux de 25 points de base. Le marché a baissé pendant au moins 12 minutes, puis on a écouté un peu Powell. Puis on est remonté en appliquant le bon vieux principe du BUY THE DIP parce qu’on s’est rendu compte que Powell n’avait AUCUNE idée d’où il allait et ce qu’il devait faire au niveau des taux et que – du coup – on allait probablement se rejouer le mois d’octobre comme le mois de septembre. S’amuser à checker tous les chiffres économiques qui seraient censés aider la FED à prendre un décision pour le meeting du 29 octobre et en arriver chaque fois à la conclusion que si c’est pas bon économiquement parlant, la FED va baisser les taux pour aider l’économie et que si c’est bon, ben faut acheter le marché parce que l’économie, elle est trop balaise et qu’en plus Powell va baisser les taux pour qu’elle soit encore plus balaise. Et l’inflation ? Ben l’inflation on n’en a définitivement plus rien à foutre, puisqu’hier, Powell a dit UN TRUC. Il a dit qu’il préférait sauver l’emploi, plutôt que réduire l’inflation. On en reparlera quand on paiera 18 balles la tasse de latte macchiato avec du caramel dessus, des pépites de chocolat dedans. On n’en est plus très loin, d’ailleurs…


Les annonces qui ne servent à rien et qui bottent en touche


Donc. Je ne vais pas vous gâcher le suspense qui n’a d’ailleurs jamais existé : la Fed a baissé ses taux de 25 points de base, pour la première fois depuis décembre dernier. Et là, 10 heures après l’annonce, j’ai l’impression qu’ils nous auraient présenté un cours de cuisine avec pour thème : comment rendre la cuisine végane intéressante, ça aurait provoqué à peu près le même élan d’enthousiasme. Dans la foulée de l’annonce, Powell nous a dit plein de choses, mais il y en a une qui est ressortie très fortement, c’est que la FED est actuellement dans une phase de « risk-management cut », histoire de dire : « On ne panique pas, mais on assure nos arrières ». Et aussi histoire de dire que le mec est sourd, aveugle et que son labrador est complètement bourré. Clairement, s’il y a une chose qu’il faut retenir du mic-mac d’hier, c’est que les gars de la FED n’ont aucune idée d’où ils vont et de ce qu’ils doivent faire. Si vous vous êtes levé ce matin en vous disant :


« Ah ben tiens, c’est cool, aujourd’hui je vais pouvoir tranquillement lire le communiqué de presse de la FED et ça va me permettre d’y voir un peu plus clair sur l’avenir des marchés financiers et de la finance mondiale, vu qu’eux ILS SAVENT »….


RETOURNEZ VOUS COUCHER. METTEZ VOUS EN POSITION FŒTALE et attendez le prochain meeting de la FED. Les gars n’ont plus aucune vision, plus aucune idée d’où ils vont. Ils volent a vue en plein brouillard, avec l’altimètre en panne et une carte en papier qui date des années 70 avec pour seule certitude que « par-là autour, y a des montagnes ». Donc ce matin, les marchés, qui attendaient un plan clair sur trois ans avec un GPS intégré, se retrouvent à débattre : est-ce que ça veut dire qu’il coupe encore en octobre ? En décembre ? Ou jamais ? Ou alors que Powell n’en a plus rien à faire parce qu’il est en train de se demander ce qu’il va bien pouvoir faire de ludique quand il sera à la retraite en mai prochain et si « faire chier Donald Trump » est vraiment une activité considérée comme un hobby…


La vérité c’est que Powell lui-même n’en sait rien. Hier soir il a eu l’honnêteté (ou l’ironie) de le dire : « Il n’y a plus de chemin sans risque. » Je ne sais pas comment il faut interpréter ça, mais au vu de l’immobilisme des marchés hier soir et des futures qui sont largement orientés à la hausse, j’aurais tendance à dire que nous sommes repartis dans un remake du mois de septembre. Et on va se concentrer sur la baisse des taux qui est déjà agendée dans nos têtes pour le 29 octobre.



Octobre, décembre… et après ?


Après une fine analyse des discours et des annonces d’hier soir, les experts et autres économistes en tous genres s’accordent sur un scénario plus ou moins commun : encore une petite coupe en octobre, et après, on verra. En décembre, on fera les comptes :


• Si l’emploi continue de ralentir, on coupe encore.

• Si l’inflation repart, on freine. À moins que l’emploi continue de ralentir

• Et si Trump s’énerve, on improvise.


Comme l’a dit Powell, pour l’instant nous vivons une stratégie de « meeting by meeting ». Ça fait sérieux en anglais, mais en français, ça s’appelle juste de la navigation au pifomètre et ça veut aussi dire que ça ne sert à rien de tirer des plans sur la comète, même les gars qui prennent les décisions dans la plus grosse banque centrale du monde n’ont aucune idée d’où ils vont et de ce qu’ils feront dans six semaines. Et puis, on a aussi parlé du DOT PLOT qui laisse supposer que la FED devrait baisser les taux encore deux fois cette année, mais que l’année prochaine, ça ne sera pas 4 comme on espérait, mais plutôt… une fois. Mais c’est encore trop loin pour s’en préoccuper… D’autant plus qu’avec Trump qui rôde dans les parages, la plupart des membres de la FED ne savent même pas s’ils seront toujours membres de la FED à Noël, puisque tout prétexte sera bon pour les mettre dehors, une amende de stationnement impayée, traverser un passage piéton quand c’est rouge ; Trump ne laissera rien passer et saisira toutes les opportunités pour remplacer un Démocrate Hawkish par un Républicain Dovish… Il a déjà commencé et ça se voit comme le nez au milieu du visage.



L’inflation des tarifs ou les tarifs de l’inflation


Et puis l’autre truc qui – avec le recul peut encore être considéré comme une jolie manière de planquer la poussière sous le tapis, c’est la déclaration de Powell à propos des tarifs douaniers qui font grimper les prix. Selon lui, c’est pas grave. c’est un « one-off ». Un petit hoquet temporaire. Autrement dit : « Ne vous inquiétez pas, les prix montent parce que Trump met des taxes partout, mais ça va passer. » Sauf que, pendant ce temps, l’inflation des services grimpe aussi, et ça, ce n’est pas lié aux tarifs. Mais là encore, pas de panique officielle : le mantra de la Fed, c’est que tout est « transitoire »… jusqu’au jour où ça ne l’est plus. Ils se sont déjà fait avoir il y a quelques années, pourvu que leur nouvelle préoccupation de sauver de l’emploi ne les aveugle pas trop au point de se laisser déborder à nouveau.


Mais c’est pas tout. Non, parce qu’on aurait pu se contenter de se dire : « bon, la FED vole à vue, on va faire comme elle et se contenter d’acheter en attendant d’y voir plus clair »… Mais en plus, il y a la politique à l’intérieur de la FED qui est en train de se faire infiltrer par les Hommes du Président. Hier soir, Stephen Miran, ex-conseiller de Trump, fraîchement parachuté au board de la Fed la veille du meeting, a voté pour une coupe de 50 points. Le gars n’a même pas eu le temps de trouver la machine à café qu’il était déjà en train de voter pour une coupe massive. Il était le seul, d’accord, mais ça montre aussi que le ton est donné. La FED ne vit plus dans l’harmonie, mais dans le conflit perpétuel. Et il n’y a pas besoin d’avoir été stratège au Mi6 pour comprendre que plus l’on va se rapprocher de la libération de Jerome Powell, plus la FED va se « trumpiser » et il est plus que probable que dans le courant de l’année prochaine, la FED ne sera plus indépendante. Il faudra voir au fur et à mesure comment le marché va le digérer. Bref, on n’était pas dans une réunion de banquiers centraux hier, mais plutôt dans un épisode du bureau des légendes. Et Powell joue les funambules pour montrer que la Fed reste « indépendante ». Sauf que plus personne n’y croit vraiment et ceux qui y croient encore regardent ça avec nostalgie, comme on voit un vieux bateau en train de couler au large…



Lost in FOMC


Alors, comment les marchés ont réagi à cette brillante masterclass d’incertitude ?


• Le S&P 500 a d’abord baissé, puis monté, puis hésité, puis… rien.

• Le Nasdaq a tenté un rebond technique, porté par les sempiternelles valeurs tech, mais termine quand même en baisse de 0.3% sans trop savoir pourquoi.

• Le dollar a fait un aller-retour et les Bons du Trésor aussi. Le 10 ans est à 4.07% et l’Euro/Dollar se traite à 1.18.


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Trois semaines de bruit pour un quart de point

Thomas Veillet