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C'est arrivé à Nino Ferrer

C'est arrivé à Nino Ferrer

Update: 2024-11-27
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Il y a quelque temps, je logeais chez un ami dans le quartier résidentiel de Rueil Malmaison quand pour nous indiquer le chemin, son épouse nous dit, vous verrez, dans le bas de la rue, l'ancienne maison de Nino Ferrer. Et c’est vrai que cette vieille demeure a un style colonial américain inattendu en région parisienne. Et que par la fenêtre ouverte, on le devine regardant son jardin en plein été, écrire un soir de 1972 : C'est un endroit qui ressemble à la Louisiane/À l'Italie/Il y a du linge étendu sur la terrasse/Et c'est joli …

On connaît tous Nino Ferrer. Mais on ignore qui il était. Voilà toute la triste histoire de la vie d’un homme qui avait pourtant une grande soif de vie, de rire, de fête, et d’amis.

Nino, diminutif d’Agostino, est le fils d’un ingénieur nommé Pietro Ferrari et d’une passionnée de théâtre et littérature, Raymonde Magnin. Ils se sont rencontrés et mariés à Nouméa, en Nouvelle-Calédonie et c’est lors d’un séjour chez les grands-parents, à Gènes, que Nino a vu le jour. Il a suivi sa scolarité sans problème, diplôme universitaire, mais son truc, c’est la musique, le jazz, qu’il a d’ailleurs appris à jouer tout seul. Et il se débrouille bien, c’est un artiste reconnu qui se produit dans des clubs de jazz avec son trio. Mais au début des années 60, le jazz prend un coup de vieux avec l’arrivée du rock puis des yéyés dont Nino Ferrari ne se sent pas proche du tout.

Mais bon, Nino abandonne la contrebasse pour la basse et la guitare électrique et se retrouve à accompagner certains d’entre eux comme les Chaussettes Noires d’Eddy Mitchell. Pas qu’eux, il y a heureusement des Américains de passage comme Ray Charles ou plus sédentaires comme Nancy Holloway. Nino finit par se faire repérer, chante dans des orchestres comme ce soir où il se trouve à Antibes Juan les Pins sur une célèbre terrasse où entre deux chansons, on passe un appel car une cliente a perdu son petit chien.

Comment il s’appelle ? Mirza ?

Auriez-vous vu un chien qui s’appelle Mirza ?, demande Nino Ferrer. Et comme la sono passe alors Fingertips, le hit du jeune génie Stevie Wonder, Nino se met à improviser dessus : z’avez pas vu Mirza, lalalala, … Waouw ! Ça sonne ! C’est drôle, c’est sympa, et voilà qu’il se met à improviser dessus avec l’orchestre, soir après soir, pour le plus grand plaisir du public. Mais, le croirez-vous, un soir, un certain Eddie Barclay se trouve dans l’assistance. Ils signent et du jour au lendemain, Nino Ferrer devient une des nouvelles coqueluches yéyés, enchaînant avec des Cornichons, Gaston et autres Oh hé hein bon, qui, il faut bien le dire, sont très loin de ses aspirations et prétentions artistiques.

Non, son véritable univers musical ne sera jamais reconnu par le public qui ne réservera à sa vraie musique que de très rares succès, le contraignant à se replier sur sa peinture et sa solitude, mise à part l’une ou l’autre exception, petites bouffées d’air frais pour un artiste qui a souffert autant de ses bides que de ses triomphes.

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