Du Mexique à l’Inde, des élections géantes qui donnent des couleurs à la démocratie
Description
C’est une année d’élections dans toutes les régions du monde. Alors que les pays membres de l'Union européenne élisent actuellement leurs députés au Parlement européen, nous revenons que les récents scrutins au Mexique et en Inde.
Le Mexique a organisé le 2 juin dernier les élections les plus importantes de son histoire avec la tenue simultanée des scrutins présidentiel, législatifs et locaux. Au total quelque 98,3 millions d'électeurs étaient inscrits sur les listes électorales dans ce pays d’Amérique centrale voisin des Etats-Unis et très lié à celui-ci par l’économie, les migrations et par la circulation des armes, qui alimente un niveau de violence insupportable infligé par les cartels mexicains de la drogue. Vingt-huit candidats aux élections locales ont été assassinés pendant la campagne, ciblés par les cartels, rappelant le défi immense de la lutte contre la violence au prochain dirigeant du pays.
Et ce sera pour la première fois de l’histoire du Mexique, une présidente, Claudia Sheinbaum, élue avec 59% des voix et dont le parti Morena (le Mouvement de régénération nationale) a également largement remporté les législatives avec une majorité confortable au Congrès. Claudia Sheinbaum succèdera le 1er octobre prochain à celui qui est considéré comme son mentor, Andrés Manuel Lopez Obrador, qui a dirigé le pays pendant six ans, la durée du mandat présidentiel non renouvelable au Mexique. Ce dernier est toujours très populaire malgré les critiques sur son bilan négatif en matière de réduction de la violence. La présidente élue est créditée, elle, d’un bon bilan à la tête de la mégalopole de Mexico, avec ses 22 millions d’habitants estimés, où les statistiques de sécurité se sont améliorées sous son autorité de 2018 à 2023.
La nouvelle présidente devrait notamment maintenir les orientations de son prédécesseur, notamment les politiques sociales visant à lutter contre la pauvreté et les inégalités
Claudia Sheinbaum est une scientifique qui a été membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), mais elle est aussi une militante engagée dans des mouvements sociaux et politiques depuis plus de 40 ans. Au cours des six dernières années, sous la présidence de Manuel Lopez Obrador, le gouvernement a mis en œuvre des programmes sociaux qui ont directement bénéficié aux catégories les plus démunies et vulnérables des populations.
À lire aussiÀ la Une: le Mexique célèbre une victoire judiciaire contre les fabricants d’armes américains
25 millions de Mexicains reçoivent des aides directes, notamment des pensions pour des personnes âgées, des bourses scolaires et universitaires, des aides pour les jeunes en apprentissage et les personnes handicapées, des subventions pour les petits agriculteurs… Le salaire minimum a aussi été revalorisé de près de 40%. Ce sont des politiques publiques qui rappellent celles du président Lula da Silva au Brésil. En Amérique latine, il existe encore des personnalités et des partis qui ne se contentent pas de discours et de promesses mais qui mettent effectivement en œuvre des politiques audacieuses qui s’attaquent à la pauvreté de masse et aux inégalités abyssales, malgré un contexte économique et des finances publiques fragiles.
Les élections en Inde, un défi logistique
La plus grande démocratie du monde, l’Inde, sort aussi d’élections générales étalées sur six semaines, élections remportées par le parti nationaliste hindou, le BJP du Premier ministre sortant Narendra Modi, mais avec une majorité significativement réduite l’obligeant à former une coalition avec d’autres partis pour gouverner…
On peut souligner la qualité de l’organisation, car organiser des élections dans le pays le plus peuplé de la planète est un défi logistique exceptionnel qui a été relevé haut la main par la commission électorale. Ce sont 642 millions d’Indiens, plus de 66 % des 968 millions d’électeurs recensés, qui se sont exprimés dans les urnes, souvent dans des conditions climatiques très difficiles, avec des températures dépassant 45 degrés Celsius dans plusieurs régions. Trente trois membres du personnel électoral sont morts par insolation. Quelque 15 millions d’agents électoraux ont été déployés, recourant à tous les moyens de déplacement imaginables, pour donner la possibilité à tous les citoyens, jusque dans les villages les plus reculés, d’exercer leur droit de vote.
À lire aussiInde: tout savoir sur les élections législatives dans la plus grande démocratie du monde
Des machines électroniques ont permis le dépouillement rapide des bulletins de vote. Des machines qui ne sont pas tombées en panne au moment où on avait besoin d’elles, comme cela est souvent arrivé dans les pays africains qui ont dépensé des millions de dollars pour moderniser prétendument la gestion des élections. On se souvient encore de la déception des citoyens au Nigeria, lorsque les espoirs d’une nette amélioration de la qualité de l’organisation des élections s’étaient vite évanouis après la défaillance de machines électroniques. La combinaison d’un déficit d’intégrité et d’une incompétence incompréhensible dans l’organisation et la logistique continue de détruire la crédibilité des élections dans beaucoup de pays africains. Il faut cependant saluer parmi les belles exceptions, celle de l’Afrique du Sud qui sort aussi d’élections générales fort bien organisées et dont les résultats sont incontestables.