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Algérie: «Abdelmadjid Tebboune est très contesté au sein de l’armée»

Algérie: «Abdelmadjid Tebboune est très contesté au sein de l’armée»

Update: 2024-09-06
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En Algérie, la présidentielle, c'est ce samedi 7 septembre. Trois candidats sont en lice, dont le président sortant, Abdelmadjid Tebboune, qui est soutenu par l'ancien parti unique FLN. Mais quel est le poids de l'armée dans ce scrutin ? Pour Ali Bensaad, il est déterminant. Cet analyste est professeur des universités à l'Institut français de géopolitique de Paris VIII.

RFI : Pourquoi dites-vous, dans une récente tribune à Mediapart, qu'Abdelmadjid Tebboune a dû se soumettre aux militaires pour pouvoir faire un deuxième mandat ?

Ali Bensaad : En fait, Tebboune est très contesté justement au sein de l'armée pour sa médiocrité politique. Et il y a de la part de l'armée, si je puis dire, une quasi-obsession de contrôle des acteurs politiques. Et la candidature de Tebboune n'était absolument pas acquise. Et on a même parlé à un moment donné de la possibilité d'un candidat militaire. D'ailleurs, publiquement, les décideurs ont fait savoir pendant un bon bout de temps que les élections allaient être reportées, etc. Et en fait, Tebboune n'a été, si je puis dire, avalisé qu'après une emprise encore plus grande de l'armée sur la vie politique et institutionnelle. Ce n'est pas fortuit que, la veille de la déclaration de candidature de Tebboune, un décret a été promulgué, ce décret qui légalise de fait le passage de la haute administration civile et celle des entreprises publiques sous l'autorité de l'armée.

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C'est-à-dire que, très discrètement, au mois de juin dernier, est passé un nouveau décret qui autorise les officiers supérieurs de l'armée algérienne à accéder aux plus hautes fonctions publiques tout en restant sous l'autorité de l'état-major algérien. C'est ça ?

Exactement. Et de fait, on a eu plusieurs entreprises, les entreprises de téléphonie, les aéroports, les sociétés des eaux, etc, qui sont dirigées actuellement par des militaires et c'est au prix de cette dévitalisation, si je peux dire, de la fonction publique, où l'armée se réattribue ces fonctions-là, que la candidature de Tebboune est devenue acceptable pour un dernier mandat.

Depuis trois ans, le discours du pouvoir algérien se durcit contre la France. Est-ce que c'est seulement à cause de la petite phrase d'Emmanuel Macron, c'était en septembre 2021, sur « le système politico-militaire algérien » ?

Alors c'est un prétexte. Mais ce raidissement, en fait, il s'explique pour des raisons strictement internes. C'est lié au raidissement autoritaire du régime, à son désir de soustraire la population au monde pour mieux l'enfermer, pour mieux asseoir son autoritarisme sans risquer des parasitages extérieurs. Or, il se trouve que la France, qu'on l'aime ou pas, est de fait la fenêtre d'ouverture sur le monde la plus pratique et la plus proche pour les Algériens.

À cause de la diaspora notamment ?

Pas seulement à cause de la diaspora. On est à une heure de Paris. Et donc la France est devenue, pour le régime, le pays à diaboliser à tout prix. Et le régime en a perdu la mesure de ce que sont les relations internationales. Et je pense qu'un des éléments justement de l'isolement dans lequel est l'Algérie actuellement, c'est cette diplomatie de la confrontation, cette diplomatie populiste, je dirais. Et elle est quelque part suicidaire, parce que la décision de substituer brutalement l'anglais au français à l'université, c'est insensé. Et en cassant ce maigre tissu [francophone] pour une hypothétique acquisition de l'anglais, ça ne s’acquiert pas comme ça. Donc c'est un effet retour de bâton sur la société. Et moi, même si je regrette beaucoup la position de la France qui s'est départie de sa position d'équilibre entre l'Algérie et le Maroc, j'estime que ce qu'elle a fait, c'est quasiment un retour de bâton de la politique populiste algérienne. Mon interprétation du changement de la position politique de la France à l'égard de la question du Sahara, c’est lié au fait que, la France maintenait une position d'équilibre parce que l'Algérie était un pays qui comptait pour la France, pour ne pas percuter ses intérêts, etc. Mais l'Algérie ne compte plus, non seulement pour la France, pour l'Espagne qui a précédé la France, mais même pour la Russie qui se permet d'avoir des milices [Wagner] qui menacent la sécurité de l'Algérie à ses frontières. C'est un pays extrêmement affaibli et isolé.

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